La fiscalité du marché de l'art contemporain( Télécharger le fichier original )par Alice DEBEIR Université du droit et la santé LILLE 2 - 2009 |
Exemple chiffré :
Contrairement au mécénat il s'agit d'un soutient avec contrepartie directe. L'administration exige que les dépenses soient réellement exposées dans l'intérêt direct de l'entreprise et qu'elles lui apportent des avantages et contreparties équivalents à leur montant. Le parrainage est vu comme une action publicitaire. Selon l'article 39-1 7° du CGI, ces manifestations sont de caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ou concourant à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises, lorsqu'elles sont exposées dans l'intérêt direct de l'exploitation. 50(*) Toutes ces mesures semblent plus que favorable au développement de l'art contemporain. Cependant si un nouveau plan de relance du marché a été élaboré à la demande du Président de la République, c'est bien que certains points de notre fiscalité demeurent inadaptés. C'est ce que nous allons développer ans cette seconde partie afin de comprendre pourquoi, malgré les efforts politiques mis en place depuis de nombreuses années, le marché de l'art contemporain français est en plein déclin. Il convient toutefois de noter que le rapport Berthenod51(*) constate que la « fiscalité française applicable à l'objet d'art, prise dans son ensemble, est moins défavorable que ce qui est parfois soutenu. » TITRE II. LA COMPETIVITE DU MARCHE FRANCAIS DE L'ART REMISE EN CAUSE FACE A LA LIBERALISATION DES ECHANGES Le marché de l'art représente, en France, un chiffre d'affaires de 4 à 5 milliards d'euros et près de 50 000 emplois directs ou indirects. Depuis 1993, le marché français s'ouvre progressivement à la mondialisation, dans un contexte de concurrence dominé par les pays anglo-saxons. Longtemps leader du marché, la France peine à s'insérer dans cette compétition, malgré des atouts importants. Elle s'alarme de la fuite de son patrimoine et des moyens de l'État pour l'endiguer. Les opérateurs du marché s'inquiètent aussi des impératifs de l'internationalisation, tout en affrontant la concurrence "intérieure" des pratiques para-commerciales attisées par l'usage d'internet. La médiatisation du marché, la flambée de l'art contemporain et l'évolution des pratiques culturelles attirent l'attention sur ce marché et ses enjeux, qui ont justifié en avril 2008 le lancement d'un plan gouvernemental pour le développement du marché de l'art français. Selon Mme Albanel « les enjeux du marché de l'art sont multiples pour la France. Ce marché constitue un véritable vecteur de croissance économique puisque plus de 50 000 emplois et près de 10 000 entreprises sont concernées. » Si un plan de relance du marché de l'art tente d'être mis en place cela laisse sous entendre que la législation actuelle, et plus particulièrement la législation fiscale en matière d'art n'est pas adaptée. Dans notre première partie nous avons recensé les éléments positifs de la politique actuelle. Celle-ci présente cependant des défauts, notamment lorsque l'on aborde la problématique d'un point de vue mondial ou, à plus petite échelle, européen (chapitre II) voir même interne avec le développement de l'e commerce (chapitre I). Chapitre I. La France et la culture: un marché freiné, entravé par sa propre législation . Actuellement les amateurs d'art, particuliers ou professionnels sont étouffés par des problèmes de législation et d'insécurité. §1. L'ISF : « entre justice sociale et enjeux culturels »52(*) L'oeuvre d'art est signe de richesse et de fortune, en toute logique, elle attise le débat fiscal. L'impôt de solidarité sur la fortune, institué par une loi du 23 décembre 1988 a repris de nombreuses dispositions applicables à l'impôt sur les grandes fortunes, en vigueur de 1982 à 1986. A l'origine il avait été proposé que les oeuvres d'art soient incluses dans l'assiette de l'IGF. Mais déjà à l'époque la nécessité de protéger le marché de l'art faisait débat et un amendement du gouvernement les en a exclus. Cette exonération fut conservée lors du passage à l'ISF. Appliqué indistinctement à tous les biens, l'impôt de solidarité sur la fortune aurait pu avoir pour effet, en frappant les oeuvres d'art, de dissuader leur acquisition et de provoquer leur dissipation, notamment à l'étranger, pour faire face au règlement de l'impôt. Afin de préserver et développer le patrimoine collectif privé, le législateur a choisi d'exonérer les oeuvres d'art. Ainsi, les oeuvres d'art, objets d'art ou de collection n'entrent pas dans le champ de la taxation sous réserve de remplir les conditions imposées par l'administration. Cependant, l'existence même de cet impôt constitue un frein aux transactions d'art en raison des risques encourus. En France l'instabilité juridique est telle qu'il pèse la crainte de voir un jour les oeuvres réinsérées dans l'ISF. Le Conseil des Impôts s'est d'ailleurs prononcé favorablement à cette mesure en 1998, mais l'Assemblée Nationale rejette chaque année le projet. Le débat sur leur intégration dans le champ d'application de cet impôt a régulièrement lieu lors de la discussion, chaque année, du projet de loi de finances. Il aura fallu, lors du vote de la dernière loi de finances, l'intervention du gouvernement sur le fondement de l'article 44, alinéa 3 de la Constitution, pour que l'amendement proposé par la commission des finances de l'Assemblée nationale soit retiré. Dans l'hypothèse d'un assujettissement de ces biens à l'impôt, il semble que la définition de l'oeuvre d'art adoptée soit la même que celle appliquée par l'administration des douanes. L'évaluation des objets qui font partie de l'assiette de l'I.S.F. s'effectuerait de façon forfaitaire, calculée sur la base de 3 à 5 % de la valeur du patrimoine du contribuable, la déclaration se faisant comme en matière de meubles meublants. Si les professionnels du marché de l'art s'émeuvent d'une possible intégration des oeuvres d'art dans le champ d'application de l'I.S.F., ce qui aurait des effets négatifs, sur le marché de l'art et sur la sauvegarde du patrimoine, le principe de cette exonération semble maintenu pour l'avenir, le ministère de la Culture étant favorable à cette disposition §2. Des mesures fiscales détournées de leur objectif: quand les particuliers se mettent à faire du commerce Le code de commerce en son article L 110-1 répute acte de commerce tous les achats de biens meubles destinés à être revendus par un professionnel agissant à titre de profession habituelle. Le collectionneur n'échappe pas à cette disposition et dès lors qu'il rempli ces conditions, sera qualifié de commerçant. Du collectionneur au commerçant la frontière est mince et le critère de commercialité est parfois difficile à apprécier. Une vente occasionnelle reste un acte de gestion privée.
Depuis une dizaine d'années le monde assiste au développement des ventes en ligne, le marché de l'art n'a pas échappé à ce phénomène et la commercialisation d'oeuvres d'art via le web est de plus en plus fréquente. L'engouement pour les sites commerciaux fait naître une nouvelle concurrence pour les lieux traditionnels du marché de l'art. Or, ce circuit économique offre aussi l'occasion à bon nombre de particuliers de poursuivre une activité "semi-professionnelle", par des achats et des ventes d'oeuvres d'art. Parmi les acteurs de la vente en ligne se trouve le particulier, qui, s'il réalise des ventes de manière occasionnelle ne revêt pas le caractère de professionnel. En effet, avant de connaitre ce mode de commercialisation les ventes entre particuliers avaient lieu sous forme de « vides greniers » ou de publication de petites annonces. Ces ventes sont soumises aux règles du droit civil et échappent totalement au régime juridique et fiscal des activités commerciales. Mais la vente sur internet ne peut pas être assimilée à ce type de commercialisation. Le gouvernement a du faire face à l'évolution de ce phénomène en prenant les mesures adéquates. Ainsi le particulier réalisant des ventes sur internet doit faire preuve de vigilance car il peut très vite basculer dans la commercialité sans en avoir conscience. Or, l'internaute particulier qui réalise de nombreuses ventes doit se déclarer comme commerçant sous peine de poursuivre une activité professionnelle dissimulée. Trois critères permettent de considérer qu'un vendeur particulier sur un site de courtage fait figure de professionnel. La régularité de l'activité : selon la fréquence des ventes réalisées par l'internaute l'activité sera considérée soit comme occasionnelle soit comme habituelle. Le caractère lucratif de l'activité : lorsque le vendeur tire des revenus de son activité de vente sur internet, même si ces revenus ne sont pas suffisants pour vivre, il pourra être taxé de professionnel. Il appartient au juge d'apprécier la situation au cas par cas. L'intention d'avoir une activité professionnelle : l'intention est démontrée par un faisceau d'indices. En premier lieu, le particulier doit avoir réalisé des achats pour revendre. Si celui-ci a crée une boutique en ligne, aménagé des locaux destinés à cette activité ou créée des publicités pour promouvoir ses biens, ces indices seront retenus par le juge pour apprécier le caractère intentionnel. §3. La volonté de développer le recours au mécénat : L'entreprise au service de l'art. Comme le souligne très justement Martin Bethenod, « aucune mesure fiscale ne transformera jamais un chef d'entreprise en mécène, qu'il ne le fera que s'il a déjà en lui cette envie, cette passion. » La loi du 23 juillet 1987 offre aux entreprises un régime de déduction de leur résultat imposable du coût d'acquisition d'oeuvres d'artistes vivants. Cette possibilité est cependant subordonnée à la condition que ces oeuvres soient exposées dans des lieux accessibles au public et aux salariés. La loi de 2003 avait déjà joué un rôle très important dans le développement de ce système de défense des causes d'intérêt national. Cependant, comme le reconnait Mme Alabanel53(*), cette loi ne constitue pas un cadre figé, il faut continuellement en améliorer les dispositions. Les mesures sont insuffisantes. A la lecture du rapport de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris sur les aspects fiscaux de la place du marché français de l'art54(*) il est possible de constater très clairement que les mesures relatives au mécénat ne sont pas suffisamment incitatives. En effet : « le mécénat et l'achat d'oeuvres d'art par les entreprises reste aujourd'hui l'apanage de grands groupes et de certains chefs d'entreprise à titre individuel. La majorité des entreprises, et surtout les PME, ne le pratiquent pas, pour des raisons financières principalement, mais aussi par manque d'information et par peur de la complexité des procédures. » Le rapport ajoute : « Mais en contrôlant de manière trop stricte ces élans de générosité, il [l'Etat] nuit à son objectif. Le contrôle nécessaire des actions doit se faire plus léger et en tous cas s'exercer plus à posteriori. » La loi de 2003 se voit reproché son champ d'application jugé trop restreint car excluant du dispositif les entreprises individuelles et les professions libérales. D'un autre côté elle est jugée peu attractive pour les petites entreprises, car le montant de la déduction est plafonné de façon uniforme à 0,5% du chiffre d'affaires. A noter. Concernant le mécénat des particuliers, le plan de renouveau propose d'étendre l'acquisition de trésors nationaux aux particuliers. L'argumentation de cette décision repose principalement sur cette illustration. Comme l'illustre l'acquisition de la fuite en Egypte, oeuvre de Nicolas Poussin. Cette acquisition fut permise grâce au concourt de plusieurs entreprises mais aussi grâce à un généreux donateur, particulier, seul partenaire de l'opération être privé du bénéfice de la loi dite « mécénat ». Dans une optique de revitalisation du marché de l'art il faut éradiquer, ou tout au moins afin d'être moins radical, assouplir, les mesures « tatillonnes » prises par le gouvernement et notamment les exigences en matière d'exposition au public qui sont largement à l'origine du peu d'effet du dispositif. Alléger les conditions d'exposition pour relancer la demande des entreprises. Encore faut-il que les chefs d'entreprise se lancent dans ce « partenariat » au service de la création. L'un des principaux aménagements souhaités par
le ministère de la culture est l'assouplissement de certaines mesures de
la loi de 2003 voire même pour certaines leur suppression. _d'une part, le dispositif sera ouvert aux entreprises individuelles et aux professions libérales ; _d'autre part, le plafond de la déduction fiscale sera relevé très sensiblement pour les PME ; _enfin, les entreprises seront laissées libres de choisir les moyens les plus appropriés pour valoriser leurs oeuvres : il pourrait s'agir, par exemple, d'un prêt à un musée. Chapitre II. L'Europe, la France et la culture: une harmonisation en marche Dès sa naissance le marché de l'art revêt une dimension internationale. Un tableau pouvait être vendu à Amsterdam et quelques mois plus tard être remis en vente à Paris. A l'origine les grandes places internationales étaient formées par le triangle Paris, Londres, Amsterdam. Il est important que ce marché se développe dans une logique mondiale. A partir du moment où l'oeuvre d'art fait l'objet de transaction, le marché doit être organisé. Cette organisation présente un certain nombre de spécificités en ce qu'elle est susceptible d'affecter le commerce entre Etats membres. En effet, les places du marché de l'art ont un caractère international et ne se limite pas au seul marché interne. La logique de protection du patrimoine est susceptible de modifier le jeu des transactions. La compétitivité du marché de l'art ne se décrète pas, elle s'organise. C'est ce qui a motivé le législateur communautaire à intervenir. Face à l'internationalisation des échanges et à la globalisation du marché de l'art, les mesures fiscales doivent faire l'objet d'une harmonisation entre les différents États membres. Les oeuvres culturelles ont une double identité, elles sont à la fois des marchandises et des biens culturels appartenant au patrimoine de notre pays. Il convient alors de les protéger mais aussi de leur appliquer une fiscalité avantageuse, notamment dans le cadre des échanges pour éviter que ces biens ne disparaissent définitivement de notre patrimoine culturel national. §1. La TVA à l'importation. La TVA sur les importations est présentée de façon récurrente comme un facteur de non compétitivité du marché de l'art communautaire, empêchant notamment le retour d'oeuvres majeures dans la Communauté. Dans le contexte actuel, contexte de concurrence entre les places du marché, la TVA à l'importation représente un véritable obstacle. En effet, les exportations appauvrissent le patrimoine et les importations d'oeuvres détenues par les étrangers se font rares compte tenu de cet impôt. Pour exemple la TVA à l'importation n'existe ni aux Etats Unis ni au Japon. La taxe sur la valeur ajoutée est un impôt indirect sur la consommation du sur les recettes. Le marché de l'art, et plus spécialement les oeuvres d'art considérées comme marchandises, est assujetti à la TVA et l'artiste n'échappe pas au paiement de cet impôt. Auparavant, l'article 261-4-5° du CGI exonérait de TVA les prestations de services et les livraisons de biens effectuées dans le cadre de leur activité libérale par les auteurs des oeuvres de l'esprit désignées à l'article 3 de la loi n° 57-298 du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique, à l'exclusion des opérations réalisées par les architectes et les auteurs de logiciels. L'article 261-4-6° exonérait les prestations fournies par les interprètes des oeuvres de l'esprit et les artistes du spectacle. Depuis le 1er octobre 1991 les auteurs d'oeuvre de l'esprit sont soumis à la TVA55(*). Aux termes de l'article 5 de la loi du 26 juillet 1991, précitée, les auteurs et interprètes d'oeuvres de l'esprit sont soumis de plein droit à la TVA. Avant l'entrée en vigueur de cette disposition, cette taxe était pour les artistes une faculté à titre d'option. Cependant, afin d'atténuer les effets néfastes de cette taxe, un régime dérogatoire, spécifique aux oeuvres artistiques a été mis en place. Le régime de TVA applicable aux oeuvres d'art résulte de la 7eme directive communautaire du 14 février 1994, transcrite dans le droit national le 29 décembre de la même année. La directive repose sur un principe général : Les ventes de biens à destination de pays qui ne font pas partie de l'Union européenne sont exonérées, car les exportations sont porteuses de croissance et d'emplois. En revanche, les importations, quelle que soit la qualité de la personne qui les effectue, sont taxées, afin de dissuader les achats hors Union européenne. Deux mesures incitatives ont été mises en place. D'une part, l'artiste qui vend ses oeuvres ou qui cède ses droits est donc assujetti à la TVA. Il bénéficie cependant d'un taux de TVA minoré, ces transactions sont soumises au taux réduit de 5,5%. D'autre part, les biens importés temporairement en vue d'être exposés bénéficient d'un régime suspensif. En conséquence, dans le cas d'une vente aux enchères publiques, les oeuvres d'art sont admises en exonération de droits, et ne sont pas considérées comme importées tant que la vente n'a pas eu lieu, à condition qu'elle intervienne dans un délai de deux ans. Il faut aussi souligner que dès lors qu'une oeuvre ne fait pas partie d'une des catégories énumérées par le Code Général des Impôts c'est le taux normal de TVA qui s'applique. Cette distinction ne manque pas de soulever des difficultés. Les exportations sont quant à elles exonérées de TVA (article 262-I CGI) et ouvrent droit à la déduction de TVA qui a grevé le coût d'acquisition du bien. §2 .Un réel handicap pour le marché de l'art Malgré tout, la TVA à l'importation reste le principal handicap du marché français. Jean jacques Alliagon disait à juste titre: « La TVA à l'importation peut décourager la localisation en Europe de ventes importantes et n'assure que de faibles recettes au budget de l'État » On recense depuis une dizaine d'années un réel essoufflement du marché de l'art européen qui laisse transparaitre une certaine fragilité causée notamment par l'application de mesures fiscales inadéquates, principalement la TVA à l'importation. En effet, ce régime est de nature à porter atteinte au dynamisme du marché de l'art, en « mettant une barrière à l'entrée des oeuvres d'art dans l'Union Européenne »56(*) . La conséquence qui en résulte est une délocalisation extra-européenne des oeuvres d'art. Au regard de nombreux rapports rendus au fil des années la TVA à l'importation est présenté comme un facteur de non compétitivité du marché. Ces rapports s'accordent sur la nécessité de supprimer cette taxe. Le rapport Chandernagor, du nom de son auteur, constate que « la France se situe loin derrière ses principaux concurrents, en matière de dynamisme commercial ». Pour contourner cette situation, il préconisait, à défaut de mettre en place un taux zéro, de recourir à un taux intermédiaire de 2,5%, du même ordre que celui appliqué par l'Angleterre afin d'éviter que la taxe ne produise des effets non négligeables sur le patrimoine national en agissant comme un droit de douane dissuasif à l'entrée de notre marché le renfermant alors sur lui-même. Le rapport Aicardi57(*) quant à lui estimait que le fait d'appliquer la TVA à l'importation procède d'une mauvaise compréhension du marché de l'art : « ce n'est pas comme pour tous les marchés de biens et de services, l'exportation qui est favorable, elle appauvrit le patrimoine national, mais l'importation l'accroit. » Il faut en effet, prendre beaucoup plus en compte la spécificité que présente le marché de l'art contemporain par rapport aux autres marchés économique, dans l'application de cette taxe. Ainsi la mécanique de la TVA joue à la fois contre le marché de l'art français et contre le patrimoine. En 1999, le rapport de la délégation de l'Assemblée Nationale opérait le constat suivant : « Les Etats-Unis et l'ensemble des pays tiers [à l'Union européenne] présentent, dans l'ensemble, un marché de l'art plus dynamique que le marché européen. » Les amateurs d'art se tournent alors vers les places du marché offrant une fiscalité plus attractive et moins contraignante. Les oeuvres transitent principalement par New York. Les Etats Unis et le Japon n'ayant pas de taxe à l'importation. Il y a bien une « sale taxe » aux Etats Unis mais celles-ci présentent des caractères très éloignés de ceux de notre taxe. Les rapports sont unanimes sur le sujet et préconisent la suppression, ou moins radicalement l'atténuation de cette taxe. La suppression permettrait : D'accentuer le dynamisme du marché D'enrichir sur le long terme le patrimoine européen, ou au moins d'en réduire l'appauvrissement. Le maintien de cette taxe est totalement illogique si l'Europe souhaite que les oeuvres transitent sur son territoire. Il faut noter en outre que cette taxe ne présente pas un gain significatif pour l'Etat, comme le note Monsieur Lellouche dans son rapport58(*) . La TVA à l'importation n'est cependant pas le seul obstacle européen. Le droit de suite contribue aussi fortement au déclin du marché. Une harmonisation européenne est ici aussi nécessaire. Il a d'ailleurs déjà fait l'objet de réforme. §3. Les effets néfastes du droit de suite. Le droit de suite est un prélèvement sur le produit de la vente d'une oeuvre d'art contemporaine Le concept de droit de suite est né en France vers 1890, à la suite de récits, parfois vrais, concernant des artistes vivant dans la misère alors que marchands et collectionneurs s'enrichissaient en se revendant leurs oeuvres. Le sentiment d'injustice à l'égard des artistes a joué un rôle important dans l'invention de ce nouveau droit. Depuis la naissance du droit de suite, de nombreux traités internationaux visant la protection des doits des artistes ont été signés. La Convention de Berne relative à la protection des oeuvres littéraires et artistiques, modifiée par l'Acte de Paris en 1971 est l'un des textes les plus importants en la matière. L'article 14ter stipule que l'on confère à l'auteur d'une oeuvre d'art originale un droit inaliénable qui lui octroie un pourcentage du prix lors de toute transaction ultérieure de son oeuvre. Cependant, le détail des dispositions a été laissé à l'appréciation des législations nationales, ce qui explique que l'application des conventions internationales est loin d'être uniforme. Le droit de suite a été introduit dans le droit français en 1920 pour des raisons d'équité entre artistes et marchands : il représente un pourcentage (allant de 0,5 à 4 %) du prix de revente des oeuvres, versé par les professionnels du marché de l'art (galeries et maisons de vente) au profit des artistes et de leur famille. Son montant ne peut excéder 12 500 euros. Tout comme le droit d'auteur, il est inaliénable et perdure 70 ans après la mort de l'artiste. Il permet notamment aux artistes qui ont vendu leurs oeuvres de jeunesse à bas prix de profiter ensuite des prix élevés auxquels celles-ci peuvent être vendues lors de transactions ultérieures. Galeries d'art et maisons de vente sont très critiques vis à vis de ce droit qu'elles rendent responsables du déplacement des ventes d'art contemporain dans des pays sans droit de suite. Ce droit n'existe pas dans tous les pays (Etats-Unis, Grande Bretagne, Suisse). Dans les pays européens où il existe son taux diffère de 2 à5% avec souvent un système progressif par tranches. Cela entraîne des distorsions de concurrence. La directive de 2006 a légèrement atténué cet effet en proposant une généralisation de ce droit à tous les pays membres de l'Union Européenne et l'harmonisation de son montant. Elle devait être transposée en France avant 2006, mais certains États disposaient de dérogation ceux-ci pouvant la transposer jusqu'en 2010. (Il s'agit des pays sans droit de suite comme la Grande Bretagne.) Le délai de transposition accordé aux pays ne connaissant pas le droit de suite est excessivement long rendant la directive non efficace immédiatement. Le rapport Bethenod relatif au plan de relance du marché de l'art mentionne lui aussi les difficultés liées au droit de suite. Selon Christine Albanel, « Les effets de ce droit de suite n'ont pu être suffisamment bien évalués lors de la transposition dans notre droit, en 2006 [article L. 122-8 du Code de la propriété intellectuelle], de la directive de 2001 qui pose son principe . Ce droit est inconnu de places comme New York, Hong Kong ou Genève, poursuit la ministre. Surtout, au sein même de l'Union européenne, le Royaume-Uni a fait le choix, ouvert par la directive, de n'appliquer le droit de suite que sur les ventes d'artistes vivants. Une distorsion majeure s'est ainsi instituée entre la place de Paris et sa rivale la plus immédiate, celle de Londres ». La France qui préside actuellement l'Union Européenne compte bien tirer profit de cette position en égalisant les distorsions entre les membres. ANNEXES Annexe n°1. Tableau synthétique comparatif entre mécénat et parrainage
(c)Brigitte Legros2004 espaceculture mars 2004 Annexe n° 2 Discours de Christine Albanel lors de
la remise du rapport de Martin Bethenod et de la présentation du «
Plan de renouveau pour le marché de l'art français
» « Mesdames et Messieurs, a)Encourager les Français à devenir
collectionneurs. b) En ce qui concerne les entreprises, nous allons
élargir leur intervention sur le marché de l'art en
étendant le bénéfice du mécénat aux
entreprises individuelles et aux PME. 2. Le second axe de ce Plan consiste à
améliorer la compétitivité du marché de l'art
français et de sesacteurs. a) La première urgence est d'alléger et de
moderniser la réglementation applicable aux ventes publiques
volontaires. b) Nous devons également aménager le cadre
européen pour en tirer le meilleur parti. Annexe n°3 Tableau récapitulatif des différents statuts fiscaux de l'artiste
Source : Chambaud V. Le statut fiscal de l'artiste BIBLIOGRAPHIE Textes de loi Loi n° 68-1251 du 31 décembre 1968 tendant à favoriser la conservation du patrimoine national Loi du 25 juillet 1975 L'article 6 de la loi de finance rectificative pour 1982 n° 82-540 du 28 juin 1982. JO du 28 juin 1982 Loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat. JO 24 juillet 1987 L'article 26 de la loi de finance pour 1988 n° 87-1060 du 30 décembre 1987. JO du 31 décembre 1987 Loi du 26 juillet 1991 n° 91-716. JO du 27 juillet 1991 Loi de finance 2004, n°2003-1311, JO du 30 Décembre 2003 Loi 18 janvier 2005 n° 2005-32 du de programmation pour la cohésion sociale Loi de finance pour 2009 n° 2008-1425 du 27 décembre 2008. JO du 28 décembre 2008 Arrêté du 6 janvier 1989 relatif à la terminologie économique et financière. « le soutien matériel apporté sans contrepartie directe de la part du bénéficiaire à une oeuvre ou à une personne pour l'exercice d'activités présentant un intérêt général. » Décret n°81-255 du 3 mars 1981 sur la répression des fraudes en matière de transactions d'oeuvres d'art et d'objets de collection . Discours Discours de Christine Albanel lors de la remise du rapport de Martin Bethenod et de la présentation du « Plan de renouveau pour le marché de l'art français » mercredi 02 avril 2008 http/www.memoire\Plan de renouveau pour le marché de l'art français - 2 avril 2008.mht Instructions fiscales Instruction fiscale du 24 octobre 2002, 4 C-6-02, BOI n° 184 relative aux mesures visant à favoriser le mécénat Instruction n°5B-9-04 du 9 avril 2004, BOI n°66 relative au mécénat des particuliers Instruction 4 C-5-04 n°112 du 13 juillet 2004 relatives aux mesures visant à encourager le mécénat d'entreprises Instruction fiscale du 18 décembre 2006 4 H-5-06 BOI n° 208 relative au régime fiscal des organismes sans but lucratif Instruction fiscale du 9 décembre 2008, 5 b-19-08, BOI n°103 relative à la réduction d'impôt sur le revenu au titre des dons aux oeuvres versé par les particuliers. Commentaires de l'article 23 de la loi de finances rectificative pour 2007 Revues juridiques Droit et Patrimoine « Marché de l'art et droit » Droit et Patrimoine n°176 Décembre 2008 La Documentation Française, catégorie Revue TRONQUOY (P.) « Les politiques culturelles », cahiers français, La documentation Française n°348 Janvier Février 2009 Le journal des Arts SCHMITT (J.M). - " Pour une taxe sur la valeur ajoutée réduite sur les biens culturels ". Le Journal des Arts, No. 153, 30 août-12 septembre 2002, p. 24-25. Les petites affiches PERROTIN Frédérique « La fiscalité de l'art: un plan de renouveau », Les petites affiches 27 Mai 2008 n°101 RIOU (A.) « Un peu de fiscalité culturelle » Les petites affiches 8 juillet 1994 n°81 « Les mesures législatives fiscales dans le domaine de l'art » Les petites affiches 18 juillet 2009 LGDJ RELLAS J.-R., « La fiscalité du patrimoine culturel », L.G.D.J., 2003. Nota Bene BOUSSEAU (N.) « Dation en paiement par remise d'oeuvre d'art » Nota Bene n°138 Novembre 2008 BOUSSEAU (N.) « Mesures phares pour le renouveau du marché de l'art tricolore » Veille juridique Rapports officiels BETHENOD (M.) Rapport remis à Christine Albanel, « prpositions en faveur du développement du marché de l'art en France », 2008 CAPIA (R.) Rapport présenté au nom de la commission fiscale de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris, « Quelle place pour le marché de l'art en France ? - Aspects fiscaux », 2000. GAILLARD (Y.). - Marché de l'art : les chances
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la protection des trésors nationaux et les moyens d'acquisition
d'oeuvres d'art par l'État. La Documentation française,
2001. Ouvrages CHAMBAUD (V)., « Guide juridique et fiscal de l'artiste » collection entrepreneurs Dunod, 2007 CHATELAIN (J.) PATTYN (C.) . - OEuvres d'art et objets de collection en droit français, Berger-Levrault, 1999. Voir en particulier le chapitre V consacré à "La fiscalité des oeuvres d'art et objets de collection" pages 105-120. Durand Robert « Droit du marché de l'art » Dalloz 2004 FINGERHUT (J.). - La fiscalité du marché de l'art. - Paris : Presses universitaires de France, 1999 FINGERHUT (J.). - La fiscalité des oeuvres d'art / Préface de Gilbert Tixier. - Paris : Economica, 1996. LAMARQUE (G.). - Droit et fiscalité du marché de l'art. - Paris : Presses universitaires de France, 1992 LENA (H.) - Fiscalité du mécénat : dons, oeuvres d'art, parrainage, sponsoring, fondations d'entreprise. - Paris : Presses universitaires de France, 1991 Quemin A. « L'art contemporain: entre institution et marché » Jacqueline Chambon, 2002 Tchakaloff Marie-France Christophe , professeur de droit public à l'Université de Paris I L'Europe en son labyrinthe : comment relancer le marché de l'art français. Mars 2008 Manuels, Mémentos Mémentos Francis Lefebvre Mémento Francis Lefebvre « Fiscal », édition 2009 Manuel Cauzian (M .) Précis de fiscalité des entreprises Litec, édition 2008-2009 Jurisclasseur « Circulation des biens culturels » Jurisclasseur Europe Traité. Fasc 2400 8 Mai 2008 Jurisprudence CAA Nantes 27 Mai 1996 CA Paris 23 Novembre 1982 CE, 20 oct. 1982, req. n° 22988 : RJF 12/82, n° 1132 CE, 9 juill. 1980, req. n° 12982. - CAA Nancy, 7 avr. 1994, req. n° 92768 : RJF 3/95, n° 347 CAA Nancy, 27 févr. 1992 : RJF 7/92, n° 998. - CAA Nantes, 22 déc. 1993, req. n° 92312 : RJF 4/94, n° 431 Sites internet www.culture.gouv.fr www.efl.fr Navis fisal www.gazette-drouot.com www.inforeg.ccip.fr Chambre du commerce et de l'industrie TABLE DES ABREVIATIONS art. article al. alinéa BIC bénéfices industriels et commerciaux BNC bénéfices non commerciaux BOI bulletin officiel des impôts CA Cour d'appel CAA Cour administrative d'appel Cass. com Cour de cassation, chambre commerciale CE Conseil d'Etat C. civ. code civil CGI code général des impôts CPI code de la propriété intellectuelle CRDS contribution au remboursement de la dette sociale Doc. adm. documentation administrative IGF impôt sur les grandes fortunes ISF impôt de solidarité sur la fortune Inst. adm. instruction administrative PME petites et moyennes entreprises TVA taxe sur la valeur ajoutée SOMMAIRE * 50 Sur la différence entre le mécénat et le parrainage se reporter à l'annexe n°1 * 51 Rapport de la mission de réflexion et de concertation en vue de proposer un plan de renouveau du marché de l'art. * 52 Gazette Drouot expression employée par Jacques Fingerhut * 53 Discours de Christine Albanel, ministre de la Culture et de la Communication, prononcé à l'occasion la remise de la distinction de Grand Mécène du ministère de la Culture à la Fondation Bettencourt Schueller, à LVMH/Moët Hennessy - Louis Vuitton, à la Fondation Orange, à la Fondation Gaz de France, à Natixis et à HSBC France ; et de la distinction de Grand Donateur à Monsieur et Madame Hugues Lepic, mécènes du musée du Louvre mardi 29 janvier 2008 * 54 Rapport présenté au nom de la commission fiscale de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris, « Quelle place pour le marché de l'art en France ? - Aspects fiscaux », par R. CAPIA, 2000. * 55 loi n° 91-716 du 26 juillet 1991 * 56 Robert Capia quelle place pour le marché de l'art en france? Ccip 2000 * 57 Rapport de la commission d'études pour la défense et l'enrichissement du patrimoine national et le Développement du marché de l'art présidée par M. Aicardi, fait à la demande du Premier ministre, 1995. * 58 Rapport d'information déposé par la délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne sur « La fiscalité du marché de l'art en Europe », par P. LELLOUCHE, 2003. |
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