WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

L'action Paulienne

( Télécharger le fichier original )
par Youssef Fassi-Fihri
Université de Perpignan - DESS 2003
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

COMMENTAIRE D'ARRÊT

INTRODUCTION :

La nature du commerce bancaire tend de plus en plus à passer par delà les frontières étatiques. Ainsi, les banques organisent les paiement et les garanties des opérations sur les marchandises ou les services, à la demande de leur clientèle importatrice ou exportatrice.

L'étude des conditions particulières du commerce international a permis de constater que plusieurs facteurs militaient en faveur de l'utilisation du crédit documentaire.

Au Maroc, le crédit documentaire commence à occuper une place importante dans les transactions internationales de sorte que son caractère irrévocable rend l'engagement de la banque confirmatrice définitif qui, déclarée responsable, doit répondre du paiement notamment par décision judiciaire comme le montre l'arrêt rendu par la 4ème chambre civile près la Cour Suprême de Rabat le 10/3/99.

Dans cette affaire, la société FRIGO SAID (la défenderesse) a conclu avec la société SEPHACOMAR ESPANA un contrat de vente en vue duquel elle a exporté à cette dernière deux quantités de poissons dont la valeur de la première est de 10.960.500 Pesetas espagnoles et la seconde est de 8.000.000 de Pesetas espagnoles.

A cet effet, la société importatrice a ouvert un crédit documentaire irrévocable auprès de la banque extérieure d'Espagne . Ce dernier a été confirmé par la demanderesse au pourvoi qui a avisé l'exportatrice de l'ouverture dudit crédit.

Ainsi, l'exportatrice (la Société FRIGO SAID) après avoir exécuté l'ensemble de ses obligations envers l'importatrice (SEPHACOMAR ESPANA), a été avisée par WAFABANK de l'annulation du crédit documentaire au motif que le règlement se fera directement auprès de l'importatrice.

La société FRIGO SAID a sollicité la condamnation de la banque confirmatrice au règlement de la somme de 1.300.000 DH représentant la valeur du poisson congelé.

Le tribunal de Première Instance de SAFI a rendu un jugement le 28/2/1996 dans le dossier n° 161/95 condamnant la débitrice au règlement de la contre valeur de la somme de 10.960.500 Pesetas espagnoles et a déclaré les autres demandes irrecevables.

La Cour d'Appel de SAFI a confirmé cette décision en fondant son arrêt sur l'argumentation suivante : 

-2-

L'appelante (WAFABANK) est la banque confirmatrice du crédit au Maroc, ce qui rend cette dernière solidairement responsable avec la banque extérieure d'Espagne. La Cour a également considéré que le visa apposé par la banque confirmatrice sur la lettre du 3/10/1994 conforme à la réception des documents dans les délais. La banque se devait de soulever les réserves dans les documents dans les délais de validité du crédit , cependant sous peine d'être solidairement tenu du règlement .

La requête aux fins de pourvoi se fonde sur l'article 28 du Code de Procédure Civile régissant la compétence territoriale, et les articles 230,234,895 et 921 du D.O.C. et 341 et 345 du C.P.C.

Le problème posé est celui de savoir si une banque confirmatrice d'un crédit documentaire peut être solidairement tenue du paiement pour n'avoir pas soulevé de réserves émises sur les documents dans les délais, alors même qu'elle soutient avoir agit en qualité d'intermédiaire ?

La quatrième Chambre Civile près la Cour Suprême répond par l'affirmative en mettant l'accent sur le fait que le demandeur au pourvoi est une banque confirmatrice d'un crédit documentaire irrévocable et non une banque notificatrice.

De ce fait, elle a considéré que le respect des règles du crédit documentaire impose à la banque confirmatrice d'examiner les documents dès leur réception, nonobstant le respect des instructions de sa cliente, dans un délai raisonnable, sous peine de ne pouvoir invoquer leur non conformité, et de les adresser à la banque émettrice.

Par son arrêt du 10 Mars1999, la Cour Suprême rejeta le pourvoi formulé par la banque.

1ère PARTIE : LES ARGUMENTS DES PARTIES AU LITIGE

A travers cette partie, nous essayons de mettre l'accent sur les différents arguments avancés par les parties au litige devant les juges de fond en premier lieu, et les moyens invoqués par le demandeur au pourvoi devant la Cour Suprême en second lieu.

A/ Les arguments avancés par les parties au litige devant les juges du fond :

La société FRIGO SAID a introduit une action devant le Tribunal de Première Instance de SAFI, tendant à la condamnation de WAFABANK au paiement de la somme de 1.300.000 représentant la valeur du poisson congelé objet de deux exportations et subsidiaires une expertise pour évaluer le préjudice subit.

-3-

Que celle-ci soutient avoir conclu un contrat vente avec la Société Espagnole au vue duquel elle devait exporter deux livraisons de poissons .

Que l'importatrice a ouvert un crédit documentaire irrévocable et confirmé auprès de la banque Espagnole.

La demanderesse ajoute que le crédit documentaire est une opération par laquelle une banque reçoit les instructions de ses clients importateurs dans le cadre de relations commerciales internationales, offre à son vendeur une garantie de paiement et à l'acheteur une garantie de recevoir sa marchandise.

Qu'en l'espèce FRIGO SAID a été avisé de l'ouverture de ce crédit, de ses conditions et du fait qu'il était en outre confirmé par une banque Marocaine qui l'a avisé de l'ouverture du crédit.

Que la demanderesse après avoir exécuté l'ensemble de ses obligations, que l'acheteur a été avisé par la banque Marocaine de l'annulation du crédit documentaire au motif que le prix serait réglé directement par l'acheteur.

WAFABANK défenderesse a répliqué sur le fond du litige que le crédit documentaire portait sur la somme de 10.960.500 Pesetas a été émis par la banque espagnole le 3/10/94.

Que WAFABANK n'a reçu de la Ste FRIGO SAIL les documents relatifs à ce crédit documentaire que le 3/10/94 c'est-à-dire le dernier jour de validation du crédit.

Cette même lettre comporte en outre des instructions précises émanant de FRIGO SAID enjoignant à WAFABANK d'adresser les documents en l'état, ce qu'elle a fait, alors qu'ils n'étaient pas conformes au Swift du 26/9/94 comportant les conditions du crédit documentaire.

WAFABANK a donc adressé les documents en l'état à la banque Espagnole et a ordonné d'enlever de leurs réserves.

La banque Espagnole lui a répondu le 24/10/94 en évoquant l'absence de conformité des documents.

Le 13/1/95 WAFABANK a reçue de la banque extérieure d'Espagne les documents sans paiement.

WAFABANK a dès lors considéré que la confirmation supposait la réception de documents conformes, en application de l'article 9 des règles et usances du crédit documentaire.

Qu'en l'occurrence elle a exécuté les instructions de la demanderesse en adressant les documents reçus en l'état alors qu'ils n'étaient pas conformes.

-4-

WAFABANK soutient en outre avoir agit en qualité de mandataire qui a exécuté les instructions de son client en adressant les documents en l'état alors qu'ils n'étaient pas conformes.

Le Tribunal de Première Instance de SAFI a rendu un jugement le 28/2/1996 condamnant la défenderesse WAFABANK au règlement de la contre valeur de la somme de 10.960.500 Pesetas espagnoles fondant sa décision, principalement, sur la force du crédit documentaire irrévocable et confirmé par la défenderesse et rejetant les autres demandes notamment le règlement du second crédit documentaire ouvert pour 8.000.000 de Pesetas espagnoles au motif que la demanderesse n'a pas produit la lettre de crédit documentaire pour apprécier le délai de validité.

WAFABANK a interjeté appel de cette décision en reprochant à l'arrêt attaqué d'avoir méconnu qu'elle s'était contenté d'exécuter les instructions de sa cliente et qu'en réalité la faute incombait à cette dernière qui avait présenté des documents non conformes.

L'intimée a sollicité le rejet de l'appel.

La Cour d'Appel de SAFI a rendu un arrêt par lequel elle a confirmé le jugement de première instance dans toutes ses dispositions au motif que l'appelante ayant reçu les documents dans les délais, sans formuler de réserve, est tenue solidairement au paiement.

B/ Les arguments avancés devant la Cour Suprême :

WAFABANK, demandeur au pourvoi, fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir violé les dispositions des articles 895 du D.O.C. et qui met à la charge du mandataire l'obligation d'accepter strictement la mission qui lui a été confiée sans sortir du cadre de sa mission.

En effet, la lettre du 3/10/1994 émanant de la défenderesse au pourvoi par laquelle cette dernière lui a remis les documents comportait des instructions écrites, claires lui intimant d'adresser les documents en urgence et dans l'état où il les a reçus, sans avoir à les examiner.

Ces instructions portaient sur les documents prouvant incontestablement que le demandeur au pourvoi a agit en tant que banque intermédiaire exécutant son obligation dans le cadre du contrat de mandat.

Par ailleurs, le demandeur au pourvoi invoque le défaut de conformité des documents à la lettre de crédit comportant ainsi que plusieurs réserves reconnues par la défenderesse, qui constituent une violation de son engagement en qualité de vendeur et bénéficiaire du crédit documentaire.

-5-

Que l'arrêt attaqué n'a pas répondu à ce point de sorte que cela équivaut à un défaut de notification.

Le demandeur au pourvoi invoque également la violation des dispositions de l'article 9 du règlement 500 du C.C.I. car les documents présentés par cette dernière sont non seulement non conformes mais comportaient des instructions précises que la banque était tenue de respecter, de sorte que la défenderesse ne saurait reprocher le refus de la banque espagnole d'avoir refusé le paiement pour non conformité aux conditions de vente.

Le demandeur au pourvoi souligne également la reconnaissance écrite émanant de la défenderesse, de sa faute par une télécopie du 22/2/1995 ce qui constitue un aveu en matière civile conformément aux dispositions des articles 405, 407 et 416 du D.O.C.

Le demander au pourvoi invoque outre la violation de l'article 345 du D.O.C., le manque de motif et l'absence de base légale de l'arrêt attaqué.

A cet égard le demandeur fait grief à l'arrêt attaqué de n'avoir pas répondu au moyen tiré de la non conformité des documents relatifs au transport de la marchandise (C.M.R.) alors que ce contrat reste soumis aux conditions du contrat de transport international de marchandises sur route signé à Genève le 19/5/1956 devant comporter un certain nombre de mentions obligatoires et ce, en dépit de toute clause contraire.

Enfin, WAFABANK soutient avoir agit en qualité de mandataire et que la Cour d'Appel n'a pas répondu à ce moyen également.

3 ème Partie : APPRECIATION DE LA POSITION DE

LA COUR SUPRËME

La Cour Suprême est la plus haute juridiction du Royaume, unique, et sédentaire, que le législateur a placé au sommet de la hiérarchie judiciaire pour apprécier, en partant des faits souverainement constatés par les juges du fond, la légalité des jugements et arrêts rendus en dernier ressort par les cours et tribunaux, et casser les décisions dont les dispositions sont entachées d'une violation de la règle de droit.

En droit comparé, on parle de « Cour régulatrice du droit », ayant pour mission essentielle d'assurer l'unité du droit national, notamment par l'unité de la jurisprudence, et de réaliser ainsi l'égalité effective entre les justiciables devant la loi ; Elle ne peut en aucun cas connaître du fond des litiges, mais, a l'obligation, lorsqu'elle casse l'arrêt qui lui est déféré, de renvoyer la cause et les parties devant une juridiction de fond de même ordre et de même degré que celle ayant rendu l'arrêt cassé, et ce pour qu'il soit fait droit.

-6-

Dans cette affaire, la Cour Suprême a rejeté le pourvoi en cassation introduit par WAFABANK ,en rappelant :

- le rôle d'une banque confirmatrice d'un crédit documentaire irrévocable

- le respect des règles et usances du crédit documentaire impose l'examen des

documents dès leur réception, dans un délai raisonnable.

- L'émission de réserves hors délai de validité du crédit est écartée de sorte que la

banque confirmatrice est tenu solidairement au paiement au même titre que la

banque émettrice .

- Les obligations de la banque confirmatrice en rappelant la distinction entre la notion de banque confirmatrice et de banque notificatrice d'une part, et les obligations d'une banque confirmatrice d'autre part.

1/ Distinction entre banque confirmatrice et banque notificatrice :

La Cour Suprême a fait une distinction entre une banque confirmatrice et une banque notificatrice d'un crédit documentaire irrévocable.

Elle a constaté qu'il s'agit, dans le cas d'espèce, d'une banque confirmatrice d'un crédit documentaire irrévocable, qui a reçu les documents relatifs au crédit dans les délais et n'a émis aucune réserve les concernant.

En effet, une banque confirmatrice joue un rôle actif dans l'opération de crédit car elle a l'obligation d'examiner les documents qui lui ont été remis par le bénéficiaire, et ce dans un délai déterminé, faute de ne pouvoir invoquer leur non conformité avant de les transmettre à la banque émettrice.

La doctrine s'est préoccupée, pour sa part, de cette distinction et a associé le rôle du banquier notificateur à la théorie du mandat car il reçoit effectivement le mandat de la banque émettrice d'accepter des documents conformes et, le plus souvent, de procéder au règlement de la lettre de crédit mais ne contracte aucun engagement de paiement envers le bénéficiaire.

Le demandeur au pourvoi avait, en ce sens, argué de sa qualité de banque intermédiaire et de mandataire ayant exécuté les instructions de sa cliente, mais tant les juges de fond que la Cour Suprême n'ont tenu compte de ce moyen.

Par ailleurs, une banque confirmatrice est une banque tierce qui intervient aux côtés de la banque émettrice en prenant un engagement identique mais autonome par rapport à celui souscrit par la banque émettrice.

La banque située dans le pays du vendeur prend alors un engagement personnel et irrévocable en faveur du bénéficiaire.

-7-

Cette forme de crédit fournit à ce dernier une double promesse irrévocable de paiement émanant de deux banques.

Ainsi, la jurisprudence marocaine a adopté la même position que la doctrine à savoir l'engagement personnel et irrévocable d'une banque confirmatrice envers le bénéficiaire et, partant, c'est à bon droit que la Cour Suprême a tenu solidairement responsable du paiement WAFABANK considérée banque confirmatrice ayant un engagement personnel envers le défendeur au pourvoi en l'occurrence la société FRIGO SAID.

2/ Les obligations d'une banque confirmatrice d'un crédit documentaire

irrévocable

Il est important de préciser qu'une banque confirmatrice doit exécuter, dans le cadre du crédit documentaire irrévocable, ses obligations notamment par l'examen rigoureux des documents qui lui sont remis par le bénéficiaire mais aussi par le respect du délai de validité du crédit pour adresser les dits documents à la banque émettrice.

Toutefois, il faut souligner que si la banque confirmatrice n'exécute pas ses obligations, sa responsabilité est engagée et sera tenue de réparer le préjudice causé.

La Cour Suprême confirmant la décision des juges de fond, a mis l'accent sur le respect des règles et usances du crédit documentaire qui imposent à la banque confirmatrice d'examiner les documents dès leur réception dans un délai raisonnable avant de les adresser à la banque émettrice.

En effet, l'examen des documents est une obligation substantielle qui pèse sur la banque confirmatrice d'un crédit documentaire de sorte qu'elle devra vérifier si les documents répondent rigoureusement aux conditions de la lettre de crédit et par conséquent aux exigences de l'acheteur.

La Cour Suprême n'a pas pris soin de rappeler, à travers son arrêt objet du présent commentaire, que l'article 15 des règles et usances consacre formellement le devoir de vérification des documents pesant sur la banque chargée de réaliser un crédit documentaire « les banques doivent examiner tous les documents avec un soin raisonnable pour s'assurer qu'ils présentent l'apparence de conformité avec les conditions de crédit »

En droit comparé, la jurisprudence a de son côté, à de multiples reprises, affirmé et sanctionné l'obligation bancaire de contrôle de la régularité des documents.

-8-

En effet, la chambre Commerciale de la Cour de Cassation Française a dans son arrêt du 13/7/1954 affirmé l'obligation de la banque confirmatrice d'examiner et de contrôler la régularité des documents.

Cette même obligation de vérification a été soulevée par la Cour de Cassation Libanaise dans son arrêt du 26/5/1971 ( cité à la semaine juridique 1972 - Tome II n° 17126 note de J. STOUFFLET).

Cependant, si cette vérification n'a qu'un objet limité il faut du moins que la banque se montre extrêmement stricte dans l'exécution de sa tâche.

La banque serait donc, en faute d'accepter des documents non conformes aux termes du crédit.

Quoiqu'il en soit, l'obligation de vérification des documents n'est pas suffisante pour écarter la responsabilité de la banque confirmatrice car, encore faut-il qu'elle adresse les dits documents dans les délais de validité du crédit.

La Cour Suprême a considéré que la banque confirmatrice en l'occurrence WAFABANK n'a pas remis les documents du crédit dans les délais, estimant qu'entre la réception des documents le 3/10/1994 et l'émission des réserves le 24/10/1994, 21 jours se sont écoulés et partant il ne s'agit pas d'un délai raisonnable ;

En effet, la banque confirmatrice dispose d'un délai pour examiner les documents et décider s'il y a lieu d'en contester la conformité, notamment par la levée des réserves avant de les adresser à la banque émettrice ; en cas d'irrégularité, elle est tenu d'en aviser rapidement le bénéficiaire.

Dans la doctrine française, la notion de « délai raisonnable » évoquée par la Cour Suprême, n'a pu à l'heure actuelle être définie malgré plusieurs questionnaires adressés par la commission bancaire à tous les pays du monde.

