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La pratique des essais cliniques au Sénégal

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par Ousmane DIARRA
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - DEA Droit de la Santé 2007
  

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TITRE II : LE PROBLEME DU CONTENTIEUX

Il s'agit de voir d'abord les difficultés de la preuve (chapitre I), ensuite la responsabilité des cliniciens (chapitre II).

CHAPITRE I : LES DIFFICULTES DE LA PREUVE

Elles sont liées à l'inefficacité de l'expertise comme moyen dans la fourniture de la preuve (section I) et au cas du renversement de la charge de la preuve, épreuve facile pour l'investigateur (section II).

SECTION I : L'EXPERTISE, UN MOYEN INEFFICACE

La production de la preuve en matière médicale est une entreprise périlleuse. La victime se trouve confrontée à des difficultés de fournir la preuve de la faute médicale. Seule la technique médicale peut démontrer l'origine du mal dont souffre le patient.

Aussi le juge, un profane de l'art médical est-il parfois obligé de faire recours à un expert médical conformément à l'article 156 du code de procédure civile41(*) aux fins de déterminer et peut- être de traquer le fautif.

En effet, l'article 156 dispose : lorsqu'au cours d'un procès ou avant tout procès l'appréciation des faits de la cause ou des mesures à ordonner exige des connaissances qui soient étrangères au juge, l'expertise est ordonnée par un jugement qui énonce d'une manière précise la mission de l'expert, celle-ci ne peut porter que sur les questions purement techniques.

En cas d'urgence, elle peut être ordonnée par le juge des référés ».

Le recours du juge à l'expertise relève de son pouvoir d'appréciation souveraine. En tant que juge du fond, il a l'opportunité d'ordonner toutes les mesures d'expertise qu'il estime nécessaire pour l'appréciation des faits dont il est saisi.

Le juge n'est pas tenu de considérer comme vrai les résultats de l'expert.

Cependant, force est de constater que le plus souvent l'expertise influence beaucoup la décision du magistrat.

Dans l'affaire Hubert C/ Dame Alice Leger, l'expert désigné, le Professeur Louis Queue, considérait que le dommage subi par la victime (apparition d'une fistule vésico-vaginale) avait pour origine trois facteurs parmi lesquels une blessure fait par une sonde métallique dont l'usage actuel constitue une singularité d'un caractère dangereux.

Le juge retient que la seule cause du mal de la victime reposait dans le sondage effectué par un préposé de la clinique insuffisamment expérimenté, utilisant un « instrument tombé en désuétude ».

L'affaire veuve Nemer Sabbah c/ hôpital Principal, le professeur Papa Demba NDIAYE en établissant le certificat de genre de mort du mari de Nemer Sabbah a décelé une intoxication à l'oxyde de carbone, cause directe du décès.

Dans la décision, la Cour d'Appel s'est fondée sur le rapport d'expertise.

Les résultats du rapport d'expertise du Professeur Fadel Diadhiou dans l'affaire Mme Anne Maire Agbo C/ Clinique Casahous faisait ressortir que les préjudices subis par la victime étaient liés à une transfusion qui a occasionné une série de complications circulatoires et de surinfections qui trouvait leur source dans une coagulopathie et un défaut de mémoire médical.

Le juge a repris et suivi l'expert en ces termes « qu'il résulte du rapport d'expertise que les dommages subis sont consécutifs à une transfusion ..., dont le défaut de mémoire médical laisse penser qu'elle ne s'est pas passée dans les règles de l'art ».

Ces décisions constituent les raisons d'une crainte quant à l'efficacité de l'expertise. La victime ne peut pas compter sur les résultats de l'expert médical pour obtenir gain de cause, si l'on sait le principe de solidarité de corps qui animent toute profession surtout la profession médicale. Aucun médecin n'aimerait voir des confrères condamnés par la justice, car cela porterait atteinte à la crédibilité de leur métier.

Le voeu de tout professionnel de la santé est de voir la médecine avancée avec la découverte de nouveaux médicaments.

De ce fait il serait difficile à notre avis que l'investigateur d'un essai clinique soit mis en cause par une expertise. C'est pour cette raison que nous considérons que le recours à l'expertise est un « cadeau empoissonné » offert à la victime. Cette dernière semble avoir une arme pour assurer sa défense, en réalité ce moyen peut lui être fatal.

Il faudrait peut être compter sur l'objectivité de certains experts, car il existe des experts épris de justice et d'équité ; ces experts sont de bons experts comme le disait D. Malicier « Etre un bon expert, c'est être libre et juste ».

Si le principe de la charge de la preuve pèse sur le sujet en principe, il n'en demeure pas qu'il ait une limitation.

Il peut arriver que le clinicien soit dans l'obligation de fournir la preuve. Il convient d'étudier cet aspect.

Section II : L'OBLIGATION DU CLINICIEN DE FOURNIR LA PREUVE, « UN CADEAU EMPOISONNE » POUR LE PATIENT

Les règles régissant le droit de la preuve sont dominés par le principe « Actori incobit probatio » qui signifie que la charge de la preuve incombe au demandeur. L'arrêt Martin/Birot en date du 29mai 195142(*) confirmait ce principe. Mais, l'arrêt Hédreul du 25février 199743(*) de la cour suprême marque un revirement total de la jurisprudence antérieure. Désormais, il incombe au médecin d'apporter la preuve qu'il a rempli son obligation d'informer son patient « le médecin est tenu d'une obligation particulière d'information vis-à-vis de son patient, et il lui incombe de prouver qu'il a exécuté cette obligation ».Ce revirement jurisprudentiel reprend l'alinéa2 de l'article 1315 du code civil qui dispose que « Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de l'obligation. A la lumière de ce texte il apparaît que, c'est au défendeur de fournir la preuve de l'acquittement de son obligation d'information. Les investigateurs doivent être plus attentifs aux qualificatifs donnés à l'information pour former et renseigner les sujets.

Il faut reconnaître qu'imposer la preuve de l'information à la charge des cliniciens aujourd'hui semble en pratique très difficile à mettre en oeuvre.

Comment le clinicien peut-il prouver qu'il a donné une information claire et suffisante au sujet se prête à l'essai ?

Le devoir d'information pose la délicate question de la manière de se pré constituer une telle preuve. Au Sénégal, tous les moyens de preuve sont admis, même s'il est clair que l'écrit, éventuellement signé par le patient semble être le moyen le plus efficace pour le clinicien de se constituer une preuve. L'écrit comme moyen de preuve en matière d'essai clinique pour une population « villageoise » presque analphabète ne nous semble pas judicieux, car la traduction peut parfois faire défaut. La réalité sur le terrain nous plonge dans une inquiétude, surtout si l'on pense aux difficultés de faire comprendre certains concepts complexes.

Quoi qu'il advienne, le clinicien est dans l'obligation de fournir la preuve qu'il a donné l'information. L'investigateur serait alors obligé de formaliser l'information ne serait-ce que pour avoir une preuve par écrit. C'est là un écueil à éviter, car l'investigateur prouvera avec beaucoup de faciliter qu'il a donné l'information, il suffit que le sujet appose sa signature. En réalité, le renversement de la charge de la preuve est une fausse promesse de protection des personnes qui se prêtent à l'essai clinique puisqu'il contraint plus qu'il ne protège.

Cependant, il appartiendra au juge d'apprécier souverainement hormis l'écrit, les autres preuves fournies afin d'engager la responsabilité des cliniciens.

* 41 Code de procédure civile du Sénégal

* 42 B. Hoerni, R.Saury, Information, autonomie et décision en médecine, édition Masson, Paris, 1998, p.55

* 43 Idem.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon