WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Regards sur la traduction juridique du développement durable

( Télécharger le fichier original )
par Cyrille Emery
Université du Maine - Master 2 recherche en géographie 2010
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

B. Enjeux et débats

B.1. Un constat qui ne fait pas l'unanimité

L'urgence du développement durable repose sur l'affirmation préalable d'un constat, dont l'établissement suppose lui-même la réponse à trois questions. Première question : y a-t-il oui ou non une dégradation de la nature dans la période contemporaine ? Deuxième question : si dégradation il y a, celle-ci trouve-t-elle oui ou non son origine dans l'activité humaine (facteur anthropique) ? Enfin, troisième question : s'agit-il oui ou non d'un phénomène irréversible ?

Pour la grande majorité des scientifiques, le dérèglement climatique et l'épuisement des ressources naturelles trouvent leur origine dans l'activité humaine, et les deux phénomènes présentent des risques d'irréversibilité. La loi du 12 juillet 2010, dite Ç Grenelle II >>, ne dit pas autre chose : Ç L'objectif de développement durable répond (É) à cinq finalités : 1 La lutte contre le changement climatique >>. Les experts ne contestent pas, de manière générale, l'existence de cycles naturels (variabilité naturelle),

15 Maréchal (J.-P.), Ç Développement durable >> in Dictionnaire des risques, Paris, sous la direction d'Yves Dupont, éditions Armand Colin 2004.

16 Bürgenmeier (B.), Économie du développement durable, Bruxelles, éditions de Boeck, 2ème édition 2005.

et notamment une activité solaire plus intense ces dernières années ; mais de tels phénomènes ne suffisent pas, selon eux, à expliquer l'évolution récente du climat et de l'état des ressources naturelles. En d'autres termes, l'homme aggrave fortement l'évolution actuelle du climat et de l'état des ressources disponibles.

Pour une minorité d'experts cependant, les données obtenues depuis quelques dizaines d'années seulement ne peuvent être interprétées sur une longue période et ne révèlent pas d'irréversibilité. La concentration en CO2 n'évolue pas, selon eux, en fonction des activités humaines, mais principalement en raison de l'interaction entre les océans et l'air (par absorption ou rejet de CO2 en fonction de la température). Le facteur anthropique serait négligeable, c'est notamment la thèse du professeur Claude Allègre.

Par ailleurs, comme on l'a vu, les plus optimistes considèrent que la pollution, qui est réelle, suit une Ç courbe de Kuznets È, c'est-à-dire qu'après une période d'augmentation, elle devrait baisser en raison d'un phénomène d'allocation des ressources aboutissant à combattre les effets de cette pollution.

Peut-on contribuer à définir des objectifs, des politiques et une gamme d'instruments juridiques à partir d'un constat aussi peu consensuel ? Pour tenter de mettre tout le monde d'accord sur le constat, un rapport dénommé Millenium Ecosystem Assesment a été publié en 2005, à la demande du Secrétaire général des Nations Unies. Ce travail, l'un des plus importants entrepris par l'humanité depuis ses origines, a permis d'obtenir des résultats concrets, à la fois en ce qui concerne l'état des ressources naturelles et de l'évolution du climat.

Que dit le rapport ? S'agissant de l'eau, le rapport affirme que la quantité d'eau extraite des rivières et des lacs pour l'irrigation, les besoins domestiques et l'usage industriel a doublé au cours des 40 dernières années. Il précise que, depuis le début des années 1980, environ 35 % des mangroves ont disparu, 20 % des coraux dans le monde ont été détruits et 20 % de plus ont été sérieusement dégradés. Ces constituants essentiels des écosystèmes avaient mis plusieurs centaines, voire plusieurs milliers d'années à se constituer.

Les auteurs du rapport constatent également que les activités humaines produisent aujourd'hui plus d'azote utilisable biologiquement que tous les processus naturels combinés, et que plus de la moitié des engrais azotés manufacturés jamais utilisés ont

été appliqués depuis 1985. Le rapport constate que l'afflux d'azote dans les océans a doublé depuis 1860 ; que l'utilisation d'engrais phosphorés et le taux d'accumulation du phosphore dans les sols agricoles ont triplé entre 1960 et 1990.

En ce qui concerne les aspects économiques et sociaux du développement durable, le rapport note qu'en 2001, 1 milliard de personnes survivaient avec un revenu inférieur à un dollar par jour. Il ajoute que l'inégalité dans les revenus a augmenté au cours de la dernière décennie. Un enfant qui na»t en Afrique sub-saharienne a 20 fois plus de risques de décéder avant l'âge de cinq ans qu'un enfant qui na»t dans un pays industriel ; mais surtout, selon le rapport, cette disparité est plus grande qu'il y a une décennie. En dépit de la croissance de la production alimentaire par personne durant les quatre dernières décennies, le rapport estime que 856 millions de personnes étaient en état de malnutrition en 2000-2002, soit 32 millions de plus qu'en 1995-1997.

Enfin, toujours selon le rapport, environ 1,1 milliard d'êtres humains n'ont toujours pas accès à l'eau pour leurs besoins quotidiens. La pénurie d'eau touche entre 1 et 2 milliards de personnes dans le monde. Depuis 1960, le ratio entre l'utilisation de l'eau et les réserves d'eau accessibles s'est accru de 20 % par décennie.

La réponse juridique pourrait se trouver au niveau des arbitrages, c'est-à-dire au niveau de la prise de décision. C'est que laissent entendre deux chercheurs canadiens : Ç Il est de plus en plus difficile, socialement et politiquement, de faire des choix sans tenir compte des effets et des conséquences de nos priorités de développement ou de nos choix en matière d'investissement dans les infrastructures publiques ou industrielles. Le principe d'un développement viable semble, en théorie du moins, faire largement consensus. Dans les faits toutefois, cette idée se transforme souvent en alibi démagogique pour apaiser les bonnes consciences. Il y a une marge entre un souci véritable de favoriser un développement compatible avec une vision écologique de l'environnement et un discours idéologique qui se greffe après coup sur des choix ou des stratégies économiques qui, de prime abord, semblent définies exclusivement en fonction d'une lecture strictement économique ou sectorielle du développement, lecture qui ne tient pas compte des effets néfastes à moyen ou long terme des décisions prises

aujourd'hui. Comment les priorités économiques et environnementales peuvent-elles être conciliées avec le programme d'un développement viable ou Ç durable >> ? >>17.

Cette difficulté à traduire ou à concilier entre eux des objectifs mal définis transpara»t encore dans l'analyse d'Emmanuel Torres : Ç En s'intéressant à l'environnement urbain et à la problématique de la ville durable, l'économie rencontre un certain nombre de difficultés notamment dues à la nature actuelle de ses méthodes (très centrées sur la valorisation monétaire), au croisement de questionnements sur deus réalités difficiles à conceptualiser : la ville et l'environnement, et à la difficulté de transformer les grands principes généraux du développement durable en concepts opératoires débouchant sur l'action locale >>18. Il n'en va pas autrement pour le droit, comme le montre l'échec du droit du développement dans les années soixante.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Et il n'est rien de plus beau que l'instant qui précède le voyage, l'instant ou l'horizon de demain vient nous rendre visite et nous dire ses promesses"   Milan Kundera