En tout état de cause, le « délai raisonnable » pour examiner les documents droit être le plus bref possible afin que le bénéficiaire sache à quoi s'en tenir et que ses droits sur les marchandises soient préservés.

Selon Maître Dominique DOISE, la notion de - Délai raisonnable - et l'obligation de restitution de documents sont liés « au formalisme de rejet » des documents ; ces obligations s'expliquent par le souci d'accorder au bénéficiaire la possibilité de rectifier les irrégularités.

Ainsi, le non respect du formalisme du rejet des documents irréguliers est sévèrement sanctionné et la partie qui négligera ces obligations sera réputée avoir levé les documents conformes au crédit et « ne pourra faire valoir la non conformité du paiement... »

-9-

Par conséquent, le manquement aux obligations précitées par une banque confirmatrice d'un crédit documentaire irrévocable implique sa responsabilité et devra dès lors répondre du paiement sans pouvoir invoquer un quelconque moyen pour échapper à la réparation du préjudice.

En conséquence, la Cour Suprême a rejeté à bon droit, la requête aux fins de pourvoi introduite par la banque après avoir répondu aux moyens invoqués et apprécié l'inviolation d'aucune disposition légale.

D'une manière générale il convient de préciser que la jurisprudence marocaine est particulièrement sévère quant à la responsabilité du banquier en matière de crédit documentaire.

Il en va pour s'en convaincre, de citer à titre d'exemple une jurisprudence non publiée : l'affaire WAFABANK contre Ste JAWDAT TRADIND dans laquelle la banque a été condamnée au paiement du montant du crédit documentaire par le Tribunal de Première Instance de Casablanca Anfa alors que l'acheteur a sollicité l'intervention du Président du T.P.I. en référé pour effectuer une saisie arrêt entre les mains de cette banque, l'empêchant ainsi de verser les fonds au bénéficiaire.

La question qui mérite d'être posée alors est de connaître la position délicate de la banque qui devra soit se soumettre aux règles et usances du crédit documentaire, soit au contraire se soumettre à une décision judiciaire l'empêchant d'exécuter le contrat de crédit (Jugement n° 3516 du 22/7/1998 dans le dossier commercial 1993/97 par le Tribunal de Première Instance de Casa Anfa - jurisprudence non publiée).

La doctrine marocaine s'est pour sa part souciée de la question, à travers le commentaire de Maître Mohamed MALJAOUI, sur l'intervention du juge des référés ordonnant une saisie arrêt entre les mains de la banque en cas de fraude visible sur marchandises objet d'un crédit documentaire.

Il a en outre mis l'accent sur les conditions de crédit documentaire et les règles et usances qui l'entourent, invitant les juges à être plus vigilants avant d'ordonner la dite saisie (commentaire de Maître MALJAOUI sur l'ordonnance n° 1523/139 du 3/12/1997 TPI Ain Sebaa parue à l'actualité juridique n° 13 - Février 1999)

-10-

CONCLUSION

Au Maroc, le contentieux relatif au crédit documentaire demeure réduit eu égard à la quantité d'opérations exécutées.

Généralement les banques négocient sans avoir recours aux procès et les tribunaux interviennent souvent sur saisine de petites et moyennes entreprises peu habituées aux opérations commerciales internationales.

Le mécanisme du crédit documentaire se situe au carrefour juridique des évolutions du commerce et des techniques.

Il assure l'interface entre le droit bancaire, le droit des transports, le droit des assurances et le droit de la vente.

Néanmoins, l'émergence des systèmes d'échange de données informatisées entraînera, probablement, la transmission des informations (documents) et la prise des engagements sans support papier ni signature manuscrite.

Selon mon point de vue, je peux dire d'une façon imagée que les tendances actuelles du commerce international, notamment dans les pays occidentaux risquent d'entraîner une fragilisation de l'opération de crédit documentaire, à moins que la Chambre de Commerce Internationale et les banques n'y remédient, notamment par la création d'un moyen de paiement et de garantie nouveau correspondant aux évolutions du commerce international.

Les banques joueront un rôle substantiel dans cette élaboration qui est inéluctable.

Enfin, il m'appartient de soulever un dernier constat qui concerne cette évolution. Envisager l'ouverture d'un crédit documentaire irrévocable sur un support électronique conduire vraisemblablement à une rupture avec le passé car le coeur de l'opération, à savoir les vérifications des documents avec une appréciation raisonnable, sera entièrement automatique et ne dépendra plus de la diligence d'une banque confirmatrice.

S O M M A I R E

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway