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L'action Paulienne

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par Youssef Fassi-Fihri
Université de Perpignan - DESS 2003
  

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3/ Le tiers défendeur à l'action : le cocontractant fraudeur

Selon la doctrine comparée, la volonté coupable des participants à l'acte suspect constitue la pierre angulaire de l'action paulienne, communément connue aussi synonymie : la fraude paulienne.

Ainsi, le droit romain exprimait cet esprit de fraude par « OMNIA QUAE GESTA CRUNT FRAUDATIONIS CAUSA » c'est dire que le débiteur a voulu ou su échapper à ses obligations, ou encore que le cocontractant de ce dernier en a profité à telle enseigne que la sanction appropriée sera constituée par l'inopposabilité de l'acte au créancier demandeur.

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(1) IN : prévis dans la règle des obligations (AL WAJIZ FI NADARIAT AL ILTIZAM) par Dr. MOHAMED HASSANINE - Professeur à l'université d'Alger page 284

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En ce sens, le Professeur GUILLOUARD a soutenu, lors de sa thèse, le caractère essentiellement moraliste de l'action « ... tout en essayant de faire progresser la moralité de l'individu ; le pouvoir social doit aussi, faisant la part des mauvais penchants de l'homme, prendre ses mesures pour éviter cette violation des engagements qui, en se multipliant, serait une cause de ruine sociale... » (1)

Force est de constater que cette citation se rapproche d'une peine civile ayant pour conséquence, entre autre, de ne sanctionner que ceux qui ont personnellement pris part à l'acte suspect.

Remettant en cause des actes apparemment réguliers, l'action porte une atteinte grave à la sécurité des transactions et ne doit donc être admise que sous certaines conditions relatives au défendeur.

Il va donc, falloir rechercher chez quelles personnes l'esprit de fraude doit être constaté ? car le problème ne se pose pas dans les mêmes termes selon que l'action est exercée contre l'ayant cause directe du débiteur fraudeur à savoir son contractant, ou bien celui auquel il a lui-même transmis ses droits ; en l'occurrence le sous acquéreur.

a/ Quand l'action paulienne est intentée contre le contractant du débiteur

De prime abord il nous faudra distinguer selon que l'acte attaqué est à titre onéreux ou à titre gratuit mettant en cause l'acquéreur direct c'est à dire le contractant du débiteur.

1 - Le principe :

En effet, il faut agir contre celui qui a profité de l'acte et peut seul remettre dans le gage des créanciers la valeur qui leur a été soustraite.

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(1) Thèse de M. GUILLOUARD sous le thème « de l'action paulienne en droit romain et en droit français » Caen - 1868 - page II, IN :Encyclopédie DALLOZ - Action Paulienne - Prg « 4 »

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En droit romain, l'action paulienne ne pouvait être exercée à l'origine que si le tiers qui a passé avec le débiteur l'acte attaqué a été complice de la fraude, c'est ce que nous appelons le « conscius fraudis ».

En effet, il a fini par introduire une distinction capitale concernant les tiers, ce qui a été conservé par la jurisprudence récente notamment marocaine et occidentale.

Ainsi, lorsque l'acte frauduleux est à titre gratuit, l'action paulienne est recevable contre l'acquéreur qu'il soit de bonne ou mauvaise foi.

A cet égard, la preuve de la complicité du tiers dans la fraude paulienne n'est donc pas nécessaire. Ce dernier ne procure aucune contrepartie au patrimoine du débiteur et peut, éventuellement, lutter pour conserver un avantage gratuit quant bien même il ignorait l'insolvabilité du donateur.

Par ailleurs, lorsque l'acte frauduleux est à titre onéreux, le créancier agissant contre le contractant doit prouver qu'il a été complice de la fraude.

Les juges du fond apprécient souverainement les éléments qui lui sont soumis en prenant en considération les liens de parenté, d'alliance, d'amitié, ou encore la modicité du prix.

En matière de vente par exemple, l'action paulienne ne peut triompher contre le tiers débiteur que s'il a été complice de la fraude, mais si ce dernier a agit de bonne foi l'acte ainsi établi est inattaquable.

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Généralement, il faut distinguer selon que le prix de vente est dérisoire et nous nous trouvons devant une donation déguisée, auquel cas la mauvaise foi du tiers importera peu ; ou bien que le prix est seulement insuffisant et le contrat considéré lésionnaire il n'en restera pas moins onéreux.

Néanmoins, l'application de ce principe soulève des difficultés tant au niveau de la définition de la complicité du tiers, mais aussi au niveau de la jurisprudence.

2/ Applications jurisprudentielles

La complicité du tiers n'est pas nécessaire, comme nous l'avons précédemment souligné, lorsque l'acte attaqué est un acte à titre gratuit mais si l'action prospère contre lui, il perd seulement le bénéfice d'une libéralité.

Cette perte demeure en fait moins digne d'intérêt que celle du créancier.

En droit comparé, de nombreuses décisions jurisprudentielles relèvent un « concert » frauduleux entre le débiteur et son cocontractant, ce dernier voulant s'associer à la fraude.

Mais d'autres arrêts se contentent de relever la connaissance de la fraude par le tiers pour conclure à sa complicité.

Quoiqu'il en soit, la complicité de la fraude du tiers n'étant pas directement prouvée, nous sommes en droit de prendre en considération d'autres motifs qui ont pu inciter le tiers à passer l'acte.

En effet, il serait impropre d'exercer l'action paulienne contre un acte tendant à sauvegarder les intérêts légitimes du cocontractant, notamment en matière de constitution de sûretés au profit d'un tiers.

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Par ailleurs, certains problèmes de qualification de l'acte attaqué n'ont pas manqué de se produire, compte tenu de la disparité du régime.

Il en va pour s'en convaincre de traiter du cautionnement lequel peut être gratuit à l'égard du débiteur principal mais revêt un caractère onéreux à l'égard du créancier cocontractant et partant la preuve de la mauvaise foi du tiers cocontractant de la caution.

Ainsi, aux côtés de l'action intentée contre le cocontractant du débiteur celle-ci peut être dirigée également contre le sous acquéreur.

b/ Quand l'action paulienne est intentée contre le sous acquéreur

Il arrive que l'objet de l'acte frauduleux ait été aliéné auquel cas l'action paulienne doit être exercée contre le sous acquéreur.

Mais, nous sommes en droit de se poser la question de savoir si le créancier peut diriger son action contre l'acquéreur, quoi que celui-ci n'ait plus le bien entre les mains ? ou bien optera-t-il pour s'adresser directement au sous acquéreur ?

La réponse à cette problématique mérite que nous nous penchions sur la doctrine notamment française à travers les dispositions de l'article 1167 du code civil français.

En effet, si l'action ne pouvait prospérer contre l'acquéreur direct en l'occurrence le cocontractant du débiteur à titre onéreux et de bonne foi, le sous acquéreur est, en principe, à l'abri des poursuites.

Par ailleurs, lorsque le cocontractant du débiteur est soumis à l'action paulienne, à savoir qu'il avait acquis le bien à titre gratuit ou il était complice de la fraude, il faut tenir compte de la situation personnelle du sous acquéreur, en vue de savoir si l'action peut être intentée contre lui.

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A cet égard, la doctrine s'est attardée à mettre en exergue la recherche des conditions dans lesquelles le sous acquéreur a, lui-même, acquis le bien frauduleux.

Elle a, en outre, admis que l'action paulienne peut être exercée contre ce dernier s'il acquiert ledit bien à titre gratuit, ou en complicité de fraude.

Cependant, il nous importe de mettre l'accent en droit marocain, sur la différence entre action paulienne et action en nullité laquelle est plus rapprochée d'une action en responsabilité fondée sur la faute personnelle par application des dispositions du dahir formant code des obligations et contrats du 12 Août 1913.

Relever une telle différence, revêt à notre sens, une importance considérable car elle permettra de clarifier toute ambiguïté sans briser tout obstacle en ce sens que certains juristes ont admis, à tort, l'idée que l'action intentée à l'encontre de l'acquéreur direct, doit forcément l'être à l'égard de son acquéreur.

En droit comparé, la jurisprudence n'est pas muette car dans un arrêt de la Cour de Cassation française, celle-ci a relevé qu'en matière de redressement ou de liquidation judiciaire d'une société, un donataire ne pouvait avoir transmis à un acheteur plus de droits qu'il n'avait réellement reçus mettant ainsi en relief, les conséquences de la nullité des actes de la période suspecte.(1)

Quoiqu'il en soit, l'action a pour but de remettre les choses dans l'état antérieur à l'acte, mais seulement à l'égard du créancier agissant. Mais, elle ne produit aucun effet sur le débiteur qui reste tenu à l'égard du tiers, ni sur les autres créanciers s'ils interviennent.

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(1) Arrêt de la cour de cassation française du 17/12/1985 - chambre commerciale - DALLOZ 1986 - Tome I P. 101

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De son côté, le créancier qui intente l'action, bénéfice d'un privilège sur le bien qu'il fait rentrer dans le patrimoine du débiteur, ce qui diffère de l'action du créancier qui agit par voie oblique.

L'effet de l'action est claire dans la mesure où dans les rapports du créancier et du tiers qui a passé avec le débiteur l'acte attaqué, cet acte est inopposable au créancier.

La jurisprudence marocaine considère, comme nous le verrons lors de la seconde partie, la nullité de l'acte attaqué au lieu de son inopposabilité au créancier demandeur à l'action.

Après avoir traité des conditions d'exercice de l'action paulienne, il nous importe lors de notre seconde partie, de souligner ses effets.

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I Ième Partie - LES EFFETS DE L'ACTION PAULIENNE EN DROIT MAROCAIN

L'action paulienne est exercée par le créancier en vertu d'un droit propre. Elle tend, en outre, à remettre les choses en l'état mais seulement en tant qu'elle est une action en inopposabilité à l'égard du créancier qui l'intente.

Les effets de l'action paulienne s'ordonnent autour de deux volets : d'abord il s'agit d'une action en inopposabilité qui se traduit par l'inefficacité de l'acte frauduleux dans les rapports du créancier demandeur et du tiers cocontractant du débiteur ; ensuite, il y a lieu de préciser que c'est une action individuelle qui ne profite qu'au poursuivant et qui n'a pas d'incidence sur les autres créanciers et partant ne produit à leur égard qu'un effet relatif.

Nous nous efforcerons, lors de cette partie, de mettre en exergue, d'abord l'effet de l'inopposabilité de l'acte frauduleux au poursuivant en s'attardant sur les différents rapports existants entre les parties au litige d'une part, et l'inadéquation entre la doctrine et la jurisprudence notamment pour l'admission de la nullité de l'acte frauduleux d'autre part ; ce qui nous mènera à traiter ensuite, de la réparation du préjudice causé, à savoir comment rétablir l'état antérieur à l'acte ? et comment intenter une action en responsabilité civile ?

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