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Regards sur la traduction juridique du développement durable

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par Cyrille Emery
Université du Maine - Master 2 recherche en géographie 2010
  

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B.2. Les caractéristiques du marché

Sur ce point, le marché public de restauration scolaire passé en 2009 par la ville de Strasbourg est un bon exemple de la mise en Ïuvre du développement durable à l'échelle territoriale. L'adjointe au maire chargée des marchés publics et de la politique d'achats, Chantal Augé, a répondu aux questions du Moniteur des travaux publics & du b%otiment et du site d'information achatpublic.info. Pour elle, la commande publique est effectivement un levier qui peut entrainer les fournisseurs dans une démarche plus systématique. En 2009, la ville a commencé à insérer de manière substantielle des exigences environnementales et sociales dans son marché de restauration scolaire.

L'avis d'appel public à candidature pour ce marché94 a été publié le 23 juillet 2009 au Journal officiel de l'Union européenne95. La description de l'objet du marché était la

94 On notera qu'il s'agit d'un accord-cadre mais, par souci de simplification, on utilisera ici le terme de marché public.

95 Avis n° 202988-2009, 23 juillet 2009.

suivante : Ç fourniture de repas pour les restaurants scolaires des écoles maternelles et élémentaires et les établissements d'accueil de la Petite Enfance de la Ville de Strasbourg - marché à vocation de développement durable È. Les critères d'attribution du marché à l'offre économiquement la plus avantageuse étaient libellés de la manière suivante :

1. Valeur technique. Pondération : 45.

2. Prix des prestations. Pondération : 35.

3. Développement durable. Pondération : 20.

La prise en compte des différentes facettes du développement durable au cours de l'opération a séduit le jury de la deuxième édition des Trophées de la commande publique, placée sous le parrainage du ministère du Budget, qui lui a attribué la première place dans la catégorie Ç achat durable È à l'occasion du Salon des maires et des collectivités locales (Smcl). Ç La loi sur le Grenelle de l'environnement impose un minimum de 20 % d'aliments issus de l'agriculture biologique dans toute la restauration collective à partir de 2012. Nous n'avons pas attendu cette date pour introduire du bio dans la restauration scolaire qui représente 33 % de la restauration collective È, poursuit l'adjointe aux marchés publics. Ç Chaque jour environ 5 800 repas sont livrés dans les restaurants scolaires de la ville qui ne disposent pas de cuisine centrale mais uniquement de fours pour réchauffer les plats livrés. Avec cette démarche ambitieuse, nos objectifs étaient de réduire de 3 % par an au minimum les émissions de CO! générés par les repas livrés, de promouvoir une alimentation fondée sur la consommation d'aliments respectueux du développement durable, de développer la filière d'agriculture biologique, de promouvoir l'emploi des personnes en difficulté d'insertion, complète Michèle Jean-Olive, coordinatrice des achats à la ville. Nous avons essayé d'exploiter au mieux les possibilités offertes par le code des marchés publics, mais aussi d'avoir un rTMle éducatif et citoyen. Nous souhaitons sensibiliser les élèves, mais aussi leurs parents et entourage à développer des comportements respectueux du développement durable et à réduire leurs émissions de CO! È, ajoute Madame Augé.

B.2.1. 22 % à 44 % d'alimentation biologique dans les assiettes

La ville a commencé à travailler sur le marché fin 2008. Si elle n'a pas fait appel à une assistance extérieure pour la rédaction du cahier des charges, son service des achats

et de la commande publique a veillé à fournir à la direction de l'éducation une réponse adaptée à ses besoins. Ç Pour la préparation des menus, nous devions rester dans un certain équilibre nutritionnel, leur connaissance spécifique du domaine nous a beaucoup aidé. Nous avons également sollicité l'avis de l'agence de l'environnement et de la ma»trise de l'énergie (Ademe) et demandé des conseils aux organismes qui ont des connaissances en matière d'insertion sociale, tels que les relais emplois-chantiers. Nous avons également regardé ce qui avait été fait par d'autres collectivités È, précise la coordonnatrice. Des fréquences minimales par catégorie d'aliments biologiques (légumes fruits, produits laitiers frais, viande ou Ïufs, pain, céréales ou légumes secs), ont été définies dans le Cctp (1). La fréquence sera différente si l'école fait partie des sites expérimentaux. Ç Toutes les écoles de la ville vont avoir du bio dans leurs assiettes. Mais l'offre en aliments issus de l'agriculture biologique est à l'heure actuelle insuffisante. Le marché stipule que les repas doivent être composés au minimum de 22 % de bio. Ce pourcentage est élevé à 44 % pour 15 % des restaurants scolaires désignés en tant que sites expérimentaux. Ainsi par exemple pour les légumes la fréquence minimale est de deux fois par semaine, quatre fois par semaine pour les sites expérimentaux, pour la viande ou les Ïufs deux fois par mois ou une fois par semaine, détaille Michèle Jean-Olive. Si l'offre en produits bio est suffisante, l'expérimentation pourra être étendue à d'autres sites par avenant È, poursuit-elle.

B.2.2. Bio implique-t-il local ? L'exemple de Lons-le-Saunier

Sur ce point, on peut citer également l'exemple de la ville de Lons-le-Saunier, dont le député-maire, Jacques Pélissard, président de l'Association des maires de France, est un spécialiste du droit de l'environnement souvent cité parmi les Ç ministrables È ces dernières années. Le rapport Pitte-Coffe fait état de la politique alimentaire de la ville de Lons-le-Saunier : Ç L'utilisation de produits bio locaux est à encourager vivement. Elle semble inaccessible et trop onéreuse pour tous les responsables qui ont été interrogés à ce sujet. Pourtant, il existe un excellent exemple hors Cnous, celui de la ville de Lons-leSaunier (Jura). Une cuisine centrale, placée sous la direction de M. Thévenet, y prépare tous les repas de restauration collective (écoles, collèges, lycées, hôpitaux, maisons de retraite, prison, restaurants municipaux) exclusivement à partir de produits bios. Les marchés sont passés avec des fournisseurs locaux et les coüts entrent dans des contraintes budgétaires semblables à celles des Crous. È

En dépit de l'intérêt de cet exemple, on ignore malheureusement à quelles conditions la ville jurassienne a pu retenir exclusivement des Ç fournisseurs locaux >> comme l'indique le rapport. La préférence locale étant interdite, comme cela a été rappelé, le caractère local des aliments ne peut être utilisé comme un critère de sélection pour l'attribution du marché aux fournisseurs. La ville de Strasbourg a eu du mal à éviter cet écueil. Bien qu'elle fait tous les efforts possibles pour ne pas mentionner dans le cahier des charges du marché sa préférence pour le recours à des fournisseurs, elle a néanmoins précisé, s'agissant du pain, que celui-ci devrait être acheté auprès des boulangeries locales. Une telle mention est illégale. Comme on l'a déjà vu, la ville pouvait décrire les caractéristique attendues du pain, notamment sa fraicheur, sans pour autant imposer d'implantation locale.

Mise à part cette irrégularité, commune à un grand nombre d'acheteurs publics, la ville de Strasbourg a procédé différemment pour décrire ses attentes à l'égard du marché de restauration scolaire. Elle a élaboré une grille afin de calculer le coüt carbone. Cette grille est inspirée du tableur Carbone Cantine élaboré par David Jadaud.

B.2.3. Une grille pour calculer le coOt carbone

20 % de la note globale, c'est la pondération accordée par Strasbourg au critère Ç développement durable >>, découpé en deux volets : le volet environnemental pondéré à 13 % et le volet insertion sociale pondéré à 7 %. Ç Pour ce premier volet nous avons utilisé deux sous-critères, le coüt carbone de 5 menus-types et les conditions d'approvisionnement des aliments. S'agissant du sous-critère coüt carbone, la ville a fonctionné par simulation. Nous avons remis aux candidats un cadre de réponse permettant de calculer le coüt en kilogrammes équivalents carbone pour la réalisation de ces menus-types pour 6 000 repas. Chacun des candidats devait indiquer le lieu de provenance, le nombre de kilomètres entre le lieu de provenance et Strasbourg et le mode de transport, routier, fluvial, ferré, aérien >>, détaille la coordinatrice des achats. Au-delà de la simulation, le titulaire, dont le marché a été conclu à compter du 1er septembre 2009, devra rendre des comptes à la ville lors de l'exécution du marché. Ainsi il est tenu de diminuer les émissions de CO! liées aux prestations du marché au minimum de 3 % chaque année. Ç Ce minimum de 3 % par an est l'application du Ç facteur 4 >> du protocole de Kyoto. En introduisant le protocole en droit interne, la France s'est engagée à diviser par 4 ses émissions de gaz à effet de serre d'ici 2050. La traduction de ce principe revient à une diminution de 3 % par an >>, précise Chantal

Augé. En cas de non respect de cette exigence, la ville pourra ne pas reconduire le marché. Ç Pour contrôler le respect de cette obligation, le titulaire devra fournir trimestriellement une liste indiquant les tonnages utilisés pour chaque aliment qui entre dans la confection des repas livrés durant la période concernée. Il devra de plus, indiquer systématiquement les lieux de provenances et les modes de transports des aliments. Pour nous aider dans le contrôle, nous nous sommes dotés d'un calculateur carbone pour établir les tonnes équivalent CO! du marché È, précise Michèle Jean-Olive.

B.2.4. Le tableur Carbone Cantine

Élaboré par David Jadaud et mis à jour en aoüt 2009, le tableur Carbone Cantine permet de faire une estimation des émissions de gaz à effet de serre (GES) liées aux choix des aliments. Il permet aussi de simuler l'impact des modifications tout en s'assurant du respect des principales contraintes nutritionnelles et du volume de produits issus de l'agriculture biologique.

Principe de définition du facteur d'émission de chaque produit
(D. Jadaud, Tableur Carbone Cantine, 28 aoOt 2009).

Le principe de Carbone Cantine
(D. Jadaud, Tableur Carbone Cantine, 28 aoOt 2009).

Selon l'auteur, Ç chaque aliment est associé à une série de données : - facteur d'émission de la production en agriculture conventionnelle - coefficient en cas de production biologique - coefficient de saisonnalité, en cas de production hors saison - majorations liées au mode de conservation (surgélation, réfrigération, conserve, séchage) - majoration liée aux processus de transformation - majorations liées au transport (importation hors Europe, importation Europe-Méditerranée, production nationale ou locale) - composition nutritionnelle (protides, lipides et glucides). È

En ce qui concerne l'origine géographique des aliments, Carbone Cantine distingue quatre situations : - les importations hors Europe-Méditerranée ; - les importations depuis l'Europe ou la Méditerranée ; - les productions nationales ; - les productions locales. En combinant les données extraites d'une étude Ademe - Bio IS pour les fruits et légumes exotiques ou hors saison pour l'année 2006, Carbone Cantine pose l'hypothèse suivante pour les importations hors Europe-Méditerranée :


· Le volume global dépasse les 4 000 000 tonnes. Le transport aérien ne concerne que 1 % de ce volume qui est considéré ici comme négligeable.

· Le volume total des émissions de GES est estimé à 1 000 000 tonnes éq. CO2. Le transport aérien pèse pour 24 % sur ce total. On ne s'intéresse ici qu'aux denrées qui transitent par bateau et par camion, ce qui représente 760 000 tonnes éq. CO2 de GES.

· Les produits hors saison représentent 63 % des volumes importés (37 % pour les produits exotiques). On fait l'hypothèse que le transport aérien se répartit uniformément entre ces deux catégories.

· Le hors saison représente 53 % des émissions et l'exotique 47 %, ce qui représente respectivement 402 800 et 357 200 tonnes éq. CO2.

Carbone Cantine conclut à une majoration à appliquer de 66 kg éq. C / t de fruits exotiques. Pour les productions venant d'Europe ou de Méditerranée, le tableur part du scénario suivant :

· Distance 1 800 km (Alméria - Bourges) ;

· Transport par tracteur routier non réfrigéré : 29,4 g éq C / t.km.

On obtient alors une majoration de 53 kg éq. C / t. Le tableur Opération Carbone (Source Guillaume Chouvellon) retient une majoration de 42 kg éq. C / t.

Pour les productions nationales et locales, l'auteur de Carbone Cantine construit les scénarios suivants :

· Production nationale : distance 585 km (Bourges-Strasbourg) parcouru avec un porteur de PTAC compris entre 11 et 19 tonnes (74,9 g éq. C / t.km) ;

· Production locale : distance 37 km (Issoudun-Bourges), réalisée en 3,5 tonnes (331,7 g éq. C / t. km).

Carbone Cantine conclut à une majoration de 44 et 12 kg éq. C / tonnes pour les productions nationales et locales.

B.2.5. Les limites du tableur Carbone Cantine

Nous avons mis en évidence les données du tableur Carbone Cantine liées à l'origine géographique des aliments. Carbone Cantine fait entrer, néanmoins, dans son calcul, un

certain nombre de données telles que le caractère séché, appertisé de l'aliment ou emballage, ainsi que l'éventuelle production sous serre chauffée.

Dans tous les cas, le transport conduit à une majoration de 12 à 66 kg éq. C / t.

C'est ce tableur qui semble avoir inspiré la grille d'appréciation des offres des prestataires candidats au marché de Strasbourg.

B.2.6. L'insertion sociale

En ce qui concerne le second sous-critère de développement durable lié aux conditions d'approvisionnement des aliments, la coordinatrice des achats de Strasbourg, Mme Jean-Olive, explique que les candidats devaient désigner les mesures qu'ils prendraient lors de l'exécution du marché en faveur du respect de l'environnement, telles que l'utilisation de logiciel d'optimisation des livraisons, des véhicules de livraison Ç propres È, recours à l'éco conduiteÉ En matière d'insertion sociale, un minimum de 27 heures de travail effectuées par du personnel en insertion, par tranche de 10 000 euros hors TVA de prestations facturées était exigé des candidats. Les candidats devaient mentionner dans leur offre le volume horaire dédié à l'insertion professionnelle en plus de ce minimum, la qualité du tutorat et le niveau de qualification pouvant être acquis par le personnel en insertion lors de l'exécution du marché, développe la responsable. Le titulaire, qui embauche déjà du personnel en insertion, s'est engagé à faire réaliser 32 heures de travail en insertion par tranche de 10 000 euros hors TVA, et à recruter du personnel supplémentaire parmi les publics en difficulté. Ç L'exigence d'insertion professionnelle comme condition d'exécution du marché et critère de jugement des offres a permis d'obtenir des offres intéressantes sur ce point È, se félicite Michèle Jean-Olive. Le relais emploi chantiers de Strasbourg a été fortement associé à la démarche. Il a apporté sa collaboration lors de l'analyse des offres. Il sera également chargé de contrôler le respect de la clause lors de la mise en Ïuvre du marché.

Pour répondre aux conditions du marché, l'Alsacienne de restauration s'est engagée à travailler avec l'Organisation professionnelle de l'agriculture biologique en Alsace (Opaba) et avec une coopérative, la Solibio, qui vise à faciliter l'approvisionnement de produits biologiques pour la restauration collective.

Regards sur la traduction juridique du développement durable B.2.7. Conditions d'exécution du marché strasbourgeois

Des conditions d'exécution à caractère environnemental ont été fixées dans le marché. Ainsi pommes, carottes, céleri, chou blanc et rouge et tomates en saison estivale devront obligatoirement provenir de l'agriculture biologique (label AB ou équivalent). << Nous avons imposé au titulaire de respecter l'équilibre nutritionnel et le rythme des saisons dans le choix des aliments composant les menus. Pour sensibiliser les jeunes générations, une animation trimestrielle sera organisée pendant le repas sur le rTMle de l'alimentation sur la santé et la préservation de l'environnement. Nous allons prochainement valider le thème de la première animation È, explique la coordinatrice.

En définitive, l'Alsacienne de restauration a adhéré totalement aux objectifs poursuivis par la collectivité strasbourgeoise. Après avoir formulé l'offre économiquement la plus avantageuse et avoir obtenu le marché, l'entreprise a devancé les objectifs qui lui étaient assignés. Ainsi, selon les Dernières nouvelles d'Alsace, << dans son cahier des charges concernant le marché pour les écoles, la Ville de Strasbourg nous demandait de réduire de 3 % les émissions de CO2 (dioxyde de carbone) générées par nos repas È, rappelle Jean-Yves Fontaine, directeur général de l'Alsacienne. << On a signé pour juin 2010, mais finalement on s'est piqués au jeu et on tiendra l'objectif dès janvier È, poursuit le chef d'entreprise96. Un objectif qui a été atteint avant l'heure, en definitive97.

Comme on le constate, la ville de Strasbourg est allée très loin dans l'intégration du développement durable à son marché public de restauration. Ainsi, même les serviettes en papier doivent être composées de papier recyclé non blanchi, toute indication de marque ou de société étant proscrite pour ne pas engendrer de pollution liée à l'utilisation d'encres d'impression. En cas de circonstances exceptionnelles, telles qu'une panne de lave-vaisselle, le titulaire doit être en mesure de fournir de la vaisselle à usage unique, vaisselle qui doit être bien sür recyclable.

96 «Une cuisine allégéeÉ en carbone», Les Dernières nouvelles d'Alsace, 23 octobre 2009 : http://sitemap.dna.fr/articles/200910/23/cuisine-allegee-en-carbone,strasbourg,000012347.php, page consultée le 2 juillet 2010 [en ligne].

97 L'Alsacienne de restauration a réalisé un petit film qui présente le marché de restauration de la ville de Strasbourg : http://www.alsaciennederestauration.fr/IMG/swf/ELIORDD.swf, page consultée le 10 juillet 2010 [en ligne].

L'exemple du marché public de restauration scolaire de Strasbourg B.2.8. Le prix par repas n'est pas affecté pas les exigences de développement durable

Le marché de la restauration scolaire de Strasbourg représente 33 millions d'euros au maximum sur quatre ans. En dépit des exigences environnementales et sociales, les prix proposés par les entreprises de restauration ont été inférieurs aux prévisions de la ville. Ainsi les prix donnés par la société retenue, l'Alsacienne de restauration, sont de 3,41 euros hors TVA par repas et de 3,72 euros hors TVA pour les sites expérimentaux. Selon les fonctionnaires territoriaux, Ç les prix ne représentent pas de surcoüt par rapport aux prix des marchés antérieurs È, souligne Michèle Jean-Olive.

B.3. Les enseignements du marché strasbourgeois

B.3.1. Pour l'acheteur public : le critère Ç développement durable È a permis l'émergence de la meilleure offre

Au final, c'est le critère du Ç développement durable È prévu à l'article 5 de l'actuel Code des marchés publics qui a été décisif, et ce sans tenir compte de la proximité du prestataire ou des fournisseurs. Ç Ce critère a permis de départager les offres de façon significative. Ces derniers se sont vu attribuer des notes très différentes sur ce critère, contrairement à la valeur technique et au prix, pour lesquels les offres étaient très proches È, conclut Madame Jean-Olive. En ce sens, la prise en compte du développement durable pour la sélection de l'offre économiquement la plus avantageuse dans les marchés publics s'est avérée discriminante, c'est-à-dire opérationnelle, et elle a donc permis de classer aisément les offres et de faire émerger l'offre économiquement la plus avantageuse pour la collectivité.

B.3.2. Pour les entreprises : un marché qui a imposé une évolution des pratiques

Par ailleurs, la passation de ce marché a été riche d'enseignements pour les entreprises candidates. Elle leur a permis de s'engager réellement dans une démarche de développement durable en remettant en cause leurs propres pratiques. La directrice Qualité de l'Alsacienne de restauration, Caroline Dietrich, est ainsi à l'origine d'une étude complète de l'impact des activités de l'entreprise sur le développement durable, qui s'est conclue lors de la passation du marché strasbourgeois. Pour elle, Ç l'étude a mis en évidence, pour la période étudiée, des émissions de l'ordre de 4 400 tonnes d'équivalent CO2 soit 2,5 kg par repas ou encore les émissions annuelles moyennes de 500 français. L'enjeu se situe clairement au niveau des matières premières mises en Ïuvre pour confectionner les repas qui sont à l'origine de plus de 73 % des gaz à effet de

serre. A ce poste stratégique se rajoutent 3 postes prioritaires que sont les procédés internes (9 % de l'impact), les emballages (5 %) et le fret (3 %). C'est sur ces 4 postes principaux que nous concentrerons toute notre énergie en vue d'une réduction globale annuelle de 3 % demandée par la ville de Strasbourg. Au lancement de notre Bilan carbone, nous avions tous des certitudes quant aux postes les plus émetteurs au sein de notre cuisine centrale. Les résultats nous ont vraiment surpris ! Nous n'envisagions pas un tel impact pour les matières premières agricoles et avions largement surestimé celui du fret vers nos clients. Sans ce bilan carbone, nous aurions consacré beaucoup d'énergie à des postes pour lesquels le retour sur investissement aurait été minime et nous serions, peut être, passés à côté de l'essentiel. Aujourd'hui nous savons quels leviers actionner pour réduire nos émissions et les plans de progrès sont déjà en cours È.

Légende : les 4 axes d'action principaux de l'Alsacienne de restauration
(matériaux entrants hors emballages, procédés internes, fabrication et fin de vie des emballages et fret).

On peut tirer deux enseignements de cet exemple strasbourgeois. Le premier, c'est que les entreprises n'ont pas toutes (encore ?) intégré dans leur stratégie la nécessité du développement durable. L'observation de la représentante de la ville selon laquelle les entreprises Ç se sont vu attribuer des notes très différentes sur ce critères È, alors que les différences de prix étaient en définitive très faibles, est révélatrice d'un niveau d'apprentissage disparate. Elle montre que la prise de conscience du développement durable ne se traduit pas encore dans la politique commerciale des entreprises.

Il est vrai également que l'Alsacienne de restauration était titulaire de ce marché depuis de nombreuses années, et que celui représentait environ 10 % de son chiffre d'affaires. Cela constitue une motivation supplémentaire par rapport aux concurrents.

Le deuxième enseignement à tirer de l'exemple strasbourgeois, c'est naturellement l'impact que peuvent avoir les collectivités territoriales sur la mise en Ïuvre de politiques de développement durable au niveau local. Parce qu'elle a adopté pour ellemême un Plan climat territorial, parce qu'elle a décidé pour elle-même la réalisation d'un Bilan Carbone, la Communauté de Strasbourg, et en son sein la ville de Strasbourg, ont été amenées à imposer à leurs cocontractants le respect d'objectifs qu'elles s'étaient fixé pour elles-mêmes. Or, la commande publique représente environ 10 % du produit intérieur brut français et en moyenne 15 % du produit intérieur brut des États de l'Union européenne. C'est dire que les collectivités territoriales peuvent, en leur qualité d'acheteurs publics, influer fortement sur la mise en Ïuvre de politiques de développement durable par les acteurs privés (ou publics d'ailleurs) qui sont leurs partenaires économiques privilégiés.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci