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La fiscalité du marché de l'art contemporain

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par Alice DEBEIR
Université du droit et la santé LILLE 2 -  2009
  

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Fiscalité du Marché de l'art

Mémoire

Sous la direction de

Monsieur le Professeur Philippe JUDICQ

Professeur à la faculté de Lille II

SOMMAIRE :

TITRE I. Fiscalité Française et marché de l'art: une politique fiscale au service du développement culturel

Chapitre 1. La reconnaissance du statut de l'artiste : un encouragement apparent au développement de la création artistique.

Chapitre II. L'encouragement à l'achat d'oeuvres d'art. Les autres acteurs du marché de l'art: investir dans le marché de l'art, devenir mécène.

TITRE II. La compétitivité du marché français de l'art remise en cause face a la libéralisation des échanges

Chapitre I. La France et la culture: un marché freiné, entravé par sa propre législation.

Chapitre II. L'Europe, la France et la culture: une harmonisation en marche

INTRODUCTION

Paris a été la capitale incontestée du marché de l'art jusqu'au lendemain de la seconde guerre mondiale. Elle a ensuite été progressivement distancée par New York et Londres qui occupent aujourd'hui les deux premières places en volumes de transactions effectuées. La France est ainsi passée de pays centre à pays périphérique. Le recul de Paris est préoccupant. Une fiscalité trop pesante et inadaptée pourrait l'expliquer.

Le Conseil des ventes notait dans un rapport annuel que « certains signes permettent d'espérer que la France redevienne le marché de référence des oeuvres d'art ».

Nous avons assisté à un réel regain d'intérêt pour l'art dont le cadre juridique a toujours été mal aimé et surtout mal connu. Le marché de l'art a connu depuis quelques temps un développement sans précédent. Il s'est démocratisé, libéralisé et internationalisé.

Cependant, la crise est passée par là. Face à elle le marché de l'art contemporain est autant malmené que les autres. Même si celui-ci connait une chute moins brutale que celle des autres marchés artistiques, le monde assiste à un effondrement des ventes de l'art contemporain.

La crise actuelle semble sonner le glas de l'ère spéculative. Restriction de l'offre, estimation à la baisse entraînant la chute du chiffre d'affaire de Sotheby's, Christie's et Phillips de Pury & Company. En quelques mois, les prix de l'art à New York sont retombés à leur niveau de 2005. Or, les grandes ventes d'art contemporain organisé en novembre à New York et à Londres sont traditionnellement considérées comme de bons indicateurs de la santé du marché de l'art.

Étymologiquement l'art se définit comme la quête d'un idéal esthétique. L'art est donc emprunt d'esthétisme et tend à la recherche du beau. Il en résulte un processus de fascination. Cette définition est cependant très subjective.

« L'art est fait pour troubler, la science rassure »1(*), cette réflexion de George Braque laisse transparaitre les sentiments éprouvés par la majorité des amateurs d'art.

Le ressenti face à une oeuvre d'art est, en effet, dicté le plus souvent par une sensation, un réflexe émotionnel et non par une démarche spéculative et intéressée. Face à une création, la sensibilité personnelle de l'observateur en permettra l'appréhension. Dans un premier temps l'objet d'une réalisation est donc de toucher le public.

A cet égard nous pouvons citer Lambert Wilson, acteur et chanteur, répondant à une question relative à son rejet de l'art conceptuel a pu dire : « Je n'aime pas ça. Je trouve que l'art doit être clair. S'il faut des pages d'explications pour le comprendre... J'aime le choc immédiat, qui vous prend aux tripes. » En se fondant sur cette notion émotionnelle de nombreuses créations peuvent être considérées comme artistiques.

Se pose alors la question d'une définition précise de l'oeuvre d'art.

L'oeuvre d'art ne peut pas être réduite à une marchandise comme une autre. La valeur de l'objet d'art ne se mesure pas seulement sur le plan monétaire mais comporte aussi une dimension symbolique essentielle. L'objet d'art constitue un élément du patrimoine collectif dont l'État peut souhaiter, au nom de l'intérêt public, la sauvegarde et la conservation sur le territoire national.

Que l'on se place dans une optique juridique, fiscale, philosophique ou tout simplement artistique, la notion d'oeuvre se définit de diverses manières.

Le recours au droit peut perturber. En effet, l'art évoque plutôt l'absence de règle et l'émotion créatrice, alors que le droit renvoi à la rigueur et au raisonnement. Cependant les notions d'art et de droit, sont compatibles voire même indissociables, dès lors que la création artistique va faire l'objet de transactions.

Dans un premier temps nous nous tournons logiquement vers le code de la propriété intellectuelle afin de trouver une éventuelle définition de l'oeuvre artistique. La loi fondatrice du régime moderne français des droits de propriété littéraire et artistique est une loi de 1957, modifiée en 1985 et en 1997. Aujourd'hui, les textes sont regroupés dans les code de la propriété intellectuelle.

L'article 111-1 du CPI dispose: l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous.

Définition complétée à l'article L.112-2 par une liste indicative d'oeuvres dans le domaine artistique qui sont:

_ les oeuvres de dessin, de peinture, d'architecture, de sculpture, de gravure, de lithographie,

_ les oeuvres graphiques et typographiques

_ les oeuvres photographiques et celles réalisées à l'aide de techniques analogues à la photographie,

_ les oeuvres des arts appliqués,

_ les illustrations, les cartes géographiques.

Ainsi que:

_ les oeuvres cinématographiques et autres oeuvres constituant dans des séquences animées d'images, sonorisées ou non, dénommées ensemble oeuvres audiovisuelles.

Au premier abord il semble que le code ne définisse pas explicitement la notion de création artistique. Il nous faut donc nous tourner vers la jurisprudence qui, au fil du temps, a établi des critères, devenus aujourd'hui traditionnels, permettant d'appréhender la notion.

Au regard de la jurisprudence, l'oeuvre d'art est une création originale, sans considération de mérite ou de destination et ne nécessitant ni formalisme ni paiement préalable.

Le droit d'auteur suppose donc une création originale. Cette condition soulève le problème de l'intensité de l'originalité de la création. En effet, y a t-il une exigence d'un seuil minimum d'intensité concernant la prestation créative originale?

L'originalité exprime la personnalité de l'auteur de la création. En droit français cela suffit à faire naître une oeuvre artistique.

Les exemples précités tirés du CPI vont permettre de mieux cerner la notion. Cependant la liste n'est pas exhaustive, il s'agit de simples illustrations. Des oeuvres mentionnées par le code peuvent se voir refuser le statut. A contrario, des créations qui ne sont pas mentionnées dans le CPI vont être considérées comme de véritables oeuvres d'art.

Compte tenu de l'absence de définition précise en propriété intellectuelle, il convient de se tourner vers des références fiscales pour cerner les spécificités de l'oeuvre d'art.

Le droit fiscal appréhende la notion d'une manière spécifique.

D'un point de vue fiscal la notion se définit d'une toute autre manière et prend en compte de multiples critères. La qualification d'oeuvre d'art revêt un intérêt non négligeable pour un acquéreur ou un vendeur, intérêt concernant notamment la fiscalité de ces dernières, qui sera plus ou moins favorable selon la qualification retenue. L'activité artistique est concernée par la fiscalité au même titre que n'importe qu'elle activité économique. La question de la définition de l'oeuvre d'art n'est pas à prendre avec légèreté dans la mesure où une telle oeuvre est soumise à un régime fiscal très particulier, qu'elle ouvre droit, pour son auteur, au statut fiscal d'artiste et pour ses acquéreurs et détenteurs, aux mesures d'incitation à la création artistique, réductions d'impôt, régimes spéciaux de taxation ou d'exonération.

La distinction est donc importante mais pas toujours évidente.

L'article 98 A de l'annexe III du Code général des impôts donne une liste des réalisations qu'elle considère comme oeuvres d'art. Cette énumération est une énumération stricte des créations susceptibles de revêtir la qualification d'oeuvre d'art.

« Sont considérées comme oeuvres d'art les réalisations ci-après :

- tableaux, collages et tableautins similaires, peintures et dessins, entièrement exécutés à la main par l'artiste, à l'exclusion des dessins d'architectes, d'ingénieurs et autres dessins industriels, commerciaux, topographiques ou similaires, des articles manufacturés décorés à la main, des toiles peintes pour décors de théâtres, fonds d'ateliers ou usages analogues ;

- gravures, estampes et lithographies originales tirées en nombre limité directement en noir ou en couleurs, d'une ou plusieurs planches entièrement exécutées à la main par l'artiste, quelle que soit la technique ou la matière employée, à l'exception de tout procédé mécanique ou photomécanique ;

- à l'exclusion des articles de bijouterie, d'orfèvrerie et de joaillerie, productions originales de l'art statuaire ou de la sculpture en toutes matières dès lors que les productions sont exécutées entièrement par l'artiste; fontes de sculpture à tirage limité à huit exemplaires et contrôlé par l'artiste ou ses ayants droit ;

- tapisseries et textiles muraux faits à la main, sur la base de cartons originaux fournis par les artistes, à condition qu'il n'existe pas plus de huit exemplaires de chacun d'eux ;

- exemplaires uniques de céramique, entièrement exécutés par l'artiste et signés par lui ;

- émaux sur cuivre, entièrement exécutés à la main, dans la limite de huit exemplaires numérotés et comportant la signature de l'artiste ou de l'atelier d'art, à l'exclusion des articles de bijouterie, d'orfèvrerie et de joaillerie

- photographies prises par l'artiste, tirées par lui ou sous son contrôle, signées et numérotées dans la limite de trente exemplaires, tous formats et supports confondus.  »

Le recours au droit fiscal peut sembler surprenant. La relation entre l'art et la fiscalité n'est pas forcément évidente. Mais, comme le note à juste titre Eric Mirieu de la Barre « la réalité des rapports entre l'impôt et l'objet d'art est infiniment plus complexe et moins univoque que ne le laisse supposer une approche de l'objet d'art comme prétexte opportun à prélèvement fiscal. »

En effet, le droit fiscal se voit reconnaitre une double mission:

D'une part il permet à l'État de faire entrer des recettes par l'intermédiaire des prélèvements et des taxes. Cependant, le régime fiscal en la matière est lourd et peut constituer un obstacle au développement du marché de l'art. Le traitement du marché par les pouvoirs publics est à prendre en compte dans cette analyse.

D'autre part le législateur joue un rôle de régulation par le biais du droit fiscal. En tant que régulateur le législateur peut moduler le marché de l'art afin de lui faire prendre la direction souhaitée. Mais ce n'est pas toujours évident.

Le législateur doit allier à la fois intérêt étatique, économique et intérêt culturel. L'équilibre entre les deux peut s'avérer difficile à atteindre notamment lorsque de nouveaux paramètres entrent en compte de façon impromptue.

Le marché de l'art est en effet un marché en perpétuelle évolution. L'apparition de nouvelles formes d'oeuvres d'art contemporain comme la vidéo ou l'art conceptuel, l'évolution des formes d'expositions, le rôle croissant d'Internet dans la vente des créations artistiques, rendent souvent le cadre juridique peu adapté. Or les oeuvres d'art sont assujetties aux impositions de l'État. Cet assujettissement nécessite forcément une définition stricte de ce qu'est une oeuvre d'art. Cette difficulté relative à la qualification a été démontrée à travers de nombreuses affaires.

Afin d'illustrer notre propos sur l'imbrication de l'argumentation juridique, appuyée sur des règles formalisées de droit et l'argumentation esthétique, appuyée sur des conventions informelles délimitant le sens commun de l'art, nous citerons l'affaire Brancusi. Le sculpteur Brancusi avait décidé d'exposer ses oeuvres aux États Unis. En 1928, au moment où l'art abstrait venait d'apparaitre en Europe, il expédia donc une sculpture intitulée Oiseau en vol, création abstraite. La loi américaine exonérant de droits de douane toutes les oeuvres d'art, il pensait n'avoir à payer aucune taxe. A l'arrivée les douaniers refusèrent de reconnaître le statut d'oeuvre d'art à cette sculpture abstraite qui ne ressemblait pas à un oiseau.

Cette affaire nous renseigne sur la vision fiscale de l'oeuvre d'art. En effet, afin d'éviter ce type de désagrément face à l'apparition constante de nouveaux courants artistiques il est nécessaire d'établir une définition stricte de ce qu'est une oeuvre d'art en matière fiscale. Par ailleurs, face à l'évolution constante des courants artistiques, cette définition devra faire l'objet d'une actualisation.

Posséder une oeuvre d'art c'est conjuguer rêve, plaisir et patrimoine. L'acquisition d'une oeuvre d'art constitue en effet une excellente préconisation de diversification patrimoniale. Dans une période de complète transformation du marché de l'art, acquérir et conserver des oeuvres d'art apparaît comme une réelle opportunité. Valeur de prestige et de plaisir, les objets d'art sont exonérés d'impôt sur la fortune, permettent d'acquitter certains impôts et sont aisément transmissibles.

Source Gazette Drouot

Ce sujet présente un double aspect: l'aspect politique et les intérêts de l'état, à savoir l'entrée de recettes dans les caisses de l'état, et l'aspect culturel avec l'intérêt créatif destiné à promouvoir le développement des créations de l'esprit. La difficulté de mettre en place une politique cohérente repose sur cette multiplicité d'intérêts à prendre en compte. Face à ce constat nous pouvons dire que la politique fiscale en la matière est une politique schizophrène dans la mesure où elle tente de taxer au maximum tout en voulant préserver le patrimoine. En effet, la préservation du patrimoine culturel est primordiale pour les générations à venir, mais l'État ne peut s'empêcher de taxer les oeuvres d'art, signe apparent de richesse. Les oeuvres d'art ne peuvent pas être assimilées à de simples marchandises comme le serait n'importe quels autres biens ou services. C'est ce qui fait tout l'intérêt d'un tel sujet.

En ne tenant pas compte du caractère particulier que présente le marché de l'art, le droit français n'affecte pas à l'objet d'art un régime fiscal cohérent, mais plutôt un ensemble désordonné de modalité d'impositions dérogatoires additionnées de prélèvements fiscaux. Or la fiscalité doit être un instrument au service de l'art, l'inverse n'est pas envisageable. L'art ne doit pas et ne peut pas être considéré comme un instrument permettant de financer les caisses de l'Etat.

Apprendre à conjuguer taxe et plaisir des yeux c'est tout un art. L'art de la fiscalité.

TITRE I. Fiscalité Française et marché de l'art: une politique fiscale au service du développement culturel

Selon le Centre d'information et de Documentation de l'assurance, un million de foyers français possèdent des oeuvres d'art, meubles d'antiquité ou objets précieux pour une valeur marchande évaluée à plus de 7,6 milliards d'euros. Face à de telles estimations, l'État ne peut pas rester indifférent et nous comprenons aisément l'intérêt de mettre en place une fiscalité qui serait source de produits importants pour les finances publiques.

Il est impossible de comprendre le problème de la fiscalité en matière d'oeuvre d'art sans connaître la législation en vigueur, et sans en faire un état des lieux. Cela révèle d'une part l'inefficacité d'un système parfois peu adapté et trop lourd pour le contribuable, et d'autre part la difficulté pour le législateur de mettre en place une législation attractive et attrayante favorisant le développement culturel tout en permettant à l'Etat de percevoir des impôts.

L'étude de l'ensemble des dispositions fiscales applicables aux différents acteurs du marché permet de comprendre comment la puissance publique appréhende la création artistique.

Toutes les catégories d'acteurs de la chaîne de l'art contemporain sont concernées par les mesures fiscales, depuis la conception, la fabrication, la diffusion et la commercialisation des oeuvres d'art (Chapitre I) jusqu'à l'entrée dans les collections des musées, des entreprises et des particuliers (Chapitre II). Dès lors, sont concernés les artistes plasticiens, les collectionneurs, ainsi que d'une façon générale les entreprises.

Chapitre 1. La reconnaissance du statut de l'artiste : un encouragement apparent au développement de la création artistique.

Aucun code n'est dédié au statut de l'artiste, pourtant il s'agit d'une matière complexe nécessitant d'être organisée. Au gré des lois, des décisions de justice et des instructions, l'artiste s'est vu reconnaître un véritable statut fiscal agrémenté de taxation, dérogations, exonérations ou exceptions. Pour pouvoir prétendre au statut fiscal de l'artiste, le « créateur » doit répondre à certaines conditions concernant son oeuvre. Il doit créer une véritable oeuvre d'art au sens fiscal du terme2(*). Le Code général des Impôts dresse une liste des oeuvres considérées comme telle. Cette liste limitative et restrictive entraine le désarroi de certain artiste dont les créations ne seraient pas mentionnées par le code. Cette exclusion entraîne le refus du bénéfice du statut fiscal particulier réservé aux artistes.

Pour pouvoir bénéficier du statut particulier de l'artiste (II), des conditions intrinsèques à l'oeuvre d'art doivent être remplies (I).

§1. Les conditions relatives à l'oeuvre d'art.

Pour être considérée comme une oeuvre d'art au sens fiscal du terme, une création artistique doit remplir certaines conditions. Toutes les créations artistiques ne seront pas assimilées à des oeuvres d'art notamment si elles ne sont pas réalisées par la main de l'artiste (A) ou si le critère d'originalité ne leur ai pas reconnu (B).

A. L'oeuvre d'art doit être réalisée par la main de l'artiste.

Peu importe la technique utilisée, l'oeuvre doit résulter de la création directe et manuelle de l'artiste. Elle ne doit pas résulter d'une production automatisée ou mécanisée.

Cette condition, « réalisée par la main de l'artiste » sous entend l'intervention unique de la main de l'artiste.

Cependant, certaines créations peuvent nécessiter l'intervention d'artisans ou d'ouvrier d'art. L'oeuvre ainsi créée ne relèvera pas de l'unique intervention de l'artiste mais d'un processus de « collaboration ». Ce procédé se retrouve fréquemment dans le domaine de la sculpture. La création interviendra sous le contrôle de l'artiste. Le fondeur n'a pas la qualité de co-auteur. Il n'est qu'un assistant de réalisation3(*). L'oeuvre sera alors considérée comme réalisée par l'artiste lui-même et lui seul.

B. L'oeuvre d'art doit être unique et originale

La condition d'originalité doit être appréhendée de manière totalement objective sans que ne soient prises en compte les qualités artistiques de l'oeuvre. Quels qu'en soit son mérite ou sa destination, la condition d'originalité est toujours exigée.

Cette notion ne fait cependant l'objet d'aucune définition par la loi. C'est la jurisprudence qui l'a progressivement reconnue.

Une oeuvre d'art est considérée comme  originale  dès lors qu'elle porte l'empreinte personnelle de l'artiste, le reflet de la personnalité de son auteur ou la marque de sa personnalité.4(*)

Au sein de cette partie il est nécessaire de procéder à une subdivision.

a. oeuvre d'art originale et reproduction

Une oeuvre d'art originale est une oeuvre authentique. C'est à dire une oeuvre émanant de l'auteur lui-même. Le décret n°81-255 du 3 Mars 1981 portant sur la répression des fraudes en matières de transaction d'oeuvres d'art et d'objet de collection, dispose, en son article 95(*), que « Tout fac-similé, surmoulage, copie ou autre reproduction d'une oeuvre d'art originale, doit porter de manière visible et indélébile la mention "Reproduction" »

Avant l'introduction de cette réglementation aucun texte n'exigeait cette désignation.

Ce texte permet d'éviter toute situation de fraude. En effet, certaines personnes peuvent vouloir faire passer frauduleusement une reproduction pour une oeuvre originale. L'oeuvre d'art n'est pas le résultat de l'imitation, et l'habileté qui permet de bien imiter ou de bien reproduire ne suffit pas pour être artiste. Il faut du « génie », qui est le « don naturel qui donne ses règles à l'art » (Kant).

b. oeuvre d'art originale et tirage limité

L'originalité de l'oeuvre ne réside pas dans le fait que celle-ci soit en un unique exemplaire. Une photographie éditée à plusieurs exemplaires reste une création originale. Cependant le tirage est limité à un certain nombre d'exemplaires. Au delà du seuil légal l'oeuvre perd son caractère d'oeuvre d'art.

§2. Le statut fiscal de l'artiste : des aménagements favorables à la création artistique

A partir du moment où la création répond aux conditions exigées par le droit, le statut est alors ouvert à l'artiste. Une fois l'accès au statut reconnu il convient de s'interroger sur les conséquences fiscales que cela engendre à savoir la qualification des revenus de l'artiste (A) et leur modalité d'imposition (B) mais aussi les exonérations accordées aux artistes (C).

A. La qualification des revenus artistiques. Une activité non commerciale: imposition au titre des BNC.

Au regard de l'analyse de V. Chambaud6(*), le métier d'artiste constitue « une pratique personnelle et indépendante, dans laquelle l'activité intellectuelle est prépondérante. » Dès lors, les revenus tirés d'une telle activité sont forcément des bénéfices non commerciaux imposés en tant que tels. Cela peut sembler surprenant dans la mesure où l'artiste produit des oeuvres tel un artisan et les vend tel un commerçant.

Les revenus tirés d'une activité artistique sont traités comme les bénéfices tirés d'une activité libérale et sont ainsi imposés à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux7(*).

Bien sûr un artiste peut être assimilé à un commerçant ou à un artisan et donc dépendre d'un statut fiscal différent de celui des artistes.

Ce sera le cas de l'artiste qui ne réalise pas d'oeuvre d'art originales au sens du CGI, qui ne respecte pas les conditions imposées pour la réalisation des ses oeuvres ou encore qui poursuit plusieurs activités et l'activité commerciale, artisanale ou libérale est prépondérante. (Annexe n° 3)

B. Les régimes d'impositions de l'artiste

Il existe deux régimes d'imposition de l'artiste :

- le forfait ( micro-BNC)

- le réel (déclaration contrôlée)

Il en résulte des conséquences fiscales différentes. Le choix de l'artiste pour l'un de ces régimes est en réalité conditionné par l'importance du chiffre d'affaire réalisé.

a. Le régime micro BNC

Ce régime peut convenir aux artistes réalisant un chiffre d'affaire peu important et ne dépassant pas le seuil de 32 000 euros à compter du 1er janvier 20098(*). Le bénéfice imposable sera estimé de manière forfaitaire à un pourcentage des recettes. Comptablement ce système épargne les complications mais fiscalement il ne modère pas toujours la taxation.

Il s'agit d'un régime spécial, mentionné à l'article 102 ter du CGI, qui dispense le contribuable de déclaration de TVA, en contrepartie, celui-ci ne pourra pas la récupérer, cette exonération ne doit pas être considérée comme un avantage. En effet, les artistes ont beaucoup de charges portant notamment sur le matériel nécessaire à leur art. La TVA afférente à ces dépenses ne pourra faire l'objet d'aucune déduction.

Cependant ils bénéficieront d'un abattement évalué à 66% des recettes brutes. Cet abattement tient lieu de déduction de toutes les dépenses professionnelles, y compris les dépenses de matériel, de déplacement, d'exposition, de promotion, de cotisations sociales ou d'amortissement lié à un bien affecté à l'activité.

Ainsi si les charges supportées sont inférieures à l'abattement, le contribuable est gagnant. Le cas contraire cela peut être très pénalisant pour lui.

A noter : L'artiste qui réalise un chiffre d'affaire annuel inférieur à 32 000 euros sera d'office soumis au régime du micro BNC.

Que se passe t-il dans l'hypothèse où il dépasse ce seuil?

La règle est fixée à l'article 293 B du CGI qui prévoit qu'en cas de dépassement le bénéfice de ce régime est maintenu durant une année après le franchissement du seuil, dans la mesure où les recettes restent inférieures à 51 000 euros.9(*)

Quel intérêt présente ce régime.

Les obligations comptables sont limitées en effet, seule la tenue d'un document donnant le détail journalier des recettes professionnelles est obligatoire. Les dépenses n'ont pas à être justifiées. L'option pour ce régime est donc un choix de facilité.

Comme nous l'avons évoqué, le contribuable bénéficie d'un abattement forfaitaire.

Lorsque les dépenses sont supérieures à cet abattement il convient alors mieux d'opter pour le régime d'imposition au réel.

En effet, l'artiste qui relève en principe d'office du régime du micro BNC compte tenu de son chiffre d'affaires, peut tout de même opter pour le régime du réel (déclaration contrôlée) dès lors qu'il s'en trouve avantagé.

En revanche un contribuable qui a opté pour un régime réel d'imposition au titre d'une année ne peut pas renoncer à son option pour bénéficier du régime des micro-entreprises au titre des années suivantes si son chiffre d'affaires ou ses recettes excèdent les seuils principaux d'application de ce régime.

b. La déclaration contrôlée

Il s'agit du régime obligatoire pour tous les artistes réalisant un chiffre d'affaires annuel supérieur à 32 000 euros TTC. Ou, comme nous l'avons précédemment évoqué, il peut être choisi sur option, par l'artiste réalisant un chiffre d'affaires annuel inférieur à 32 000 euros, si ce choix présente un avantage pour lui, notamment au regard de ses dépenses ou si l'activité est déficitaire.

Cette option est irrévocable et couvre une période de deux ans.

Quel intérêt présente ce régime.

Dans le cadre du régime de la déclaration contrôlée, l'artiste a la possibilité d'être imposé sur le bénéfice réellement réalisé. Il n'est donc imposé que sur ses gains réels. En cas de déficit l'imputation sur ses autres revenus est possible.10(*) Les plus values professionnelles sont exonérées après cinq ans de détention des biens, si le chiffre d'affaire ne dépasse pas 90 000 euros.11(*) Par ailleurs, il pourra adhérer à une association de gestion agréée, ce qui lui permettra de bénéficier des avantages fiscaux attachés à l'adhésion.12(*) Contrairement au régime précédent, le contribuable va, dans le cadre de cette imposition, devoir produire une déclaration de TVA.

c. L'imposition d'après le bénéfice moyen.

Cette option, pour le bénéfice moyen, peut permettre à l'artiste d'optimiser sa fiscalité. Ce régime est mentionné à l'article 100 bis du CGI.

Le dispositif de l'article 100 bis offre le choix entre deux méthodes de calcul du bénéfice moyen: sur trois ans ou sur cinq ans. Il s'agit d'une procédure sur option révocable, il convient de bien choisir le moment de l'option.

Quel est l'intérêt de ce dispositif.

Ce système est un système de lissage des revenus qui permet d'atténuer les effets de la progressivité de l'impôt. Pour en profiter il suffit d'avoir choisit le régime de la déclaration contrôlée. Les contribuables imposés selon les micro-BNC n'y ont pas accès.

Prenons un exemple :

Soit un artiste dont les bénéfices imposables sont les suivants :

- 2005 : 45 000 euros: N-4;

- 2006 : 100 000 euros: N-3;

- 2007 : 150 000 euros: N-2;

- 2008 : 300 000 euros: N-1;

- 2009 : 900 000 euros: N.

En optant pour le régime de l'article 100 bis du CGI à compter des revenus de 2009, la base d'imposition de l'année 2009 sera déterminée comme de la manière suivante ( nous envisageons l'option sur cinq ans): 1/5 × [(N - 4 : 45000) + (N - 3 : 100 000 €) + (N - 2 : 150 000 €) + (N - 1 : 300 000 €) + (N : 900 000)]= 1/5 x 1495 000= 299 000

Dans ce cas, dès l'année 2008, cet artiste va diminuer par 3 son assiette imposable à l'impôt sur le revenu.

Grâce à cette option, son impôt sur le revenu sera de 101 000 euros au lieu de 342 000 euros !

Lorsqu'un contribuable opte pour ce régime, son revenu doit immédiatement être établi d'après la moyenne des recettes et des dépenses des trois ou des cinq dernières années, même si les recettes et dépenses des deux ou des quatre premières de ces années ont été déjà retenues pour l'établissement de l'imposition des deux ou quatre années correspondantes ou si, antérieurement à l'année d'option, le contribuable n'a pas été soumis à l'impôt sur le revenu.

d. L'abattement de soutien aux jeunes créateurs

En application de l'article 93 du CGI l'artiste qui débute leur activité à compter du 1er janvier 2006 bénéficie d'un abattement de 50% sur le montant de son bénéfice imposable pendant ses cinq premières années d'activité.

C. L'exonération de la taxe professionnelle

a. Principe

En application de l'article 1447 du CGI toute personne qui exerce une activité professionnelle non salariée, à titre habituel et professionnelle, acquitte la taxe professionnelle.

Cette taxe fut créée en 197513(*) par Jacques Chirac pour remplacer l'antique patente.

La loi du 25 juillet 1975 codifiée à l'article 1460-2° CGI, dispose: « les peintres, sculpteurs, graveurs et dessinateurs considérés comme artistes, et ne vendant que le produit de leur art » sont exonérés de la taxe professionnelle. De plus certains photographes peuvent bénéficier de cette exonération en vertu du 2° bis du même article : « Les photographes auteurs, pour leur activité relative à la réalisation de prises de vues et à la cession de leurs oeuvres d'art au sens de l'article 278 septies ou de droits mentionnés au g de l'article 279 et portant sur leurs oeuvres photographiques. »14(*)

b. Applications

Les exonérations étant d'application stricte, l'exonération prévue par l' article 1460-2° du CGI ne concernent que les professions limitativement énumérées par cet article15(*).

Pour bénéficier de l'exonération l'artiste ne doit vendre que le produit de son art. Les personnes exerçant des professions artistiques énumérées à l' article 1460 du CGI exercent une activité commerciale lorsqu'elles vendent le produit de leur art par des opérations publicitaires16(*) . Elles ne bénéficient pas dans ce cas de l'exonération.

Par contre la condition est remplie dès lors que l'artiste exécute des oeuvres dues à sa conception personnelle, soit seul, soit avec les concours limités indispensables à l'exercice de son art.

En revanche, en règle générale, celui qui exécute des travaux d'après des modèles fournis par des tiers est imposable.

De même, ne peut être considéré comme vendant le produit de son art celui qui, pour exécuter ou reproduire des oeuvres dont il est l'auteur, exploite un établissement dans lequel le travail industriel est prédominant et le travail artistique secondaire, ni celui qui exploite un atelier de dessins dans lequel il emploie plusieurs collaborateurs exécutant, sous sa direction, les travaux de préparation et de mise au net qu'appellent ses créations17(*).

Le dessinateur publicitaire qui crée des dessins originaux sur commande peut, par exemple, bénéficier de l'exonération même si es dessins sont destinés à être reproduits en de nombreux exemplaires18(*).

Par contre, un graphiste publicitaire, dont l'activité consiste essentiellement en l'exécution, sur commande, d'oeuvres graphiques publicitaires composées de textes et de photographies, quelle que soit la part de création de l'intéressé, ne peut pas bénéficier de l'exonération19(*). Mais celui qui crée des dessins originaux sans travailler sur modèle et n'utilise qu'un nombre limité de collaborateur peut en bénéficier, même s'il travaille sur commande20(*).

D. La franchise de TVA

Par ailleurs, il est important de noter que les artistes bénéficient d'une franchise de TVA lorsqu'ils ont réalisés au cours de l'année précédente, un chiffre d'affaires HT n'excédant pas 37 400 euros21(*). Ils sont, le cas échéant, exonérés de taxe sur les salaires pour les rémunérations versées à compter du 1er janvier 2000 (loi de finances pour 2001).

La franchise n'est pas forcement avantageuse pour les artistes, en effet, si ces derniers ne sont pas soumis à TVA, corrélativement ils ne peuvent pas récupérer la TVA sur leurs achats. Un artiste peut donc opter pour le paiement de la TVA.

Chapitre II. L'encouragement à l'achat d'oeuvres d'art. Les autres acteurs du marché de l'art: investir dans le marché de l'art, devenir mécène.

Mécène, collectionneur ou simple acheteur occasionnel, l'acheteur d'art, en dehors des galeristes et des musées qui en font métier, a longtemps été un individu ou une famille.

Ce n'est qu'au XIX siècle que les entreprises commencent à investir dans des oeuvres d'art, sans le moindre encouragement public.

Vers la fin du XXe siècle, à l'instar d'autres pays occidentaux, avec au premier plan les Etats Unis, le législateur décide d'accorder des avantages fiscaux significatifs à tous les acheteurs d'art et plus particulièrement aux mécènes, qu'ils soient particuliers (A) ou entreprises (B).

A. Le collectionneur

A noter Article 278 Septies CGI

«  la TVA est perçue au taux de 5,5%:

1° Sur les importations d'oeuvres d'art, d'objet de collection ou d'antiquité, ainsi que sur les acquisitions intracommunautaire effectuées par un assujetti ou une personne morale non assujettie d'oeuvres d'art, d'objet de collection ou d'antiquité qu'ils ont été importés sur le territoire d'un autre état membre de la Communauté Européenne.

2° Sur les livraisons d'oeuvres d'art effectuées par leur auteur ou ses ayant droit. »

Doit être considéré comme collectionneur « toute personne privée qui procède à des acquisitions d'oeuvres d'art. » cette définition est issue du plan de renouveau du marché de l'art, présidé par Martin Berthenod. (Commissaire général de la Foire internationale d'art contemporain, FIAC).

Madame Christine Albanel Ministre de la Culture et de la Communication s'est largement inspirée de ce rapport lors de la présentation du « plan de renouveau pour le marché de l'art français. » en réponse à la demande du Président de la République lui signifiant de « prendre les dispositions nécessaires pour redresser rapidement le marché de l'art français ». Ce plan prévoit notamment le développement des collections privées.

L'acheteur particulier est l'acteur principal du marché de l'art, celui dont l'engagement est l'enjeu principal de tous les autres acteurs, parce que sans lui rien ne peut se faire. Il faut l'encourager à devenir un collectionneur Les pouvoirs publics s sont donc attelés à développer les mesures de faveur relatives au mécénat afin d'encourager les collectionneurs à acquérir, conserver et transmettre leur patrimoine artistique. Ces mesures concernent l'impôt sur le revenu, l'impôt de solidarité sur la fortune (que nous aborderons plus en détail dans la seconde partie), la taxe forfaitaire et les droits de transmission.

Les oeuvres d'art bénéficient en droit français d'une fiscalité à la fois spécifique et attractive. De l'achat à la revente, de la possession à la transmission, les objets d'art disposent d'un cadre juridique et fiscal national qui comporte des éléments particulièrement intéressants.

a. Les mesures favorables au collectionneur.

1. La réduction d'impôt sur le revenu.

Le mécanisme de réduction d'IRPP , mentionné à l'article 200 du CGI, prévoit une déduction de 66% 22(*)pour un don fait par un particulier.

La réduction est accordée à certaines conditions : Le don doit être fait à destination de certaines catégories d'organismes mentionnés à l'article 200 du CGI.

Par ailleurs, le don doit être une véritable libéralité et ne doit comporter aucune contrepartie pour le donateur. A contrario, le donateur perd l'avantage de la réduction. Il existe tout de même une exception à ce principe. Si l'avantage est purement institutionnel ou symbolique (hommage, remerciements publics, titre honorifique), le donateur conservera le bénéfice de la réduction d'impôt.

2. L'exonération d'ISF

Le patrimoine culturel doit être protégé, même lorsque les oeuvres d'art sont détenus par des propriétaires privés. Afin de faire de la France un pays de collectionneurs les propriétaires d'oeuvres d'art bénéficient d'une mesure de soutien : l'exonération d'ISF.23(*) Les oeuvres d'art sont exclues de l'assiette de l'ISF, elles ne sont donc ni imposable ni déclarables.

3. La transmission d'oeuvres d'art.

En principe, l'évaluation des biens composant l'actif et le passif successoral se fait selon leur valeur vénale au jour de l'ouverture de la succession par les héritiers. Aux termes de l'article 764 du CGI des méthodes d'évaluation particulières s'appliquent aux biens mobiliers. (Meubles meublant, bijoux, oeuvres d'art ou de collection.)

Si l'objet d'art est qualifié de meuble meublant, trois hypothèses sont envisagées par le législateur :

Lorsque le bien fait l'objet d'une vente publique dans les deux années suivant le décès il faut tenir compte du prix exprimé dans l'acte de vente.

A défaut de vente publique il faut retenir l'estimation contenue dans les inventaires et autres actes.

A défaut de ces modes de détermination, la base d'évaluation sera la récapitulation détaillée et estimative faite dans la déclaration de succession. Si la déclaration n'estime pas la valeur des biens, ces derniers font l'objet d'une estimation forfaitaire égale à 5% de la valeur des autres biens mobiliers et immobiliers. La preuve contraire peut être apportée par l'administration ou par les héritiers. Cependant l'évaluation des oeuvres d'art n'est pas évidente. Le législateur a donc introduit une taxe forfaitaire.24(*)

L'évaluation successorale des objets d'art peut ne pas être nécessaire car il arrive que les objets d'art soient exonérés de droit de mutation. Les héritiers, donataires et légataires d'objet d'art « de haute valeur artistique ou historique »25(*) qui en font don à l'Etat sont exonérés des droits de mutation à titre gratuit.

4. Le paiement de l'impôt en nature : la dation en paiement

Il doit certainement s'agir de la mesure permettant de réconcilier intérêt étatique et intérêt artistique. Compte tenu de la double nature de l'oeuvre d'art, richesse économique et richesse culturelle, le législateur a eu la bonne idée de faire de celle-ci une monnaie d'échange fiscal en permettant son usage comme moyen de paiement de l'impôt.

La dation en paiement26(*) est une mesure fiscale originale et avantageuse qui permet de régler une partie ou la totalité de l'impôt. Régi par la loi Malraux du 31 décembre 196827(*) ce système permet le paiement des droits de succession et de mutation28(*) ainsi que le paiement de l'impôt sur la fortune29(*), par la remise à l'Etat de biens culturels. Ces biens doivent constituer des éléments essentiels du patrimoine national.

A noter. Les autres types d'impôts ne peuvent pas encore être acquittés par le biais de la dation en paiement. Le rapport Bethenod propose un élargissement du dispositif à l'impôt sur le revenu. Mais la proposition n'a pas encore été validée.

Le bien proposé en règlement des droits dont le contribuable est redevable fera l'objet d'une procédure d'agrément. 30(*)

Face à la réussite de ce dispositif il fut même instauré en Belgique en 1985 et au Royaume Uni en 2000.

La dation en paiement présente l'avantage de maintenir le patrimoine culturel sur le territoire national en permettant de conserver des biens prestigieux : les manuscrits de Proust, Sartre, Rousseau...

5. La proposition du prêt à taux zéro.

Le 2 avril dernier, Christine Albanel, ministre de la Culture, présentait au Conseil des ministres le rapport « sur le développement du marché de l'art en France au sein duquel elle proposait notamment l'institution d'un « prêt à taux zéro » pour les particuliers désireux d'acquérir des oeuvres d'artistes vivants. Ce dispositif s'inspire du système Anglais « own art » qui consistait à accorder aux particuliers un prêt à taux zéro dans la limite de 4 000 euros pour l'acquisition d'oeuvre d'art contemporain auprès d'un professionnel du marché de l'art. Ce système a fait naitre 10 000 collectionneurs en trois ans.

Cette proposition a été saluée par la presse comme l'une des « mesures phares » destinées à relancer le marché31(*) C'est d'autant plus surprenant que cette mesure ne figure pas au nombre de celles conseillées par les auteurs du rapport Bethenod, ceux-ci l'ayant même explicitement rejetée.

b. La taxation avantageuse des plus values : particularisme de la fiscalité des ventes d'objets d'art

Les ventes d'objets d'art par les particuliers32(*) sont soumises à une taxation des plus values réalisées, comme le sont toutes les ventes de biens mobiliers depuis la loi du 19 juillet 197633(*) sauf dans les cas où la vente à lieu en faveur d'un musée de France, d'une collectivité territoriale, d'un service d'archive de l'Etat ou des collectivités locales34(*)

Les cessions faites par des particuliers s'inscrivent dans le cadre de la gestion du patrimoine privé du collectionneur et sont soumises à la taxe forfaitaire sur les métaux précieux, les bijoux, les objets d'art de collection et d'antiquité.

Parfois, le propriétaire d'objets d'art ne peut justifier l'origine de ses biens. En effet, un grand nombre d'objets, initialement sans valeur, ont pu être donnés, acquis sans facture chez un antiquaire, ou transmis de génération en génération. Au gré des modes ou d'une découverte fortuite, le bien acheté à faible prix ou oublié dans le grenier devient un objet précieux. La fiscalité française a su s'adapter à ces situations, en prévoyant un système original et souple de taxation de la vente ou de l'exportation.

Les objets d'art et de collection vendus pour un montant inférieur à 5 000 euros ne sont pas taxés. Au-delà de ce montant, le vendeur peut, en fonction des cas, choisir une taxation forfaitaire ou opter pour le régime de droit commun.

1. Les biens imposables.

La taxe forfaitaire a été crée par l'article 10 de la loi n°76-660 du 19 juillet 1976 portant sur

A noter. Une précision importante doit être apportée. La taxe forfaitaire doit être vue comme la taxation de la plus value réalisée à l'occasion d'une cession à titre onéreux ou d'une exportation. Cela a pour conséquence, qu'un artiste réalisant une cession ou une exportation visée à l'article150VI se voit exonéré de taxe forfaitaire. En effet, cela semble logique car de son côté la cession va générer un revenu et non une plus value. Il faut cependant que celui-ci soit le créateur de l'oeuvre et qu'il en justifie la propriété continue depuis sa création. En revanche, la taxe forfaitaire sera du pour les oeuvres qu'il détient dans son patrimoine privé réalisée par d'autres artistes.

l'imposition des plus values35(*). C'est un régime fiscal adapté aux particuliers en cas de cession à titre onéreux ou d'exportation.

Si le propriétaire d'une oeuvre d'art ne dispose pas de facture d'achat, ou n'a pas la possibilité de justifier l'origine de l'oeuvre, il est obligatoirement assujetti à la taxe forfaitaire.

Les biens imposables sont les métaux précieux, les bijoux, objet d'art, de collection ou d'antiquité. Les oeuvres d'art sont définies en référence aux sept catégories de formes d'expression retenues dans le cadre du régime de TVA propre aux opérations relatives au marché de l'art36(*). Il faut ajouter à cela les oeuvres audiovisuelles37(*).

2. Les opérations imposables.

La taxe est du dès lors qu'un collectionneur particulier, personne physique ou morale, réalise la cession d'un bien imposable pour un montant supérieur à 5000 euros38(*), dans le cadre de la gestion privée de son patrimoine.

Il importe peu que la vente ai eu lieu en France ou à l'étranger. Il suffit juste que le vendeur ait son domicile fiscal en France.

Ainsi la taxe s'applique à toutes formes de cessions39(*). Elle concerne:

Les ventes.

Les cessions à titre onéreux d'un bien situé en France ou dans un autre état membre de l'Union Européenne.

Les exportations définitives vers un pays membre40(*) .

3. L'appréciation du seuil de 5000 euros (CGI article 150 VJ 4°)

La limite des 5000 euros s'applique à chaque cessions ou exportations et s'apprécie objet par objet41(*). Dans l'hypothèse où le vendeur cède à des dates distinctes mais rapprochées les différents éléments d'un seul ensemble à un acheteur unique, l'administration fiscale considère qu'il s'agit d'une cession unique. En revanche si les éléments sont cédés à différents acheteurs alors l'administration considère que les éléments constituant l'ensemble sont dispersés. Dès lors le franchissement du seuil s'apprécie objet par objet.

4. Assiette et taux de la taxe.

L'assiette de la taxe forfaitaire frappant les cessions ou exportation d'objets d'art repose sur le prix de vente, en cas de cession, ou sur la valeur en douane, en cas d'exportation.

Si un intermédiaire transparent ( toute personne qui agit au nom et pour le compte du vendeur ou de l'acquéreur) participe à la transaction, la commission qu'il reçoit est retenue dans l'assiette de la taxe forfaitaire.

Si un intermédiaire opaque (toute personne à qui est transférée la propriété du bien avant qu'elle ne soit transmise à l'acquéreur final) la taxe est due sur le prix payé par cet acquéreur.

Ainsi, la commission versée à un éventuel intermédiaire n'est pas déductible du prix de cession.

Si la cession se fait par le biais d'un intermédiaire c'est sur lui que repose le versement de la taxe.42(*)

Le taux de la taxe est de 8% (dont 0,5% au titre de la CRDS) pour les métaux précieux et de 5% (dont 0,5% au titre de la CRDS) pour les bijoux, objets d'art et de collection. Elle est exigible au moment de la cession ou de l'exportation. A défaut de versement un interêt de retard de 0,4% par mois est applicable (article 1727 CGI) ainsi qu'une amende fiscale égale à 25% des droits éludés ( art 1761 CGI)

5. L'option pour le régime de droit commun.

En application de l'article 150 VL du CGI «  le vendeur ou l'exportateur, personne physique, domiciliée en France, peut opter pour le régime défini à l'article 150 UA à la condition de justifier de la date et du prix d'acquisition du bien ou de justifier que le bien est détenu depuis plus de douze ans. Dans ce cas la taxe forfaitaire prévue à l'article 150 VI n'est pas due. »

L'option pour ce régime est irrévocable43(*) . Le régime fiscal de la taxe forfaitaire, en principe exceptionnel, est devenu courant, au point que les nombreux professionnels utilisent systématiquement cette option, sans vérifier s'il est possible d'atténuer la fiscalité en justifiant l'origine de l'oeuvre. Lorsqu'un collectionneur dispose de justificatifs44(*) avec son nom, le prix, la date d'achat et les caractéristiques de l'oeuvre, il peut opter soit pour la taxe forfaitaire, soit pour le régime de droit commun, qui l'exonère de ladite taxe.

6. Le calcul de la plus value : les ventes réalisées pour un montant inférieur à 5 000 euros sont exonérées en cas de plus value. A contrario, les plus values réalisées sont imposées. Le calcul résulte de la différence entre :

Le prix d'acquisition OU la valeur vénale du bien au jour de son entrée dans le patrimoine

ET

Le prix de cession OU la valeur en douane

Le montant de la plus value est réduit d'un abattement de 10% par année de possession, au delà de la deuxième45(*). La plus value est donc exonérée après une détention de douze années.

La plus value est taxée au taux de 28,1 % ( taux de 16% auquel viennent s'ajouter 11% plus 1,1% de prélèvements sociaux. )

Exemple de calcul de la fiscalité des plus values pour les investissements dans l'art.

Monsieur X, imposé à 49,78% de TMI a acquis en Février un dessin de Picasso au prix de 180 000 euros. En Juin 2008, il négocie cette acquisition au prix de 360 000 euros. Cette cession génère une plus value soumise à taxation. Il a conservé les factures.

* 1 Le jour et la nuit, George Braque

* 2 Art.98 annexe III CGI

* 3 CAA Nantes 27 Mai 1996

* 4 CA Paris 23 Novembre 1982

* 5 Version en vigueur au 16 Juillet 2009

* 6 CHAMBAUD V., « Guide juridique et fiscal de l'artiste » collection entrepreneurs Dunod, 2007

* 7 Art.92 du CGI

* 8 Loi de finance pour 2009 Loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008. JO n°0302 du 28 décembre 2008

* 9 BOI 4 G-1-09

* 10 Le régime du Micro-BNC ne permet pas d'imputer le déficit.

* 11 Art. 151 Septies CGI

* 12 Dans le cadre du Micro-BNC le contribuable peut adhérer à une association de gestion agréée mais il n'en tire aucun avantage fiscal.

* 13 Loi du 25 juillet 1975.

* 14Taxe professionnelle devrait disparaître d'ici 2010 soit 35 ans après sa création.

Aux professions exonérées de taxe professionnelle le législateur a ajouté, depuis l'année 2004, les photographes auteurs

* 15 Doc. adm. 6 E 1332, n°3.

* 16 En ce sens, en matière de taxe professionnelle Rép. min. n° 54751 à M. Mandon : JOAN Q 8 juin 1992, p. 2515 ; Dr. fisc. 1992, n° 48-49, comm. N° 2279

* 17Doc. adm. DGI 6 E-1332, § 1er

* 18 CE, 20 oct. 1982, req. n° 22988 : RJF 12/82, n° 1132

* 19 CE, 9 juill. 1980, req. n° 12982. - CAA Nancy, 7 avr. 1994, req. n° 92768 : RJF 3/95, n° 347

* 20 CAA Nancy, 27 févr. 1992 : RJF 7/92, n° 998. - CAA Nantes, 22 déc. 1993, req. n° 92312 : RJF 4/94, n° 431

* 21 Article 5 de la Loi 91-716 du 26 juillet 1991 en vigueur depuis le 03 juillet 1992

* 22 loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale.

* 23 Art.885 I al.1er

* 24 Taxe forfaitaire sur les métaux précieux

* 25 Loi du 31 Déc. 1968 tendant à favoriser la conservation du patrimoine national

* 26 Art.1716 bis CGI

* 27 Loi n° 68-1251 du 31 décembre 1968

* 28 l'article 6 de la loi de finance rectificative pour 1982 a permis d'acquitter par ce moyen les droits de mutation à titre gratuit entre vifs, ainsi que les donations partage.

* 29 l'article 26 de la loi de finance pour 1988 a étendu le domaine de la dation au paiement de l'ISF.

* 30 Sur la procédure d'agrément se référer à l'article 384 CGI

* 31 Le Figaro, 3 Avril 2008, Du prêt à taux zéro au mécénat. Des mesures phares qui illustrent les quatre objectifs du «plan de renouveau pour le marché de l'art français».

* 32 Les professionnels du marché de l'art sont logiquement exonérés de la fiscalité particulière prévue pour la taxation des ventes d'objets d'art car ils sont taxés à l'impôt sur le revenu conformément au droit commun des BIC Art.150 V bis I

* 33 Loi n° 76-660

* 34 Art.150 V bis CGI

* 35Les dispositions sont codifiées aux articles 150VI à 150VM du CGI.

* 36 Art. 98 CGI

* 37Bulletin officiel des Impôts 5G-2-06 du 26 octobre 2006 relatif à l'abattement de 50% sur le bénéfice accordé aux artistes plasticiens débutants ou nouvellement installés en France, au titre des oeuvres d'art dont la création ouvre droit au dispositif de faveur

* 38 Loi de finance 2004, n°2003-1311, 30 Déc. 2003

* 39 Art.150 VI CGI

* 40BO douane n°6758, 19 mai 2008

* 41BOI 8 M-2-06 n°33

* 42 CGI Annexe II, art. 150 V ter et art. 74 S bis.

* 43 annexe CGI II, art. 74 S septiès

* 44 La preuve de la détention d'une durée supérieure à douze ans : Sont admis comme preuve: une facture délivrée par un commissaire-priseur ou un intermédiaire, un extrait de déclaration ayant servi de base à la liquidation des droits de mutation en cas de succession ou de donation.

* 45 Art.150 CGI

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