CHAPITRE 2 :
MARGINALISATION SOCIALE
En plus de la situation sur le plan économique et
politique, le Tiers Monde se trouve marginalisé sur le plan social. A
cet égard, la marginalisation internationale des pays aidés
produit une exclusion sociale interne au sein de ces pays. Ceci se traduit par
une expansion de la corruption (Section 1) et par l'enlisement de la
pauvreté (Section 2).
Section 1 : expansion de la
corruption
La corruption est un sujet à la mode. Cependant,
l'affirmation d'une volonté générale de lutter contre le
phénomène par les grandes organisations internationales, qui
intègrent le débat avec leurs prêts, à pensée
universaliste, n'aident pas à mettre en oeuvre des stratégies
crédibles et efficaces face à un phénomène dont les
origines et les conséquences sont diverses.
La corruption intéresse les analystes du
développement de façon intermittente depuis presque 40 ans.
Dès les travaux pionniers, la question de l'effet du
phénomène sur la modernisation politique, économique et
sociale des sociétés du Tiers Monde, se posait. La controverse
opposait les fonctionnalistes libéraux et les structuralistes, les
premiers voyaient dans la corruption une stratégie de contournement des
obstacles politico-étatiques et un accélérateur amoral
mais efficace des transitions souhaitables vers des économies de
marchés démocratiques, alors que les seconds, insistaient sur les
victimes de ce système informel et prônaient dans une logique
keynésienne et Wébérienne la construction d'États
forts1.
La corruption qui nous intéresse ici est due aux
investissements des firmes américaines, européennes ou japonaises
qui sont réputées plus corruptibles2.
A cet égard la corruption des firmes internationales se
traduit par leurs concurrences à gagner des marchés. A travers un
abus d'autorité publique pour des avantages privés.
Ainsi, les pays donateurs bénéficient de l'achat
d'équipement par les pays récipiendaires et des investissements
dans ces pays et même ils généralisent la corruption au
sein de ceux-ci.
En plus, la corruption peut être
épidémique c'est - à -dire
généralisée ce qui suppose qu'elle est devenue un rouage
de la reproduction du système, ou planifiée, ce qui implique
qu'elle est un instrument vital pour la survie du régime politique en
tant que moyen de contrôle des divers segments de la population.
En fait, le clientélisme politique repose sur un ensemble
de pratiques qui instrumentalisent politiquement certains types de relations
personnelles.
1- Revue, «Tiers Monde», N° 161,
Janvier-Mars, 2000, T.XLI., P. 10.
2- Idem. P. 11.
Au fondement du clientélisme se trouvent des relations
de clientèle sur la base desquelles vont s'édifier des
réseaux de clientèles. La relation de clientèle constitue
une forme caractéristique d'échange social fondée sur
l'échange de dons et de contre - dons. Les multinationales, cherchant
à obtenir des débouchés à l'exportation dans un
monde libéralisé et donc plus concurrentiel, ceci pousse ces
firmes à pratiquer la corruption qui est un vecteur de leur
puissance.
La corruption d'agent public est le fait intentionnel, pour
toute personne, d'offrir, de promettre ou d'octroyer un avantage indu
pécuniaire ou autre, directement ou par des intermédiaires,
à un agent public, à son profit ou au profit d'un tiers, pour que
cet agent agisse ou s'abstienne d'agir dans l'exécution de fonctions
officielles, en vue d'obtenir ou conserver un autre avantage indu. C'est le
détournement d'un pouvoir mis au service de l'intérêt
général au profit d'un intérêt particulier. Le
corrupteur a le pouvoir d'influencer ou de faire prendre - moyennant une contre
partie - toute décision relevant de l'administration ou des
prérogatives de la puissance publique et de la faire tourner à
son avantage.
Les phénomènes de corruption ont
déjà été théorisés et
hiérarchisés. Ils vont du simple «paiement de
facilitation» pour fluidifier le fonctionnement d'administrations
kafkaïennes, au noyautage complet des pouvoirs exécutifs,
législatifs et judiciaires, aboutissant dans les cas extrêmes
à une «capture d'État».
La corruption et son corollaire, le blanchiment, ne cessent
pourtant de se normaliser dans les transactions internationales.
L'aide est devenue en effet, une véritable entreprise
commerciale avec ses patrons et clients, ses managers et exportateurs, ses
consultants et stagiaires, ses courtiers et son système de distribution,
ses financiers et banquiers et même
ses académiciens. En un mot une chaîne de
solidarité qui n'est pas imperméable à la corruption lors
qu'elle ne la favorise pas.
Ainsi, l'aide amplifie la corruption et favorise un enlisement de
la pauvreté.
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