INTRODUCTION GENERALE
A l'origine, chacun avait pleinement le droit de se faire
justice. Cela consistait généralement en des représailles
envers la personne qui était censée avoir commis le tort. Ce
système est aujourd'hui dépassé. Ainsi, nul n'a le droit
de se faire justice. Cette conception traduit à l'analyse au moins deux
réalités :
- D'abord, que la justice est rendue dans un cadre
précis, c'est-à-dire dans les juridictions ;
- Ensuite, qu'il existe des personnes physiques
chargées de matérialiser la justice et de la servir.
Au rang de ces personnes chargées d'animer la justice,
il faut citer les magistrats, les officiers ministériels et autres
auxiliaires de justice. C'est donc une véritable mosaïque où
s'agencent et s'entremêlent organes et personnes ; « c'est
un véritable théâtre ou chacun est appelé à
jouer convenablement son rôle »1(*).
Au coeur de ces organes, nous avons porté notre
attention sur le greffe des juridictions, organe à part entière
de ce système. Mais avant toute analyse complémentaire, il est
convenable de présenter cet organe et d'en explorer les contours d'une
façon générale.
Il faut alors retenir que le greffe2(*) au sens du lexique des
termes juridiques, est le secrétariat des juridictions. Il faut tout de
même rappeler que le mot greffe désignait au départ le
poinçon à écrire, et de cette signification on
est passé à celle du lieu où l'on écrit et
où l'on conserve cet écrit. Ainsi, qu'elles soient des
juridictions de droit commun ou des juridictions d'exception, il existe un
service des greffes dont la mission est à quelques exceptions
près la même. Il s'agit pour cet organe de procéder
à la tenue des documents de la justice, à l'ouverture et à
la fermeture des dossiers, à leur mise en état d'être
jugé. C'est aussi la trésorerie du tribunal, la porte
d'entrée et de sortie des procédures.
Les greffiers quant à eux sont concentrés au
siège et au parquet des juridictions. Ces derniers, placés
littéralement hors de la portée de vue des justiciables et du
public, oeuvrent dans les coulisses. On retrouve au parquet et au siège
des fonctionnaires des greffes et parquet3(*) tous cadres confondus :
commis de greffes, greffiers adjoints, greffiers, greffiers principaux et
administrateurs de greffes. Il y a aussi des agents relevant du Code du travail
à savoir :
- Les agents décisionnaires allant de la sixième
à la dixième catégorie ;
- Les agents contractuels d'administration, allant de la
septième à la douzième catégorie.
Il faudrait tout de même remarquer que ces personnes
sont tout simplement assimilées à des fonctionnaires de greffes,
sous réserve d'une prestation de serment des greffiers. Aussi, et
parallèlement aux magistrats, les greffiers exercent quotidiennement des
tâches spécifiques et variées dont l'ensemble est
désigné sous le vocable de pratique de greffe.
La pratique des greffes n'est donc pas une discipline à
part entière, puisqu'elle combine dans son application concrète
tous les principes du droit judiciaire privé (droit civil et
procédure civile, droit pénal et procédure pénale).
Et, c'est justement ce mélange qui justifie sa complexité et qui
paradoxalement en fait une discipline fort passionnante. A l'évidence,
les missions de cet organe de la justice sont nombreuses et complexes. Mais au
delà de cet ensemble éparse de compétences, l'un d'entre
eux a littéralement suscité notre intérêt : il
s'agit du domaine pénal, ou plutôt (comme nous l'avons
présenté en intitulé), du système 4(*) répressif.
A l'heure où la société camerounaise est
soumise à de nombreuses mutations aussi bien sur le plan socio politique
que sur le plan juridique, réfléchir sur le GREFFE DANS LE
SYSTEME REPRESSIF CAMEROUNAIS relève d'un très grand
intérêt.
Sur le plan socio politique en effet, on a assisté
à un certain moment, notamment pendant les émeutes de
février 2008 à une escalade de l'insécurité dans
la quasi-totalité du pays. Ce qui a débouché sur des
arrestations massives ; la sollicitation des institutions de justice et
partant de ses organes. Il était alors important pour le justiciable de
savoir où et vers qui se tourner pour que la justice soit rendue
rapidement et efficacement. L'on en déduit naturellement que les
services de greffe, dans le cadre d'affaires pénales, ont
été assaillis et ont vu leur activité se décupler.
Le justiciable a donc été appelé à mieux
s'imprégner du rôle de cet organe qu'il connaît mal, mais
qui s'avère pourtant être « le poumon de
l'administration de la justice5(*) ».
Sur le plan juridique, on peut noter que l'inflation
législative connue depuis le début des années 2000 et qui
était déjà préfigurée par la loi
constitutionnelle de 1996, a aussi été décisive. Au nombre
de ces textes, il faudra citer les diverses lois portant organisation de la
justice, le projet de décret de 2002 révisant le statut des
fonctionnaires des greffes, la constitution modifiée de 2008, la loi sur
l'assistance judiciaire de mars 2009, ... mais surtout avec l'arrivée en
2005 du Code de Procédure Pénale6(*). Ce texte a
marqué un tournant décisif dans le système
répressif national, influençant sensiblement tous les
intervenants de la chaîne pénale et surtout le corps des
greffiers.
On note par exemple que depuis l'arrivée du Code de
Procédure Pénale7(*), le greffier ne tient plus le plumitif
à l'audience, celui-ci étant manié par le juge. Ou
même encore, on a constaté une claire définition de son
rôle dans la phase d'instruction, depuis le rétablissement du juge
d'instruction8(*). Les
exemples en la matière sont assez nombreux.
Il est simplement à regretter que, le greffe dans le
système pénal, ou le greffe tout court, est un thème qui
n'a pas fait l'objet de nombreux travaux par les grands théoriciens du
droit judiciaire privé, en dépit de son importance
indéniable dans le fonctionnement et la gestion des juridictions. En
effet, très peu d'études lui ont été
consacrées ; comme si la science juridique l'avait ignoré ou
le tenait en mépris. Les divers traités de procédure ou
même les manuels d'institutions judiciaires évoquent rapidement la
pratique des greffes, pour s'attarder à satiété sur de
grands principes.
Il est tout de même bon de remarquer qu'un tel
thème mérite notre intérêt puisque, tout individu
qui sans appréhension s'approche de la justice dans le cadre d'une
affaire pénale, gagnerait à maîtriser la procédure
qui va du greffier au greffier, c'est-à-dire qui commence et se termine
avec lui.
Le thème et la matière sont donc
évidemment riches puisque s'il faut étudier « le greffe
dans le système répressif camerounais », il faudra
nécessairement retracer de manière chronologique, ses
interventions dans le procès pénal, depuis la phase d'instruction
jusqu'à la phase d'exécution de la décision
prononcée par le juge en passant par le jugement et les voies de
recours. Il faudra aussi énoncer tour à tour les
différents degrés de juridiction dans lesquels il est susceptible
d'intervenir ; qu'il s'agisse du TPI, du TGI de la Cour d'Appel et de la
Cour Suprême.
Mais, une telle approche du thème manque à
notre avis de synthétisme et d'originalité. On risquerait
même de se perdre dans une telle analyse car il faudrait alors
établir à chaque fois, la distinction entre les différents
tribunaux et leurs sections pénales respectives.
Il existe également une autre façon de penser un
tel sujet. Puisqu'il entrevoit le greffe dans le système pénal de
façon globale, on pourrait faire une approche comparative de ses
interventions dans toutes les autres matières où il est
appelé à jouer un rôle9(*). On aurait encore pu
mettre en cause les interventions du greffe au regard de l'ancien
système (Code d'Instruction Criminelle et Criminal Procedure Ordinance)
et du nouveau système (Code de Procédure Pénale).
A l'évidence, une telle approche manque elle aussi de
synthétisme au regard des missions importantes du greffe et des
exigences quant à la forme et à la présentation d'un
mémoire tel que le suggère Michel BEAUD10(*).
Dans tous les cas, il sera inévitablement question du
rôle du greffe dans le procès pénal, des
conséquences de celui-ci. Il sera surtout question de bien situer sa
place et ses pouvoirs dans le système répressif ;
système où l'on retrouve les magistrats du siège, du
parquet, les officiers de police judiciaire, les auxiliaires de justice, etc.
En outre, quelle est la place du greffe dans le
système répressif sus-évoqué ? La
question est d'autant plus pertinente que le statut des fonctionnaires du
greffe réaffirme avec vigueur que « les fonctionnaires des
greffes et parquet exercent leurs fonctions sous l'autorité des
magistrats11(*) », plaçant implicitement le
greffier dans une situation de subalterne. A cette situation, vient s'ajouter
leur « impopularité justifiée par leur
méconnaissance de la part des justiciables » comme le souligne
KERNALEGUEN12(*).
De cette interrogation centrale, découle une multitude
d'autres. On se demandera par exemple si, compte tenu de la discrétion
du greffe dans la machine judiciaire, son rôle en matière
répressive ne serait-il pas caractéristique d'une situation de
dépendance extrême vis-à-vis des magistrats ?
Autrement dit, est-il détenteur d'un pouvoir propre, spécifique
en la matière ? On se demandera aussi comment est-ce que dans son
action le greffe participe à sa manière à la sauvegarde
des droits du justiciable ou même encore, comment est-ce qu'il participe
à une bonne administration de la justice ? Quelle est
l'étendue de sa responsabilité dans son action en matière
pénale ? Qu'en est-il des problèmes de
célérité dans les procédures ? Autant de
questions qu'il faudra normalement élucider tout au long de ce
travail.
Il est clair toutefois qu'au regard de ses nombreuses
missions, il dispose d'un pouvoir autonome qu'il exerce de manière
suprême. Cela ne doit pas pour autant éclipser le fait qu'il n'est
qu'un « auxiliaire de justice » au sens premier du mot et
que de ce fait, il a parfois un rôle second et secondaire. Etudier la
place du greffe c'est bien entendu étudier la place du personnage qui le
matérialise, c'est-à-dire le greffier. Présenter ses
implications dans le système répressif au Cameroun nous conduira
à dire pour notre part qu'il est une institution incontournable dans le
système répressif (première partie) bien qu'à
certains égards, le greffe est limité dans son action en
matière répressive (deuxième partie).
PREMIÈRE PARTIE :
LE GREFFE, UNE INSTITUTION INCONTOURNABLE
DANS LE SYSTÈME REPRESSIF
Dans le cadre du système répressif, chaque
élément du système c'est-à-dire chaque organe a
une tâche bien définie et qui lui est propre. Le greffe
n'échappe pas à cette règle. Les attributions du greffier
vont ainsi de la simple information du justiciable à la rédaction
des qualités13(*)
d'un jugement. Mais, si aujourd'hui toutes ces tâches semblent aller de
soi, il n'en a pas toujours été ainsi. Car, avant la
réforme de 1975 et le décret portant statut particulier du corps
des greffes, les missions de ce dernier étaient exercées par des
fonctionnaires quelconques, recrutés sur le tas et qui parfois ne
recevaient pas une formation adéquate pour pouvoir exercer les taches
ô combien importantes dévolues au greffier.
Le décret de 1975 est ainsi venu redéfinir le
statut du greffier qui était assez ambigu ; il définit dans ses
dispositions que le greffier est un fonctionnaire de toute catégorie
exerçant des tâches précises mais surtout très
variées. Ce texte ne faisait que préfigurer une série
d'autres qui allaient prouver de manière plus ou moins nette
l'intérêt que le législateur portait à ce corps. On
a alors eu des textes comme la loi n° 88/015 du 16 décembre 1988
fixant les émoluments du corps des greffes des cours et tribunaux, le
projet de décret n° 2002/30 du 3 décembre 2002 modifiant et
complétant certaines dispositions du décret n° 80/299 du 26
juillet 1980 portant organisation administrative des juridictions, la loi
n°2006/015 du 29 décembre 2006 portant organisation judiciaire de
l'Etat, ... pour ne citer que ceux là. Ces textes ont pour ainsi dire
porté au sommet le rôle du greffe des tribunaux ; surtout en
matière pénale. Leur pouvoir s'est développé de
façon fulgurante, à tel point que des pratiques informelles et
même illégales se sont développées au sein de la
justice. Relevons d'emblée que, le greffier, dans la machine
répressive intervient de façon nette au parquet, à
l'information judiciaire et au siège se rendant incontournable aux yeux
du justiciable. Il joue surtout un rôle plus autonome après la
sentence, notamment avec la délivrance des expéditions, des
grosses et copies grosses. Certaines législations lui ont
même attribué des fonctions de juge délégué
dans le cadre d'une « justice de proximité14(*) ».
Ceci étant, on peut toutefois se questionner sur la
probité avec laquelle il exerce ses fonctions surtout que l'on sait que
dans la pratique ce pouvoir est instrumentalisé. De toutes les
façons, le greffier est réellement détenteur d'un pouvoir
autonome (qu'il exerce de façon souveraine) et spécifique
(dont les tâches sont statutairement définies). Il est toutefois
bon de rappeler que ce pouvoir se matérialise surtout par le travail
qu'il est amené à accomplir, devenant du fait même la porte
d'entrée inévitable des procédures (chapitre 1) et une
cheville ouvrière dans le suivi des procédures pénales
(chapitre2).
CHAPITRE 1
LE GREFFIER, PORTE D'ENTREE DES PROCEDURES
Chaque fois qu'un justiciable, dans le cadre d'une affaire
pénale est confronté à la justice, il lui revient de
s'adresser aux greffiers (qu'ils soient du siège ou du parquet). Ainsi,
le greffier devient inévitablement la pièce maîtresse du
commencement du procès pénal ; l'action du magistrat
n'intervenant relativement qu'a posteriori. Mais cette position du greffier qui
s'avère être une position privilégiée est
quelquefois à la base de plusieurs dérives car, à l'instar
de ses autres homologues fonctionnaires, le greffier instrumentalise parfois
ce rôle (Section 2). Avant d'entrevoir cet aspect, il sera important pour
nous d'analyser le rôle renforcé du greffe dans la phase
préparatoire du procès pénal (Section 1).
Section 1 : LE ROLE RENFORCE DU GREFFIER
DANS
LA PHASE PREPARATOIRE DU PROCES
Préalablement à tout procès, le
rôle du greffier varie selon qu'il soit en service au parquet
(paragraphe1), qu'il fasse office de greffier d'instruction ou qu'il exerce au
siège (paragraphe 2).
Paragraphe 1 LE GREFFIER AU PARQUET15(*)
Les fonctions du greffier découlent ici à la
fois des dispositions du décret du 26 juillet 1980 modifié par
les dispositions du décret du 8 juillet 1981 sur l'organisation
administrative des juridictions16(*) notamment en ce qui concerne l'organisation
administrative des parquets (art.18 al.1 ; 24 al.2 ; et 32al.1) et
des dispositions du Code de Procédure Pénale.
Quoiqu'il en soit, le greffier est tenu de fournir certaines
prestations dans le cadre des actes susceptibles ou non d'aboutir à un
procès pénal (A) et de ceux spécifiquement
préparatoires audit procès (B).
A / Les actes susceptibles d'aboutir ou non à un
procès pénal
Il s'agit ici des tâches consécutives d'une part
à la saisine du procureur de la République dans les conditions
prévues aux articles135, 139 et 140 du CPP. D'autre part, aux
décisions subséquentes de ce magistrat telles que
préconisées à l'article141.
Le greffier est alors appelé à assurer :
· l'enregistrement des plaintes, dénonciations,
procès verbaux d'enquête ou de contravention émanant des
officiers de police judiciaire ;
· la tenue de tout registre relatif à ces divers
documents suivant leur nature ;
· la préparation matérielle des actes
relatifs aux solutions données aux requêtes ou aux
procédures (soit transmis, soit fait retour aux officiers de police
judiciaire, correspondance au Procureur Général près la
Cour d'Appel ou à d'autres magistrats ou administrations, convocations
ou procès verbaux de notification de classement sans suite
etc...) ;
· la conservation des diverses archives dont les
classements sans suite ou les procès verbaux ayant fait l'objet
d'amendes forfaitaires payées.
Concurremment à ces actes qui sont tributaires soit de
l'arrêt des poursuites par le procureur de la République, soit de
la recherche par celui-ci d'éléments complémentaires
devant lui inspirer la meilleure solution au litige à caractère
pénal dont il est saisi, le greffier est appelé à en
accomplir d'autres dans le cadre de la préparation matérielle du
procès pénal ; surtout lorsque le Ministère public a
opté pour la poursuite du suspect (art.151 du
CPP).
B / Les actes spécifiquement préparatoires au
procès pénal
Lorsque le procureur de la République a
décidé de poursuivre un suspect, il dispose de trois modes de
saisine à savoir la citation directe prévue par les
articles 40 à 55, 299 al.2 ; le flagrant délit (art.114 et
298) et le recours au juge d'instruction (art.143 du code).
Il revient, dans chacune de ces hypothèses, au
greffier de procéder à l'établissement de certains
documents ou actes que devra signer le magistrat du parquet.
· S'agissant de la poursuite par voie de citation
directe, le greffier devra préparer les mandements de citation tant du
prévenu que des autres parties (partie civile, civilement responsable,
témoins ; etc.) à adresser aux huissiers de justice, autant
qu'il veillera à leur mention au registre prévu à cet
effet.
· Pour ce qui est du flagrant délit, le greffier
devra apprêter le procès verbal et éventuellement le mandat
de détention provisoire qui seront des pièces indispensables au
dossier.
· Quant à la voie de l'information judiciaire, le
greffier aura à préparer le réquisitoire introductif
d'instance qui doit être signé et daté par le Procureur de
la République en vue de sa transmission au juge d'instruction par
l'intermédiaire du président du tribunal compétent. De
même, il pourra éventuellement apprêter les
réquisitoires supplétifs décidés par le Procureur
de la République à toute étape de l'information judiciaire
et son réquisitoire définitif à la clôture de
celle-ci.
Au stade de l'information judiciaire, le rôle du
greffier qui, par ailleurs n'est plus le même individu, sera tout
particulier.
Paragraphe 2 LE GREFFIER A L'INFORMATION JUDICIAIRE
ET AU SIEGE
Le rôle du greffier est différent quand on
l'envisage à l'information judiciaire (A) ou au siège proprement
dit (B).
A / Le greffier dans la phase d'instruction
Fonctionnaire en service au siège de la juridiction
où se déroule l'information judiciaire, le greffier
désigné pour assister le juge d'instruction aura dans le cadre de
cette procédure une autre appellation, celle
de « greffier d'instruction ».
Dans le cadre de l'information judiciaire, trois principaux
articles définissent le rôle du greffier d'instruction qui est un
rôle essentiellement d'assistance, les autres dispositions du TITRE V du
Code de procédure pénale ne faisant que préciser chaque
domaine de son intervention. Il s'agit des articles 153 incorporé au
chapitre 1 consacré aux dispositions
générales ; 165 et 166 faisant partie du chapitre 3
qui traite du déroulement de l »information judiciaire.
L'examen de ces dispositions nous permettra d'être mieux
édifié en la matière. En effet :
L'Article 153 :
Il stipule en son alinéa 1er que le
Juge d'Instruction est assisté d'un greffier et son
2ème alinéa précise à nouveau
que le greffier d'instruction est chargé de la dactylographie des actes
d'information. Il notifie ou fait signer aux personnes
intéressées tous les actes de procédures soumis à
cette formalité.
L'alinéa 3 quant à lui souligne que ces
notifications ont lieu à personne et qu'à défaut, le
greffier procède par lettre recommandée avec accusé de
réception.
L'article 165
« Alinéa
1er : la procédure d'information
est écrite. Les actes sont dactylographiés17(*) par le greffier sous
le contrôle effectif du Juge d'Instruction.
Alinéa 2 : l'information
judiciaire donne lieu à l'ouverture d'un dossier.
Alinéa 3 : le dossier
d'information donne lieu à un inventaire détaillé tenu
à jour ».
Il est à noter que ce dossier fera l'objet d'un
liassage ultérieur18(*) .
Toutes les pièces du dossier sont cotées et
inventoriées par le greffier d'instruction au fur et à mesure de
leur rédaction ou de leur réception.
Alinéa 4 : toutes les
pièces du dossier y compris l'inventaire sont établies au moins
en doubles exemplaires afin de permettre en cas de recours, la transmission
d'un double à la Cour d'Appel.
Alinéa 5 :
a. Le Ministère public peut se faire délivrer
par le greffier d'instruction copie certifiée conforme de tous les actes
de procédure.
b. Les autres parties peuvent également à leur
requête et contre paiement des frais se faire délivrer copie de
toute pièce de la procédure.
c. Ces copies peuvent être établies à
l'aide de tout procédé de reproduction ».
L'article 166 vient lui aussi
préciser de façon claire les missions du greffier d'instruction.
Il stipule notamment que toutes les déclarations donnent lieu à
la rédaction d'un procès verbal établi conformément
aux articles 164 et 165. Son 2ème alinéa
définit quant à lui les conditions d'application des articles 132
à 190. Il résulte alors de ces diverses dispositions que la
présence et surtout l'intervention du greffier confère force
probante et validité à tout acte d'instruction du début
à la fin de celui-ci.
Ainsi, l'assistance permanente que le greffier d'instruction
prête au juge d'instruction se manifeste dans trois domaines
principaux :
Ø La préparation matérielle des actes
d'instruction ;
Ø La participation active à certains
actes ;
Ø L'accomplissement de certaines tâches
spécifiques.
1) La préparation matérielle des actes
d'instruction
De par le seul fait qu'il lui revient de les dactylographier,
le greffier d'instruction assure la préparation matérielle de
tous les actes d'instruction ; y compris ceux soumis à la signature
exclusive du juge d'instruction.
S'agissant de cette dernière catégorie d'acte,
l'on peut citer :
v Les ordonnances
o De soit communiquer (art.145 alinéa 1),
o De refus de plus ample informé (art.145 alinéa
4),
o A fin d'informer (art.147),
o De refus d'informer,
o De fixation de la somme à consigner par la partie
civile (art.158),
o D'incompétence (art.161),
o De rejet de demande au fin d'obtenir des copies de documents
saisis,
o De restitution d'objets saisis,
o D'expertise ; ce qui implique soit la
désignation d'un expert (art.203), soit le remplacement de ce dernier
(art.210 alinéa 1) ou même encore de rejet de la demande
d'expertise,
o De surveillance judiciaire,
o De refus de transmission du duplicatum du dossier à
la chambre de contrôle de l'instruction,
o De transmission du duplicatum à la chambre de
contrôle de l'instruction,
o De clôture de l'information judiciaire.
Cette liste est loin d'être exhaustive puisque le C.P.P
indique d'autres ordonnances qui peuvent rentrer dans la phase d'instruction.
v Les convocations
Le C.P.P. a prévu quelques cas de convocation et on
peut distinguer des convocations au témoin, au conseil, et à
toutes autres personnes intéressées (partie civile, civilement
responsable...).
v Les mandats
- D'amener.
- Détention provisoire.
v Les correspondances diverses
Elles peuvent intervenir à toutes les étapes de
l'information judiciaire.
On peut aussi avoir des commissions rogatoires servies par le
juge d'instruction.
2) Les actes préparatoires ou établis par
les greffiers d'instruction, consignés par le juge d'instruction et
d'autres personnes.
Il s'agit essentiellement des procès verbaux de toute
nature. Ils peuvent être relatifs aux déclarations d'un
inculpé (art.171, 174,175) ; d'un témoin, d'un expert qui
agira sous une prestation de serment.
Il peut également s'agir de la remise d'un
scellé par un expert commis ; de la transmission d'une
correspondance utile à la manifestation de la
vérité ; de diverses opérations d'interception,
d'enregistrement des communications ou encore de destruction d'un tel
enregistrement.
Il peut enfin s'agir de la réception de l'appel contre
une ordonnance du juge d'instruction devant la chambre de contrôle de
l'instruction.
3) Les tâches spécifiques dévolues
au greffier d'instruction19(*)
Il s'agit ici de tous les actes établis par le
greffier, certes sous le contrôle effectif du juge d'instruction mais
qui ne nécessitent pas obligatoirement la signature de ce dernier. On
peut donc citer de façon sommaire :
- la tenue du sommier d'instruction ;
- la reproduction et l'établissement des copies d'actes
d'instruction, ainsi que leur délivrance aux personnes
intéressées ;
- La réception et la conservation de certaines
pièces ou de certains objets tel que les scellés, le rapport
d'expertise... ;
- La transmission de certains
documents aux instances désignées par la loi à l'instar du
duplicatum du dossier d'instruction au procureur de la république ou au
président de la chambre de contrôle de l'instruction (art.253
al.4) ;
- La lecture aux parties de
leurs déclarations avant la signature des procès verbaux y
relatifs et de la teneur de tout document requérant qu'elles en prennent
connaissance.
- La mise du dossier à la disposition des conseils.
Il convient de rappeler qu'aux termes de l'article
183 que le greffier d'instruction, à l'instar des parties
et témoins ne peut assumer les fonctions d'interprète.
B / Le greffier au siège
Chargé au premier plan de la conservation des dossiers
de procédure, c'est au greffier qu'il reviendra de les apprêter,
c'est-à-dire d'en assurer la mise en état pour l'audience.
Contrairement à la pratique en vigueur jusqu'alors
dans la partie francophone (le code d'instruction criminelle abrogé),
c'est au siège de la juridiction de jugement qu'il reviendra
désormais de confectionner le rôle en matière
pénale. Le greffier du siège le fait en concertation avec le
parquet.
Dans ce contexte, c'est le greffier qui, sur instruction du
président de la juridiction concernée, établit
matériellement ledit rôle et fait porter et déposer le
plumitif et les dossiers dans la salle d'audience.
Dès qu'une juridiction de jugement est saisie soit par
citation directe, soit par flagrant délit, soit par ordonnance de renvoi
du juge d'instruction, soit par arrêt de renvoi de la chambre de
contrôle de l'instruction, il est fait appel à un greffier pour
assurer le service aux cotés des magistrats du siège ou du
parquet. Ce qui laisse alors la porte ouverte à plusieurs
dérives ; car de plus en plus ce rôle est
instrumentalisé dans la phase préparatoire du procès.
Section 2 UN ROLE DE PLUS EN PLUS
INSTRUMENTALISE
DANS LE PROCES PENAL
Le service public, pour bien fonctionner doit s'appuyer sur
un certain nombre de principes qualifiés d'idéaux du service
public. Parmi ceux-ci on distingue la continuité et la
gratuité du service public. Ceux-ci, pour importants qu'ils soient
(en tant qu'ils constituent même le fondement du Service public
étatique), devraient normalement s'affirmer avec plus de rigueur en ce
qui concerne le service public de la justice. Car la justice, plus que
tout autre service public a besoin d'être continue. On ne saurait
d'ailleurs imaginer des affaires non enrôlées ou même
simplement non jugées du fait de l'absence des agents dudit service. On
ne pourrait concevoir une justice en vacances, car les affaires et les
situations sociales conflictuelles font quasiment partie de l'univers
journalier des justiciables.
De plus, une justice où tout se monnaie et
s'achète ne saurait être bien vue par le justiciable ; car
elle manquerait alors grandement à sa mission essentielle
c'est-à-dire se rapprocher du justiciable et le servir le plus
rapidement possible.
Il est donc clair qu'une telle justice qui ne respecte pas la
continuité mais surtout la gratuité n'est pas envisageable.
Cependant, il est bon de noter que le greffier est un gestionnaire de fonds;
fonds qu'il perçoit auprès du justiciable à travers les
frais divers que ce dernier est amené à verser au cours d'un
procès. De ce fait, il peut être amené à exploiter
cette situation, surtout que les affaires pénales nécessitent
souvent des frais élevés et également que les justiciables
soucieux de vite obtenir justice ne maîtrisent pas toujours les
coûts de procédure.
La dénaturation des idéaux du service public
constitue en effet l'élément moteur de l'instrumentalisation du
pouvoir du greffe (paragraphe 1), laquelle a des conséquences
énormes quant au déroulement du procès pénal
(paragraphe 2).
Paragraphe 1 LA DENATURATION DES IDEAUX DU SERVICE
PUBLIC, ELEMENT MOTEUR DE L'INSTRUMENTALISATION DU POUVOIR DU
GREFFE
La situation socio économique du fonctionnaire
camerounais, et partant du greffier l'expose à toute sortes de vice
qui mettent à mal les idéaux du service public tant
prôné. Ceci se caractérise surtout par une
désacralisation du principe de gratuité du service public (A)
quoiqu'il existe d'autres entraves aux idéaux du service public (B).
A / La désacralisation du principe de
gratuité de la justice
Dans la présente rubrique, il sera question de montrer
que cette mise à mal du principe de la gratuité de la justice
entraîne dans tous les cas un système
généralisé de corruption. Toutefois, les entraves à
l'exigence de consignation de l'art.158 du CPP (2) constituent un
élément majeur dénaturant le principe de gratuité.
Mais avant cela, il sera question d'examiner de façon plus ou moins
sommaire ledit principe (1).
1) Exposé du principe de gratuité de la
justice
Voltaire en 1771 précisait déjà que
« c'est en jouissant du précieux avantage de rendre
gratuitement la justice que nous serons plus justes ». Ainsi
pour satisfaire ses missions fondamentales, la justice a besoin
d'être gratuite. Cette gratuité suppose tout simplement que
tout demandeur du service public ne devrait pas se voir vendre le service qu'il
réclame ; ni remettre aux agents publics de façon
injustifiée des sommes d'argent ou toute autre forme de biens en nature.
La gratuité de la justice implique pour sa part que le justiciable ne
doit au delà des sommes requises, verser des frais nécessaires
à la prestation du service qu'il sollicite.
Ceci s'applique alors normalement à tout service
public. Ainsi, dans son rapport avec le justiciable au pénal, le
greffier ne devrait exiger que les frais normaux de la procédure
notamment les consignations sans chercher à se faire remettre plus qu'il
n'en faut.
Mais, la gratuité se manifeste surtout par la
gratuité d'accès au juge, lequel est d'ailleurs un principe
légalement reconnu20(*). L'Etat entend ainsi garantir au citoyen
son droit fondamental à la justice. C'est dans cette optique que l'Etat
a instauré et organisé l'assistance judiciaire et la protection
de l'individu devant les cours et tribunaux.
Mais en matière pénale, cette gratuité
prend un tout autre sens, car le CIC en son article
368 prescrivait que la partie qui succombe est condamnée
aux dépens. Cela signifie en principe que les frais avancés par
la partie qui saisit le juge doivent lui être restitués par la
partie qui succombe. L'article 8 al. 2 de la loi
n°2006/015 du 29 Décembre 2006 portant organisation judiciaire va
dans le même sens en affirmant que « les émoluments
statutaires des défenseurs et autres auxiliaires de justice sont, des
frais d'instruction du procès et de l'exécution des
décisions sont avancés par la partie au profit de laquelle ils
sont engagés. Ils sont supportés par la partie qui succombe, sauf
décision contraire motivée de la juridiction ».
Il en résulte donc à l'analyse que la justice
est gratuite aussi bien è l'égard du défendeur (de bonne
foi) que du demandeur (partie civile) qui entend défendre un droit
légitime.
En définitive, il est clair que la justice est gratuite
bien qu'à première vue cette gratuité peut paraître
relative du fait des frais introductifs d'instance qu'il faut verser et que le
justiciable trouve d'ailleurs très éprouvants
financièrement, et de fait, au lieu de rapprocher la justice du
justiciable a le mérite de l'en éloigner.
2) Les entraves à l'exigence de consignation
(art.158 CPP)
La pratique judiciaire oblige la partie qui saisit le juge par
citation directe ou le juge d'instruction par plainte avec constitution de
partie civile, de verser une consignation au greffier en chef de la
juridiction saisie. Cette consignation est fixée par le juge et à
défaut de consignation, le juge est tenu de déclarer la citation
irrecevable.
Mais on constate aussi dans la pratique judiciaire, que le
greffier est obligé de porter sur la couverture du dossier face interne
la date et le montant de la consignation versée par la partie
plaignante21(*). Cela permet au juge de
s'assurer que la consignation est versée ou ne l'est pas. Ce
caractère obligatoire est d'ailleurs affirmé avec plus de
force par l'art. 158 du CPP quand il soutient
que « la personne qui met en mouvement l'action publique
(...) est tenue, à peine d'irrecevabilité de consigner au greffe
du TPI compétent la somme présumée suffisante pour
le paiement des frais de procédure ».
Malheureusement cet article porte en lui même les germes
de sa propre défaillance car l'on imagine alors que le greffier de
service pourrait exiger des montants élevés bien que comme le
prévoit le même article, « cette somme est
fixée par ordonnance par le juge
d'instruction »22(*).
En effet, bien qu'étant l'apanage du juge
d'instruction, le greffier reste en pratique le seul garant de la suffisance ou
non des sommes à consigner car de plus en plus dans nos tribunaux, ces
sommes sont fixées de façon arbitraire par le greffier qui, au
demeurant, s'arroge les attributs du magistrat quelquefois
défaillant.
Le justiciable quant à lui ne saurait très
souvent contester cet état des choses parce que non seulement il n'est
pas bien renseigné ; mais aussi il ne dispose pas de moyens de
pression sur la personne du greffier ; encore moins de preuves suffisantes
pour nier l'effectivité des montants qu'on lui demande de verser. Les
entraves à l'exigence d'une consignation juste dénaturent ainsi
le principe de gratuité de la justice surtout dans la phase de
déclenchement du procès. Elles marquent ainsi un certain pouvoir
que le greffier possède ;bien que ce pouvoir donne très
souvent lieu à des dérives graves qui tendent à
généraliser le système de corruption en
« vigueur » dans notre pays.
B / Les autres entraves aux idéaux du service
public
Comme nous l'avons montré plus haut, la
désacralisation du principe de la gratuité de la justice se
manifeste le plus souvent à l'ouverture du procès par une
exigence abusive de consignation. Mais ces dérives, ou plutôt
cette dénaturation des idéaux du service public ne se situe pas
seulement au niveau pécuniaire car dans la pratique, on constate
diverses manoeuvres dilatoires (1) ainsi que des cas d'abus de pouvoir (2).
1) L'existence d'une pluralité de manoeuvres
dilatoires
La justice répressive a ceci de particulier qu'elle met
en jeu des intérêts qui touchent la personne dans son
honorabilité car ici on évoque des condamnations
à des peines infamantes et même des amendes. Pour cela, elle doit
être rendue de façon rapide surtout que le justiciable qui s'y
approche attend généralement très vite satisfaction.
Le greffier peut alors, parce qu'il est au centre de la
machine répressive procéder à des manoeuvres dilatoires
pour retarder le procès. Concrètement il peut retarder ou alors
refuser de délivrer une pièce du dossier, de la dactylographier.
Il peut en outre s'absenter sciemment en vue du report d'une descente sur le
terrain (notamment dans la phase d'instruction) .Il peut même, quand il
est au siège tarder à enrôler un dossier ou proposer au
Président du tribunal une date lointaine et injustifiée.
Toutes ces manoeuvres démontrent le pouvoir que le
greffier tient au sein de la justice, mais surtout elles tiennent souvent soit
à des considérations personnelles, soit à son désir
d'être corrompu, ou tout simplement à une mauvaise foi
caractérisée. Toujours est-il que ces agissements peuvent
dégénérer et devenir manifestement des abus de pouvoir de
la part du greffier.
2) La récurrence des manoeuvres d'abus de
pouvoir
Les missions des fonctionnaires des greffes et parquet
étant d'assurer l'intendance des juridictions et d'assister les
magistrats dans leurs fonctions juridictionnelles. Il va de soi que la
principale règle de conduite à laquelle ils sont assujettis est
la probité. Celle-ci leur est imposée par le statut de la
fonction publique et par le serment des greffiers du siège et du
parquet dans la formule suivante :
« Je jure de bien et loyalement remplir mes
fonctions et d'observer en toutes circonstances les devoirs qu'elles
m'imposent »23(*).
Mais la pratique judiciaire révèle très
souvent autre chose car, les greffiers abusent très
généralement du pouvoir qui leur est statutairement
confié
Ces abus se manifestent surtout par des actes d'une
extrême illégalité telle que la divulgation du secret de
l'information judiciaire, ou même encore le fait de brimer un
justiciable, de l'injurier, de lui faire produire des pièces qui ne lui
seront manifestement d'aucun bénéfice pour la suite de son
procès. A l'évidence, les abus de pouvoir et d'autorité
sont monnaie courante dans nos tribunaux et, c'est le justiciable qui,
malheureusement en paye les frais, lui qui ne maîtrise pas toujours
l'univers des tribunaux24(*).
Cependant cette instrumentalisation de pouvoirs a une
incidence énorme aussi bien sur le procès pénal qu'en
dehors, avec notamment une éventuelle mise en jeu de la
responsabilité du greffier.
Paragraphe 2 UNE INSTRUMENTALISATION AUX CONSEQUENCES
ENORMES SUR LE PROCES PENAL
Il est très souvent admis que « la prise
d'un grand pouvoir implique de grandes responsabilités ».
Ainsi le greffier, qui est souverain en certains moments de la
procédure25(*) est amené à faire face
à des taches immenses, que ce soit au parquet à l'information
judiciaire ou siège. Cependant, ce pouvoir est parfois utilisé
à d'autres fins car, sur le terrain de la pratique, le greffier
l'instrumentalise de diverses manières. Aussi, si l'exercice de son
pouvoir le rend-il de fait responsable, il est également vrai qu'il a
des conséquences certaines qui défigurent l'image du
procès et de la justice que l'on souhaite tous avoir. Ces
conséquences peuvent avoir un impact sur le cours du
procès ; on parlera alors de conséquences d'ordre processuel
(A). Mais au delà de celles-ci, on verra que l'instrumentalisation du
pouvoir du greffe dans sa phase préparatoire du procès, conduit
parfois à une mise en jeu de sa responsabilité (B).
A / Les conséquences d'ordre processuel
Par conséquence d'ordre processuel, il faut
entendre surtout les incidents que l'instrumentalisation du pouvoir du greffe
peut générer sur le cours du procès. Il est alors
intéressant de noter que ces conséquences, bien qu'ayant des
facettes multiples et multiformes peuvent d'abord s'analyser dans les lenteurs
judiciaires (1) mais également dans l'alourdissement de la charge
pécuniaire du justiciable (2).
1) les lenteurs judiciaires
L'une des conséquences quasi immédiate des
entorses dans l'action du greffe que nous avons soulevé plus haut est
qu'elle provoque irrémédiablement un dysfonctionnement de
l'appareil judiciaire tout entier et qui se traduit par le ralentissement du
cours des procédures. Cet état des choses n'est pas alors
bénéfique pour le justiciable qui, dans le cadre de la justice
pénale risque quelquefois sa vie. Les manoeuvres dilatoires, les abus de
pouvoir multiformes n'ont donc pour seule conséquence que l'augmentation
des lenteurs judiciaires tant décriées.
Une autre conséquence aussi est l'empilement des
dossiers qui au lieu d'être enrôlés afin d'être
vidé sont plutôt entassés dans les bureaux des greffiers au
risque d'être soit au mieux mutilés ou détruits, soit au
pire perdus.
Toujours est-il que les lenteurs judiciaires
provoquées par le greffier desservent complètement le service de
la justice ; mais au premier chef le justiciable. Prenons le cas banal
d'un individu qui se présente au service des greffes afin de porter
plainte pour vol ou pour coups et blessures et que, par le fait du greffier,
l'affaire n'arrive pas à être présentée à
temps devant le Procureur. Il est clair que le moment venu, les preuves
pourraient être difficiles à rassembler, compliquant ainsi le
déroulement de la justice. Un autre cas peut être celui d'un
individu sous le coup d'une prévention et qui, du fait des lenteurs
occasionnées par le greffier, n'arrive pas à se faire rendre
justice. On imagine alors le préjudice aussi bien matériel que
moral qui pourrait en résulter.
2) L'alourdissement des charges pécuniaires du
justiciable
Le justiciable, dans le cadre d'un
procès, n'est tenu de payer que les frais légaux normalement
prévus. Mais, il arrive que le greffier ; de façon
arbitraire exige au justiciable plus que ce qu'il devrait payer. Ce
phénomène, très fréquent dans les greffes de nos
cours et tribunaux se manifeste surtout par une multiplication des dossiers de
procédures. Une exigence abusive de consignation, par une
réclamation de frais totalement injustifiés, variant la plupart
du temps en fonction du statut social du justiciable ou au gré des
humeurs du greffier. Malheureusement, tous ces frais contribuent à
alourdir la charge financière du justiciable moyen qui ne dispose
déjà pas de revenus consistants. En plus, les
répercussions sont immédiates car il pourrait avoir des
difficultés pour les frais que lui coûtent le procès
(renvoi des affaires, production des frais supplémentaires, frais
à verser après le procès...). Dans tous les cas, le
greffier peut être à l'origine d'une déconfiture du
justiciable ; ce qui peut le freiner dans sa quête de justice
surtout s'il faille exercer des voies de recours.
Néanmoins, cette instrumentalisation du pouvoir du
greffe ne demeure pas exempte de toute répression car il est toujours
possible de mettre la responsabilité en cause du greffier.
B / La possibilité de mettre en jeu la
responsabilité du greffier
Comme tout fonctionnaire, le greffier est responsable dans
ses relations avec l'usager. C'est pour cela qu'il doit accomplir toutes ses
fonctions avec la probité qui sied à un personnage de
l'administration de la justice. Mais au delà de ces impératifs
moraux, un système a été prévu pour pouvoir mettre
en oeuvre la responsabilité du greffier car, ses actes peuvent
être sanctionnés s'il agit de manière
répréhensible avec le justiciable ou tout simplement s'il commet
des fautes dans son service. Aussi, la responsabilité du greffier par
rapport à son rôle en matière pénale (2)
révèle de multiples facettes. Ceci constitue une garantie
supplémentaire pour le justiciable puisqu'en réalité,
comme tout fonctionnaire, sa responsabilité peut être
engagée (1).
1) La responsabilité du greffier en tant qu'agent
de l'Etat
Les obligations auxquelles les fonctionnaires font face
impliquent forcément des responsabilités aussi bien à
l'égard de leurs administrations que des tiers. Cette responsabilisation
constitue essentiellement la base et le fondement de la sanction des fautes
résultant du manquement à leurs obligations. Car, comme le
révèle MESSANGA ATANGANA26(*), « toute obligation non
assortie d'une sanction est comme du pain sans levain ». Pour
lui, le greffier ne devrait donc pas être en marge de cette
règle.
Il est cependant bon de relever que le greffier, comme tout
fonctionnaire peut être sous le coup d'une sanction disciplinaire. La
répression disciplinaire étant le pouvoir conféré
à l'autorité investie du pouvoir de nomination, de
réprimer les fautes commises par les fonctionnaires. Elle est donc
essentiellement liée à la fonction et est subordonnée
à une faute disciplinaire qui elle, s'analyse comme la violation d'une
règle ou d'une obligation à laquelle est assujetti le
fonctionnaire. Il peut s'agir par exemple du refus de servir ou
d'obéir, d'un abandon de poste, d'une négligence
systématique.
Toujours est il qu'il faut une faute et que cette faute soit
d'une gravité certaine. Ce dernier critère est
apprécié souverainement par le supérieur
hiérarchique qui, à sa discrétion détermine la
gravité de ladite faute, ce en fonction des conséquences plus ou
moins graves sur le fonctionnement du service public.
Le greffier qui refuse de servir un justiciable ou qui
manifeste une mauvaise volonté dans l'accomplissement de ses
tâches peut se voir infliger des sanctions allant de l'avertissement
écrit à la révocation en passant par le blâme avec
inscription au dossier, du retard à l'avancement ou de l'abaissement
d'échelon, de classe ou de grade et même l'exclusion temporaire du
service27(*). Dans tous
les cas, la répression disciplinaire aura toujours un effet
négatif sur la carrière du greffier et ces sanctions peuvent
même être des suspensions de rémunérations (pour le
cas de l'exclusion temporaire) ou tout simplement des déchéances
(lorsque le greffier ne jouit plus de la confiance de son supérieur
hiérarchique).
La sanction disciplinaire vient donc en quelque sorte faire
le contrepoids à une instrumentalisation grandissante du pouvoir du
greffe et plus précisément du greffier qui se devra alors, dans
le cadre d'une justice répressive efficace et rapide d'accomplir ses
fonctions avec beaucoup de diligence et de professionnalisme.
2) La responsabilité du greffier
relativement à son rôle en matière pénale
Le greffier peut ne se voir infliger aucune sanction
disciplinaire alors même qu'il est fautif, ce en raison des
affinités qu'il a pu développer avec le chef
hiérarchique.
Nonobstant le caractère sérieux des sanctions
disciplinaires, il faut reconnaître qu'elles peuvent être
très limitées. En plus il n'existe pas à notre
connaissance des affaires incriminant directement les greffiers. Cependant, il
est des fautes qui, lors d'une affaire pénale ne sauraient rester
impunies soit du fait qu'elles seront soulevées par le justiciable dans
le cadre d'une action en justice contre la personne du greffier ; soit
parce que la loi prescrit expressément de les sanctionner.
Au rang de ces actes du greffier pouvant entraîner sa
responsabilité on peut citer entre autre : la violation du
secret de l'instruction (a) et le non respect des formalités de
l'article 112 du CIC (b).
a. La violation du secret de l'instruction
Le greffe, comme le corps médical ou le corps des
avocats est tenu au secret professionnel du fait même de la
confidentialité qui doit régner avant les débats au fond.
Ainsi, la loi fait obligation au juge d'instruction ainsi qu'au greffier de ne
pas divulguer le secret de l'instruction sous peine de poursuites.
L'article 154 du CPP le réaffirme d'ailleurs
en ces termes « toute personne qui concourt à
l'information est tenue au secret professionnel sous peine des sanctions
prévues à l'article 310 du code pénal » et
l'article 155 du CPP ajoute que « la
diffusion par quelque moyen que ce soit de nouvelles, photographies, opinions
relatives à une information judiciaire est
interdite... ». Il apparaît donc clairement qu'à la
phase d'instruction le greffier peut voir sa responsabilité
engagée en raison des actes qu'il pose, ce qui a le mérite de
constituer une garantie de plus pour le justiciable.
b. La violation des formalités de l'article 112 du
CIC
Contrairement au Code de Procédure Pénale qui
est resté muet sur la question, l 'article 112 du CIC avait
prévu une sanction contre le greffier en cas d'inobservation des
formalités prescrites pour les mandats de justice28(*). Ainsi, le greffier est tenu
de les accomplir avec beaucoup de diligence et d'attention. Cette
formalité est davantage mise en exergue dans des pays comme la
France29(*). Dans ce pays le greffier qui contrevient
à cette formalité écope d'une amende civile de 50 francs
(environ 7,69 euros) en cas d'inobservation des formalités prescrites
pour les mandats de justice.
Le législateur français a même
prévu des amendes de 10 francs (1,53 euros) pour des omissions commises
par le greffier telle que l'omission d'avertir le Procureur de la
République au plus tard l'avant-veille d'un acte, alors que celui-ci
avait fait connaître au juge d'instruction son intention d'y assister.
L'omission d'informer le Procureur le jour même où elle est rendue
de toute ordonnance non-conforme à ses réquisitions,...
Toutes ces formalités contribuent à lutter contre le risque que
le greffier a de se départir de ses missions essentielles et de
permettre une certaine limpidité dans son action
De ce qui précède, il ressort que le greffier
est un personnage décisif en ce qui concerne l'ouverture de l'action
publique. Il est pour ainsi dire indispensable dans son action lorsqu'il est au
parquet (c'est la porte d'entrée des procédures pénales)
et même quand il est au siège (notamment à l'information
judiciaire). Le greffier possède donc d'énormes pouvoirs en
matière d'entrée des procédures ; car il enregistre
les plaintes, procède à l'instruction en même temps que le
juge et il enrôle les affaires quand il est au siège. Dans tous
les cas, qu'il soit au parquet ou au siège, son absence rendrait toute
action publique impossible. Cela est d'autant plus vrai que « Tout
acte juridictionnel doit être accompli avec l'assistance d'un
greffier ».
Toutefois, ce personnage qui s'avère être au
coeur de la machine répressive « joue » quelquefois
avec les pouvoirs qui lui sont statutairement confiés. Il
l'instrumentalise très souvent son- pouvoir- du fait de sa position
privilégiée quant au déclenchement d'une action
pénale. Tout ceci aux détriments du justiciable et du corps de la
justice tout entier. Cependant son pouvoir va au delà de ce qui a
été évoqué jusqu'ici car, une fois la
sentence rendue le greffier prend toute son autonomie puisque c'est à ce
niveau qu'il devient véritablement une clé pour le procès
pénal, que ce soit vis-à-vis du justiciable ou dans son rapport
avec son service.
CHAPITRE 2
LE GREFFE, « CHEVILLE OUVRIERE »
DANS LE SUIVI
DES PROCEDURES PENALES
« Une fois la sentence rendue, le juge cesse
d'être juge » a -t- on coutume de dire. Le greffier se
déploie alors totalement dans son action puisqu'il n'est plus sous
l'autorité des magistrats. Il exerce des tâches importantes, et
ce de façon souveraine. Le justiciable sera alors inévitablement
conduit vers lui pour accomplir des formalités telles que la
délivrance des certificats d'appel ou de non appel, d'une
expédition ou même simplement exercer ses droits de recours si la
sentence lui semble insatisfaisante. Toujours est-il qu'à ce niveau le
greffe ou plutôt le greffier est immensément sollicité,
devenant même incontournable pour l'achèvement du procès
commencé des semaines, des mois voire des années auparavant.
Ainsi, qu'il soit du siège ou du parquet il a un rôle qui ne
dépend pas de l'aval d'une quelconque autorisation ou même de
l'assistance aux magistrats. Le greffier est donc après la sentence un
personnage pleinement autonome, exerçant des tâches propres et
spécifiques. Mais dans quelle sphère se manifeste cette autonomie
ou plutôt cette souveraineté ? La question a tout son
intérêt car montrer que le greffe est la cheville ouvrière
dans le suivi des procédures c'est d' abord dire qu'il a un pouvoir
effectif dans la machine répressive, mais aussi reconnaître qu'il
y a des formalités qu'il est tenu d'accomplir d'office (la constitution
d'un dossier de procédure par exemple) et d'autres qu'il accomplira de
façon incidente (notamment dans l'exercice des voies de recours). Le
suivi des procédures internes qui consiste en l'analyse des rapports
entre le greffier et son service (section 1) constitue donc une
prérogative essentielle du greffier. Cependant, le suivi des
procédures externes c'est-à-dire l'analyse des rapports entre le
greffier et les justiciables rentre aussi dans le vaste champ de
compétence du greffier (section 2).
Section 1 LE SUIVI DES PROCEDURES
« INTERNES » : LES RAPPORTS
ENTRE LE GREFFIER ET SON SERVICE
Comme tout fonctionnaire, le greffier a des obligations
vis-à-vis du service dans lequel il exerce. Ainsi il est tenu
d'accomplir après le procès des actes qui permettront à la
décision de devenir exécutoire. Il est donc en ce sens une
clé déterminante quant à l'issue du procès
(paragraphe 1). Mais à coté, le greffier secrétaire de
parquet joue un rôle prépondérant dans l'exécution
des décisions de justice (paragraphe 2).
Paragraphe 1 LE GREFFIER DU SIEGE, UNE CLE DETERMINANTE
QUANT A L'ISSUE DU PROCES
Nous nous appesantirons uniquement ici sur la rédaction
des qualités d'un jugement (A) et la constitution par le greffier du
dossier de procédure (B).
A / La Rédaction des qualités d'un
jugement
Les qualités constituent la partie introductive du
jugement. Elles indiquent la juridiction qui a statué, la date à
laquelle la décision a été rendue et précisent que
celle-ci a été rendue en audience publique.
Dans leur rôle d'instruction, les qualités d'un
jugement donnent au lecteur un aperçu général sur le
litige et les parties au procès.
Aussi renferment-elles tous les renseignements relatifs
à l'adresse, l'identité et la qualité des parties, la
nature du litige, les noms et prénoms du juge, du représentant du
Ministère public, du greffier et de l'interprète
éventuellement.
Les jugements contiendront également les noms,
professions, domiciles des parties, l'acte introductif d'instance et le
dispositif des conclusions.
En matière civile et commerciale les qualités
sont en principe rédigées par le greffier. Toutefois,
l'article 43 du CPCC exige que ce dernier
rédige lesdites qualités sous la surveillance du juge et que
celui-ci intègre obligatoirement l'acte introductif d'instance et le
dispositif des conclusions des parties.
Cette surveillance est nécessaire, et même
obligatoire, car une jurisprudence constante impose au juge, de ce point de
vue, les obligations ci-après :
(1) le juge ne doit statuer sur ce dont il a été
saisi sous peine de commettre un excès de pouvoir en se
prononçant ultra ou infra petita. Cela signifie
concrètement que le juge ne doit se prononcer sur les demandes
formulées dans la limite des conclusions des parties30(*) ;
(2) Les juges de fond sont liés par des conclusions
prises devant eux et ne peuvent modifier arbitrairement les termes du
débat donc ils ont été saisis31(*). La
non reproduction du dispositif des conclusions dans le jugement ou
l'arrêt est prescrite à peine de nullité32(*).
Pour la rédaction des qualités, le greffier est
tenu de rechercher dans les pièces du dossier les renseignements
nécessaires et surtout de veiller à vérifier dans le
plumitif si le tribunal était régulièrement
composé. La Cour Suprême a décidé dans une
espèce que toute décision de justice doit à peine de
nullité renfermer en elle-même la preuve que la juridiction dont
elle émane était régulièrement composée, car
les règles relatives à la composition des cours et tribunaux sont
d'ordre public33(*).
Le greffier devra également veiller à porter la
mention ci-après à la fin des qualités :
« Sans que les présentes qualités puissent nuire ou
préjudicier aux droits et intérêts des parties, mais au
contraire sous les réserve les plus expresses de fait et de
droit ».
L'intérêt de cette mention est de décliner
la responsabilité du juge et du greffier sur une erreur
éventuelle sur la personne, l'adresse et la qualité des parties
au procès et par voie de conséquence, de ne pouvoir fonder la
nullité du jugement entrepris qu'exclusivement sur des circonstances de
fait et de droit.
En ce qui concerne l'identification des parties, la loi exige
que celle-ci soit précise et exacte. La jurisprudence a
décidé en l'espèce qu'il suffit qu'aucun doute ne puisse
s'élever sur l'individualité des parties et qu'il revient
à la partie qui invoque l'omission d'une mention identitaire de
démontrer en quoi cela a pu nuire à ses
intérêts34(*).
En conséquence de ce qui précède, les
qualités doivent contenir obligatoirement, les mentions
ci-après :
· l'indication du tribunal qui a rendu la
décision ;
· la date du jugement ;
· le numéro du répertoire ;
· les noms et prénoms du juge, représentant
du ministère public et du greffier ;
· la nature du différend ;
· les noms, prénoms et domicile des
parties ;
· l'acte introductif d'instance ;
· le dispositif des conclusions des parties ;
· l'indication que les parties se sont
présentées en personne ou par mandataire ou qu'il a
été jugé sur mémoires produits ;
· l'indication des incidents survenus en cours d'audience
éventuellement.
En matière pénale, les qualités sont
aussi l'oeuvre du greffier. Elles doivent contenir
les mentions obligatoires ci-après :
· l'indication du tribunal qui a rendu la
décision ;
· la date du jugement ;
· le numéro du répertoire ;
· les noms et prénoms du juge, du
représentant du ministère public, du greffier et de
l'interprète assermenté ;
· la nature de l'infraction ;
· les noms et prénoms, domicile et profession des
parties ;
· les différentes dates auxquelles l'affaire avait
été renvoyée ;
· la mention de la prestation de serment des
témoins majeurs qui ont été entendus ;
· la mention que les témoins de moins de 16 ans
ont été entendus à titre de simple renseignement ;
· la mention que le prévenu a eu la parole en
dernier pour sa défense ;
· la mention que la partie civile a été
entendue en sa demande de dommages intérêts.
Une simple erreur de frappe n'est pas une cause de
nullité d'un jugement ou d'un arrêt dès lors qu'une
énonciation de cette décision peut être rectifiée
à l'aide d'autres mentions.
L'erreur matérielle ouvre exclusivement une action en
rectification devant la juridiction qui a commis ladite erreur et non un
recours en cassation35(*).
Lorsque le jugement est rendu sur le siège, les motifs
qui sont en principe l'oeuvre du juge, sont soit dictés au greffier par
le juge, soit rédigés sur un brouillon qui est remis ensemble
avec le dossier, au greffier quelques jours après l'audience.
Mais à coté de cette tache délicate que
le greffier a de rédiger les qualités d'un jugement et
éventuellement les motifs, il faudra aussi noter qu'après le
procès, il doit constituer le dossier de procédure.
B / La constitution du dossier de procédure
La constitution du dossier de procédure est une
tâche très délicate qui requiert beaucoup d'expertise et de
dextérité. Il doit alors être accompli par le greffier qui
semble être le seul à même de posséder la
méthode nécessaire et la discipline qui va avec. Ces deux grands
principes s'intègrent dans les formalités substantielles
ci-après :
· le liassage du dossier,
· le numérotage et l'inventaire des
pièces,
· le ficelage du dossier,
· la présentation de la chemise du dossier.
1) Le liassage du dossier pénal
Avant de distinguer entre les dossiers sortant du cabinet de
l'instruction et ceux introduits par voie de citation directe ou de flagrant
délit, il faudra d'abord pouvoir définir la notion.
En effet, le liassage est le classement et la
répartition des pièces en plusieurs liasses dans un dossier de
procédure.
Pour ce qui est des dossiers sortant du cabinet d'instruction,
les pièces du dossier sont réparties en cinq liasses :
· les pièces de forme,
· les pièces d'enquête
préliminaire,
· les pièces d'information,
· les pièces de renseignements,
· les pièces de règlement
définitif.
S'agissant des dossiers sortant du tribunal, il est à
noter que lorsqu'un dossier est transmis à la Cour d'Appel, le nombre de
liasses varie suivant que le tribunal aura été saisi par
ordonnance de renvoi, par citation directe ou flagrant délit. Si le
tribunal a été saisi par ordonnance de renvoi, les pièces
sont réparties en six liasses comme suit :
· pièces de forme,
· pièces d'enquête préliminaire,
· pièces d'information préliminaire,
· pièces de procédure,
· pièces de renseignement,
· pièces de règlement définitif.
Si le tribunal a été saisi par voie de flagrant
délit, les pièces, réparties en cinq liasses sont
classées comme suit :
· les pièces de forme,
· les pièces d'enquête
préliminaire,
· les pièces de procédure,
· les pièces de renseignement,
· les pièces de règlement
définitif.
Si le tribunal a été saisi par voie de citation
directe, les pièces sont réparties en quatre liasses. L'ordre
précédent est respecté excepté les pièces
d'enquête préliminaire.
En cas de pourvoi, le greffier se contentera de
répartir dans les différentes liasses, les pièces
supplémentaires générées par l'instruction à
la Cour d'Appel. Il est important de préciser ici que la
répartition des pièces dans les liasses d'un dossier
déjà liassé est plus aisée, car on classe
simplement dans chaque liasse, les pièces correspondantes au dessus des
plus anciennes36(*).
2) le numérotage des pièces et
l'inventaire
Chaque pièce doit recevoir un numéro distinct.
En effet, une série de numéros distincts doit être
affecté à chaque liasse. Chaque numéro sera ainsi
précédé de la lettre qu'il suit .on notera par
exemple :
· pièces de forme : F1, F2, F3,
F4,... ;
· pièces d'enquête
préliminaire : E1, E2, E3,... ;
· pièces d'information : I1, I2,
I3,... ;
· pièces de procédure : P1, P2,
P3,... ;
· pièces de règlement
définitif : RD1, RD2, RD3,....
Ce système présente alors un avantage pour le
greffier car il lui évite de recommencer à chaque fois le
numérotage des pièces toutes les fois que le dossier fait
successivement l'objet de communication et d'appel.
Ce numérotage facilite l'inventaire qui doit
être soigneusement fait dans chaque dossier. Il sera alors question
d'inventorier (faire le total) les pièces de chaque liasse et de porter
le total au bas du document.
3) La présentation de la chemise du
dossier
Il est extrêmement important de tracer et de remplir
avec le plus grand soin la chemise des dossiers. La raison principale est que
la lecture d'une chemise bien présentée évite des
recherches fastidieuses et renseigne opportunément le magistrat
appelé à étudier ou consulter le dossier sur la nature et
l'état de la procédure. Elle doit notamment comporter :
Ø les noms et prénoms de toutes les parties en
cause
Ø l'indication des conseils qui ont été
constitué pour ces différentes parties
Ø en face du nom de l'inculpé ; une des
mentions ci-après doit être portée :
· L (en liberté)
· MD (mandat de dépôt) en date du...
· LP (liberté provisoire)
· MA (mandat d'arrêt) en date du...
4) Le ficelage
Il consiste à réunir et à perforer par
une ficelle dans le coin inférieur gauche, les pièces de la
chemise du dossier37(*). Le ficelage a pour but d'éviter
toute falsification ultérieure d'un document et de faciliter la
conservation des éléments qui ont été versés
au dossier.
Il apparaît donc nettement que la constitution du
dossier de procédure n'est pas une tache aisée car non seulement
elle nécessite beaucoup de dextérité de la part du
greffier mais aussi, une quelconque défaillance (perte des pièces
du dossier, mauvais classement desdites pièces,...) aura
forcément une incidence sur le cours du procès et pourrait le cas
échéant entraîner la mise en jeu de sa
responsabilité.
Cependant, le greffier du siège n'est pas le seul
à intervenir dans ce que nous avons appelé « suivi des
procédures internes », puisque le greffier, secrétaire
de parquet intervient aussi à maints endroits dans l'exécution du
jugement.
Paragraphe 2 LES IMPLICATIONS DU SECRETARIAT DU PARQUET
DANS L'EXECUTION DU JUGEMENT
Les magistrats du parquet ont traditionnellement la charge,
l'exclusivité et l'initiative de faire exécuter les
décisions des juridictions répressives devenues
irrévocables et de tenir compte des causes desdites décisions. Il
s'agit essentiellement de la peine de mort, des peines d'emprisonnement et des
condamnations pécuniaires (amendes et dépens). Mais en
réalité ce sont les greffiers qui veillent scrupuleusement au
respect du formalisme qui entoure l'exécution de la peine
d'emprisonnement ou de la peine de mort, le recouvrement des amendes et des
dépens dus à l'Etat étant très souvent
diligenté par le procureur de la République. Il ne sera pas alors
nécessaire que nous envisagions cet aspect ici, puisque
l'exécution de la peine d'emprisonnement(A) et de la peine de mort(B)
constituent l'essentiel des attributs du greffier du parquet dans
l'exécution d'un jugement.
A / L'exécution de la peine d'emprisonnement
L'emprisonnement est une peine privative de liberté
à temps où à perpétuité pendant laquelle le
condamné est astreint au travail, sauf décision contraire
dûment motivée du juge. Pour garantir l'exécution de la
peine d'emprisonnement, le greffier secrétaire de parquet tient sous le
contrôle du Procureur de la République, un registre dit Registre
d'exécution des peines.
Le greffier note dans ce registre toutes les décisions
portant condamnation à l'emprisonnement ou à l'amende et toutes
les diligences conduisant à l'exécution desdites condamnations.
Ce registre doit être tenu avec soin, car il est d'une importance
capitale et sa bonne tenue peut éviter des erreurs dans
l'exécution des peines.
Si le condamné est détenu, le Procureur de la
République informe le régisseur de la prison de la nature de la
décision rendue. Cela permet concrètement au régisseur de
la prison de calculer la peine avec précision et de situer avec
exactitude la date de son expiration dans les conditions prévues
à l'article 28 du Code Pénal.
Si le condamné n'est pas détenu, et que le juge
n'a pas décerné mandat d'arrêt ou de dépôt
à l'audience contre lui, l'article 27du Code
Pénal prescrit que la peine privative de liberté ne
peut être mise en exécution que lorsque la condamnation est
devenue irrévocable.
A cet effet, le greffier en chef délivre d'office des
extraits de la décision de condamnation au procureur de la
République dès que ladite condamnation a acquis l'autorité
de la chose jugée.
Le procureur de la République envoie à son tour
ces extraits à la police ou à la gendarmerie pour rechercher le
condamné.
Pour obliger les éléments des forces de l'ordre
de procéder à l'arrestation automatique du condamné, le
Procureur de la République devra assortir les extraits de la
décision de condamnation d'un ordre d'incarcération dûment
signé par lui-même.
Toutefois, si le greffier en chef ne délivre pas
d'office ces extraits, le Procureur de la République, sur proposition du
greffier, secrétaire de parquet, doit les lui réclamer, car le
contrôle permanent du registre d'exécution des peines doit
nécessairement permettre à tout moment au chef de service des
affaires judiciaires de se rendre compte que la décision est devenue
définitive donc, susceptible d'exécution.
Le Procureur de la République doit également
veiller à ce que la détention préventive soit prise en
compte dans le calcul de la peine temporaire d'emprisonnement à temps,
en confrontant scrupuleusement l'état des détenus
préventifs que lui adresse régulièrement le
régisseur de prison et son registre d'exécution des peines.
Ce travail est en réalité fait par le greffier,
secrétaire de parquet, proposé à la tenue du registre
d'exécution des peines. Enfin, le Procureur de la république ne
devrait pas se contenter de ces états. Il a le devoir et l'obligation
légale de se transporter à la maison d'arrêt pour
contrôler sur place les détentions préventives et toucher
du doigt les problèmes d'ordre administratif et judiciaire qu'elles
posent et d'en rendre compte à la hiérarchie avec des
propositions concrètes. L'exécution de la peine de mort quant
à elle appelle encore plus de délicatesses.
B/ L'exécution de la peine de mort 38(*)
Comme toutes les peines pénales, la peine de mort ne
peut être exécutée que si elle est devenue
irrévocable. Elle ne peut avoir lieu les dimanches et jours
fériés la décision qui prononce la peine de mort doit
impérativement préciser le procédé de mise a mort
du condamné. En effet, l'article 23 du Code Pénal laisse au juge
le choix entre la fusillade et la pendaison.
Toutefois aucune condamnation ne peut, en application de
l'article 22 du code pénal, être exécutée tant que
le Président de la République ne s'est pas prononcé sur
la grâce à accorder ou non au condamné. A cet effet ,
dès que la condamnation à mort passe en force de chose
jugée, le greffier, secrétaire de parquet est tenu d'ouvrir le
dossier de ministère public après avoir recueilli l'avis du juge
qui a rendu la décision de condamnation à mort .
Après instruction, le dossier de recours en
grâce est transmis au ministère assorti de son avis.
Le ministère de la justice saisit le Conseil
Supérieur de la Magistrature qui émet son avis et le
Président de la République, en sa qualité de
président dudit conseil, statue sur la grâce du
condamné.
En conclusion, le recours en grâce est automatique car
elle est prescrite par la loi. En conséquence, la demande
préalable du condamné n'est pas nécessaire.
Si le Président de la République accorde la
grâce, la peine de mort est commuée d'office en une peine
d'emprisonnement à vie.
Si en revanche le Président de la République
rejette le recours en grâce, la décision de rejet est,
conformément à l'article 23/D1 du Code pénal, transmise
pour exécution par la Cour d'Appel dans le ressort de laquelle le
condamné est détenu.
L'exécution doit intervenir dans les meilleurs
délais possibles après réception par le procureur
général de décision du rejet recours en grâce, sous
réserve des conditions prévues a l'article 22 (3 et 4) du Code
pénal. A cet effet, la date, le lieu et l'heure de l'exécution
sont fixés par décision conjointe du procureur
général et gouverneur de la province territorialement
compétent.
Ce denier prend toutes les mesures de sécurité
nécessaires, notamment en réquisitionnant la force armée
qui doit assurer l'exécution de la sentence.
De son côté, le procureur général
notice au condamné ou à son représentant le rejet du
recours en grâce avant l'exécution. Toutefois, l'article 23.D3 (2)
du code pénal autorise le procureur général de surseoir,
sous sa responsabilité et à charge d'en rendre compte
immédiatement au ministre de la justice, à l'exécution en
cas de révélation d'un fait d'une importance ou gravité
exceptionnelles.
L'article 23.D4 du même code fixe les
personnalités suivantes qui doivent assister à
l'exécution :
-le procureur général ou son
représentant choisi parmi les magistrats du parquet ;
-le greffier désigné par le procureur
général ou par son représentant ;
-un ministre de culte auquel appartient le condamné,
désigné par le procureur général ;
-un médecin requis par le procureur
général ;
-le personnel nécessaire à l'exécution
et au maintien de l'ordre public (peloton d'exécution) ;
-le ou les défenseurs du condamné dûment
avisés l'exécution par le procureur général,
peuvent assister à l'exécution, même non publique.
L'article 23.D5 (1) prescrit que c'est le greffier qui
rédige le procès-verbal d'exécution qui est signé
par le procureur général, le médecin et par
lui-même. Ce procès - verbal doit obligatoirement
mentionner :
-le nom du condamné ;
-les références exactes de l'arrêt de
condamnation et la décision de rejet du recours en grâce,
-les actes, lieu et heure de la notification du rejet du
recours en grâce au condamné ;
-le mode d'exécution ;
-les date, lieu et heure de l'exécution.
Le greffier ainsi requis est tenu :
1) De notifier à l'officier d'état civil
compétent une expédition dudit procès-verbal aux fins
d'établir l'acte de décès du condamné.
2) D'afficher une expédition de procès-verbal
d'exécution pendant huit jours à la porte de la prison où
le condamné était détenu.
3) De dresser un procès-verbal distinct des
éventuelles déclarations du condamné et s'il y a lieu, les
incidents ayant éventuellement marqué l'exécution. Ce
procès-verbal est signé par le greffier et le procureur
général ou son reprenant.
Outre le fait que le greffier a des obligations à
accomplir vis-à-vis de son service, il faut aussi noter que le suivi des
procédures externes c'est-à-dire les rapports qu'il entretient
avec le justiciable témoignent aussi de l'importance du greffier dans le
suivi des procédures.
Section 2 LE SUIVI DES PROCEDURES
« EXTERNES » : LES RAPPORTS
ENTRE LE GREFFIER ET LE JUSTICIABLE
Après l'audience, le greffier est tenu d'accomplir
plusieurs diligences qui ne sont pas nécessairement dictées par
des impératifs de service et qui dépendent en grande partie de
l'intervention du justiciable. Ces diligences s'analysent surtout en la
délivrance de certaines pièces au justiciable (A). Mais il faut
noter que le suivi de ces procédures prend toute sa mesure dans le suivi
par le greffier des voies de recours (B).
Paragraphe 1 LES RAPPORTS ENTRE LE GREFFIER ET LE
JUSTICIABLE QUANT A LA DELIVRANCE DE CERTAINES PIECES
La délivrance des pièces s'analyse surtout dans
la délivrance des P.V. d'enquête, des extraits du plumitif, des
certificats d'appel, de non appel, de pourvoi, de non pourvoi, des extraits de
décision. Ce sont des pièces qui intéressent tout
particulièrement le justiciable. Cependant nous n'envisagerons que la
délivrance des extraits du plumitif que sont : les
expéditions (A), de la grosse et des copies (B).
A / La délivrance des expéditions
Les expéditions sont des copies certifiées
conformes des minutes des décisions de justice ou des actes
authentiques.
Exemple : statuts des
sociétés commerciales, conventions d'hypothèque dont le
greffier en chef est simplement dépositaire, et les registres publics
tenus par le greffier en chef en vertu des lois et règlements tel que le
registre de commerce.
Les expéditions ont la même force probante que
les originaux dont elles émanent et dont elles rapportent la preuve
juridiquement valable de leur contenu. Elles ont force probante en droit et
font foi jusqu'à inscription de faux. Ce sont des actes authentiques.
C'est pour cette raison que la loi et la jurisprudence entourent leur
formalisation(1) et leur délivrance(2) de soins très
attentifs.
1) La formalisation des expéditions
Avant de signer une expédition, le greffier est tenu de
la collationner scrupuleusement à la minute afin de s'en assurer la
parfaite conformité.
Si l'expédition est payante, le greffier doit veiller
à mettre au bas de celle-ci, le décompte des droits de greffe
perçus pour sa délivrance, sans oublier le numéro de la
quittance de versement desdits droits dans la caisse des régies des
recettes instituée auprès de la juridiction.
Toutes les expéditions payantes sont soumises au droit
de timbre à raison d'un timbre par feuillet (rôle)39(*).
La
mention « expédition » doit
impérativement figurer sur la première page de
l'expédition, tandis que la dernière page reçoit la
relation de l'enregistrement de la décision. Celle-ci est
immédiatement suivie de la mention
ci-après : « Pour expédition
certifiée conforme ».
2) La délivrance des
Expéditions
En ce qui concerne la délivrance des
expéditions, nous remarquons qu'elle obéit à des
règles générales (a) et à des règles
particulières en matière pénale (b).
a- Les règles générales
Aucune expédition d'une décision de justice ne
peut être délivrée avant sa signature par le juge et le
greffier audiencier et encore moins avant son enregistrement, à
l'exception des ordonnances assorties de la clause d'exécution
provisoire et avant enregistrement et des décisions de justice
dispensées de la formalité de l'enregistrement par la loi.
Parmi ces dernières, on peut citer les décisions
rendues par les juridictions traditionnelles. Toutefois, celles rendues en
matière de successions par ces dernières doivent obligatoirement
être soumises à la formalité de l'enregistrement avant la
délivrance de l'expédition.
Quant aux autres règles régissant la
délivrance des expéditions, celles-ci varient selon que l'on se
trouve en matière civile ou en matière pénale.
b- Les règles particulières en
matière pénale
Le greffier est tenu de délivrer d'office au
ministère public une expédition de chaque décision rendue
en matière pénale.
Quant aux parties au procès, il ne peut leur
délivrer expédition que sur leur demande expresse.
Le greffier n'est pas autorisé à délivrer
expédition aux personnes qui ne sont pas parties au procès il ne
pourra le faire que sur réquisition expresse du ministère public,
et lorsqu'il s'agit d'un jugement dont la publication a été
ordonnée par le juge. L'expédition n'est cependant pas le seul
document pouvant servir au justiciable, il faudrait aussi compter avec la
grosse et la copie-grosse.
B / La délivrance de la grosse et de la
copie-grosse
Nous verrons ici la délivrance de la grosse(1) et de
la copie-grosse(2) qui sont aussi des documents indispensables pour
l'exécution des décisions de justice.
1) La délivrance de la grosse
La grosse est une expédition revêtue de la
formule exécutoire. C'est le titre d'exécution qui n'est
délivre qu'une seule fois à la partie gagnante contre paiement
d'une certaine somme auprès du greffier40(*).
Pour cette raison, le greffier doit veiller à porter
sur la minute de la décision, la mention de cette délivrance.
Mais en cas de perte de la première grosse, la partie
qui veut s'en faire délivrer une seconde, doit en faire la demande par
requête au Président de la juridiction qui a rendu la
décision. Le Président saisi rend une ordonnance autorisant le
greffier à délivrer une seconde grosse.
Mention de cette ordonnance est portée au bas de la
minute de la décision et au bas de la seconde grosse.
La grosse se distingue donc de l'expédition par la
mention « GROSSE » portée sur la
première page du document et par la présence de la formule
exécutoire au bas de celui-ci.
2) la délivrance de la copie
La copie est une simple reproduction de la minute de la
décision. Il n'est pas nécessaire qu'elle soit absolument
certifiée conforme par le greffier. Une copie de chaque décision
est toujours classée dans le dossier placé aux archives.
Une copie accompagne toujours la grosse de jugement. Il est
bon de souligner que habituellement ce sont les copies qui sont le plus
délivrées dans nos cours et tribunaux certainement à cause
du fait qu'elles n'obéissent pas à un formalisme rigoureux et
qu'elles n'entraînent pas pour le justiciable le paiement des frais de
timbres qui peuvent lui paraître très élevés.
Il est vrai que le greffier est une pièce essentielle
dans le suivi des procédures externes surtout en ce qui concerne la
délivrance des pièces au justiciable. Mais dans l'analyse du
rôle du greffier comme étant la cheville ouvrière dans le
suivi des procédures externes, il faudra constater que le suivi des
voies de recours par le greffier est un élément qui rentre
également en compte dans le caractère incontournable du greffier
en procédure pénale.
Paragraphe 2 LES INTERVENTIONS DU GREFFIER DANS
L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS
Le code de Procédure Pénale édicte dans
les articles 427 à 544, l'ensemble des
modalités permettant à un justiciable non satisfait de la
décision rendues par un juge de porter celle-ci devant l'instance
supérieure ou, au cas où la décision a été
rendue en son absence, de revenir devant le même juge pour faire valoir
ses prétentions. Les voies de recours, bien qu'initiées par le
justiciable sont en fait diligentées par le greffier. Ce dernier
interviendra d'une part en ce qui concerne les voies de recours ordinaires (A)
et d'autre part pour les voies de recours extraordinaires (B).
A / l'intervention du greffier dans l'exercice des voies
de recours ordinaires
Nous verrons dans cette partie de notre travail l'appel (2) et
l'opposition (1) qui constituent les principales voies de recours
ordinaires.
1) L'opposition
La voie d'opposition n'est ouverte qu'aux parties au
procès. La partie qui fait opposition doit avoir été
absente au premier jugement et c'est pour cette raison que
l'article 427 précise que
« toute partie au procès peut faire
opposition ». Cette disposition exclut le ministère
public qui pourtant est partie au procès pénal. En effet, la
présence du ministère public est obligatoire à l'audience
à peine de nullité de la décision rendue.
Il faut également préciser que, l'opposition
n'est ouverte que contre les décisions rendues par défaut. Le
jugement est rendu par défaut dans les cas prévus aux
articles 351 et 416 du CPP.
L'opposition doit être faite dans un délai de 10
jours à compter du lendemain de signification du jugement (rendu)
à la personne de la partie qui a fait défaut si cette personne
réside au Cameroun. Ce délai est de trois (03) mois à
compter toujours du lendemain de la signification si la partie
défaillante réside à l'étranger
(article 430).
L'article 432 alinéa 2,
précise que l'opposition est formée soit par déclaration
consignée sur l'acte de signification lorsque celle-ci est faite
à personne, soit par déclaration faite du greffe de la
juridiction qui a rendu la décision, soit par télégramme
avec accusé de réception ou par lettre recommandée avec
accusé de réception adressée au greffier en chef de la
juridiction qui a statué, soit enfin par tout autre moyen laissant trace
écrite et daté destiné au même greffier en chef.
Dès réception de la déclaration
d'opposition, le Greffier en chef dresse immédiatement le
procès-verbal dont il adresse copie au ministère public et aux
autres parties.
S'agissant de l'exécution, l'opposition suspend toute
exécution et oblige à restituer tout ce qui a été
retenu à ce titre. C'est le principe posé par
l'article 428 (1). En cas d'exécution d'un
mandat d'arrêt décerné par la juridiction qui a rendu le
jugement par défaut, l'affaire est enrôlée à la
prochaine audience et au plus tard dans les sept (7) jours de l'opposition,
faute de quoi l'opposant est remis en liberté s'il présente une
garantie41(*).
Le greffier intervient de manière plus nette en
matière d'appel.
2) L'appel
Contrairement à l'opposition, l'appel est une voie
de réformation qui transmet à un autre degré de
juridiction le litige tranché par une juridiction inférieure.
L'appel est donc une procédure qui permet au justiciable non satisfait
de la décision rendue dans son affaire par le juge d'instance, de saisir
la Cour d'Appel pour lui soumettre le même litige.
Aux termes de l'article 441 (1),
l'appel doit, à peine d'irrecevabilité, être fait au greffe
de la juridiction qui a rendu la décision querellée.
L'appel peut se faire soit par déclaration soit par
lettre ordinaire ou par lettre recommandée avec accusé de
réception, soit par télégramme avec accusé de
réception ou tout autre moyen laissant trace écrite et ayant date
certaine. Tous ces moyens ont un seul destinataire, le Greffier en Chef du
tribunal dont émane la décision. Lorsque l'appel est formé
par télégramme ou par lettre recommandée, la date d'appel
est celle du cachet de la poste. Lorsqu'il est fait par tout autre moyen
laissant trace écrite et ayant date certaine ou par lettre ordinaire, la
date d'appel est celle de l'envoi.
Les déclarations d'appel sont reçues et
consignées par ordre chronologique dans un registre spécial tenu
aux greffes. Toute personne intéressée peut se faire
délivrer moyennant des frais de greffe correspondant, une
expédition. Dans tous les cas, la déclaration d'appel doit
être consignée par écrit42(*). La loi prescrit
également au greffier qui reçoit déclaration d'appel d'en
dresser sur le champ procès-verbal et de notifier par tout moyen
laissant trace écrite ou par exploit d'huissier. La loi prescrit
également que l'appelant a désormais l'obligation de
procéder dans les quinze jours à compter de cette notification,
un mémoire d'appel contenant ses moyens et conclusions ainsi que toutes
autres pièces pouvant étayer son appel. Le défaut de
production de ce mémoire rend l'appel irrecevable. Le greffier doit
porter la mention de cette notification sur son procès-verbal. Le
délai de production du mémoire court à compter du
lendemain du jour de réception de la notification ou de la lettre du
greffier en chef. La notification ou la lettre du Greffier en Chef contient une
copie du procès-verbal ou de la déclaration d'appel.
L'appelant détenu peut adresser sa lettre d'appel au
greffier en chef sous le couvert du régisseur de la prison où il
est détenu. Le régisseur de la prison qui reçoit une
déclaration d'appel faite sous son couvert doit transcrire cette
déclaration dans un registre spécial tenu au greffe de la prison.
Cette transcription est datée, signée par le régisseur de
la Prison et contresignée par l'appelant. Le régisseur
établit, en triple exemplaires, un récépissé
mentionnant la date de dépôt de la lettre et son objet ; il
remet sur-le-champ un exemplaire à l'appelant, classe le deuxième
au dossier pénitentiaire de l'intéressé et annexe le
troisième à la lettre d'appel qu'il transmet, dans les 48 heures
au Greffier en Chef de la juridiction ayant rendu la décision. La
transmission au Greffier en Chef doit être faite par tout moyen laissant
trace écrite. Dès réception de la déclaration et
des pièces y annexées le Greffier en Chef procède comme
ci-dessus, pour inviter le détenu appelant à produire son
mémoire d'appel et adresse au Procureur de la République ainsi
qu'aux autres parties, copie de son procès-verbal ou de la
déclaration d'appel soit par lettre recommandée avec
accusé de réception ou par tout moyen laissant trace
écrite43(*).
Au terme du délai accordé à l'appelant
pour produire son mémoire d'appel, le Greffier en Chef met en
état le dossier de procédure. Le dossier ainsi mis en état
est sans délai transmis au Greffier en Chef la Cour
d'Appel44(*).
Dès réception du dossier de procédure, le
Greffier en Chef de la Cour d'Appel le transmet au président de ladite
cour qui, après avis du Procureur Général, fixe la date
d'audience45(*).
Après avoir fixé la date d'audience, le
Président de la Cour d'appel communique le dossier au Procureur
Général pour citation des parties et témoins. Mention de
cette formalité doit être faite dans la décision.
B / l'intervention du greffier dans l'exercice des voies
de recours extraordinaires
Il s'agit du pourvoi et de la révision46(*). Mais dans le cadre
de notre étude, nous nous appesantirons simplement sur le pourvoi qui
constitue non seulement la voie de recours extraordinaire par excellence, mais
aussi la plus utilisée.
Le pourvoi se fait par déclaration au greffe de la Cour
d'Appel qui a statué ou directement au greffe de la Cour Suprême.
La déclaration peut être faite, lorsqu'elle est écrite. Le
destinataire est soit le greffier en Chef de la Cour d'Appel ayant
statué ou celui de la Cour Suprême.
Il convient de relever que selon l'ancienne
législation, le pourvoi pouvait être fait au greffe de n'importe
quelle Cour d'Appel ou de tout tribunal de Première ou de Grande
Instance.
La déclaration, la lettre recommandée avec
accusé de réception, le télégramme ou le moyen
laissant trace écrite sont consignés dans un registre
spécial tenu au greffe soit de la Cour d'Appel soit de la Cour
Suprême.
Lorsque le demandeur au pourvoi est détenu, sa
déclaration peut être faite au greffe du Tribunal de
Première Instance au lieu de détention. Dans ce cas, la
déclaration peut également se faire par simple lettre sous
couvert du régisseur de la prison du lieu de détention.
L'instruction du pourvoi commence par les formalités de
mise en état du dossier qui sont dévolues au greffe et
s'achève par la procédure à l'audience.
Le dossier de procédure constitué par le
Greffier- en- chef comprend la déclaration de pourvoi, le
procès-verbal de réception de cette déclaration, les
conclusions et mémoires produits par les parties devant le tribunal
et/ou de la Cour d'appel, toutes les décisions avant dire droit rendues
par le tribunal et/ou la Cour d'appel et une expédition de l'arrêt
de la Cour d'appel et du jugement rendu par le tribunal.
Dès réception du dossier de procédure
ainsi constitué, le Greffier- en- chef de la Cour Suprême
l'enregistre et le communique au président de la dite cour. Après
avoir fait reproduire le dossier en cinq exemplaires, le président de la
cour suprême le transmet à la formation compétente. Le
greffier en chef de la cour suprême adresse au conseil du demandeur
de pourvoi, une copie du procès-verbal ; pareille copie est
adressée au Procureur Général s'il est demandeur au
pourvoi. Le greffier en chef notifie en même temps, par exploit
d'huissier ou par tout moyen laissant trace écrite, au conseil ou au
Procureur Général qu'il dispose d'un délai de trente jours
pour déposer son mémoire ampliatif au greffe de la Cour
Suprême et ce, à peine de déchéance.
Lorsque le demandeur au pourvoi a sollicité
l'assistance judiciaire, le greffier en chef de la cour suprême en
informe immédiatement le Procureur Général de ladite Cour
qui met en état le dossier d'assistance judiciaire qu'il soumet à
la commission siégeant auprès de la Cour suprême. Le
greffier en chef procède aux notifications mentionnées
ci-dessus.
La procédure d'instruction du pourvoi proprement dite
commence par le mémoire ampliatif suivi du rapport pour s'achever par
l'arrêt de la Cour Suprême.
Il doit à peine de déchéance, être
déposé au greffe de cette juridiction dans le délai
imparti, un registre spécial puis signé et daté par le
greffier en chef et contresigné par le déposant. L'inobservation
des délais constitue en outre une faute professionnelle et peut en
même temps donner lieu à des dommages et intérêts
à l'encontre de l'Avocat défaillant47(*).
Le mémoire doit être déposé en
autant d'exemplaires qu'il y a de parties.il faudra ajouter à ces
exemplaires cinq exemplaires de plus à l'attention du
greffier48(*). Celui-ci reçoit les mémoires
des parties et les transmet aux intéressés.
Dès qu'il reçoit le mémoire en
réponse, le Greffier en Chef de la Cour Suprême après
enregistrement comme indiqué ci-dessus, en assure la notification au
demandeur. Celui-ci peut, s'il estime utile, répliquer au mémoire
en réponse dans les quinze jours de sa notification. Le défendeur
au pourvoi qui reçoit notification du mémoire en réplique
peut y dupliquer dans le même délai de quinze
jours49(*).
Après un délai de quinze jours entre la
dernière notification d'un mémoire, le dossier est en état
et le Greffier en Chef le transmet au Président de la formation qui
désigne un rapporteur50(*).
Au regard de ses nombreuses missions en ce
qui concerne les diligences des procédures initiées, nous pouvons
conclure que le greffe est une institution incontournable, se posant même
comme la cheville ouvrière dans le suivi des procédures
pénales.
Conclusion de la première partie
La justice est une institution. Elle est un pouvoir dans
l'Etat. Ce pouvoir est exercé au Cameroun par les Cours et Tribunaux. Le
fonctionnement de ceux-ci implique une administration dense, originale et
complexe qui est assurée par les fonctionnaires des greffes et parquet.
En effet, la mission primaire de ces fonctionnaires était d'assurer
« l'intendance des juridictions et visait à dépouiller
le juge de toutes contraintes administrative »51(*), afin que ce dernier se
consacre davantage à ses fonctions délicates et complexes.
Mais les Codes de procédure judiciaire ont
confié aux greffiers des fonctions judiciaires parallèles
à celles des juges. C'est ainsi que toute demande introductive
d'instance doit être déposée dans les mains d'un greffier.
Celui-ci l'orientera dans les cabinets des juges du siège ou du parquet.
Ils accomplissent d'office toutes les diligences nécessaires à la
mise des dossiers en état d'être jugés. Ils exercent des
fonctions juridictionnelles ; et à ce titre, ils rédigent
les qualités des jugements ou arrêts entrepris et les signent
conjointement avec le juge sous peine de nullité d'ordre public de
ceux-ci. En outre, « ils exercent de manière autonome d'autres
fonctions judiciaires, notamment la réception des voies de recours, la
tenue des registres et la mise en exécution des jugements ou
arrêts »52(*). Cette exécution est corroborée par la
délivrance d'expéditions, la signification ou la notification
des décisions rendues par défaut ou réputées
contradictoires, la délivrance des extraits des jugements ou
d'arrêts pour le recouvrement des amendes et frais de justice.
Mais, cette « autonomie » du greffier se
pose-t-elle en règle absolue ? La question reste d'actualité
surtout quand on sait que le greffier est « sous l'autorité
des magistrats ». Il faudrait alors voir dans une deuxième
articulation de notre travail, comment, bien qu'étant une institution
incontournable, le greffier est limité dans son action en matière
répressive.
DEUXIEME PARTIE :
LE GREFFE, UNE INSTITUTION LIMITEE DANS
SON ACTION EN MATIERE REPRESSIVE
A l'époque de la monarchie en France, le greffier,
secrétaire du roi assistait celui -ci dans la mission de juge qui
était aussi sienne. Cette fonction préfigurait
déjà celle qu'il serait amené à remplir quelques
siècles plus tard, mais surtout définissait la place qu'il serait
amené à avoir : une place secondaire et seconde.
Ce tableau peu reluisant du greffier reflète pourtant
bien la place qu'il occupe en réalité dans la machine judiciaire
en général et pénale en particulier. Pourtant le statut du
fonctionnaire greffier, en tant qu'il est fonctionnaire doit lui assurer
respect et honorabilité de la part de ses pairs mais également
des tiers car ; le fonctionnaire, comme il est très souvent admis,
doit être le reflet de la l'Etat qu'il a le devoir de servir.
Cependant ; l'examen de divers textes53(*) qui régissent
le corps des greffes ne le dépeignent pas de fort belle manière
et à l'analyse on constate que la situation statutaire de ce personnage
est peu enviable. En dépit de sa place de poumon de la justice il subit
au jour le jour son impopularité qui malheureusement va grandissante.
Voila qui relativise le pouvoir du greffier
évoqué en « PREMIÈRE PARTIE » et fait
que de façon pratique ce pouvoir s'apparente quelquefois à un
pouvoir résiduel. Cet état des choses prend tout son relief en
matière pénale ou plutôt dans le système
répressif. Car, bien que le greffier intervienne aussi bien à
l'information judiciaire qu'au parquet et dans la phase de jugement son
champ d'action effectif est révélateur d'une
« autonomie » relative.
Ceci apparaît alors très nettement depuis le Code
de Procédure Pénale, puisque l'analyse de toutes les dispositions
relatives au greffe nous permet de conclure que le greffier est un simple
accompagnateur du juge (chapitre1) ; et c'est là tout
l'intérêt de cette partie, car elle présente aussi les
obstacles à l'efficacité du greffier comme des limites implicites
à l'action du greffier dans le système répressif
(chapitre2).
Chapitre 1
LE GREFFIER DANS LE SYSTEME REPRESSIF, UN SIMPLE
ACCOMPAGNATEUR DU JUGE
L'article 7 de l'ordonnance n°74/4 du
26/08/1972 stipule en des termes clairs et univoques que
« tout acte juridictionnel est accompli avec l'assistance d'un
greffier ».Cet article semble à première vue
relever le caractère indispensable que le greffier a dans toute
procédure judiciaire. Mais à l'analyse, on se rend compte que le
greffier, bien qu'étant indispensable n'en demeure pas moins secondaire
car il n'est là que pour « assister » et n'a donc a
priori aucun pouvoir d'initiative. Voilà où réside le plus
gros aspect du pouvoir résiduel du greffier,car même si le
système répressif lui offre de participer à toutes les
étapes de la procédure, (surtout à l'information
judiciaire) il ne faudrait surtout pas oublier qu'il n'est que l'accompagnateur
du juge et que de ce fait son rôle a une portée relative à
l'instruction(section 1), ce rôle a été
véritablement remis en cause aussi bien à l'instruction que dans
les autres phases du procès car depuis l'avènement du CPP de 2005
l'on témoigne d'un rôle de plus en plus contesté du
greffier audiencier(section 2).
Section 1 DE LA PORTEE RELATIVE DU ROLE DU
GREFFIER A L'INSTRUCTION...
C'est en réalité l'omniprésence du juge
à l'information judiciaire qui est le principal inducteur de
l'effacement du greffier à l'instruction (paragraphe 1). Ce dernier se
mue alors véritablement en acolyte du juge d'instruction
(paragraphe2).
Paragraphe 1 L'OMNIPRESENCE DU JUGE D'INSTRUCTION,
VECTEUR DE L'EFFACEMENT DU GREFFIER DANS LA PHASE
D'INSTRUCTION
Le rôle du greffier a une portée relative à
l'instruction ; tout d'abord du fait que le juge d'instruction a des
attributs énormes à l'instruction (A). Le fait qu'il agisse
pratiquement seul (B) vient ensuite confirmer cet état des choses.
A / Le juge d'instruction, un personnage aux attributs
immenses
Le Code de Procédure Pénale a rétabli le
juge d'instruction et a bien défini son champ d'action. L'analyse des
dispositions concernant ce personnage, permet de se rendre compte qu'il a des
compétences matérielles importantes, lesquelles sont
renforcées par l'intime conviction qui doit l'animer tout au long de
l'information judiciaire. NDJERE Emmanuel fait une analyse des nombreux actes
qui relèvent de la compétence du Juge
d'Instruction54(*).il s'agit en effet des
actes apparaissant comme de simples mesures d'instruction(1), de ceux
conduisant à une contrainte sur les personnes(2), des transports,
constatations matérielles et de l'expertise judiciaire(3).
1) Les actes apparaissant comme de simples mesures
d'instruction
Nous pouvons citer entre autre : les interrogatoires et
les auditions.
Pour ce qui est de l'interrogatoire, on notera que la
réglementation de celui-ci est différente selon qu'il s'agit de
l'interrogatoire de première comparution ou des interrogatoires ou
confrontations ultérieures.
Ø En ce qui concerne l'interrogatoire de
première comparution, le juge d'instruction doit, s'être
assuré de l'identité de la personne poursuivie, lui notifier son
inculpation. C'est-à-dire lui faire connaître les faits qui lui
sont imputés et les dispositions de la loi pénale qui les
répriment. L'inculpation est aux termes du CPP un acte de
compétence exclusive du magistrat instructeur et ne peut donner lieu
à commission rogatoire si ce n'est à un autre magistrat. A la
fin de l'interrogatoire de première comparution, un procès verbal
est dressé. Dans celui-ci, sont consignées toutes les
déclarations de l'inculpé.
Ø Quant aux interrogatoires ultérieurs, ils
doivent toujours se faire en présence du conseil de l'inculpé
s'il en existe. En effet, l'inculpé ne peut être entendu, seul
à moins qu'il renonce expressément, en présence de son
conseil. Afin d'assurer l'exercice de ce droit, l'avocat doit être
informé par tout moyen, laissant trace écrite au moins 48 heures
avant la date et l'heure de la comparution de l'inculpé si le conseil
réside au siège du tribunal et 72 heures au moins s'il
réside hors du siège du tribunal.
L'audition des témoins est organisée par les
articles 180 et suivants du CPP. Notons ici que le juge d'instruction est
libre de choisir les témoins qu'il désire entendre. Toute
personne convoquée pour être entendue comme témoin est
tenue de comparaître et de prêter serment avant de déposer.
Mais aux termes de l'article 187 du CPP, les mineurs de 14 ans sont entendus
sans prestation de serment. Si le témoin convoqué ne
comparaît pas, le juge d'instruction peut décerner contre lui un
mandat d'amener. Mais si le témoin est dans l'impossibilité de
comparaître, le juge d'instruction peut soit se transporter pour
l'entendre, soit délivrer à cette fin commission rogatoire
conformément aux dispositions des articles 191 à 196 CPP.
2) Les actes conduisant à une contrainte sur les
personnes
Le CPP retient la détention provisoire et la
surveillance judiciaire.
Consacrée aux articles 218 et
suivants du CPP, La détention provisoire est « une
mesure exceptionnelle qui ne peut être ordonné qu'en cas de
délit ou de crime » et ceci dans le but de
préserver l'ordre public, la sécurité des personnes et des
biens ou d'assurer la conservation des preuves ainsi que la
représentation en justice.
Au sens de l'art 221 CPP, la
durée de la détention provisoire « est fixée
par le juge d'instruction dans le mandat ». Elle ne peut
excéder six mois et peut être prorogée par ordonnance
motivée au plus pour 12 mois en cas de crime et 6 mois en cas de
délit.
Inscrite aux articles 246 à 250 CPP la surveillance
judicaire est nouvelle et vient rappeler que la liberté est un principe
et la détention l'exception qui n'interviendra que dans des
circonstances particulières.
3) Les transports, les constations matérielles
et l'expertise judiciaire
Leur réglementation s'inspire de la pratique. Le
transport est un procédé de preuve consistant à
vérifier matériellement l'existence d'une infraction et à
retrouver le coupable.
En la matière le juge d'instruction peut se transporter
sur toute l'étendue du ressort territorial de sa juridiction pour
effectuer tous les actes d'informations utiles à la manifestation de la
vérité. Il peut aussi se transporter hors du ressort territorial
de sa juridiction s'il a prévenu le Procureur de la République
compétent.
Le juge d'instruction peut donner commission rogatoire
à un autre juge d'instruction ou même
à un officier de police judiciaire, afin qu'il procède à
tous les actes d'information qui doivent être accomplis sur son
territoire de compétence.
Le juge d'instruction peut procéder à une mesure
d'information judiciaire en pays étranger par commission rogatoire
internationale. Il peut en être ainsi lorsqu'il faut
procéder :
- à l'interrogatoire d'un individu inculpé au
Cameroun ;
- à l'audition d'un témoin ;
- aux perquisitions ou aux saisies.
Il transmet à cet effet la commission rogatoire au
procureur de la République pour acheminement au Ministre chargé
de la justice par voie hiérarchique, accompagné d'un rapport
circonstancié et des documents essentiels pour son exécution. Le
juge d'instruction peut aussi recourir à une expertise judiciaire.
Le recours à une expertise s'impose toutes les fois
qu'il se présente certaines questions dont la solution exige des
connaissances toutes particulières et pour lesquelles les juges
n'auraient pas de compétences scientifiques ou techniques
suffisantes.
Le juge peut soit d'office, soit à la demande de l'une
des parties y compris éventuellement l'assureur de
responsabilité, ordonner une expertise et commettre un ou plusieurs
experts.
Il doit remplir sa mission en liaison directe et constante
avec le Juge d'instruction ou le magistrat commis. Il le tient notamment
informé du développement de ses investigations afin de lui
permettre de prendre, à tout moment les mesures utiles.
A l'analyse du vaste champ de compétence du juge
d'instruction, nous convenons avec Napoléon Bonaparte que le juge
d'instruction est un personnage puissant, au regard de ses larges pouvoirs
d'investigation et de ses nombreux attributs. C'est ce qui fait d'ailleurs
penser qu'il est l'unique protagoniste de l'information judiciaire.
B / Le juge d'Instruction ; un homme
« seul » en matière d'information judiciaire
Une infraction complexe ayant été commise ;
le juge d'instruction a pour mission de rechercher les preuves à charge
et à décharge et d'en déférer les auteurs devant la
juridiction de jugement. Divers moyens sont ainsi mis à
« sa » disposition afin qu' « il »
découvre la vérité55(*).Cette phrase confirme bien la
réalité de nos tribunaux car en effet, le juge d'instruction est
maître de l'information judiciaire et pour cela il est vu de tous comme
le personnage unique de l'instruction et c'est à peine que l'on remarque
le greffier.
Cette situation a impliqué un certain nombre de
conséquences car ; il est tout à fait important de souligner
que dans l'exercice de l'action publique ,et avant l'intervention du juge
d'Instruction, le Procureur de la République fait mener l'enquête
avec des moyens proches de ceux- du Juge d'Instruction. Or, jamais le procureur
et ses substituts ne sont mis en cause. Ce sont pourtant eux qui en quelque
sorte mettent le train sur les rails et « l'on devrait pencher
plus souvent sur la première direction prise pour se demander si ce
n'est pas elle qui parfois conduit à la
catastrophe »56(*) . Toutefois c'est le juge
d'instruction seul qui supporte les conséquences de cette action. Une
autre analyse permet d'avancer que, dans de très nombreux cas, si une
information est ouverte chez un juge d'instruction, c'est parce que
l'enquête initiale n'a pas permis d'aboutir. Il a donc une obligation de
réussir. Cette obligation n'est pas une obligation de moyen, elle est
une obligation de résultat rapide. C'est d'ailleurs cette situation qui
tend de nos jours à être instaurée à tord ou
à raison pour le médecin traitant, qui, selon les croyances
populaires doit impérativement guérir sous peine d'être
poursuivi en justice.
Le Juge d'Instruction se situe donc au même niveau de
responsabilités, car outre le fait qu'il est un personnage
contrôlé57(*), il est la pièce indispensable de
l'instruction. D'ailleurs, l'instruction se conçoit et s'achève
avec lui.
Malheureusement, il est peut-être un peu trop
isolé pour cette tâche non négligeable qu'il a à
accomplir, et le fait qu'il soit isolé peut constituer un frein
à la manifestation rapide de la vérité tant
recherchée. Ceci est d'autant plus palpable que dans le procès
(pénal surtout), le juge d'instruction éprouve des
difficultés à rassembler les preuves ; du fait notamment de
la fragilité des témoignages58(*). Remédier
à cet état des choses n'est cependant pas quelque chose
d'insurmontable car, si le Juge d'Instruction ne peut en aucun cas
transférer ses compétences à son assistant qu'est le
greffier d'instruction, il pourrait quand même l'associer de façon
active à la manifestation de la vérité en partageant avec
lui ses doutes, ses incertitudes, ses intuitions et recueillir aussi de lui
des avis et pourquoi pas des recommandations. Cette opinion peut être
justifiée par le fait que le greffier est le personnage avec qui il
partage le secret de l'instruction, il est son principal collaborateur et son
« homme de main » pourrait-on dire. Il serait alors
souhaitable que nos juges s'ouvrent davantage à ces collaborateurs de
premier ordre avec qui ils sont d'ailleurs forcé de travailler et qui,
mieux que personne maîtrisent tous les rouages de la procédure. Il
est alors regrettable que dans les tribunaux de notre pays le greffier soit
encore perçu comme un simple acolyte des magistrats en
général, et du Juge d'Instruction en particulier.
Paragraphe 2 LE GREFFIER, ACOLYTE DU JUGE
D'INSTRUCTION
Le greffier est tenu statutairement d'assister le juge
d'instruction dans son action. Mais au-delà de cette mission
conjointe qu'il a avec le juge d'instruction à l'information judiciaire,
tout porte à croire qu'il n'est ni plus ni moins que son acolyte. Ainsi,
les divers textes réglementaires qui régissent l'activité
du greffe ou tout simplement qui organisent ce corps ne manquent pas de le
préciser à plus d'un titre.
Si l'on sait déjà que « tout acte
juridictionnel d'un magistrat doit être accompli avec
L'assistance d'un
greffier »59(*) ou même que « les
fonctionnaires des greffes et parquet exercent leurs fonctions sous
l'autorité des magistrats »60(*), il faut
également remarquer que le législateur camerounais n'a pas voulu
qu'il y'ait un quelconque équivoque s'agissant de la répartition
des compétences entre ces deux personnages. Voilà pourquoi la
loi n°2006/015 du 29/12/2006 portant
organisation judiciaire précise encore en son article 25 alinéa 2
(a) que « à l'information judiciaire, le juge
d'instruction est assisté d'un greffier ».
Mais le Code de procédure pénale
réaffirme cet état des choses en des termes identiques quand il
mentionne à nouveau que « le juge d'instruction est
assisté d'un greffier ». C`est ce que dit l'article 153
alinéa 1 du Code de Procédure Pénale. Il est clair que le
juge d'instruction est doté d'un acolyte qui l'accompagne et le suit
dans tous les actes de l'information judiciaire.
Cependant, le CPP va bien au-delà de cet état de
fait puisqu'il attribue au Juge d'Instruction un pouvoir de contrôle sur
la personne du greffier. L'article 165 alinéa
01 dudit code le précise clairement en ces termes :
« La procédure judiciaire est écrite. Les actes
sont dactylographiés par le greffier sous le contrôle effectif du
juge d'instruction ».
C'est dire que le greffier est un simple acolyte du juge
d'instruction, qu'il n'est pas autonome et que les actes qu'il accomplit ont un
caractère quelque peu résiduel. Ce caractère
résiduel se manifeste surtout s'agissant des actes accomplis sur les
choses (A) et aussi sur les actes en rapport avec les personnes (B).
A / S'agissant des actes accomplis sur les choses
1
Dans le cadre de l'information judiciaire, certains autres
articles du CPP61(*) définissent le rôle du greffier
d'instruction qui est un rôle essentiellement d'assistance et même
d'assistance permanente. Le greffier est ainsi tenu de préparer
matériellement tous les actes de l'instruction qui devront servir au
juge d'instruction. De plus, le greffier en tant qu'assistant du juge est tenu
de reproduire tous ces actes pour les besoins ultérieurs de ce
dernier.
Le Code de procédure pénale mentionne
également que la réception et la conservation de certaines
pièces ou de certains objets (scellés ou résidus, rapports
d'expertise,...) sont également l'oeuvre du greffier d'instruction. On
pourra aussi mentionner à la suite de ceci le fait que à
l'information judiciaire, il peut être remis au greffier certaines
pièces de l'inculpé telles que le permis de conduire, les
clés de voiture ou encore d'autres objets personnels appartenant
à ce dernier . Une précision doit cependant être
faite. En effet, EYIKE-VIEUX souligne que les pièces à
conviction et tous autres objets saisis sont « déposés
par les officiers de police judiciaire au parquet, puis gardés au
greffe du tribunal »62(*).
Il est donc clair que le greffier est, dans la phase
d'instruction un vrai acolyte du juge ; surtout en ce qui concerne les
actes accomplis sur les choses telles que l'établissement des actes,
leur reproduction, la conservation des objets utiles à l'instruction,
etc.
Toutefois, ce pouvoir résiduel du greffier
d'instruction ne se vérifie pas uniquement par rapport aux actes
accomplis sur les choses. Le fait que le greffier soit un acolyte du juge
d'instruction se déduit aussi des rapports que le greffier entretient
avec les personnes concernées par l'instruction.
B / S'agissant des actes accomplis vis-à-vis des
personnes
L'analyse des dispositions du Code de Procédure
Pénale relatives aux actes de l'instruction s'accomplissant
vis-à-vis des personnes permet de constater que le greffier qui est
là uniquement pour assister est au service non seulement du juge ;
mais également de toutes les personnes intéressées par la
procédure. Pour illustrer cela on constatera que le greffier
est :
· chargé de délivrer aux personnes
intéressées toutes les copies des actes qui ont servi à
l'instruction.
· Chargé par la loi de transmettre aux instances
désignées (Procureur de la République, Président de
la Chambre de Contrôle de l'Instruction)63(*).
Le greffier est également la personne indiquée
en ce qui concerne l'enregistrement et la rédaction des procès
verbaux contenant les déclarations des personnes qui sont sujettes
à l'instruction. Le greffier a également le devoir de lire aux
parties leurs déclarations avant la signature des procès verbaux
y relatifs. Il a enfin le devoir de les informer de la teneur de tout document
nécessitant que ces parties prennent connaissance. C'est d'ailleurs ce
qui est prévu à l'article185 alinéa1 (b).
Il apparaît clairement que le greffier n'a de
rôle qu'en vertu de l'autorité de la loi, de la
délégation de pouvoir ou du commandement que lui fait le juge
d'instruction. Il n'est pas autonome à l'information judiciaire et
s'apparente d'ailleurs à un acolyte du juge d'Instruction, seul
« maître de l'Instruction »64(*) et détenteur
de très nombreux pouvoirs à l'information judiciaire. Cette
situation du greffier s'est quasiment étendue pendant la phase de
jugement. Car depuis l'arrivée du CPP on assiste à un rôle
de plus en plus contesté du greffier audiencier.
Section 2 ...VERS UN ROLE DE PLUS EN PLUS
CONTESTE DU GREFFIER AUDIENCIER
De façon traditionnelle, le greffier a la charge des
documents de la justice. C'est pour cela d'ailleurs qu'il est
considéré comme le secrétaire de la juridiction. L'on
comprend donc aisément que ce soit lui qui tienne le plumitif dans une
audience ; de quelque nature qu'elle soit. Voila ainsi
présenté de manière schématique le rôle du
greffier audiencier.
La tenue du plumitif à l'audience constitue depuis
longtemps une prérogative du greffier, bien que cette tendance, depuis
quelque temps était dérogatoire en zone anglophone, du moins en
ce qui concernait les audiences pénales. Dans la zone anglophone
c'était le magistrat qui tenait le plumitif d'audience.
Ce système s'est avéré salutaire dans cette zone et a
même connu une gloire qui a retenti jusqu'au Cameroun francophone
où les critiques s'accentuaient déjà en ce qui concernait
l'inefficacité des greffiers à pouvoir tenir des notes
d'audience, et au manque de sérieux dont ils faisaient preuve dans la
prise de celles-ci65(*).
La venue du CPP serait donc venue résoudre ce
problème en redéfinissant le rôle du greffier à
l'audience, et en précisant aux termes de l'article 338(2) et 381, que
désormais c'est au Président qu'il appartient de prendre des
notes d'audience. Etait-ce à tord ou à raison ? En tout cas
la courte expérience que l'on a du CPP nous laisse quand même
sceptique quant à l'aptitude des juges à tenir le plumitif.
Ceci étant, on a depuis assisté à un
rôle de plus contesté du greffier audiencier ; ce qui a le
mérite de relativiser une fois de plus ledit rôle. Pour mieux
comprendre cette affirmation, il sera nécessaire de mener une
étude chronologique qui nous permettra d'envisager la situation du
greffier audiencier avant la réforme de 2005 c'est-à-dire sous le
CIC (paragraphe 1) et également de voir l'amenuisement
considérable des pouvoirs du greffier audiencier depuis 2005 (paragraphe
2).
Paragraphe 1 LA SITUATION DU GREFFIER AUDIENCIER AVANT
LA REFORME DE 2005 : SOUS LE
C.I.C.
Avant la réforme de 2005, le greffier, membre à
part entière de la juridiction jouait un rôle très actif
à l'audience. Nous envisagerons ici la tenue du plumitif d'audience,
laquelle constituait son attribut essentiel (A) mais aussi les autres
tâches du greffier audiencier (B).
A / La tenue du plumitif d'audience
Le plumitif est un registre sur lequel le greffier
(audiencier) qui assiste le juge à l'audience, note les
déclarations des parties, la déposition des témoins, les
incidents d'audience éventuellement, et la décision du juge.
Le greffier audiencier était tenu, quelques instants
avant l'audience, de mettre le plumitif à jour en y portant la date, les
noms et prénoms du Président et des juges encas de
collégialité ou des assesseurs, du magistrat du ministère
public, du greffier audiencier et de l'interprète. A l'appel de chaque
affaire, le greffier mentionnait la comparution ou la non comparution des
parties.
Il résulte de ce qui précède que la
tâche du greffier audiencier n'était pas de tout repos, surtout
qu'il avait l'obligation de prendre note de façon
détaillée, du déroulement des débats, et des
incidents. D'où l'expression désormais
consacrée « prendre des notes à la
manière d'un greffier ».Il était tenu d'en
établir expédition dûment visée par le juge et
versée au dossier.
Ce visa est important, car il permet de corriger, de rectifier
et de compléter ces notes d'audience comme la jurisprudence en
reconnaît le droit au juge et lui en impose le devoir.
C'est pour cette raison que le greffier audiencier doit
absolument être choisi parmi les greffiers ou les agents de l'Etat dont
le niveau de base les prédispose à assumer avec compétence
cette délicate tâche qui consiste à résumer
rapidement et fidèlement les déclarations des parties et la
déposition des témoins, et à décrire
fidèlement les incidents ayant éventuellement
émaillé les débats.
Ce n'est qu à ce prix que le plumitif peut
effectivement jouer le rôle qui est le sien, à savoir :
pérenniser les débats à l'audience et authentifier la
décision du juge lue en audience publique. De nombreuses autres
tâches étaient également du ressort du greffier audiencier
sous l'ère du CIC.
B / Les autres tâches du greffier audiencier
Sous le CIC, le greffier assiste le juge à l'audience.
Il n'est autorisé à prendre la parole que lorsqu'il est requis
par le juge. Alors, il donne lecture d'une loi, d'un décret ou de tout
autre document utile aux débats. Il tient le plumitif dans lequel il
note la comparution des parties et des témoins, ainsi que leurs
déclarations.
Il doit également noter les incidents de toute nature
intervenus en cours d'audience. Les audiences des cours et des tribunaux sont
publiques sauf lorsque cette publicité est susceptible de troubler
l'ordre public ou de porter atteinte aux bonnes moeurs. Le tribunal peut le cas
échéant, par jugement avant dire droit, ordonner que l'affaire
sera jugée soit à huis clos, soit en Chambre de Conseil. Le
greffier est tenu d'en faire mention dans son plumitif.
La police d'audience est assurée par le juge qui
préside l'audience. Celui-ci peut ordonner contre les perturbateurs,
toutes les mesures propres à rétablir l'ordre et la
tranquillité, car les parties et les simples spectateurs sont tenus au
respect dû à la justice. En conséquence, si un ou plusieurs
individus troublent l'audience de quelque manière que ce soit,
le juge leur enjoindra de se retirer. Ceux qui
n'obéissent pas peuvent être saisis et déposés
à l'instant dans la maison d'arrêt la plus proche. Cette
décision sera mentionnée au plumitif et ne sera en aucun cas
susceptible d'appel.
Si le perturbateur est un avocat, le Président lui
fait des remontrances ou en cas de persistance suspend l'audience pour
régler l'incident dans son cabinet. Le délit d'audience expose
l'avocat à des sanctions disciplinaires.
Si un délit ou une contravention est commise dans la
salle pendant l'audience, le juge qui préside l'audience dressera
procès-verbal des faits, interrogera les suspects, entendra les
témoins et appliquera sans désemparer, les peines prévues
dans le Code pénal.
Mais si l'infraction commise à l'audience est un
crime, le Président, après avoir fait arrêter le suspect,
procède à son interrogatoire, à l'audition des
témoins et à la constatation des faits. Le Greffier audiencier
dresse procès-verbal du tout, dûment signé par le juge, les
parties et témoins et lui-même.
Ensuite, le dossier de la procédure est
déposé au Parquet d'instance, pour l'ouverture de l'information
judiciaire.
Le jugement doit impérativement être rendu en
audience publique, sous peine de cassation. Le greffier est tenu de relever
l'intégralité du dispositif du jugement au moment même
où il est prononcé.
Une fois la décision prononcée et
rédigée par le juge en ses motifs le dispositif, le travail du
greffier s'intensifie et devient autonome.
Il est bon de remarquer, au vu de ce qui
précède, que sous le CIC le greffier audiencier possédait
des pouvoirs qui allaient largement au-delà de la simple tenue du
plumitif à l'audience. Mais depuis l'arrivée du Code de
Procédure Pénale on a assisté à un amenuisement
considérable de ses pouvoirs.
Paragraphe 2 UN AMENUISEMENT CONSIDERABLE DES
POUVOIRS
DU GREFFIER AUDIENCIER DEPUIS LE CODE
DE 2005
Depuis l'avènement du Code de Procédure
Pénale ; on a constaté que le juge audiencier a un
rôle très étendu(A) qui contraste assez nettement avec la
contribution relative du greffier audiencier(B).
A / Le rôle étendu du juge à
l'audience pénale
Le magistrat du siège, juge audiencier,
possède un rôle très étendu à l'audience
pénale. Son rôle est, à quelques exceptions prêt le
même à toutes les phases de la procédure, que l'on se
situe en première instance, en grande instance, en appel ou même
dans le cadre d'un pourvoi en cassation. La direction des débats et de
la police d'audience (1) constitue de façon classique l'apanage du juge
audiencier. Mais la grande innovation vient du fait qu'à l'heure
actuelle, la tenue du plumitif d'audience est assurée par le juge
(2).
1) La direction des débats et la police
d'audience
La police d'audience ainsi que le
déroulement des débats sont prévus par le
livre III du CPP, en son 1er titre, au chapitre
4. Il y est surtout mentionné que
« dès l'ouverture des débats, le président,
(...) fait notifier au prévenu les faits qui lui sont reprochés
et lui demande s'il plaide coupable ou non coupable ».
De toutes les façons, la direction des débats
est assurée par le président du tribunal qui pourra entendre les
dépositions des parties, interroger les témoins, recueillir
toutes les informations nécessaires au bon déroulement du
procès. Il veille scrupuleusement à l'application des
formalités prévues de l'article 338 du CPP jusqu'à
l'article 384, lesquelles présentent de façon
détaillée le déroulement des débats dans une
audience pénale.
L'article 303 reprécise par
ailleurs que : « le président assure la police
d'audience et la direction des
débats... »66(*). A ce titre, il a le droit de prendre toutes
mesures propres à assurer le bon déroulement de l'audience. Il
peut aussi expulser de la salle quiconque se met à troubler la
sécurité des débats, et le cas échéant, le
faire arrêter et conduire en prison pour 24 heures (article305
CPP)67(*). Dans sa
circulaire du n°2051/DAJS du 18 novembre 1976,
le garde des sceaux de cette époque déplorait déjà
la mauvaise tenue des audiences et a demandé aux chefs des juridictions
de donner par écrit, toutes les instructions nécessaires aux
magistrats placés sous leur autorité ainsi qu'aux auxiliaires de
justice de leur ressort pour que les audiences se déroulent dans
l'ordre, le calme et la solennité qu'impose l'exercice de la fonction
judiciaire.
Il faut aussi relever que les avocats pour faciliter cette
police d'audience, doivent cesser de poser directement les questions aux
parties, surtout quand l'on sait qu'il est de règle de demander au
préalable l'autorisation de le faire. Les juges devraient veiller au
strict respect de cette règle pour maintenir l'équilibre entre
les parties, surtout lorsque l'une d'elles n'est pas assistée par un
défenseur. Il doit aussi être interdit aux avocats de consulter
les dossiers de procédures sur la table de la juridiction lors des
audiences.
La même circulaire prévoit que les audiences
doivent commencer à l'heure et se dérouler suivant le
cérémonial prévu par les textes en vigueur. EYIKE - Vieux
pour sa part note que : « toutes les dispositions
utiles sont prises afin que les dossiers de procédures et les
rôles d'audiences soient remis aux magistrats au moins une semaine avant
la date prévue ».
L'article 306 du CPP quant à
lui interdit dans les salles d'audience et pendant le cours des
procédures judiciaires, les enregistrements sonores et les prises par
caméra cinématographique, photographique ou de
télévision.
Au vu de ce qui précède, un constat se
dégage : les pouvoirs du juge audiencier sont importants en ce qui
concerne la direction des débats et surtout la police d'audience.
Toutefois, la tenue du plumitif d'audience permet de mieux mesurer l'ampleur
des prérogatives de ce dernier.
2) La tenue du plumitif d'audience par le juge (art 381
CPP)
Traditionnellement, l'on sait que c'est le greffier qui,
ayant le statut plus ou moins officiel de secrétaire, doit tenir les
notes d'audiences. Cependant, le Criminal Procedure Ordinance extrait
des Laws of Nigeria prévoyait déjà un
régime dérogatoire. C'est ce régime qui a
été étendu depuis juillet 2005 au Cameroun francophone. Il
est donc d'usage aujourd'hui que le juge, tienne du plumitif d'audience (du
moins en matière pénale).
La tenue du plumitif d'audience par le juge est simplement
venu consacrer et uniformiser les deux procédures (anglophone et
francophone) et accroître de manière considérable, le
travail déjà non négligeable que le juge, magistrat du
siège abat à l'audience.
Ainsi, les notes d'audience que le juge prend doivent
refléter de manière fidèle les débats car elles
serviront non seulement à motiver la sentence, plus encore, elles
permettront de rédiger les minutes des jugements, éléments
essentiels de tout procès. Les notes d'audience sont pour cela
« présumées conformes aux
débats »68(*).
Mais, il faut surtout situer le fondement de cette nouvelle
obligation qu'a le juge de tenir des notes d'audience dans l'article 381
alinéa 1er qui stipule que « les notes
d'audience sont prises par le président dans un registre appelé
plumitif ». Ces mêmes notes doivent nécessairement
être signées « par le président et par tous
les magistrats en cas de
collégialité »69(*).
Il apparaît donc que, le juge n'a plus uniquement un
rôle « passif » à l'audience, limité
à la direction des débats que tiennent les parties. Il y
participe également en les écoutant, en prenant les notes
d'audience et en s'assurant que celles-ci sont conformes au déroulement
des débats, car elles pourront le cas échéant servir si
jamais des voies de recours sont intentées.
Il est donc loisible de constater que ces dispositions de
l'article 381 ont rencontré une franche adhésion de la part de
nos juges, qui, presque unanimement la respectent en tenant de manière
assidue le plumitif d'audience. Cependant, cette situation a eu un impact
défavorable sur la célérité procès en
ralentissant manifestement les audiences, mais surtout en modifiant de
manière substantielle le rôle du greffier qui depuis lors est
presque devenu « inactif » à l'audience.
En effet, l'amenuisement considérable des pouvoirs du
greffier audiencier se constate aussi au travers de sa contribution relative
à l'audience pénale.
B / La contribution relative du greffier audiencier
Dans cette phase du procès, le
greffier lorsqu'il est à l'audience prend l'appellation de
« greffier audiencier ».
Il y a lieu de relever d'emblée que s'agissant de la
tenue du plumitif, la pratique en vigueur dans la « Criminal
Procedure Ordinance » a été
généralisée, mettant fin à ce que
préconisait l'ordonnance du 14 février 1938 portant Code
d'Instruction Criminelle.
Avec la promulgation de la loi n°2005/007 du
27 juillet 2005 portant code de procédure pénale,
le greffier est déchargé de cette tâche désormais
dévolue au président qui, aux termes des articles 338 (2) et 381
prend lui-même les notes d'audience.
Le rôle du greffier est de ce fait
dévalué puisqu'il ne constitue plus que la courroie de
transmission entre la juridiction, les parties et les témoins.
Cependant, le code, en certaines de ses dispositions a quant même
essayé de ménager au greffier, membre à part
entière de la juridiction un certain nombre de charges. Il est notamment
chargé de :
Ø Donner lecture du rôle d'audience par l'appel
des affaires qui y sont inscrites (article 338 (1)) ;
Ø Prendre note des questions et observations à
l'adresse d'un prévenu, témoin, de toute autre partie qui serait
sourd-muet, les remettre à l'intéressé pour une
réponse écrite et donner lecture du tout (article358) ;
Ø Donner lecture des actes de prévention au
prévenu pour susciter l'option prise par celui-ci de plaider coupable ou
non coupable (article 359) ;
Ø Recevoir le serment prêté par un
témoin ou toute autre partie appelée au procès ;
Ø Recevoir tous les documents produits et
procéder à leur échange ou à leur remise à
quiconque.
Mais, tout ce qui a été évoqué
plus haut concernant le rôle du greffier à l'audience pourrait
très bien être assimilé à une simple
« mascarade » orchestrée par le législateur
camerounais. Car, le greffier audiencier est en réalité devenu un
personnage passif du procès, sinon inexistant. Il n y'a qu'à
observer le déroulement des audiences pénales dans nos cours et
tribunaux pour se rendre compte de cette réalité. Ce constat est
d'autant plus patent que les justiciables préfèrent parfois
remettre leurs documents directement au juge. Le rôle du greffier est
ainsi très limité et il conviendrait même, pourquoi pas, de
le décharger complètement de l'obligation qu'il a de participer
aux audiences pour lui laisser le temps de se consacrer pleinement aux
multiples autres tâches qui ressortissent de ses compétences.
Une autre solution, la plus convenable à notre avis,
serait de le réhabiliter dans la tâche qu'il a de tenir la plume
à l'audience afin de permettre une certaine
célérité des procès.
Presque tous les textes relatifs à l'organisation
judiciaire au Cameroun s'accordent à dire que le greffier doit
participer à toutes les phases de la procédure en accomplissant
avec le juge (magistrat du siège ou du parquet) tous les actes
juridictionnels. Cependant, la pratique révèle un tout autre
constat car, le greffier est un personnage quelque peu ignoré et son
champ d'action est grandement limité. Il n'est donc en quelque sorte
que l'accompagnateur du juge. Puisque son rôle a :
- tout d'abord une portée relative à
l'instruction ; du fait des nombreux attributs du juge d'instruction, de
son large domaine de responsabilité et aussi du fait que, le greffier,
au vu de la relativité de ses compétences en instruction est
assimilable à son acolyte.
- Ensuite parce que avec le CPP, la situation du greffier
audiencier laisse transparaître aujourd'hui un rôle de plus en plus
contesté de ce dernier au détriment du juge, magistrat du
siège.
Cependant, il faudrait souligner à la suite
d'EYIKE-VIEUX que : « pour être
régulièrement composée, l'audience doit comprendre le juge
qui la préside, le représentant du ministère public, (...)
le greffier »70(*). Toutefois, les limites à l'action du greffe
ne se limitent pas simplement au fait que le greffier est un accompagnateur du
juge ; puisque les obstacles à l'efficacité du greffe
constituent eux aussi des limites implicites mais non négligeables au
pouvoir du greffier dans la machine répressive.
CHAPITRE 2
LES OBSTACLES A L'EFFICACITE DU GREFFE : DES
LIMITES IMPLICITES A L'ACTION DU GREFFIER DANS
LE SYSTEME REPRESSIF
Les exigences de célérité et
d'efficacité de la justice qui sont aujourd'hui des formules connues de
tous, tendent de plus en plus à se muer en de voeux pieux. Pourtant,
tout dépend en grande partie des hommes qui font et défont la
justice à savoir : magistrats et greffiers ; des moyens
physiques mis à leur disposition et du degré de
permissivité que leur accorde le système. Ce système pose
lui-même des obstacles à l'efficacité des magistrats, mais
surtout des greffiers qui eux, ont moins d'autonomie que les premiers. Les
pouvoirs du greffe sont alors limités non pas du simple fait que leur
champ d'action est réduit, mais aussi du fait qu'il existe des entraves
réelles ,orchestrées ou non, à leur efficacité
dans le système judiciaire en général, et pénal en
particulier. Les solutions sont pourtant nombreuses, et au delà d'une
analyse simpliste, elle dénote en fait de la place et de
l'intérêt que l'on accorde aux greffiers dans la justice au
Cameroun. Elles remettent aussi en cause les textes qui prévoient et
organisent ce corps. Ainsi, le pouvoir limité du greffe s'entrevoit
aussi (outre le fait qu'il n'est qu'un accompagnateur du juge) à
travers les obstacles liés à sa situation statutaire peu
reluisante (Section 1) et aussi à travers les obstacles qui sont
directement liés à sa fonction dans la machine répressive
(Section 2).
Section 1 LES OBSTACLES LIES À LA SITUATION
STATUTAIRE DU GREFFIER
Nous envisagerons principalement le problème de la
subordination des greffiers aux magistrats (paragraphe1) ce qui nous permettra
d'aborder les aspects de cette subordination qui limite le pouvoir des
greffiers dans la machine répressive, mais également nous ferons
état du fait qu'un renouveau statutaire du corps des greffiers est
aujourd'hui impératif (paragraphe 2).
Paragraphe 1 LE PROBLEME DE LA SUBORDINATION DU GREFFE
AUX MAGISTRATS
Le problème de la subordination du greffe aux
magistrats est un problème plus que crucial dans le contentieux
répressif. Car, du point de vue du profane, seul le magistrat existe,
les autres n'étant quasiment là que pour animer la galerie. Cette
idée est entretenue par la persistance du concept de
« personnel non magistrat » dans le paysage judiciaire (A)
mais surtout par le contrôle permanent de l'action des greffiers par les
magistrats (B).
A / La persistance du concept de « personnel non
magistrat »71(*)
Consacré par les textes législatifs et
réglementaires, auxquels il faut ajouter le vécu quotidien dans
les juridictions et même à la chancellerie, cette expression
traduit l'embarras et la difficulté qu'ont les pouvoirs publics (ou du
moins le législateur) de cataloguer au plan organique l'ensemble du
personnel qui assiste les magistrats. Pourtant l'article 7 nouveau de
l'ordonnance n° 72/4 du 26 août 1972 est
clair à suffisance : « tout acte juridictionnel d'un
magistrat est accompli avec l'assistance d'un greffier ». La
désignation de ce personnage dans l'accomplissement des actes
juridictionnels devrait alors être révélatrice de sa
singularité et de sa distinction au sein de la machine judiciaire.
Malheureusement, de nombreux textes relatifs au greffe continuent de nos jours
à faire prévaloir cette expression dans leurs dispositions.
Il s'agit en réalité d'un bric-à-brac
(voulu ou non), qui conduit à la confusion et qui est unique en son
genre. Car à l'évidence, cette tendance confusionniste n'existe
nulle part ailleurs dans l'administration publique camerounaise. Nous pouvons
énumérer à titre d'illustration les corps des enseignants,
des médecins, des pompiers des infirmiers, ... chacun de ces corps
s'identifie non pas par rapport à un autre, fut-il voisin ou
aîné, mais par rapport à lui-même c'est-à-dire
à un ensemble de règles de droit qui en déterminent les
modalités d'accès, le profil de carrière, la
déontologie interne.
De ce point de vue, il sera rare de rencontrer les concepts du
genre le « personnel non médecin » du
Ministère de la santé publique par exemple. Il est à
contrario d'usage d'employer des formules telles que le personnel d'appui, le
personnel en détachement, pour désigner par exemple l'ensemble
des agents ou des fonctionnaires exerçant dans cette institution mais ne
relevant pas de celle-ci parce que appartenant à un autre corps ou
à une autre administration.
Aussi, peut-on aisément comprendre à partir de
l'expression « non magistrat » l'appellation
générique de « maître »
conférée par le grand public à tous ceux qui
fréquentent le palais de justice, excepté les magistrats et qui
très souvent, abusent des justiciables et autres usagers sous le visage
apparent de collaborateur du magistrat. Dès lors le greffier, seul
véritable collaborateur proche du magistrat, est
soupçonné.
Il est donc dommage que jusqu'à nos jours l'opinion
publique ne puisse pas clairement scinder dans son esprit les deux corps que
sont le greffe et la magistrature. Ce phénomène a même
tendance à se généraliser à l'intérieur du
corps. Certains greffiers considèrent malheureusement les magistrats
comme leurs maîtres et au pire, ils sont traités comme des valets
que l'on peut piloter à sa guise. Il est vrai que le juge, magistrat du
siège ou du parquet, est le chef de la juridiction. Mais le greffier ne
doit pas être assimilé à un subalterne ; la
subordination s'effectuant par ailleurs entre agents du même corps et non
entre agents de corps différents. De plus le greffier est lui aussi un
fonctionnaire de haut rang ; si l'on considère qu'il est
également sorti de l'ENAM.
NDJALLA DEGAULLE 72(*) estime qu'au moment où
l'humanité se construit désormais sur la base des cercles
identitaires, la justice camerounaise gagnerait elle aussi à bannir de
telles expressions pour s'arrimer à l'évolution du monde,
même si celles-ci trouvent un justificatif historique lié à
l'insuffisance du personnel. Il ne faut surtout pas perdre de vue que ce
concept de personnel non magistrat et toutes les implications que
celui-ci suggère ne font que relativiser le pouvoir du greffier. Puisque
le justiciable (quand il le peut), préfère s'adresser directement
au magistrat qui semble posséder les pleins pouvoirs dans sa
juridiction.
Au delà de cet aspect conceptuel, la subordination du
greffe à la magistrature est aussi marquée par le contrôle
effectué par les magistrats sur les greffiers et qui constitue
malheureusement le talon d'Achille de l'action des greffiers en matière
répressive.
B / Le contrôle de l'action des greffiers par les
magistrats
On ne le dira jamais assez, le greffier est sous
l'autorité du magistrat. Mais ce lien de subordination constitue une
limite à son pouvoir surtout en matière pénale où
le magistrat contrôle l'action du greffier. Ce contrôle s'effectue
ainsi sur les finances perçues par le greffe notamment en ce qui
concerne la gestion des consignations (1) et aussi dans la rédaction des
actes de justice (2).
1) Dans la gestion des consignations
Il est bien connu -du moins des personnes au faîte de
l'actualité judiciaire- que la gestion des consignations n'a pas
toujours été l'affaire des greffiers. C'est à la suite des
indélicatesses commises par certains huissiers de justice dans la
gestion des consignations des parties civiles, que le garde des sceaux de
l'époque avait réagi de manière très
énergique au travers de la circulaire n° 3004/DCSJ du
22 novembre 1976 dans laquelle il
demandait aux Procureurs Généraux d'interdire aux huissiers de
justice « de percevoir toute somme destinée à la
consignation ou à l'avance des frais de justice, et aux greffiers de
recevoir les consignations de toute sorte, versées par les huissiers
à la suite d'exploits diligentés par
eux-mêmes »73(*).
Cependant, loin de conférer de manière logique
aux greffiers un pouvoir de gestion absolu sur ces frais, il est plutôt
demandé aux Procureurs Généraux de réglementer
cela, en interdisant tout d'abord aux huissiers de percevoir ces sommes ;
mais la pratique74(*) a révélée que le
contrôle de gestion de ces frais est aussi exercé sur la personne
du greffier. Ce fait est quand même paradoxal car il faut souligner que
le greffier en chef par exemple est « gestionnaire en
chef » des finances de la juridiction et que de ce fait, les
magistrats quels qu'ils soient, devraient se contenter de rechercher uniquement
la vérité dans les causes qui leurs sont soumises.
La réalité voudrait toutefois que le
contrôle de la gestion des consignations se fasse à un double
niveau :
- d'abord au niveau du Président du Tribunal qui est
statutairement le chef de la juridiction,
- ensuite au niveau du Procureur de la République,
agissant en tant que représentant du Ministère de la
Justice. Il peut ainsi contrôler la comptabilité du
Greffier en chef en ce qui concerne la gestion des affaires courantes et donc
la gestion des consignations versées chez lui.
Ce contrôle est peut-être justifié par le
fait que c'est le juge qui, avant d'ouvrir l'information judiciaire, fixe le
montant de la consignation que le plaignant paye chez le greffier en chef
contre reçu ; ou encore parce que tous les frais -ou presque-,
engagés par la procédure pour l'instruction d'une affaire, sont
ordonnées par un juge.
Ce contrôle est sans doute important pour un
assainissement dans la gestion des finances de l'administration de la justice
au Cameroun. Mais il a aussi son pendant qui est la limitation de l'autonomie
de gestion qu'un personnage tel que le Greffier en Chef, fonctionnaire de haut
rang, devrait avoir. Mais à côté de ce contrôle sur
les finances, il existe aussi un contrôle sur les actes établis
par le greffier.
2) le contrôle dans la rédaction des actes
de justice
EYIKE Vieux fait remarquer dans son ouvrage Code
d'instruction criminelle et pratique judiciaire
camerounaise75(*) que les greffiers sont chargés
« sous la surveillance du juge », de la rédaction
des qualités, qui comprennent l'acte introductif d'instance et le
dispositif. C'est ce même contrôle que le juge d'instruction
effectue sur la personne du greffier en ce qui concerne tous les actes
d'instruction76(*).
Il faut quand même reconnaître que ces mentions
ont quelque chose de choquant dans leur contenu. Car, on se demande si on ne
remet pas tout simplement en cause les aptitudes du greffier à prendre
des notes, lui qui est un administrateur à part entière. Ou
devrait-on croire que c'est pour contraindre le greffier à faire usage
de son intelligence en menant une analyse complète et sérieuse de
la situation qui a été soumise devant le Tribunal.
L'on pencherait plus à croire que les capacités
intellectuelles du greffier sont remises en cause. D'ailleurs, la chancellerie
avait dans deux (02) circulaires77(*), dénoncé le style immature et
négligé des décisions judiciaires. Elle y avait
condamné l'emploi excessif des expressions telles que «
Tribunal correctionnel », « Chambre correctionnelle du
TPI de... », « Chambre correctionnelle ou autre de la Cour
d'Appel de ... », « en présence du Ministère
Public » au lieu de « en présence de
Madame, Mademoiselle ou Monsieur X, occupant le banc du Ministère
Public ».
Ainsi, il est clair que ces remarques s'adressent aux
greffiers78(*) et non aux magistrats. Et quand bien
même ces remarques s'adresseraient à ces deux corps sans
exception, il faudrait quand même noter qu'il n'existe pas encore une
instance chargée de veiller spécialement à la bonne
rédaction des factums par le juge79(*).
Nous conviendrons en fin de compte qu'un organe
contrôlé ne peut que voir son pouvoir diminué, du moins en
termes d'autonomie dudit pouvoir. Le greffier est ainsi statutairement
limité dans son action. Toutefois, il existe des possibles voies de
contournement de ces obstacles, lesquelles traduisent implicitement les
impératifs d'un renouveau statutaire du corps des greffiers.
Paragraphe 2 LES IMPERATIFS D'UN RENOUVEAU STATUTAIRE DES
GREFFIERS
Le statut particulier du corps des greffes de 1975 avait pour
but de différencier et surtout de spécifier les attributs du
fonctionnaire greffier par rapport aux autres fonctionnaires. Ce statut lui
reconnaît comme à bien d'autres fonctionnaires des garanties de
carrière. Malheureusement, il existe peut-être un manque de
volonté politique puisque à l'heure actuelle, seuls les
fonctionnaires de catégorie B sont formés à la section
greffe de l'ENAM.
Cependant, le greffier a des impératifs de performance
(efficacité et efficience) au sein de la justice ; d'où la
nécessité de bien le former et d'en faire un administrateur
accompli. Seulement, le fait que le greffier soit statutairement
subordonné aux magistrats est sans doute une conséquence de cet
état de choses, et, les nombreux problèmes de subordination du
greffe évoqués plus haut doivent trouver une solution pour la
bonne marche de la machine répressive. Un renouveau statutaire est donc
nécessaire ; il passera d'abord par une refonte du statut
particulier du corps des greffiers (A) et devra s'accompagner sur le plan
réglementaire par l'instauration des règles prévoyant une
franche collaboration entre greffiers et magistrats (B).
A / La refonte du statut particulier de 1975
L'adaptation des textes aux impératifs de la
modernité doit être le souci de toute administration. Ainsi, pour
permettre que le greffier exerce ses tâches dans des conditions
optimales, il faudra nécessairement revoir sa condition statutaire et
refondre véritablement le statut particulier de 1975 pour lui permettre
d'être encore plus efficace dans la machine répressive. Ceci
passera forcément par quelques réformes :
v la détermination des compétences des greffiers
en fonction des grades : l'on ne va plus assister à des
frustrations qui proviennent du fait que dans les juridictions, les hauts
gradés du greffe à l'instar des greffiers principaux, se
retrouvent sous l'autorité des commis de greffe. Avec le nouveau statut,
on pourra assister à la hiérarchisation effective du corps des
greffes. Ce n'est qu'à cette condition que le respect va s'instaurer
dans le corps des greffes, ainsi que la discipline, toute chose susceptible de
faciliter un meilleur service public de la justice.
v Par ailleurs, dans l'attente du nouveau statut, le
Ministère de la Justice doit tenir compte au moment des nominations, du
grade des uns et des autres afin d'instaurer dans le corps un ordre et une
sérénité semblable à ce qui existe dans le corps de
la magistrature. Ce n'est qu'en procédant ainsi que l'on pourra assister
à une atmosphère de respect mutuel, de
sérénité, à une bonne organisation et à une
meilleure planification du travail.
v On pourrait aussi mentionner à nouveau l'absence du
deuxième grade du cadre des administrateurs de greffe (A) ce qui nous
permet une fois de plus de signifier l'acuité avec laquelle l'ouverture
du cycle A à l'ENAM s'impose80(*).
v On pourrait enfin citer le silence du texte du 18
décembre 1975 quant aux promotions internes, de manière à
récompenser les éléments les plus méritants et
à sanctionner les plus véreux.
v La suppression dans tous les textes des expressions du genre
« personnel non magistrat » qui ont simplement pour
conséquence de fragiliser un corps déjà bien
marginalisé. Ceci sonnera sans doute la fin de la confusion actuelle et
apportera de toute évidence un élan et un esprit nouveau dans la
famille judiciaire. Enfin, cette clarification qui au demeurant doit être
consacré dans un statut spécial permettra aussi au justiciable de
mieux cerner ce personnage qu'il côtoie sans vraiment connaître.
B / Une nécessaire collaboration entre les
greffiers et les magistrats
Les magistrats et les greffiers sont les principaux acteurs du
service public de la justice. Ce service ne peut bien fonctionner que quand il
existe une franche collaboration entre ses acteurs. Il serait donc souhaitable,
eu égard aux écarts de comportement constatés, que la
chancellerie organise régulièrement des conférences
élargies à ces principaux acteurs afin de les instruire au sujet
du type de collaboration qui doit exister entre eux.
Des conférences, comme celles organisées en
200681(*)
devraient sans doute résoudre ce problème. Elles permettraient
aux magistrats et aux greffiers de savoir qu'ils sont des collaborateurs
indissociables au sens horizontal ; l'un ne pouvant rien faire sans
l'autre.
Le législateur l'a voulu en prévoyant
explicitement dans l'ordonnance n°72/4 du 26 août
1972 portant organisation judiciaire que « tout
acte juridictionnel est accompli avec l'assistance d'un
greffier ». Il ne revient donc ni aux magistrats, ni aux
greffiers de défier ces dispositions, la loi s'imposant à
tous.
Bien plus, dans la composition des cours et tribunaux, le
greffier en fait partie. Il s'agit là des règles d'organisation
judiciaire préétablis qui sont d'ordre public et s'imposent comme
telles. Elles doivent être simplement respectées à peine de
nullité de l'acte subséquent.
Une nécessité s'impose donc aux magistrats qui
s'opposent par exemple à l'apposition de la signature par le greffier
sur les actes juridictionnels, de respecter ces règles
préétablies, la loi étant au dessus de tous. C'est
d'ailleurs ce que MOUNCHEROU NJOYA82(*) redit en ces termes :
« quand la loi a voulu, elle a dit ; quand la loi n'a pas
voulu, elle s'est tue ; et quand elle n'a pas distingué, nous ne
pouvons pas distinguer ».
D'ailleurs une jurisprudence assez récente conforte
cette position : Cour Suprême du Cameroun, arrêt
n°71/P du 03 février 2000 : Affaire TCHOKOCAM
Jean Marie c/ Ministère Public et KAMENI Moïse, TIENTCHIEU
Maurice ; et C.S. arrêt n° 75/P du 03
février 2000 : Affaire DAIGNON Laurentine c/
Ministère Public et SANGUE MISSIE et autres.
Dans ces deux décisions, la haute juridiction a
estimé que les ordonnances du magistrat instructeur ayant indiqué
que ces actes ont été accomplis avec l'assistance du greffier
devraient également être signés par le greffe et ce
à peine de nullité d'ordre public.
Il devient alors important pour le corps de la magistrature
tout entier de faire taire certains ego et des particularismes. Les
différents acteurs de la justice devraient savoir que ce n'est qu'une
collaboration empreinte de respect réciproque et de
sérénité entre eux qui pourra hisser le flambeau d'une
justice en proie à une impopularité de plus en plus croissante.
Ces obstacles d'ordre statutaire ne sont pas les seuls
à relever puisque, à côté de ceux-ci, on note des
obstacles directement en rapport avec leurs fonctions.
Section 2 LES OBSTACLES FONCTIONNELS A L'EFFICACITE
DU GREFFIER
Les obstacles fonctionnels à l'efficacité du
greffier sont ceux qui sont directement en rapport avec l'exercice de la
fonction. Dans le cas d'espèce, il s'agit de voir toutes les entraves
qui s'opposent à l'efficacité du greffier dans le système
pénal et qui, d'une manière ou d'une autre, peuvent constituer
des limites au pouvoir du greffier, à son bon déploiement dans la
justice.
Ainsi, dans leur action en matière répressive,
les greffiers sont spécialement limités du fait que les hommes
qui officient dans le service (en majorité les commis de greffe et les
greffiers) connaissent des difficultés énormes. Ces
dernières se matérialisent surtout par les insuffisances
techniques et structurelles rencontrées (paragraphe1) ainsi que par les
problèmes spécifiques liés au personnel et aux lenteurs
dans la rédaction des décisions (paragraphe 2).
Paragraphe 1 LES OBSTACLES D'ORDRE TECHNIQUE ET
STRUCTUREL
Nous verrons tour à tour l'encombrement des rôles
d'audience (A) ainsi que l'inadaptation du matériel (B) aux exigences
actuelles. Ces deux éléments constituent les principaux obstacles
techniques à l'action du greffier dans le système
répressif.
A / L'encombrement des rôles d'audience
Il n'y a qu'à faire un tour dans nos cours et tribunaux
pour se rendre compte de cette évidence qui malheureusement alourdi le
travail de la justice et constitue un obstacle patent à l'action du
greffe dans le système.
En outre, on a assisté à un encombrement massif
des rôles d'audience des tribunaux statuant en matière de
citations directe servies par les particuliers - à Douala et à
Yaoundé notamment - à cause des multiples renvois pour
identification des prévenus ou même encore pour
vérification de l'identité de ceux-ci ou pour faciliter
l'enregistrement de l'original de la citation directe. Les huissiers de
justice, saisis à la requête des victimes, avaient pris l'habitude
d'envoyer les copies des citations directes au parquet, pendant que les
originaux se trouvaient encore au service de l'enregistrement. Les affaires
étaient alors enrôlées à l'aide de ces copies qui,
généralement, ne contenaient pas l'identification complète
des prévenus. Les tribunaux procédaient systématiquement
au renvoi de ces affaires en attendant que ces diligences83(*) soient accomplies.
Certaines affaires étaient renvoyées pendant deux ou trois ans
pour ces motifs là. Pour désengorger les rôles de leur
audience, certains juges renvoyaient ce genre d'affaire sine die, en
demandant au parquet de procéder ou de faire procéder à
ces diligences avant de les enrôler à nouveau. Il leur a
été formellement rappelé qu'en matière
pénale, les renvois sine die sont interdits.
Il a été décidé84(*) par la suite,
qu'avant d'enrôler une affaire venant sur citation directe, le parquet
doit s'assurer que cet exploit a été dûment
enregistré et que le prévenu est normalement identifié.
Ainsi, depuis une dizaine d'années déjà, dans les parquets
des Tribunaux de Yaoundé (surtout), les affaires venant sur citation
directe des particuliers sont enrôlées, non plus à l'aide
des copies de citation, mais au moyen des originaux de celles-ci. En plus, les
prévenus ne sont plus identifiés à l'audience, mais
longtemps avant.
Cette pratique s'est avérée salutaire car elle a
permis de désengorger considérablement les rôles d'audience
du Tribunal de première instance de cette ville. Elle devrait faire
tâche d'huile et se généraliser à tous les autres
tribunaux de la République, surtout ceux de Douala, Nkongsamba,
Edéa, qui possèdent un volume d'affaire important. Les greffiers
de ces tribunaux ont donc parfois beaucoup de mal à se retrouver au
milieu de ce méli-mélo et a à exécuter leurs
tâches dans la sérénité. Cet état des choses
est aggravé par le fait que la justice au Cameroun possède un
matériel inadapté à ses services
B / Un matériel inadapté à une
justice en pleine mutation
Pour obtenir un bon rendement, le cadre de travail du greffier
doit être adapté et le matériel qui lui sert à
effectuer ce travail doit lui aussi être de bonne facture. On ne peut
espérer avoir un travail de qualité sans un minimum de
matériel adéquat ; C'est dans ce sens que Saint Augustin
affirmait déjà que : «
on ne peut pas pratiquer la vertu sans un minimum de
bien-être ». Le bien-être étant à
l'état actuel la fourniture dans les services des greffes de l'outil
informatique, bref, la mise sur pied des systèmes d'information
modernes.
Ces outils, indispensables aujourd'hui viendraient pallier aux
insuffisances constatées et résoudraient probablement les
problèmes de lenteur judiciaires qui se sont érigés
aujourd'hui en règles.
Pour exemple, nous mentionnerons que l'établissement
d'un B3 qui nécessite des recherches fastidieuses ne donne pas
souvent satisfaction aux usagers, surtout lorsque ceux-ci sont pris par les
délais (le concours par exemple). Une simple informatisation des
fichiers de casier judiciaire viendrait résoudre ce problème.
Le contraste est évident car, le greffier sorti de
l'ENAM et initié au TIC (Technologies de l'Information et de la
Communication)85(*) doit faire face aux
machines mécaniques qui, au delà des multiples services qu'elles
rendent, sont quand même passées de mode.
Des mesures ont cependant été prises par le
Ministre de la Justice garde des Sceaux, qui dans le but de promouvoir
l'informatisation dans les services des greffes, avait organisé des
séminaires de formation86(*). Si l'idée
était cependant louable en ce sens que -chaque participant avait droit
à une machine neuve dans son service- elle n'a pas été
pérenne, puisque jusqu'à ce jour de telles formations n'ont plus
eus lieu, du moins officiellement. Le problème demeure alors presque
entier car bon nombre de greffiers (commis de greffe et greffiers surtout) qui
ne sont pas issus de l'ENAM n'ont pas la possibilité d'être
initié à l'informatique, continuant par là même
d'utiliser les machines à écrire classiques.
Cependant, il faut reconnaître que le système
répressif camerounais est en pleine mutation (depuis l'arrivée du
code) ; et que la justice toute entière doit s'arrimer à la
tendance en vogue qui veut que toute information soit désormais
traitée de manière automatique. MOUNCHEROU NJOYA87(*), prenant le cas
spécifique des juridictions de l'Ouest, souligne que
« les juridictions doivent être
dotées de l'outil informatique » ; ce qui
contribuerait notamment à l'informatisation du casier judiciaire, si
nécessaire aujourd'hui.
Cependant, il existe d'autres problèmes d'ordre
fonctionnels qui eux, touchent directement le personnel en service tout en
évoquant les lenteurs procédurales dues à la
rédaction des décisions.
Paragraphe 2 LES PROBLEMES SPECIFIQUES LIES AUX
PERSONNEL ET AUX LENTEURS DANS LA REDACTION DES DECISIONS
Il s'agit principalement ici d'analyser les problèmes
relatifs au personnel en service (A) et ceux liés aux lenteurs dans la
rédaction des décisions (B).
A / Les problèmes liés au personnel en
service
Les hommes qui sont chargés de diligenter les
procédures au sein de la justice sont confrontés à de
nombreux obstacles les touchant directement. En effet, ils doivent pouvoir,
évoluer dans un environnement propice, maîtriser parfaitement les
rouages des procédures pénales, mais en même temps ils
doivent être suffisamment nombreux pour pouvoir gérer les
nombreuses affaires pendantes devant les tribunaux et cours. Malheureusement,
il n'en est pas toujours ainsi puisque à l'évidence il existe un
besoin quantitatif et qualitatif des effectifs des greffiers (1). De plus, la
promiscuité grandissante dans les services du greffe (2) a des causes,
et des implications qu'il conviendrait également d'analyser.
1) Le besoin quantitatif et qualitatif en
effectifs
Ø sur le plan quantitatif
Il est vrai, dans tous les secteurs de l'administration, le
problème de manque de personnel est décrié, cependant pour
ce qui est de l'administration de la justice, il y'a une
nécessité de mise à disposition dans les juridictions d'un
grand nombre de personnes capables d'exécuter les taches
rattachées au greffe. L'Etat doit ainsi faire un effort de recruter plus
d'hommes surtout quand on sait que :
· d'abord que chaque année, la section greffe de
l'ENAM ne recrute qu'environ 100 élèves ; ce qui est
insignifiant à l'échelle du nombre de départs en
retraite.
· ensuite que le nombre réduit
d'élèves sortant de l'ENAM ne permet pas que le travail immense
qu'il y'a dans nos Cours et Tribunaux soit normalement accompli.
· enfin que les concours portant recrutement des
fonctionnaires des greffes des catégories C et D se raréfient de
plus en plus. Il est donc impératif que l'Etat camerounais facilite
l'action du greffe en recrutant plus d'effectifs mais surtout en misant sur les
qualifications.
Ø sur le plan qualitatif.
Pour que son rendement soit optimal, le greffe a besoin
d'optimiser les compétences de ses agents, et d'avoir un effectif de
qualité, capable d'accomplir avec professionnalisme et sérieux
toutes les tâches que lui incombent leur mission. Cependant, la
réalité est telle que dans nos tribunaux, le personnel en
service, en majorité des commis de greffe, des bénévoles
et des contractuels sont soit formés sur le tas, parfois au gré
des supérieurs hiérarchiques. Pour résorber ce
problème d'ordre technique, il est nécessaire que :
· Les recyclages internes, réguliers et permanents
soient organisés en faveur des greffiers. En effet, les greffiers en
chef et les chefs des services des affaires administratives et
financières et des affaires juridiques doivent
régulièrement tenir des séances de recyclage de leurs
personnels sur la pratique des greffes. Cette solution, ne pourra porter de
fruits que si les greffiers en chef des juridictions et les chefs services
prédisposent des qualités requises. Ce qui nous appelle une fois
de plus à solliciter l'intervention rigide de la chancellerie qui doit,
au moment de la proposition pour la nomination aux postes de
responsabilités des greffes, tenir compte des aptitudes et des
potentialités des candidats. On ne peut valablement, ou du moins il
serait utopique de penser à un recyclage interne des greffiers
principaux par des commis de greffe ou des greffiers simples.
· Des séminaires, nationaux ou régionaux,
sur la pratique des greffes doivent aussi être organisés afin de
permettre aux greffiers d'avoir une pratique harmonisée. De tels
séminaires étaient d'ailleurs organisés chaque
année dans une ville du pays choisie à l'avance. On
définissait le thème qui devait guider l'action des greffiers
tout au long de l'année et devait les inciter à plus de
professionnalisme. Cette heureuse pratique a disparue aujourd'hui.
Il serait souhaitable, afin de pallier aux incohérences
décelées dans la pratique, que le ministre de la justice organise
chaque année des séminaires sur le renforcement des
capacités du personnel des greffes. Ils pourront mieux comprendre
l'essence de certaines diligences comme la liquidation des dépens, la
tenue du fichier,...pour ne citer que ces exemples là.
Le besoin en formation et en accroissement des effectifs n'est
pas le seul problème d'ordre humain, puisqu'il faut également
noter la promiscuité ambiante qui règne dans les services.
2) La promiscuité sans cesse
grandissante
L'usager ou toute autre personne qui entre dans le bureau d'un
greffier est tout de suite frappé par le bruit des machines qui
crépitent à longueur de journée, des bureaux exigus et
inondés de dossiers poussiéreux. Des agents travaillant pour la
plupart à 5, 6, voire 7 dans une même pièce.
Ce constat a été fait dans nos tribunaux. Il n'y
a qu'à faire un tour dans les locaux de la Cour d'appel du Littoral
pour s'en persuader. Pourtant, une telle cohabitation est dangereuse. NDJALLA
NDJALLA Degaulle 88(*)
le faisait remarquer en parlant du TGI de
Bafoussam. Il notait qu'il existe une cohabitation dangereuse de plusieurs
sections différentes au sein d'une seule et même pièce. Il
notait également que la section sociale dudit Tribunal occupait tout
simplement le secrétariat du tribunal. Les dangers d'une telle situation
ne sont plus à démontrer car non seulement ce type de
promiscuité nuit d'abord aux agents et par la suite peut être
préjudiciable au justiciable.
· Il faudra noter en ce qui concerne les agents que le
désordre qui règne dans les locaux du greffe n'est pas à
même de lui permettre une concentration optimale pour mieux traiter les
dossiers ; alors même que le suivi des procédures, surtout en
matière pénale nécessite toute la compétence
possible et surtout beaucoup de calme.
· On notera aussi le fait que les dossiers des
justiciables ne font pas souvent l'objet d'un classement minutieux, pouvant
engendrer par la même occasion des conséquences
fâcheuses89(*) pour le justiciable.
Au vu de tout ceci, il est quand même impérieux
que cette promiscuité qui va grandissante dans nos tribunaux cesse et
que des solutions adéquates soient rapidement trouvées pour
faciliter l'action du greffier dans la machine répressive. L'on devrait
par exemple construire davantage de bureaux pour loger tout le personnel
greffier. On pourrait ainsi construire dans chaque juridiction des salles
d'archives gérées par un greffier spécialement choisi et
affecté de façon permanente à ce service.
L'aménagement des pièces propres à chaque section peut
s'avérer être une solution ; et pourquoi pas à moyen
terme que chacun puisse avoir un bureau, en fonction des sollicitations et de
la notoriété du tribunal.
B / Les obstacles relatifs aux lenteurs dans la
rédaction des décisions
Les lenteurs dans la rédaction des décisions de
justice paralysent l'exercice de la justice à un double niveau ; au
niveau de l'administration elle-même et au niveau du justiciable. Le
greffier de manière incidente est lui aussi affecté ; car,
il faudra relever d'emblée que les lenteurs causées par les juges
audiencier (1) ne sont que la conséquence de la
« dépossession » du plumitif que ce premier a subit.
Au-delà il y a un problème plus global des lenteurs dans
l'établissement des minutes et des actes subséquents (2).
1) Les lenteurs causées par les
magistrats audienciers
Depuis l'entrée en vigueur le 01 janvier 2007 de la
loi n° 2005/07 du 27 juillet 2005,
le juge, en plus de diriger les débats, tient la plume
à l'audience. Mais, en plus de cela, il doit assurer la police
d'audience. Le chapitre IV du titre I du 3ème livre
intitulé des juridictions de jugement, pose clairement les dispositions
générales et spéciales applicables à la
procédure d'audience. Le juge audiencier tient une place tellement
importante que l'on remarque à peine les conseils et autres avocats qui
devraient pourtant s'illustrer de manière ostentatoire dans le
procès.
Mais, cette multiplicité des attributs du juge
audiencier pose un autre problème, celui des lenteurs dans le suivi des
débats, et partant dans la rédaction des factums. Pourtant, les
délais quant au prononcé des décisions à l'audience
sont assez strictes ; le Code prévoyant que « le
jugement est rendu soit immédiatement, soit dans un délai de 15
jours après la clôture de
débats »90(*). Cependant, ces délais, bien
qu'étant quelquefois respectés par certains juges soucieux de
rester dans la légalité, ne viennent pas résoudre
entièrement le problème des lenteurs dans la phase de jugement,
ceci du fait que du début des débats au prononcé de la
sentence, il s'écoule souvent un très long délai.
Ceci se manifeste par le fait que les magistrats, ne
possédant pas encore toute l'habileté nécessaire et la
dextérité pour prendre les notes d'audiences, prennent beaucoup
de temps à constituer le factum. Dans nos cours et tribunaux, on assiste
pratiquement à une dictée faite par les témoins, les
conseils, les parties, le procureur, ... au président du tribunal qui,
rappelons le doit en plus de prendre ces notes, assurer la police d'audience et
diriger les débats.
L'on a d'ailleurs pu assister à cette situation lors du
procès de Monsieur Edouard ETONDE KOTTO, à la Cour d'Appel du
Littoral, qui dura plusieurs semaines à cause de la lenteur des
débats et de la dictée qu'il fallait faire à chaque fois
au Président du Tribunal.
C'est une situation regrettable, car l'abondance des affaires
dans nos cours et tribunaux exige aussi que les procès se
déroulent dans une relative célérité. Nous pouvons
alors penser que la dépossession du greffier de « son plumitif
d'audience » a créé un peu plus de problèmes
qu'elle n'en a résolu : les débats à l'audience
mettant plus long et par là même les procès devenant plus
lents et plus long à gérer.
Vivement alors que nos juges s'habituent à cette
nouvelle fonction et qu'ils respectent les exigences de
célérité et d'efficacité prônés par la
justice. On notera que les délais de rédaction des minutes sont
aussi de nature à saper ces exigences du service public.
2) Les lenteurs dans la rédaction des minutes du
procès et des actes subséquents
L'alinéa 1er de l'article 196 du
C.I.C dispose que la minute du jugement sera signée au
plus tard dans les trois (3) jours par le président et le greffier. Ceci
revient à dire que la décision doit avoir été
rédigée et dactylographiée dans ce délai-là.
Pour des raisons diverses, ces délais ne sont presque jamais
respectés par les juges et les greffiers. S'élevant contre les
retards dans la rédaction des décisions judiciaires, le Garde des
sceaux, dans sa circulaire n°3 du 25 juin 1982,
a demandé que le factum soit rédigé dans toute
affaire91(*) mise en délibéré avant
de vider celui-ci et que les ordonnances, jugements et arrêts le soient,
à peine de poursuites disciplinaires, dans les deux mois de leur
prononcé. Comme on peut le constater, cette circulaire, contrairement
aux dispositions légales, porte à deux mois le délai de
rédaction des décisions judiciaires. Malgré cette
« rallonge », les retards persistent. Magistrats et
greffiers les justifient par les conditions épouvantables de travail. Il
faut reconnaître, à leur décharge, qu'ils travaillent
encore, au 21ème siècle sonné, à la
plume d'oie et à la gomme.
L'un des exemples les plus frappants de retard dans la
rédaction des décisions de justice est « l'affaire
Mademoiselle »92(*). Cette jeune fille a été
victime d'un accident de la circulation en 1986. Le
délibéré de son affaire a été vidé en
Août 1989 et le factum n'a été dactylographié qu'en
Avril 1993 ! « Justice delayed is justice
denied » disait Lord Denning cité par EYIKE-Vieux.
Cette situation qui est devenue la règle dans nos cours
et tribunaux, est tout simplement déplorable, surtout quand on sait que
les affaires criminelles ou correctionnelles mettent en jeu des
intérêts énormes, en termes financiers (lorsque la
réparation du préjudice est évoquée) et même
tout simplement en termes de sauvegarde de l'honneur (lorsque l'une des parties
fait par exemple l'objet d'une détention). Dans tous les cas le
problème du non respect des délais de rédaction
après le prononcé de la décision peut avoir des sources
diverses, allant de la défectuosité du matériel, de
l'inadaptation de celui-ci aux exigences actuelles d'une justice rapide
(l'emploi de l'outil informatique s'avérant plus que jamais
nécessaire aujourd'hui), du manque d'infrastructures ne favorisant pas
un traitement rapide des dossiers, ou simplement de la paresse de quelques
agents partisans du moindre effort.
Le CPP n'a malheureusement pas fixé des délais
précis pour la saisie ou la dactylographie des jugements ; il
stipule simplement à l'article 405 que
« le jugement est dactylographié ou saisi. L'original est
signé par le Président et, en cas de collégialité
par les autres magistrats... ». Le problème demeure alors
tout entier et appelle une solution imminente, pour la bonne marche de la
justice et un meilleur suivi des procédures.
Comme on peut le constater, les obstacles à
l'efficacité du greffe dans le système répressif sont
nombreux et multiformes. Ils trahissent de fait les limites à l'action
du greffier en matière pénale. Notons alors que, ces limites,
loin de se limiter au greffier sont globalement celles de la justice
camerounaise.
Conclusion de la deuxième partie
La place du greffier dans le procès pénal est
sans doute révélatrice de l'importance que le législateur
camerounais lui accorde. En effet, très peu de textes lui sont
consacrés, pourtant, on l'a présenté en PREMIERE PARTIE,
il est incontournable. L'une des principales conséquences de cet
état des choses est que le greffier est un personnage limité dans
son action en matière répressive. Les nombreuses innovations
contenues dans le Code de procédure pénale n'ont malheureusement
pas contribué à rehausser l'aura que le greffier devrait avoir
non seulement auprès de ses pairs, mais aussi auprès des
justiciables. Il s'apparente plus à un simple accompagnateur du
juge ; aussi bien à l'instruction qu'à l'audience. De plus
les obstacles à son efficacité dans la machine répressive
viennent se poser comme des limites implicites à son action en
matière pénale.
CONCLUSION GENERALE
Dans l'analyse portant sur le GREFFE DANS LE SYSTEME REPRESSIF
CAMEROUNAIS, nous avons tenté de mettre en relief la place que le greffe
occupe dans la machine répressive. Il est clair que le greffier est un
maillon incontournable du système répressif ; bien que
malheureusement, il soit limité dans son action par divers
paramètres. L'examen approfondi de notre thème nous a
inévitablement conduit à présenter son rôle, ses
interventions en matière pénale, son rapport avec le magistrat.
Il nous a été donné de percevoir la distinction qui existe
entre les interventions du greffier du parquet et celles du greffier du
siège. Nous avons également pu dégager quelques pistes de
solution pour une meilleure prise en compte du greffe dans la machine
judiciaire en général et pénale en particulier. Des
solutions plus globales tendant à l'amélioration du service de la
justice ont également été relevées.
Tout compte fait, il est clair que le greffier est un
personnage incontournable dans la machine répressive. Il est la matrice
même du commencement des procédures, intervenant à
l'instruction, à l'audience et même après. Le suivi des
procédures surtout après l'audience font de lui « la
cheville ouvrière » du système répressif surtout
en ce qui concerne les obligations qu'il a vis-à-vis de son service et
des voies de recours qu'il a le devoir de diligenter pour le justiciable. Le
fonctionnaire des greffes et parquet est donc dans cette
mesure « la première des gens de la
justice »93(*). Il est, pour reprendre la définition
d'André FALLOTIN « un ensemble cohérent et
toujours harmonieux du cerveau et du coeur, il participe (...) à la vie
des hommes et de la société ».
Cependant, le greffier est un personnage limité dans
son action car il s'apparente plus à un subalterne qu'à un
véritable collaborateur du juge. Ce dernier éclipsant presque
totalement le greffier du fait non seulement de ses nombreux attributs, mais
également à cause du contrôle qu'il exerce sur la personne
du greffier. De plus, la situation statutaire du greffier, ainsi que la
multitude d'obstacles à son efficacité viennent limiter la
pertinence de son action en matière pénale. Le greffier fait
pourtant partie intégrante d'un système : la
juridiction94(*). De ce
fait, tout devrait donc être mis en oeuvre pour que tous les
éléments de ce système puissent travailler de façon
optimale pour le bien de tous.
Le système répressif camerounais, nous l'avons
vu, présente de nombreuses imperfections et appelle plusieurs
réformes. Ainsi un réaménagement de la condition du
greffier par l'adoption d'un nouveau statut particulier du greffier qui
intégrerait toutes les solutions que nous avons proposées
s'avère impérieux. Ensuite, une réforme globale de tout le
système passe par une meilleure répartition des
compétences qui permettrait que le greffier ait plus d'autonomie dans la
gestion des tâches courantes. La chancellerie devrait alors travailler de
manière active à cela. Voilà ainsi présenté
quelques pistes de réflexion. Il faudrait alors simplement les
élargir aux autres domaines d'intervention du greffier
c'est-à-dire les matières civiles, sociales,
coutumières,...qui elles aussi nécessitent des solutions
imminentes.
* 1 MESSANGA
ATANGANA Norbert, Pratique des greffes, Edition MINOS, 2002, p.60
* 2 Quand on
parle de greffe, il faudra entendre le corps tout entier des greffiers (du
siège et du parquet). A distinguer avec l'appellation
« Greffe » utilisée couramment pour désigner
les greffiers du siège
* 3 C'est
l'expression la plus utilisée dans les manuels d'institutions
judiciaires.
* 4
Le dictionnaire PETIT LAROUSSE, Edition 1995, définit le
système comme une combinaison d'éléments réunis de
manière à former un ensemble.
* 5 PERROT
(R.), Institutions Judiciaires, Montchrestien 8ème Edition,
P.377, note 466.
* 6
C'est le premier code du genre en ce sens que le texte
précédent qui régissait la procédure pénale
au Cameroun francophone n'était rien d'autre que le code d'instruction
criminelle du 14 février 1838.il est à noter que le Criminal
Procedure Ordinance étant quant à lui en vigueur en zone
anglophone, ne saurait être assimilé à un code, puisqu'il
était de fait une ordonnance.
* 7 Voir
à cet effet la loi n° 007/2005 portant code de procédure
pénale applicable au Cameroun.
* 8 Présent avant 1972,
le juge d'instruction était un magistrat du siège ; avant de
devenir à partir de cette date un magistrat du parquet
(généralement le procureur de la République) prenant ainsi
le nom de « magistrat instructeur ». Le Code de
procédure pénale est venu rétablir le juge d'instruction,
magistrat du siège dans sa fonction.
* 9 Ce sont
toutes les matières prévues dans le projet de décret
n°2002/301 du 03/12/2002, lequel élargit les compétences des
greffes des juridictions en ajoutant aux matières traditionnelles
(civiles, sociales, commerciales, locales et pénales), des
matières moins classiques (immatriculation au RCCM).
* 10
Michel BEAUD dans sons ouvrage l'art de la
thèse précise le nombre de pages et le contenu
conseillés s'agissant de la rédaction d'un mémoire.
* 11 Lire
à cet effet les dispositions du statut particulier du corps des
fonctionnaires des greffes du 18 décembre 1975 notamment l'article 3
al.1
* 12
KERNALEGUEN (F.), Institutions Judiciaires LITEC,
2ème Edition, P.243.
* 13 Cette notion est
définie dans le chapitre 2 de cette partie.
* 14 C'est le
cas en France où la législation autorise parfois le greffier
à jouer le rôle de juge dans certaines audiences foraines
* 15 Il faudra
d'emblée noter qu'en matière pénale, les procédures
commencent au parquet et mobilisent de ce fait le greffier, secrétaire
de parquet.
* 16
Décret n°80/299 du 26 juillet 1980 modifié par le
décret n°81/264 du 08 juillet 1981 portant organisation
administrative des juridictions.
* 17 Ces actes
peuvent être également saisis. Tout dépendra en fait de la
disponibilité de la juridiction en matériel informatique.
* 18 MESSANGA
ATANGANA Norbert, La pratique des greffes, Edition MINOS, 2002,
Yaoundé-Cameroun, P.247.
* 19 voir
aussi le recueil des actes du séminaire d'appropriation du code de
procédure pénale par les acteurs de la chaîne pénale
tenue à Yaoundé en 2006.
* 20 Article 8
al. 1 de la loi n°2006/015 du 29 décembre 2006 portant organisation
judiciaire.
* 21
MESSANGA ATANGANA Norbert, op. cit. P. 52
* 22 Le montant de la
consignation dépend en effet de l'évaluation faite par le juge
des frais que l'instruction pourrait engager.
* 23 Article 9
al.3 du statut particulier du corps des fonctionnaires des greffes du
18décembre1975.
* 24 Le
langage et les habitudes de la justice ne pouvant être
maîtrisés que des seuls initiés.
* 25
Notamment dans l'accomplissement des formalités
nécessaires à l'enrôlement
* 26 MESSANGA
ATANGANA N, op. cit. P. 125.
* 27 MESSANGA ATANGANA(N), la
pratique des greffes, page 131
* 28
Ces formalités tiennent surtout à la mise en forme
desdits mandats.
* 29
« Répertoire Pénal Dalloz », Octobre 1997,
greffier ; page 3
* 30 C.S
Arrêt N° 50 L du 11 janvier 1972
* 31 C.S
Arrêt N° 31 /CC du 16 mars 1965, N° 12, p 1031.
* 32 C.S.
Arrêt N° 31 /cc du 24 déc. 1981 RDC série 2, 22, p.
132
* 33 C.S.
Arrêt N° 133/S du 18 Août 1983
* 34
Arrêt N° 36 du juin 1969, bull. N° 1 p 22 et Arrêt
N° 13/CC du 12 Avril 1990.
* 35
Arrêt N° 42 /P du 07 décembre 1972 de la Cour
Suprême.
* 36
Par exemple, lorsqu'une contre expertise médicale d'un
accusé est demandée par le juge d'appel ; le rapport
médical correspondant est classé dans la liasse renseignement au
dessus des premiers rapports. C'est seulement l'inventaire des pièces
qui sera modifié en conséquence.
* 37 Le
ficelage obéit à des dimensions précises, en fonction du
diamètre de la ficelle, et de la longueur de celle-ci. Mais
également on tient compte des dimensions des documents.
* 38
Il est vrai que de nos jours les exécutions des peines de mort
se raréfient considérablement du fait de l'adhésion du
Cameroun à des conventions favorisant la protection des droits de
l'homme. Ces exécutions, bien que rares ne s'effectuent donc plus sur
la place publique (source : entretien avec le chef de bureau de
l'exécution des peines de la Cour d'Appel du Littoral)
* 39 Lorsque
l'expédition est payante, le montant varie en fonction de la
juridiction. Si on est en instance, le justiciable versera une somme de 1000f
et devra produire un timbre par rôle. Si par contre on se situe au
niveau de la Cour, ce dernier doit verser une somme de 1500f accompagnée
d'un timbre par rôle.
* 40 Cette
somme varie en fonction du nombre de feuilles (rôles) et elle est souvent
affichée à l'entrée de chaque Cour ou Tribunal.
* 41 Article
429 alinéa 2 du CPP
* 42
C'est l'objet des prescriptions des articles 443 et 444 du CPP faites
au greffier en chef qui reçoit une déclaration d'appel ou au
régisseur de la prison qui reçoit pour transmission une telle
déclaration.
* 43 Article
444 Op.cit
* 44 Article
445 du CPP
* 45
Article 446 du CPP
* 46 Le droit
de demander la révision appartient au Ministère en charge de la
justice, au condamné, ou en cas d'incapacité, à son
représentant légal. Il intervient par exemple après
condamnation pour homicide ou pour meurtre lorsque la prétendue victime
est retrouvée vivante.
* 47
Article 492 du CPP
* 48
Article 493 du CPP
* 49
Article 495 du CPP
* 50 Article
496 du CPP
* 51
MESSANGA ATANGANA (N), la pratique des greffes, édt
MINOS, P.257
* 52 Ibid.
* 53 Ce sont surtout les textes
qui portent sur l'organisation administrative de juridictions ou plus
généralement les textes sur l'organisation judiciaire. Presque
tous s'accordent sur le fait que le greffier est un
« assistant » du juge alors même que le greffe est un
corps de fonctionnaire à part entière.
* 54 NDJERE (E.), Du Juge
d'instruction au Juge d'instruction, quel cheminement pour quel
résultat, Editions Presses de l'UCAC 2006, collection apprendre, P.60 et
suivantes
* 55
NDJERE(E), « Du Juge instruction au Juge
d'instruction » quel cheminement pour quels résultats ?
p.256
* 56
NDJERE (E ), op. cit. p.256
* 57 Kouonedji
F. Martin, Le juge d'instruction en procédure pénale
camerounaise, mémoire de DEA p.36
* 58 Car
très souvent le juge ne se fie qu'à ce que les parties entendues
veulent bien lui dire
* 59 article 7
de l'ordonnance 72 /4 du 26/08/1972 déjà cité.
* 60
Voir statut particulier du corps des greffes du 18/12/1975, article3
al.1 op.cit
* 61 Notamment l'article 166
CPP qui précise que toutes les déclarations donnent lieu à
la rédaction d'un p.v. établi conformément aux articles
164 et 165 du même code
* 62
EYIKE-VIEUX, l'audience en procédure pénale
camerounaise, collection VADEMECUM, édit. PUA, P.25
* 63 Voir à cet effet
l'article 253 al.3 et 4 du code de procédure pénale
* 64 Selon le
mot de Ndjere Emmanuel, déjà cité à la page 256 de
son ouvrage « du juge d'instruction au juge instruction, quel
cheminement pour quel avenir ? »
* 65 C'est ce que constate
Degaulle Ndjalla Ndjalla dans son rapport de stage effectué à la
C.AO du 12/07/04 au 06/05/05 en vue de l'obtention du diplôme de
l'ENAM.
* 66 Il
faudrait noter que la police d'audience est prévue par les articles 303
à 306 du CPP.
* 67
Le CPP avait déjà prévu la même sanction
pour le délit d'audience en son article 504
* 68 Art 381
al 3. du CPP.
* 69 Art 381
al 2 du CPP.
* 70 EYIKE-VIEUX, code
d'instruction criminelle et pratique judiciaire camerounaise, P. 155
* 71 Qui est
un concept utilisé dans plusieurs textes relatifs au greffe et notamment
dans la loi n°88/025 du 16 décembre 1988 fixant l'assiette des
émoluments des greffes des cours et tribunaux en son article
1er al 4.
* 72 NDJALLA NDJALLA (D.),
rapport de stage pratique professionnel effectué à la Cour
d'Appel de l'Ouest, P.52
* 73
EYIKE VIEUX, Code d'instruction criminelle et pratique judiciaire
camerounaise...............
* 74 Source :
entretien avec le greffier en chef de la COUR D'APPEL DU LITTORAL
* 75
EYIKE VIEUX, op cit. P. 162
* 76 Il faut
noter que le code de procédure pénale n'a pas enlevé au
greffier d'instruction l'obligation qu'il a de prendre des notes au cours de
l'instruction comme il l'a fait pour le greffier audiencier qui n'est plus
autorisé à prendre des notes d'audience.
* 77 Il s'agit
de la circulaire n°11403/CD/9346/S/DAJS du 29 septembre 1989 et de la
circulaire n°015/CD/0346/S/DAJS du 10 septembre 1991.
* 78
Remarquons alors que de telles expressions rentrent très
généralement dans
les « qualités » que le greffier a le devoir de
rédiger.
* 79 Alors que
cela s'avèrera peut-être nécessaire depuis que le juge
tient lui-même le plumitif d'audience et rédige lui-même les
qualités et le factum des décisions.
* 80
Il faudrait retenir que la formation des administrateurs de greffe et
parquet a été suspendue depuis 1983. La conséquence
principale de cette mesure est que le nombre de greffiers des administrateurs
de greffe va chaque jour s'amenuisant.
* 81 Lors des
campagnes de vulgarisation du CPP tenues pendant l'année 2006.
* 82
MOUNCHEROU NJOYA, Rapport de stage pratique professionnel effectué
à la Cour d'Appel de l'Ouest, ENAM P.54
* 83 Il
s'agissait du retour de l'orignal de la citation directe dûment
enregistrée et de l'identification du prévenu.
* 84
Lors d'une séance de travail à la chancellerie
regroupant les procureurs généraux près les Cours d'Appel
du Centre et du Littoral.
* 85
Laquelle constitue d'ailleurs une unité d'enseignement dans la
section greffe de l'ENAM.
* 86
Ces séminaires avaient eus lieu en décembre 2006, et
avaient permis à près de 200 greffiers, choisis dans
différentes régions du pays d'être formés à
l'utilisation des logiciels informatiques.
* 87
MOUNCHEROU NJOYA, rapport de stage pratique professionnel,
effectué à la cour d'appel de l'Ouest, ENAM, P. 52.
* 88
NDJALLA NDJALLA DEGAULLE, rapport de stage pratique professionnel en
vue l'obtention du diplôme de l'ENAM, p.42
* 89
Un dossier pouvant se détériorer ou carrément se
perdre faute de conservation.
* 90
Article 388 du CPP
* 91
Avec le nouveau code, la décision doit être rendue avec
les factums.
* 92Cette
affaire avait été Diffusée sur les antennes de la Cameroon
Radio and Television (CRTV) en mars 1994 dans le cadre de l'émission
« CRTV solidarité ».
* 93 MESSANGA
ATANGANA (N), la pratique des greffes, Minos 2002, ydé-Cameroun,
p.262
* 94 CSCO,
arrêt n 357 du 12/12/1961, bulletin n.5 p.332