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Aperçu évolutif de la réglementation du droit d'auteur au Burundi et les principales innovations de la loi n?°1/021 du 30 décembre portant protection du droit d'auteur et des droits voisins

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par Cyriaque NIBITEGEKA
Université du Burundi - Diplôme de Licence en Droit 2009
  

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Section 2. Les perspectives d'avenir du droit d'auteur et des droits voisins

au Burundi.

En dépit de quelques lacunes que la loi de 2005 renferme, force est de constater que le législateur a traité de presque toutes les questions que soulève le droit d'auteur à l'ère actuelle et a prescrit des solutions préconisées par les conventions internationales les plus récentes en la matière, ou déjà consacrées par les législations étrangères les plus avisées.

Cependant, plus de deux ans après la promulgation de cette nouvelle loi, le droit d'auteur dans notre pays semble n'avoir jamais existé et reste un « voeux pieux ». Si nous avons relevé des innovations textuelles importantes, rien ne semble bouger sur le terrain de la pratique ; les auteurs ont toujours des droits qu'ils ne peuvent défendre et dont ils ne peuvent bénéficier. Les avantages et les meilleures solutions que l'actuelle loi laisse miroiter semblent destinés à rester lettre morte. L'espoir que sa promulgation avait fait revivre dans les milieux artistiques a fait long feu pour des raisons que nous présenterons sous le point suivant.

Par ailleurs, comme nous avons pu le montrer, la législation de 1978 était, quoi qu'incomplète, faite de dispositions qui attestaient d'une juste appréciation du problème et de nature à assurer aux auteurs une protection conforme aux règles minimales que requièrent les intérêts tant moraux que patrimoniaux des auteurs. Toutefois, elle n'a jamais pu leur profiter.

Au bout du compte, il y a lieu d'affirmer que le problème fondamental du droit d'auteur et des droits voisins au Burundi n'est pas aujourd'hui d'ordre textuel. Des facteurs extrinsèques interviennent et font que la protection accordée aux auteurs et aux bénéficiaires des droits voisins soit plutôt illusoire.

Dans les lignes suivantes, nous tenterons d'inventorier ces facteurs qui sont autant de défis qu'il faut relever pour un meilleur avenir du droit d'auteur. En effet, le droit d'auteur au Burundi a souffert de l'absence d'une structure de gestion collective du droit d'auteur et d'autres instruments d'application des textes légaux. De même, l'ignorance des pratiques essentielles en matière de droit d'auteur et les mentalités, ainsi que le défaut de la volonté politique ont également eu leur rôle à jouer.

§1. L'absence d'un organe de gestion collective des droits d'auteurs et d'autres mesures d'accompagnement.

Le développement des nouvelles technologies apparues à partir du XIXème siècle (disques sonores, l'audiovisuel, l'Internet, le satellite, ...) ont largement étendu le marché des oeuvres de l'esprit.160(*) Avant cette époque, l'interprétation d'une oeuvre musicale par exemple se faisait avec le musicien lui-même. Et quand le public voulait réécouter cette musique, il fallait de nouveau faire appel au musicien et le payer.

Aujourd'hui, le développement technologique favorise l'utilisation massive des oeuvres de l'esprit. Une oeuvre peut être fixée sur un support matériel et être utilisée et réutilisée autant de fois que de besoin, de n'importe quel endroit et par une multitude de personnes en même temps.

Ces potentialités exponentielles d'exploitation des oeuvres échappent à tout contrôle individuel de l'auteur. Il est, en effet, difficile, voire impossible, pour les auteurs de délivrer eux-mêmes toutes les autorisations d'utiliser les oeuvres contre rémunération ; un auteur n'a pas la possibilité de se tenir au courant de tous les usages qui sont faits de ses oeuvres, et de négocier les contrats d'exploitation avec les usagers. Cette situation prouve à suffisance que si la reconnaissance des droits des auteurs est une chose, leur exercice en est une autre. Autant dire que les créateurs ont besoin d'être aidés dans l'exercice et la défense de leurs droits sous peine de voir leur protection se ramener à une véritable illusion161(*).

Dans presque toutes les législations du monde, ce problème est résolu par la création des organismes chargés de la gestion et de la défense collectives des droits d'auteurs et des droits voisins. Ces organismes sont dits aussi « sociétés de gestion » ou « bureau » du droit d'auteur selon les pays.162(*)

Ils ont entre autres fonctions d'agir comme intermédiaires exclusifs pour la conclusion des contrats entre les titulaires des droits sur les oeuvres et les utilisateurs desdites oeuvres, de recevoir et d'enregistrer toutes les déclarations permettant d'identifier les oeuvres et les auteurs ou ayants droit, de percevoir auprès des utilisateurs des redevances et de répartir celles-ci entre les bénéficiaires, de surveiller l'exploitation des oeuvres de leurs adhérents et assurer leur sauvegarde, notamment en poursuivant les contrefaçons et les autres utilisations illicites.163(*)

Une telle institution, dont l'existence est plus que nécessaire dans un monde en pleine mutation économique et technologique, et à laquelle le D.-L. de 1978 faisait allusion en son article 36, n'a jamais été mise sur pied. L'article 64 de l'actuelle loi burundaise sur le droit d'auteur et les droits voisins dispose que « Les droits mentionnés à l'article 24164(*) seront administrés par une structure de gestion collective qui sera mise sur pied et dont le rôle sera de défendre tous les intérêts des auteurs et de leurs ayants droit. ». Il est important de faire observer qu'au moment où nous rédigeons ce travail, il semble qu'aucune démarche n'est déjà entreprise pour sa création. S'exprimant sur la question à l'occasion de la journée internationale de la propriété intellectuelle du 5 au 6 juin 2007, le Directeur Général de la Culture, a imputé ce défaut à une carence du personnel formé en la matière et à un problème de moyens financiers.165(*) Nous trouvons plutôt que seul un manque de volonté politique en est comptable. Notre jugement se justifie aisément surtout quand on sait que le gouvernement a toujours pourvu à la formation du personnel pour des postes nouveaux ou des institutions au départ inexistantes, et qu'il ne lui manque que très rarement des fonds, pour les initiatives qui lui paraissent prioritaires et aussi simples que la mise en place d'un bureau de droit d'auteur.

Ce n'est pas que cette seule structure de gestion collective des droits qui est nécessaire pour que la nouvelle loi sur le droit d'auteur produise les effets attendus. L'effectivité de cette loi est également conditionnée par la mise en place d'autres mesures d'accompagnement prévues par la même loi.

Aux termes de l'article 25, l'utilisation des oeuvres tombées dans le domaine public est subordonnée « au règlement d'une redevance dans les conditions qui seront déterminées par ordonnance du ministre ayant la culture dans ses attributions. » Selon le prescrit de l'article 32, la traduction d'une oeuvre et la publication de cette traduction sur le territoire national sont licites même en l'absence de l'autorisation de l'auteur lorsqu'elles sont faites sur l'autorisation de l'autorité compétente et « conformément aux conditions spécifiées au règlement relatif aux licences de traduction annexé à la présente loi ». Et aux voeux de l'article 34, le montant et les conditions de paiement de la rémunération équitable pour la reproduction à des fins privées sont, à défaut d'accord entre les parties, « fixés par le Ministre ayant la culture dans ses attributions ». De même, la répartition de cette rémunération entre l'auteur, l'artiste interprète ou exécutant et le reproducteur de phonogramme devra se faire « en fonction d'un règlement spécial » établi par le même Ministre. En outre, selon l'esprit et la lettre de l'article 33, « la reproduction d'une oeuvre et la publication d'une édition déterminée de cette oeuvre sur le territoire du Burundi, en vertu d'une licence accordée par l'autorité compétente et conformément aux conditions spécifiées au règlement relatif aux licences de reproduction annexé à la présente loi sont licites même en l'absence de l'autorisation de l'auteur. »

Nous n'avons ciblé que les mesures d'accompagnement que nous avons considérées comme essentielles. Il faut surtout mettre l'accent sur le fait qu'on ne peut rien attendre de la loi de 2005 si des efforts de sa concrétisation ne sont pas consentis. On pourrait d'ailleurs légitimement se demander si la loi a été réellement promulguée avec la ferme intention de l'appliquer, au regard de la lenteur (ou plutôt de l'inertie) de l'autorité politique, ou si l'on ne se serait pas hâté de la promulguer pour éviter de tomber sous le coup des sanctions prévues par l'A.D.P.I.C.166(*)

Toutefois, l'évidence est là que de même qu' « un malade ne demande pas un médecin beau parleur », une loi n'a pas seulement besoin d'être trop ambitieuse pour être efficace. Encore faut-il qu'elle soit accompagnée de tous les dispositifs de nature à lui permettre de servir les intérêts de ceux qui doivent en bénéficier.

En revanche, l'application du cadre légal existant contribuerait à imposer le respect strict de la propriété littéraire et artistique et à valoriser, dans le pays, le travail intellectuel. Un artiste serait désormais considéré comme un élément clé de la richesse du patrimoine culturel de demain.

* 160 Voir D. LIPSZYC, op. cit, p.391.

* 161 E-P. LIASKOS, La gestion collective des droits des auteurs dans la perspective du droit communautaire, Bruylant, Bruxelles, 2004, 668 p.

* 162 Voir dans ce sens, F. DESSEMONTET, op.cit, pp.427 et s.

* 163 Pour plus de détails, voir A. BERENBOOM, op.cit, pp. 116-121 ; D. LIPSZYC, op.cit, pp.399- 445

* 164 L'article 24 est relatif aux droits patrimoniaux des auteurs.

* 165 Information recueillie sur place. Nous y avons participé en tant qu'étudiant -chercheur.

* 166 La loi fut promulguée juste la veille de l'expiration du délai dont jouissaient les pays les moins développés pour élaborer des législations conformes aux règles minimales des conventions internationales. Ce délai expirait le 1er janvier 2006 !

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo