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Analyse de la filière anacarde en Cote d'Ivoire: stratégies de développement et de lutte contre la pauvreté.

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par Gnénémon TUO
Université de Bouaké (Cote d'Ivoire) - D.E.A 2007
  

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CHAPITRE 1- STRUCTURE ET ORGANISATION DE LA FILIERE

En Côte d'Ivoire, l'introduction de l'anacardier date de l'indépendance. Elle s'est opérée en deux phases essentielles: une phase de reboisement (1959- 1960) et une phase de production fruitière (de 1960 à nos jours). La première phase s'inscrivait dans la politique gouvernementale de lutte contre la dégradation des sols du Nord et du Centre. Selon la SEDES, la SODEFOR et la SATMACI avaient aménagé respectivement 1401 et 820 hectares de forêts classées. « Pendant cette période de reforestation, la part commercialisée de noix de cajou a été marginalisée: elle n'était que de 300 tonnes de 1959 à 1970» (MINAGRI, 1999).

1.1- Origine- Culture

L'anacardier (Anacardium occidentale, Anacardiacées) est un arbre originaire des régions tropicales, résistant aux fortes chaleurs mais très sensible aux basses températures. C'est un arbre d'une dizaine de mètres de hauteur originaire du Brésil. L'anacardier est une espèce spontanée, utilisée pour le reboisement et de plus en plus cultivée pour son fruit. Ce fruit est composé d'une noix de cajou, et d'une pomme de cajou (voir figure 3).

Figure 3: Fruit de l'anacardier (noix et pomme)

- La noix de cajou est un fruit akène (fruit sec qui ne s'ouvre pas, mais se détache entièrement de la plante mère) qui atteint son plein développement en un mois environ. D'une dimension de trois à cinq centimètres, de couleur gris brunâtre, elle est constituée d'un péricarpe dont la partie intérieure est très dure et la partie extérieure, spongieuse. Entre ces deux structures, on découvre une partie plus molle en nid d'abeilles contenant un liquide visqueux brun foncé qui rendra assez difficile l'extraction ultérieure de la noix du fait de sa toxicité et de sa haute causticité. Cette substance est notamment utilisée dans des applications d'ordre industriel telles que la fabrication d'éléments de frictions de freins, d'embrayages, comme matériaux isolant et imperméable dans l'aviation ou comme intrant dans des peintures, des vernis, voire dans l'industrie du plastique. « En Asie, il est utilisé pour la fabrication d'encre indélébile. La noix de cajou est une graine oléagineuse. Elle renferme environ 47% d'une huile qui après traitement est assez proche de celle de l'amande douce. Cette seconde huile est, en effet, principalement destinée à la pharmacologie et à l'industrie des cosmétiques du fait de son prix de revient assez élevé» (Davis, 1999).

A l'intérieur de la noix, adhérant fortement à la coque, se trouve le vrai fruit. C'est une amande réniforme dont la dimension varie entre deux et trois centimètres selon les catégories, elle est blanchâtre et offre une saveur agréable. Elle peut être utilisée nature, grillée et salée, en cuisine ou en confiserie dans l'industrie chocolatière par exemple.

- La pomme de cajou (ou faux fruit de l'anacardier) - lorsque la noix a atteint sa taille définitive, le pédoncule qui jusque là ne s'était pas développé, grossit rapidement pour prendre la forme d'une poire de cinq à dix centimètres de longueur et d'une couleur pouvant s'étaler du jaune vif au rouge écarlate selon la variété. «Ce fruit est également comestible, sa chair est acidulée et sa saveur aigre-douce. Il possède de grandes qualités antiscorbutiques en raison de sa teneur en vitamine C qui est environ cinq fois plus élevée que celle d'une

orange. On peut aussi le transformer pour obtenir des confitures, des gelées ou des compotes, le presser pour donner un jus sucré, parfumé, dont la macération ou la distillation permettra de tirer du vinaigre, du vin ou de l'alcool) » (Davis, 1999, Op.cit).

Arbre à racine pivotante, sa multiplication se fait par semis en place, en pépinière, en panier ou en sachets polyéthylène en paquets de 2 à 3 noix préalablement triées (ne flottant pas sur l'eau). La durée de germination est de 2 à 3 semaines. La culture quant à elle, se fait de plusieurs manières. Association avec culture vivrière (arachide) avec une plantation de 8 mètres sur 8 mètres en général, parfois 6 mètre sur 6 mètres, intégration en fin d'assolement près de la culture vivrière (culture mixte avec coton par exemple) puis par culture fruitière unique (elle est réalisée avec des écartements de 6 mètres sur 6 mètres à 14 mètres sur 14 mètres).

L'anacardier commence à produire des fruits dès l'âge de 3 ans dans de bonnes conditions de culture. En début de plantation, les anacardiers sont recommandés dans les systèmes de cultures intercalaires. La durée du cycle végétal de l'anacardier est de 20 à 30 ans en moyenne. Lorsque l'arbre est vieux, il exsude une gamme et devient improductif.

1.2- Organisation et évolution de la filière

Jusqu'en 1970, les pommes consommées sous forme de fruits frais par les populations étaient beaucoup plus importantes que les noix. Elles subissaient une très faible transformation primaire avec une productivité très faible eue égard aux méconnaissances des technologies de transformations adaptées en la matière. Par conséquent, le système de production et de commercialisation de la

noix de cajou était très peu organisé, sinon même pas organisé au moment des pays comme le Mozambique et la Tanzanie avaient déjà commencé à
pénétrer le marché international. C'est seulement vers la fin des années 70 qu'on

a assisté à l'émergence d'une production nationale un peu structurée et encadrée par les sociétés SODEFOR et SATMACI. En 1997, l'Etat tente d'organiser la filière en créant le « (Comite pour le Développement de la Filière Anacarde) CDFA par l'arrêté ministériel no 101 du 23 mai 1997 qui ne sera malheureusement jamais mise en oeuvre » (INTERCAJOU, 2009). C'est seulement en 2002 que la filière anacarde va commencer à s'organiser avec la création de l'ARECA par le « Décret no 2002-449 du 16 septembre 2002 portant création de la société d'Etat dénommée ?Autorité de Régulation du Coton et de l'Anacarde? (ARECA)» (Marchés Africains, 2008), puis celle de l'INTERCAJOU « créé le 12 décembre 2007 en application de l'article 20 de l'ordonnance 2002-448 du 16 septembre 2002 portant cadre organisationnel des filières coton et anacarde » (Marché Africains, 2008, op cit). Bien que la mise en place de ces différents organes ait produit des effets positifs, la filière continue de souffrir de plusieurs maux que nous relèverons au fur et à mesure dans notre développement.

1.3- Développement de la production et commercialisation

La noix de cajou est devenue une aubaine pour les producteurs, les transformateurs, les transitaires et exportateurs. La production gérée de manière extensive, offre aux producteurs une source de liquidité facilement disponible. La faible pression phytosanitaire sur l'anacarde contribue à limiter le risque économique de l'activité pour le producteur et offre à la noix un label international de qualité.

1.3.1- Production des noix

L'anacardier, rappelons-le a été introduit en Côte d'Ivoire pour le reboisement et pour lutter contre l'érosion dans la région de Korhogo.

Aujourd'hui, les plantations couvrent toutes les régions centre et nord du pays. Par vagues successives, ces populations adoptent la culture de l'anacardier. Au vu de cela, nous nous sommes proposé de recueillir des données sur ce qui a motivé ces populations à l'adoption de cette culture. Plusieurs motifs justifient l'adoption de la culture de l'anacardier (Tableau I).

Tableau I: Répartition des producteurs selon les motifs d'adoptions.

Motifs

n (fréquence)

% (pourcentage)

% cumulé

Plante d'avenir

16

26.2

26.2

Prix intéressant

2

3.3

29.5

Sortir de pauvreté

43

70.5

100.0

Total

61

100.0

 

Source: Données d'enquêtes, Juillet-Août 2009

Les populations ont adopté cette culture pérenne pour un intérêt particulier, celui de sortir de la pauvreté. C'est au total 43/61 personnes soit 70,5% des enquêtés ont adopté cette culture pour sortir de la pauvreté; 16/61 soit 26,2% l'ont adopté parce qu'ils croient en l'avenir de cette culture ; 2/61 soit 3,3% estiment que les prix sont devenus plus intéressants et qu'il était donc une opportunité pour eux d'adopter cette culture.

L'adoption de cette culture est aussi liée au fait qu'elle nécessite très peu de moyens financiers que physiques par rapport à d'autres cultures comme celles du coton et de la mangue. Nous avons demandé aux producteurs, laquelle des trois cultures (anacarde, coton, mangue) était la moins fatigante. Leurs avis ont été rapportés dans le tableau II.

Tableau II: Répartition des enquêtés selon que la culture soit la moins fatigante.

Cultures

n

%

% cumulé

Anacarde

55

90.2

90.2

Mangue

6

9.8

100.0

Coton

0

0

100.0

Total

61

100.0

 

Source: Données d'enquêtes Juillet-Août 2009

Au total 55 personnes, soit 90,2% ont estimé que la culture de l'anacardier est la moins fatigante. Seulement 6 personnes, soit 9,8% ont choisi la culture de la mangue comme la culture la moins fatigante et 0% pour la culture du coton. La culture du coton a été jugée comme la culture la plus fatigante. Cette dernière, aussi bien qu'elle nécessite beaucoup de moyens financiers pour l'achat des produits phytosanitaires et d'engrais, elle nécessite aussi beaucoup d'efforts physiques. L'une des raisons de l'adoption de la culture de l'anacarde reste le fait qu'elle soit moins fatigante contrairement à la culture de la mangue et du coton.

Les plantations d'anacardiers ont été développées par les paysans (choix des variétés à utiliser au piquetage, la technique de plantation ou de semis, l'entretien et les pratiques de ramassage et séchage). En prenant le cas particulier de Karakoro, seulement 61 personnes ont reçu un enseignement (de l'ONG Chigata) sur les techniques culturales d'une plantation d'anacardier. Ces personnes ont été choisies dans 25 villages de la Sous-préfecture sur environ 99 villages qu'elle compte. Cet effectif n'atteint pas l'effectif des producteurs d'un village comme Pokaha (village de ladite Sous-préfecture), où le nombre est estimé à plus de 65 personnes. Ces 61 personnes ont reçu l'enseignement grâce à la coopérative Chiongagnigui des femmes de Karakoro qui a bénéficié d'une unité de décorticage (avec l'appui de partenaires comme RONGEAD (France) et INADES Formation (Côte d'Ivoire)). En plus de l'encadrement qui n'est pas effectif, la filière est soumise à d'énormes difficultés qui freinent son développement.

1.3.2- Commercialisation des noix de cajou

Le circuit de commercialisation de la noix est très long. Cette commercialisation est assurée par un grand nombre d'acteurs dont l'activité est

peu régulée (producteurs, pisteurs, commerçant des zones de productions, commerçants d'Abidjan, exportateurs). Cependant, cette situation ne profite pas aux producteurs. Nous avons mis un accent particulier sur le rôle des pisteurs dans la commercialisation de l'anacarde. En effet, qu'est-ce qu'un pisteur ?

Un pisteur est un guide qui sillonne la forêt et la campagne à la recherche de la production. C'est en quelque sorte quelqu'un qui a une maîtrise du terrain. Il est un intermédiaire dans le système de commercialisation. Il a un grand rôle social qui lui est assigné, celui d'aider les paysans à vendre leur production. Le constat sur le terrain est amer. Aujourd'hui, les pisteurs sont devenus pour la plus part des petits commerçants. Nous avons interrogé nos enquêtés sur l'appréciation qu'ils ont sur le rôle des pisteurs (Tableau III).

Tableau III: Appréciations des pisteurs par les paysans.

Appréciation

n

%

Cumulé

Aide importante

1

1.6

1.6

Escroc

60

98.4

100.0

Total

61

100.0

 

Source : Données d'enquêtes, Juillet-Août 2009

Le tableau ci-après montre clairement que les pisteurs se sont détournés complètement de leurs objectifs. Du rôle social qui leur est assigné, ils jouent aujourd'hui un rôle d'escrocs (ils sont traités d'escrocs parce qu'ils ne respectent pas les prix fixés par l'Etat). L'observation du tableau montre que 60/61 personnes, soit 98,4% de la population n'apprécie pas leur travail sur le terrain. Seulement 1/61, soit 1,6% a reconnu le rôle important que devrait jouer ces personnes.

On a aussi assisté à la non fiabilité des bascules des pisteurs et autres acheteurs, à la présence d'une multitude d'acteurs dans les zones de production, le manque d'information à la fixation du prix qui est imposé par l'acheteur, l'utilisation de faux billets par certains intermédiaires. Ces pisteurs ne sont pas

identifiés par une quelconque administration. Ce marché est dominé par les
acheteurs Indiens. Ils achètent les noix brutes grâce à des intermédiaires
Ivoiriens. Ils les exportent vers l'Inde où elles sont décortiquées et revendues

sous l'appellation mondialement connue de ?Noix de cajou d'Inde?, même sielles proviennent de la Côte d'Ivoire.

1.4- Transformation des noix de cajou

Utilisée seulement à des fins de reboisement, cette plante va se démarquer de son rôle écologique pour épouser le statut de culture de rente au plan socioéconomique. Ainsi, il s'est avéré nécessaire la mise en place d'instituts, de recherches comme l'institut de recherches des fruits et agrumes (IRFA), les structures de développement de façon générale. «La société de valorisation de l'anacardier du Nord (SOVANORD) créée en Mars 1972 et l'ANACARIndustrie de Côte d'Ivoire (AICI) en Novembre 1976 avait pour tâche de transformer la noix de cajou en amande, afin de l'exporter directement sur les marchés Européens » (SEDES, 1986).

Avec des objectifs de développement, quelques unités industrielles se sont installées en Côte d'Ivoire afin de procéder à la transformation de la noix entre autre SODIRO, CAJOU-CI, AFRECO, toutes ces initiatives se sont soldées par des échecs. Malgré la situation de crise que traverse la Côte d'Ivoire, force est de constater que le processus de transformation connaît tant bien que mal un progrès, mais reste toujours négligeable face à l'évolution de la production. Pour l'année 2008, nous avons enregistré 4 grandes sociétés de transformation et deux coopératives transformatrices (Tableaux IV et V).

Tableau IV: Sociétés de transformation en 2008.

Sociétés

Capacité potentielle (tonne)

Quantité transformée (noix

brute)

Olam Ivoire

5000

3909

SITA

2500

1473,347

Cajou de Fassou

1500

55

PAMO (au stade d'essai)

 
 

Source: ARECA

Tableau V: Coopératives transformatrices en 2008.

Coopératives Capacité potentielle (tonne) Quantité transformée (noix

transformatrices brute)

COOPABO 285 90

COOGES 4000 100

Source: ARECA

Les tableaux IV et V montrent qu'aucune société ni coopérative n'a pu transformer la capacité potentielle dont elle est capable. Cela est dû à un certain nombre de problèmes parmi lesquels on peut citer le manque de moyen financier pour employer le personnel nécessaire auquel on peut ajouter le manque de matériel à la pointe. Au titre de l'année 2009, le processus de transformation a connu une évolution considérable avec le nombre d'unités de décorticage qui s'est vu accroître (tableau VI).

Tableau VI: Evolution du nombre d'usines et d'unités de décorticage.

Nom Capacité (tonne) Localisation

Olam Ivoire 5000 Abidjan

COOGES 4000 Sépingo

PAMO 2500 Bondoukou

SITA 2000 Odienné

Cajou de Fassou 1500 Yamoussoukro

COOPRAG 300 Katiola

RAMOF Cajou 300 Bouaké

SARAYA 300 Bouaké

COOPABO 100 Bondoukou

VTRAD Essai Tieningboué

Chongagnigui `' Karakoro

COSEME `' Odienné

COFINI `' Niofoin

Klognomo `' Ferké

Wopinin woyin `' Korhogo

Anacarde Doré `' Kouassi Kouassikro

Anad `' Dabakala

Source : ARECA

Le nombre d'usines de transformation et d'unités de décorticage s'est accru grâce à certaines coopératives qui ont vu le jour et aussi avec l'appui de certains organismes non gouvernementaux qui ont apporté aide et assistance à des coopératives de producteurs ou non.

Malgré les difficultés que rencontre la filière anacarde, elle a atteint certaines performances remarquables. Le chapitre suivant expose ces performances.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote