REPUBLIQUE DU CAMEROUN UNIVERSITE DE
DOUALA
FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ET
POLITIQUES
|
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|
REPUBLIC OF CAMEROON THE UNIVERSITY OF
DOUALA
FACULTY OF LAW AND POLITICAL SCIENCES
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DEPARTEMENT DE DROIT PRIVE FONDAMENTAL
LA RESPONSABILITE PENALE DU MEDECIN TRAITANT
DANS LE SYSTEME PENAL CAMEROUNAIS
tNA:a.1:MZ ZUM
Memoire presents et soutenu publiquement en vue de
I'obtention du Diplome
d'Etudes Approfondies (DEA)
Option : Droit Prive Fondamental.
Par : ASSOUMOU Rene Serges Maran
Titulaire d'une Maltrise en Droit Prive; option :
Carrieres Judiciaires
ANNEE ACADEMIQUE 2006 - 2007
Sous la Supervision du :
Professeur Nicole Claire NDOKO Maitre de
Conferences,
Vice-Recteur a l'Universite de Douala
|
Et la Direction du :
Docteur Jean Jules FOMCHIGBOU MBANCHOUT
Chargé de cours a l'Universite de Douala
|
DEDICACE
A ma regrettée soeur bien aimée TCHIMI Merline
Carole Epse
MEDOUCK dont la mort n'aura hélas permis de voir la fin
de ce travail.
ii
REMERCIEMENTS
Au Professeur Nicole Claire NDOKO qui a
suscité en moi la passion pour les sciences criminelles, et a
accepté de superviser ce travail.
Au Dr. FOMCHIGBOU MBANCHOUT Jean Jules pour tous
les sacrifices consentis dans le cadre de la direction de ce mémoire.
Aux Dr. ELONG NGONO Samuel, ADAMOU
ISSIAKOU, et à Maître EBODE OLONG Michel
pour leur aide indéfectible et leur incroyable disponibilité.
A mes chers parents M. et Mme ABESSOLO EYIMI,
Mme GUISSIBAM Josephine, M. et Mme NJIKE et
à mes frères et soeurs EYIMI ABESSOLO Francois
G., OBONO HOUNA ABESSOLO Crescence, ANGUE
ABESSOLO Vanina P. pour leur indéfectible soutien moral sans
lequel il m'aurait été difficile d'arriver au terme de la
conception de ce mémoire.
A mes amis : ABDOU NGOISSAH, EDONGUE
Serge O., NGONGA N. Simplice, YAYA DAHIROU
Issa Bakary, MBALLA ESSOMBA Boniface, AVOZOA
O. Prudence, MATAKON, SAAG G
hislain, MBACK TINA Georges, MULOH Eric
CHE, M. et Mme NYAM, Mme NYOUM,
ZILI BITOTO, EVINA Franck, EYAMO
Arlette, EDANG ESSOMBA, Famille HEBGA
BOUGHA pour leurs contributions multiformes à
l'élaboration de ce mémoire.
A mes camarades de promotion DEA pour leur sens
élevé de solidarité, et leur inestimable
convivialité.
AVERTISSEMENT
L'Université de Douala n'entend donner aucune
approbation ni improbation aux idées défendues dans ce
mémoire. Elles sont considérées comme personnelles et
engagent la seule responsabilité de leurs auteurs.
iv
RESUME
La médecine ou l'art de soigner est une profession
règlementée au Cameroun. S'il est établi que le
professionnel dans ce domaine ne peut garantir le résultat de l'action
qu'il entreprend, il est tenu d'administrer des soins attentifs et
consciencieux conformes aux données acquises de la science. C'est
lorsqu'il contrevient à ces exigences professionnelles en commettant une
infraction qu'il peut être sous le coup de la loi pénale. De ce
fait, la responsabilité pour être engagée nécessite
la commission d'une faute. Toutefois, la faute à elle seule ne suffit
pas. Il faut qu'elle ait causé un dommage, lequel dommage doit
être lié à la faute en vertu d'un lien de
causalité.
De par l'importance que revêt sa profession, le
praticien peut être sous le coup de plusieurs types d'infractions. Elles
peuvent être de commission ou d'omission, et porter atteinte à
l'intégrité physique et morale du patient, et même
contrevenir à la déontologie.
Dans un environnement marqué par la
précarité et la pauvreté, où survivent les
mentalités rétrogrades, il n'est pas évident de mettre en
oeuvre la responsabilité du médecin et ce, malgré les
dispositions mises sur pied par le législateur dans le but de
protéger les Droits de l'Homme et Libertés. Les
difficultés liées à l'établissement de la preuve
qui se caractérise par la complexité d'accès au dossier
médical constituent un autre versant d'obstacles auxquels sont
confrontés les justiciables.
A côté des difficultés rencontrées
pour établir le lien de causalité de l'infraction causée
par le médecin, d'autres difficultés s'observent également
dans la constatation des infractions et dans la mise en oeuvre des poursuites
pénales. C'est ainsi que dans le but d'apporter des
éclaircissements d'ordre technique sur la conduite tenue par le
praticien, l'expertise a été instaurée pendant
l'instruction préparatoire, et même à l'audience.
Toutefois, face aux nombreuses insuffisances relatives
à la responsabilité pénale du médecin traitant au
Cameroun, des innovations s'avèrent nécessaires aussi bien dans
la procédure de mise en oeuvre de cette responsabilité que dans
la mise sur pied d'un environnement propice pour assurer une meilleure
protection des patients.
ABSTRACT
Medicine or the act to treat is a profession that is regulated
in Cameroon. And if it is established that the profession cannot guarantee the
results of the action that he undertakes or exercise, He is oblige to
administer attentive and conscious treatment in conformity to the knowledge
acquired in sciences. It is when he goes against these professional
requirements by committing an offence that he can fall under criminal law. In
so doing, for his responsibility to be engaged, it requires the commission of a
fault: Notwithstanding, the fault itself is not sufficient. It needs that the
fault should have caused a damage, in which the damage must be linked to the
fault.
From the importance that reveal this profession, a
practitioner can fall under many types of offences it can be of commission or
omission, and constitute an attempt against the moral and physical integrity of
the patient and against the profession .
In an environment marked by poverty, or were mentally deranged
people live, it is not evident to put in place the responsibility of doctors,
despite aim to protect Human Rights and Liberties.
The difficulties to acceed in the medical body which is based
on medical secret, and in so doing protected by the law constitute another
obstacle in which the litigants are always confused.
Apart from the difficulties encountered to establish a link
between the causes of the offence caused by the doctor, other difficulties are
equally observed in the notice of offences and in the putting in place of
criminal trials. It is here that with the aim to bring clarifications of
technical order on the profession, expertise was installed during the
preparatory trial and at audience.
Nevertheless, face with the many insufficiencies relative to
the criminal responsibility of a medical doctor in Cameroon, many innovations
seem necessary be it in the procedure of putting in place of this
responsibility, nor in the putting in place of a proper environment to ensure a
good protection of patients.
vi
LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS
Al. Alinéa.
Art Article.
Bull. civ. Bulletin des arrêts de la Cour de
Cassation,chambre civile.
Bull. crim. Bulletin des arrêts de la Cour de Cassation,
chambre criminelle.
Cass. Req. Cour de Cassation, chambre des requêtes
Cf. Confer.
Ch. corr. Chambre correctionnelle.
Concl. Conclusions.
C.P. Code Pénal.
C.P.P. Code de Procédure Pénale.
D. Dalloz.
Déont. Déontologie.
D.H. Dalloz Hebdomadaire.
D.P. Dalloz Périodique.
Ed. Edition.
G.P. Gazette de Paris.
Ibid. Même référence.
Idem. Même auteur.
J.C.P. Juris Classeur Périodique.
L.G.D.J. Librairie Général de Droit et de
Jurisprudence.
No Numéro.
Obs. Observations.
Op.cit. Opere citato.
P.U.F. Presses Universitaires de France
R.S.C. Revue de Science Criminelle.
Suiv. Suivant.
vii
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE p. 1
PREMIERE PARTIE : Le domaine de la responsabilité
pénale du médecin traitant p.7
CHAPITRE I: Les contours fluctuants des conditions de la
responsabilité pénale du médecin traitant p.8
Section I : Le caractère ambivalent de la
responsabilité pénale du médecin traitant .. p.8
Paragraphe I : Les conditions de la mise en oeuvre de la
responsabilité pénale du médecin traitant p.9
Paragraphe II : La diversité des causes
d'exonération de la responsabilité pénale du
médecin traitant p.16
Section II : Le statut juridique du médecin traitant : un
facteur de renforcement de sa responsabilité pénale p. 24
Paragraphe I : La responsabilité pénale liée
à la profession du médecin P. 24
Paragraphe II : La responsabilité relative aux
informations mises à
la disposition du médecin traitant .. p. 29
CHAPITRE II: La diversité des infractions relevant de la
responsabilité pénale du médecin traitant p. 36
Section I: Les atteintes à l'intégrité
physique du patient . p. 37
Paragraphe I : La multiplicité des infractions de
commission p. 38
Paragraphe II : l'existence des infractions d'omission p. 42
Section II : Les atteintes à l'intégrité
morale du patient, à l'éthique et à la déontologie
p. 49
Paragraphe I : Les atteintes à l'intégrité
morale du patient .. p. 50
Paragraphe II : La responsabilité pénale du
médecin liée à l'inobservation des principes
éthiques et déontologiques . p. 53
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE p. 57
DEUXIEME PARTIE : La mise en oeuvre de la responsabilité
pénale du médecin traitant p. 59
CHAPITRE I: Les difficultés relatives à la mise en
oeuvre de la responsabilité pénale du médecin traitant p.
60
Section I: Une pluralité d'obstacles propre à
l'environnement camerounais p. 60
Paragraphe I: Les réalités culturelles et
socio-économiques . p. 61
Paragraphe II : Les réalités d'ordre juridique ..
p. 64
Section II : Les difficultés liées à
l'établissement de la preuve p.68
Paragraphe I : Les difficultés d'accès au dossier
médical .... p. 68
Paragraphe II : L'arrêt dit HEDREUL : Une révolution
procédurale dans la manifestation de la vérité p. 72
CHAPITRE II : La pluralité des aspects techniques : La
complexité de la procédure p. 76
Section I : La spécificité des étapes
intervenant dans la mise en oeuvre
de la responsabilité pénale du médecin
traitant p. 76
Paragraphe I: La constatation de l'infraction pénale et la
mise en oeuvre des poursuites pénales . p. 77
Paragraphe II : De l'instruction préparatoire à
l'audience . p. 80
Section II : La nécessité de la mise en oeuvre des
dispositions appropriées en vue d'une meilleure protection des
patients .. p. 85
|
Paragraphe I : Les défis relatifs à la
procédure de mise en oeuvre de la responsabilité du
médecin
|
p. 86
|
Paragraphe II : Les autres innovations envisageables
|
p. 88
|
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
|
p. 93
|
CONCLUSION GENERALE
|
p. 94
|
1
INTRODUCTION GENERALE
<< Le respect de la vie constitue
en toute circonstance le devoir primordial du médecin
». C'est en ces termes que le Code de déontologie des
médecins du Cameroun1 en son article 1er pose les
jalons de la fonction des médecins. Le préambule de la loi
fondamentale du Cameroun2 énonce d'une part que : <<
le peuple camerounais proclame que l'être humain, sans
distinction de race, de religion, de sexe, de croyances, possède des
droits
inaliénables et sacrés. » ;
et d'autre part que : << Toute personne a droit à la
vie et à l'intégritéphysique et morale. Elle
doit être traitée en toute circonstance avec humanité. En
aucun cas,
elle ne peut être soumise à la torture, à
des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants...
».
La protection de la vie, de l'intégrité
physique et morale, principe consacré par le législateur
camerounais, est une obligation dont s'imprègne l'étudiant en
médecine à l'entame de ses études. D'après ELONG
NGONO, << l'enseignement du droit humain est florissant dans
les écoles de médecine occidentales, ce qui participe de la
recherche constante du bienêtre du malade
»3. Il s'y engage lorsqu'il est habilité
à exercer en vertu du Serment d'HIPPOCRATE4 dans le respect
des textes légaux et réglementaires (Constitution, Code
pénal, Code de procédure pénale, Code de
déontologie). Dans l'exercice de son art, le médecin est tenu,
vis-à-vis de son patient d'une obligation de moyens, c'est-à-dire
qu'il <<... s'engage seulement à tout mettre en
oeuvre pour obtenir la guérison du malade sans en garantir cette
dernière »5 en donnant des soins attentifs
et consciencieux conformes aux données acquises de la science ; et, non
de résultat, sauf dans certains cas (à l'exemple de la chirurgie
esthétique). C'est la raison pour laquelle la médecine ne saurait
être confiée à des profanes ou à des
charlatans.
1 Décret No
83-166 du 12 Avril 1983 portant Code de Déontologie des médecins
du Cameroun.
2 Loi No 96-06 du
18 Janvier 1996 portant Révision de la Constitution du 2 Juin
1972.
3 ELONG NGONO (S), <<
Devoirs des médecins », in Cameroon Tribune du 27 Novembre
2007.
4 Hippocrate, célèbre médecin
grec de l'Ecole de Cos, qui vécut au 5e siècle avant
Jésus-Christ est la plus grande figure de la médecine moderne
dont il en est considéré comme le père. Il définira
les rapports entre le médecin, son patient et la collectivité,
ainsi que les principes qui doivent régir l'exercice de la profession
à travers le serment d'Hippocrate. Il instaure la confraternité
entre médecins, l'égalité des hommes devant la maladie, la
défense de la vie avant tout et le respect du secret
médical.
C'est aujourd'hui le Serment que prêtent les
étudiants en médecine lors de la soutenance de leur
thèse.
5 Lexique des termes
juridiques, 13e éd., Dalloz 2001,
p.383.
3
5
Au Cameroun, la profession de médecin est
strictement règlementée. Les textes qui l'organisent sont la loi
no 90-36 du 10 août 1990 relative à l'exercice et
à l'organisation de la profession de médecin, et son
décret d'application no 92-265-PM du 22 juillet
1992.
Le petit Larousse6 définit le
médecin comme un professionnel qui donne des soins au cours d'une
maladie, un titulaire d'un doctorat en médecine, ou encore une personne
qui exerce la médecine. La loi du 10 août 1990 en son article 2,
alinéa 1er énonce que : « Nul ne peut exercer la
profession de médecin au Cameroun s'il n'est inscrit au tableau de
l'Ordre ». L'alinéa 2 du même article énonce que :
« Toutefois, peut exercer la profession de médecin, le
praticien de nationalité étrangère remplissant les
conditions supplémentaires suivantes :
-Etre ressortissant d'un pays ayant signé un accord de
réciprocité avec le Cameroun.
-N'avoir pas été radié de l'Ordre de son
pays d'origine ou dans tout autre pays où il aurait exercé
auparavant.
-Etre recruté sur contrat ou en vertu d'un accord
de coopération pour le compte exclusif de l'administration, d'un Ordre
confessionnel ou d'une ONG (Organisation Non Gouvernementale) à but non
lucratif.
- Servir pour le compte d'une entreprise privée
agréée ».
La médecine comporte un certain nombre de
spécialités. Elles sont aussi plurielles que les
différentes branches de la science qui, chaque jour grâce aux
progrès se diversifie. A titre d'exemple, nous pouvons citer les
médecins généralistes, les chirurgiens, les
anesthésistes, les chirurgiens dentistes, et des professionnels qui font
de la chirurgie esthétique. Ces praticiens peuvent exercer chacun, soit
pour le compte d'une personne morale de droit public (Etat), soit pour le
compte d'une personne morale de droit privé (clinique privée),
mais également pour le compte d'une ONG. Au vu des tâches qu'ils
exercent et de l'employeur pour lequel ils travaillent, on distingue l'expert
qui peut être mandaté soit par le juge, soit par une compagnie
d'assurance (on parle de médecin-conseil d'assurance), le médecin
du travail (qui a pour tâches principales les visites médicales
d'embauche,les examens médicaux périodiques, les visites
après une absence due à une maladie) et enfin le médecin
traitant ( c'est celui qui prodigue des soins au cours d'une maladie). C'est
sur cette dernière catégorie de médecin que portera notre
travail.
6 Le petit Larousse
illustré 2005.
Le médecin, dans l'exercice de son art est tenu
au respect de la loi, de l'éthique et de la déontologie. Leur
inobservation peut engager ses responsabilités civile, pénale,
morale, administrative, et même déontologique. Etre responsable,
c'est assumer les conséquences de ses actes mais, c'est d'abord agir en
connaissance de cause. Bien que le médecin dans l'exercice de son art
soit en proie à divers types de responsabilités, la
responsabilité civile et la responsabilité pénale sont
celles qui attirent plus d'attention.
La responsabilité civile est <<
l'obligation de réparer le préjudice
résultant soit de l'inexécution d'un contrat
(responsabilité contractuelle) soit de la violation du devoir
général de ne causer aucun dommage à autrui par son fait
personnel, du fait des choses dont on a la garde, ou du fait des personnes dont
on répond (responsabilité du fait d'autrui) ; lorsque la
responsabilité n'est pas contractuelle, elle est dite délictuelle
ou quasi délictuelle >>7.
La responsabilité pénale quant à
elle est << l'obligation de répondre de ses actes
délictueux en subissant une sanction pénale dans les conditions
et selon les formes prescrites par la loi >>8 .
Est de ce fait pénalement responsable, << celui qui
volontairement commet les faits constitutifs d'infraction avec l'intention que
ces faits aient pour conséquence la réalisation de
l'infraction >>9 .
Dans le cadre de ce travail, il sera question de
s'appesantir sur la responsabilité pénale du médecin
traitant dans le système pénal camerounais. Le système
pouvant être une combinaison d'éléments réunis de
manière à former un ensemble, il s'agit de voir de quelle
manière le système pénal national (les textes juridiques,
la doctrine et la jurisprudence) se situe par rapport à la
responsabilité pénale du médecin. Les aménagements
légaux et jurisprudentiels qui traitent de cette responsabilité
s'arriment-ils de nos jours aux progrès vertigineux qui sont
réalisés dans les différentes branches de la
médecine, ceci dans le souci de protéger les droits des patients
? Car comme le dit AKIDA : << La médecine a fait plus
de progrès au cours de ces trente dernières années qu'au
cours des trois siècles précédents >>
10.
7 Lexique des termes
juridiques, op.cit., p.487.
8 Ibid., p.488.
9 Art. 74, al. 2,
C.P.
10 AKIDA (M), << La
responsabilité pénale des médecins du chef d'homicide et
de blessure par imprudence >>, thèse de Doctorat de Droit,
Bibliothèque de sciences criminelles, tome 29, LGDJ, Paris 1994, p.
1.
Le choix de ce thème se justifie par
l'existence des zones d'ombre, des incertitudes par rapport à la
détermination de la responsabilité du médecin au Cameroun.
D'où la nécessité de réfléchir sur les
différents aspects qui la constitue. Les études qui mettent en
lumière le corps médical, notamment du point de vue de la
responsabilité sont limitées ; il en est de même des textes
qui règlementent cette profession. En effet, les études
recensées portent sur la déontologie médicale,
l'éthique médicale, la responsabilité médicale du
point de vue global. Avec le progrès de la science, doit-on maintenir le
même degré de la responsabilité médicale
(c'est-à-dire l'obligation de moyens) ou tendre vers une obligation de
résultat ? Le champ pourtant sensible de la responsabilité
pénale du médecin traitant dans le système pénal
Camerounais est assez peu fourni. C'est la raison pour laquelle notre souci est
d'apporter notre modeste contribution à l'édification de ce volet
du droit national tourné vers la modernisation et confronté aux
défis de la mondialisation. Les justiciables, pourront ainsi prendre
connaissance des rouages qui, parce qu'ils sont ignorés, les
empêchent de se faire rendre justice au vu de la rareté des
jugements rendus en la matière, et des affaires pendantes devant les
tribunaux; les médecins quant à eux pourront prendre conscience
de la lourdeur des tâches qui sont les leurs. Les lecteurs verront le
corps médical sous un angle un peu plus humain, débarrassé
de mystères dont il est souvent l'objet.
Dans le cadre de son travail, le médecin peut
être une autorité administrative, un expert et même un
médecin traitant, et, il peut voir sa responsabilité
engagée à ces différents titres. Seule sera retenue ici la
responsabilité du médecin dans ses relations avec son patient,
c'est-àdire, dans l'exercice de son art, notamment lorsque ses actes
sont constitutifs d'infractions. Dans leurs rapports réciproques, «
le médecin n'a vis-à-vis de son patient que des
obligations et que ce dernier n'a que des droits
»11.
Au Cameroun, l'accession aux soins n'est pas
donnée à tous au vu de la croissance exponentielle de la
population face à un personnel médical limité ; l'offre de
soins présente de très grandes insuffisances dans toutes les
composantes, à savoir : les ressources humaines, les infrastructures et
les équipements. Le nombre de médecins par habitant reste
marginal. On compte un médecin pour 10 000 habitants et un infirmier
pour environ 2 200 habitants12.
11 ELONG NGONO (S), «
Droits des malades, Devoirs des Médecins », in Cameroon Tribune du
29 mai 2008 p. 11.
12 STRATEGIE SECTORIELLE DE SANTE
2001-2010 du Ministère de la Santé Publique de la
République du Cameroun, éd. 2002, p.3.
Le patrimoine d'infrastructures et
d'équipements a connu d'importantes dégradations pendant que les
nouveaux investissements ont été limités du fait de la
récession économique ; la gestion et le développement de
toutes ces ressources s'effectuent sans aucune référence
normative. Ceux des patients qui ont accès à un médecin
sont considérés comme des privilégiés au vu des
procédures longues et tortueuses rencontrées dans les
établissements publics (tickets de consultation, mauvais accueil,
longues files d'attente, rançonnement, monnayages divers pour pouvoir
rencontrer le médecin). D'autres doivent dépenser davantage s'ils
veulent accéder aux soins des cliniques privées. La santé
n'est pas à la portée de tous. L'ignorance des règles qui
régissent le fonctionnement du corps médical par les profanes
entraîne l'ignorance de leurs propres droits. Ce n'est que lorsque les
errements médicaux dépassent l'entendement du patient et/ou de sa
famille en provocant soit des handicaps légers ou graves ou même
la mort que le patient et/ou sa famille envisage d'engager la
responsabilité du médecin. C'est ainsi que s'agissant
d'activités dangereuses, le Professeur NDOKO affirme que : «
... si le malade a subi un dommage consécutif à ces
traitements, il y aura délit d'homicide ou de blessure par imprudence.
S'il n'y a pas eu de conséquences fâcheuses, il sera rare que le
praticien soit poursuivi. En l'absence d'une victime qui pourra mettre en
mouvement l'action publique par sa plainte avec constitution de partie civile,
le ministère public, juge de l'opportunité des poursuites,
n'ouvrira pas d'information et ne saisira pas la juridiction de jugement sauf
dans des circonstances vraiment exceptionnelles
>>13.
Dans la société Camerounaise, il est
très courant de voir dans la rubrique des faits divers des journaux et
autres quotidiens des scandales ou des plaintes à l'encontre du corps
médical en général, et des médecins en
particulier14. Cette multiplicité de faits contraste avec la
réalité au niveau des juridictions. En effet, il n'est pas
fréquent en parcourant les nombreuses décisions rendues par les
tribunaux de rencontrer des affaires oh les médecins, de par les
infractions qu'ils auraient pu commettre dans l'exercice de leur art ont
été mis en cause.
Cette situation pose le problème de la consistance
du droit Camerounais en matière de
responsabilité médicale. En effet, bien que
le Code pénal camerounais réprime toute forme
13 NDOKO (N.C.), « La
culpabilité en droit pénal camerounais >>, L.G.D.J.,
thèse de doctorat, Paris, 1985, p.167.
Le Professeur NDOKO s'exprime dans un contexte oh le
ministère public a le monopole de l'instruction et de la poursuite,
suite à la suppression du juge d'instruction en 1972 de la
procédure pénale au Cameroun.
14 NGO NGOUEM (P), voir
journal Mutations No 2247 du Vendredi 26 Septembre 2008,
p.6.
d'atteinte à la personne humaine, le
régime auquel sont soumis les médecins est beaucoup plus
encadré. Cette répression est renforcée à
l'égard du corps médical parce que les médecins ont un
« devoir d'humanité». Pourtant, les
médecins sont rarement attraits devant les tribunaux pour
répondre des actes qu'ils auraient eu à poser dans l'exercice de
leur art. Cela voudrait-il dire que c'est un corps exemplaire exempt de tout
reproche ? Nous répondrons par la négative car nombreux sont les
faits recensés ; les services rendus dans les hôpitaux camerounais
ne sont pas de toute première qualité, ce qui conduit souvent
à des errements du personnel médical et à des plaintes
formulées par les patients. Ces faits figurent fréquemment dans
la rubrique des faits divers des journaux et autres quotidiens. Il se pose
ainsi la question de savoir quelle est la raison de cet état des choses
? Quelles sont les bornes de la responsabilité pénale
médicale au Cameroun ? Quelle est l'efficacité des dispositions
juridiques camerounaises relatives à la responsabilité
pénale médicale ? Autrement dit, dans quelles limites peut-on
situer la responsabilité pénale du médecin au Cameroun
?
Telles sont les différentes questions qui
constituent la base de notre travail articulé autour de deux axes
principaux, à savoir : Le domaine de la responsabilité
pénale du médecin traitant (Première Partie), et la mise
en oeuvre de cette responsabilité (Deuxième Partie).
PREMIERE PARTIE :
LE DOMAINE DE LA RESPONSABILITE PENALE DU
MEDECIN TRAITANT.
|
7
Le médecin est un professionnel qui donne des
soins au cours d'une maladie, un titulaire d'un doctorat en médecine, ou
encore une personne qui exerce la médecine. Dans l'exercice de son art,
il met en oeuvre tout son savoir-faire et fait usage de tous les moyens dont il
dispose pour donner la guérison à son patient. Il est ainsi tenu
d'une obligation de moyens. Toutefois, la méconnaissance des
règles qui régissent sa profession peut causer un
préjudice au patient et même être constitutive d'infraction.
Cette inobservation, lorsqu'elle est réprimée par le Code
pénal et d'autres textes (à l'exemple du Code de
déontologie médicale) peut entraîner la
responsabilité pénale du médecin. Ceci à cause des
incommodités infligées aux patients, aux torts causés
à la société et surtout à l'instauration d'un
climat de méfiance qui peut s'installer dans les rapports entre les
médecins et leurs patients. La responsabilité pénale du
médecin est un sujet vaste et pas toujours aisé à
appréhender.
S'il est vrai que les infractions relevant de la
responsabilité du médecin traitant sont diverses (Chapitre II),
force est de constater que les conditions de mise en oeuvre de cette
responsabilité comportent des contours incertains (Chapitre
I).
CHAPITRE I :
LES CONTOURS FLUCTUANTS DES CONDITIONS DE LA
RESPONSABILITE PENALE DU MEDECIN
TRAITANT
|
Le principe de la légalité des
délits et des peines, principe consacré par le législateur
camerounais dans la Constitution, et le Code pénal en son article 17
voudrait que toute infraction pour être réprimée soit
contenue dans un texte ( le Code pénal ou toute autre loi
pénale). Une fois la norme codifiée, elle a une portée
générale. C'est la raison pour laquelle l'article 1er
du Code pénal énonce que : « la loi
pénale s'impose à tous ».
Cette disposition, qui s'applique à tout
citoyen n'exclut pas les médecins. Toutefois, comme il s'agit de la
médecine et que le risque fait corps avec ce métier, les contours
de leur responsabilité comportent des subtilités qui
mériteraient d'être cernées afin d'établir avec
précision le régime de la responsabilité pénale du
médecin traitant. Aussi examinerons-nous le caractère ambivalent
de la responsabilité pénale du médecin traitant (Section
I). Une fois cerné, il sera question de voir l'étendue de cette
responsabilité, ceci au vu du statut juridique du praticien qui est un
facteur de renforcement de la responsabilité de ce dernier (Section
II).
SECTION I : LE CARACTERE AMBIVALENT DE LA
RESPONSABILITE PENALE DU MEDECIN TRAITANT.
Le principe de la légalité criminelle,
exprimé par l'adage latin « nullum crimen, nulla
poena, sine lege» est un principe selon lequel tout acte
constituant un crime ou un délit doit être défini avec
précision par la loi ainsi que les peines qui lui sont
applicables.
Le médecin est lié à son patient
en vertu d'un contrat. Il en résulte que, toute faute commise par ce
dernier dans l'exercice de son art ne donne lieu qu'à des
réparations. Il peut toutefois arriver que le praticien commette une
faute qui soit pénalement répréhensible. Pour que la
responsabilité pénale du médecin traitant soit retenue, il
faut que certaines conditions soient réunies (paragraphe I) et qu'il n'y
ait aucun fait justificatif ou cause d'exonération (paragraphe
II).
9
Paragraphe I : Les conditions de la mise en oeuvre de la
responsabilité pénale
du médecin traitant.
Pour que la responsabilité pénale du
médecin soit engagée à l'égard de son patient, il
faudrait que ce professionnel ait commis une faute (A), et que cette faute ait
causé un préjudice (B) à son patient.
A - L'existence d'une faute, élément
indispensable pour engager la responsabilité
pénale du médecin traitant.
La faute du médecin traitant est établie
par l'existence d'un manquement, de l'inobservation d'une norme ou même
d'une simple imprudence, d'une négligence. Un lien de causalité
doit être établi entre la faute et le dommage causé, car
<< il ne suffit pas que la relation de causalité soit
directe, mais il faut qu'elle soit certaine
»15.
L'information du patient constitue un
élément fondamental servant à éclairer son
consentement. C'est aussi la condition première du respect de la
dignité du malade. Considérer l'autre comme une personne qui a le
droit de savoir ce qui le concerne au plus profond de lui-même est une
exigence faite au médecin, et qui gouverne les rapports qui le lient
à son patient. Les manquements au droit à l'information sont sans
doute ceux qui sont le plus mal vécus par les malades et par leurs
proches.
Contrairement au droit civil, le droit pénal en
raison du principe de la légalité des délits et des peines
ne connaît pas d'incrimination générale de la faute. La
faute pénale est définie avec une grande précision par le
lexique des termes juridiques comme l' <<
élément moral des délits non intentionnels,
consistant :
-soit en une imprudence, négligence ou manquement
à une obligation de prudence ou de sécurité prévue
par la loi ou le règlement, s'il est établi que l'auteur des
faits n'a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas
échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses
compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait
;
-soit en violation manifestement
délibérée d'une obligation particulière de prudence
ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement
;
-soit en une faute caractérisée ayant
exposé autrui à un risque d'une particulière
gravité qui ne pouvait être ignoré
»16 .
15PENNEAU (J),
LA RESPONSABILITE DU MEDECIN, Connaissance du droit,
éd. Dalloz 1992, p.103 ; Crim., 15 Janvier 1958, 9 Janvier 1992, 20
Novembre 1996, 29 Octobre 2002, 13 Novembre 2002, 5 Octobre 2004.
16 Lexique des termes
juridiques, op.cit., p.258.
10
Avant d'en arriver là, la jurisprudence
française a à travers l'arrêt Mercier, défini les
rapports entre le praticien et son patient. Arrêt de principe,
l'arrêt Mercier, a établi le principe selon lequel le
médecin est lié à son patient en vertu d'un
contrat17. Tout manquement issu de cette relation devrait constituer
une faute contractuelle susceptible d'entraîner la réparation par
le paiement de dommages et intérêts. En matière
médicale, c'est un peu plus compliqué. En France par exemple un
débat doctrinal a longtemps opposé les partisans de
l'unité des fautes civile et pénale (1) aux partisans de la
dualité des fautes civile et pénale (2)18.
1- La thèse de l'unité des fautes civile
et pénale.
Pour les partisans de cette thèse (les
civilistes en l'occurrence19), il n'y a aucune différence de
nature, de degré, ou de gravité entre les deux fautes. Leur
argument s'appuie sur les textes concernant la faute civile (art.1382 et 1383
du Code civil) et la faute pénale (art.319 et 320 du Code pénal
français)20. A cet effet, ils considèrent que les
termes très larges et très descriptifs à ces textes
englobent n'importe quelle faute d'imprudence, si légère
soit-elle. Et, ils ajoutent que, l'interprétation jurisprudentielle des
mots « maladresse, imprudence, inattention et
négligence >> oblige à admettre que la faute
pénale des articles 319 et 320 contient tous les éléments
de la faute civile. Toute faute qui entraîne un dommage corporel se
traduit par une infraction. Il est donc possible en la matière, de
séparer de la faute pénale, une faute civile qui resterait en
dehors du droit pénal21.
Pour ces auteurs, tant que la faute civile et la faute
pénale sont identiques et ont la même nature, l'une et l'autre
s'apprécieront in abstracto. Selon cette
méthode d'appréciation, l'existence de la faute et sa
gravité s'apprécient par référence à un type
abstrait : l'homme normalement prudent et diligent. L'attitude de l'auteur du
dommage est comparée à la conduite qu'aurait eue un individu
avisé, placé dans les mêmes circonstances, abstraction
faite de toute analyse de la personnalité de son auteur.
Le modèle abstrait de référence est
« le bon père de famille >>. Dans
le domaine professionnel, le modèle de comparaison devient
« le bon professionnel >>.
17 Cf. arrêt MERCIER du
20 Mai 1936, civ. 20 Mai 1936, D.H., 1936.1.88
18AKIDA (M), op.cit. p.18
et suiv. ; DORSNER-DOLIVET(A), CONTRIBUTION A LA RESTAURATION DE
LA FAUTE, CONDITION DES RESPONSABILITES CIVILE ET PENALE DANS L'HOMOCIDE ET LES
BLESSURES PAR IMPRUDENCE: A propos de la chirurgie, éd.
L.G.D.J 1986, p. 37 et suiv.
19 Il s'agit de J. DEPREZ, H.
et L. MAZEAUD et A. TUNC, AKIDA (M), op.cit. P.19.
20 L'art. 289 du Code
pénal Camerounais est l'équivalent de ces articles.
21 AKIDA (M), op.cit.,
p.20.
12
14
16
18
20
La thèse de l'unité a été
très sévèrement critiquée par la doctrine en ce
sens qu'elle manque de fondement, et surtout qu'elle entraîne des
conséquences insupportables dans le domaine pénal.
En ce qui concerne l'absence de fondement de la
thèse de l'unité, la faiblesse du fondement textuel et la
défaillance du fondement rationnel ont été
avancées. Pour ce qui est de la faiblesse du fondement textuel, R. MERLE
estime que << chacun des aspects de la faute
énumérée dans l'article 319 (du Code
pénal Français) est susceptible de degrés :
la
maladresse, une inattention peuvent être plus ou
moins lourdes selon les circonstances ; or, sile législateur
pénal n'a pas dit que seules seraient prises en considération les
maladresses,
les inattentions d'une certaine gravité, il n'a pas
dit non plus que n'importe quelle maladresse, ou n'importe quelle inattention
suffirait à provoquer l'application de la peine
>>22.
S'agissant de la défaillance du fondement
rationnel, il serait loisible de rappeler que la grande règle qui domine
le droit pénal est Nullum crimen nulla poena sine
lege et son corollaire, l'interprétation restrictive des
textes pénaux. Contrairement au droit civil qui est dominé par la
formule << indemniser la victime à tout
prix >>, les principes tels que la présomption
d'innocence, le moindre doute profite à la victime, la
nécessité d'apprécier la faute pénale
in concreto, en tenant compte de la
personnalité du prévenu et de ses possibilités
réelles sont ceux qui soutendent le droit pénal que le principe
de l'identité des fautes civile et pénale viendrait battre en
brèche.
L'application de la thèse de l'unité
aurait des conséquences inadmissibles dans le domaine pénal.
D'une part, elle viendrait instaurer une autorité de fait du civil sur
le criminel car, << dans le but louable d'indemniser la
victime, le juge pénal sait que, s'il relaxe le prévenu, il
privera la victime de toute indemnisation. Face à une alternative
difficile, il se prononcera en faveur de la victime, en condamnant le
prévenu à une courte peine d'emprisonnement assortie souvent d'un
sursis ou d'une légère amende pour sauver les
intérêts privés de la partie civile
>>23. D'autre part, elle dénaturerait
l'élément psychologique de l'infraction car en cherchant à
indemniser la victime à tout prix, le juge appréciera la faute
in abstracto, et non in
concreto, méconnaissant ainsi l'un des principes cardinaux
de droit pénal qui est celui de la personnalité de la
peine.
22 R. MERLE cité par
AKIDA, op.cit., p.21.
23 AKIDA, op.cit.,
p.24.
De ce qui précède, on peut conclure avec
le Professeur CHAVANNE que « la théorie de
l'unité des deux fautes est un facteur de trouble et de désordre
dans l'administration de la justice
>>24.
Pour mettre fin à ces troubles et à ce
désordre, et permettre d'une part au juge pénal de garder son
autonomie, et d'éviter d'autre part de sacrifier le prévenu au
profit de la victime, et enfin de permettre au droit pénal de garder son
aspect humanitaire et équitable, il s'avère nécessaire de
séparer la faute civile et la faute pénale.
2- La thèse de la dualité des fautes
civile et pénale.
Pour les partisans de la thèse dualiste (les
pénalistes français25), les fautes civile et
pénale ne sauraient être identiquement appréciées.
Ils se prononcent en faveur de l'appréciation in
concreto. Ils justifient cet état des choses par l'origine
des deux fautes. La première est issue d'une relation contractuelle,
tandis que la deuxième serait la résultante d'une
infraction.
Ainsi, le but même de l'action répressive
commande au juge pénal de ne pas se servir des mêmes instruments
que ceux utilisés par le juge civil, c'est-à-dire
apprécier la faute pénale in concreto.
Selon ce critère, le juge doit tenir compte de tous les traits de la
personnalité du prévenu. Un examen psychologique de sa
personnalité est souhaitable si l'on veut qualifier convenablement la
faute pénale. Pour que la peine atteigne son but, «
l'infraction doit être examinée non pas en
elle-même mais à travers son auteur, un être de chair et de
sang, responsable >>26. La thèse de la
dualité exige le jugement de l'auteur de l'infraction selon sa faute,
source du mal, et non sur le résultat dommageable, simple
conséquence de la faute.
En effet, il faut constater avec J. GRAVEN que «
si on juge l'homme selon le résultat produit, nous ne
sortons pas de l'optique erronée du droit ancien, du droit primitif oil
le fait juge l'homme..., or, aujourd'hui, on cherche non pas à frapper
ou venger quasi automatiquement parce qu'un résultat a été
la conséquence d'un acte accompli ou omis, mais on vise à punir
un homme en raison de la faute qu'il a commise dans les circonstances oil il se
trouvait, étant donné ce qu'il pouvait et devait prévoir
et éviter >>27. Le professeur CHAVANNE
ajoute que « frapper l'auteur d'un résultat sans
examiner son comportement...,
24 CHAVANNE cité par
AKIDA, op.cit., p 27.
25 LABORDE-LACOSTE, G. VIDAL,
J. MAGNOL, DONNEDIEU DE VABRES, CHAVANNE, PIROVANO, LEVASSEUR sont quelques uns
des juristes qui ont activement participé à ce
débat.
26 PIROVANO cité par
AKIDA, op.cit., p. 31.
27 J. GRAVEN cité par
AKIDA, op.cit., p. 33.
serait négliger l'un des fondements essentiels du
droit pénal >>28. C'est dans la même
optique qu'un attendu de la Cour d'Appel de Nîmes en France
énonçait que : << au regard de la loi
pénale, l'imprudence d'un acte ne doit pas s'apprécier
d'après son résultat, mais uniquement au regard de l'obligation
de diligence qui s'impose à tous. Action ou omission, l'imprudence
suppose la prévisibilité raisonnable, compte tenu du comportement
usuel des hommes >>29.
Ce débat a été tranché par
une décision de la Cour de Cassation qui, dans son célèbre
arrêt BROCHET et DESCHAMPS, a consacré le principe de
l'identité des fautes civile et pénale30. La Cour
déclare que : << les faits constituant la maladresse,
l'imprudence, l'inattention, la négligence ou l'inobservation des
règlements susceptibles de caractériser les délits
d'homicide et de blessures involontaires, sont punissables, sans que la
légèreté de la faute commise puisse avoir d'autre effet
que celui d'atténuer la peine encourue
>>.
Le Code de procédure pénale
camerounais31 dispose quant à lui en son article 59 que
<< Toute infraction peut donner lieu à une action
publique et, éventuellement, à une action
civile>>. L'article 61 plus précis énonce que
<< l'action civile peut être exercée en
même temps que l'action publique devant la même juridiction lorsque
les deux résultent des mêmes faits.
Elle peut aussi être exercée
séparément de l'action publique. Dans ce cas, la
juridiction
saisie de l'action civile surseoit à statuer
jusqu'à la décision définitive de l'action publique
>>.
Serait-ce un choix de la part du législateur
camerounais pour la thèse de la dualité des fautes civile et
pénale ? Nous répondrons par l'affirmative, car le
législateur en matière répressive, édicte, garantit
et respecte les principes directeurs du procès pénal.
La commission de la faute doit entraîner la
survenance d'un préjudice. Toutefois, la faute et le préjudice
elles seules ne suffisent pas à établir la responsabilité
du médecin, encore fautil établir le lien de
causalité.
B- La survenance d'un préjudice et la
nécessité d'un lien de causalité.
Pour être répréhensible, l'acte du
professionnel doit avoir causé un préjudice au patient. En
l'absence de préjudice, l'action entreprise par le patient serait
dépourvue de tout intérêt. A l'exception des cas où
le médecin porte volontairement atteinte à
l'intégrité physique ou à la vie de ses patients
(infanticide, avortement, coups et blessures, etc....), les atteintes
involontaires exigent l'existence d'une relation de cause à effet entre
la faute relevée à
28 CHAVANNE cité par
AKIDA, op.cit., p. 33.
29 Nîmes (ch. Corr.) 28
Mai 1966 J.C.P. 1967.II.11324, obs. P. CHAUVEAU, R.S.C. 1969, p.337, obs. G.
LEVASSEUR.
30 Cour de cassation, civ. 18
Décembre 1912, Bull no 231.
31 Loi No 2005-007
du 27 Juillet 2005 portant Code de procédure pénale.
l'encontre du médecin et du préjudice
constaté. L'élément le plus difficile à
établir, s'agissant de la responsabilité pénale du
médecin, est le lien de causalité entre la faute relevée
et le résultat obtenu. << Le lien de causalité
doit être certain ; une simple probabilité ne suffit pas.
Autrement dit, le résultat doit être la conséquence directe
de l'acte posé par le praticien
>>32.
En effet, l'article 289 du Code pénal
énonce que : << Est puni (...) celui qui, par
maladresse, négligence, imprudence ou inobservation des
règlements cause la mort ou des blessures, maladies ou incapacité
de travail... >>. Cela suppose que la déclaration de
culpabilité établit la preuve d'un lien de causalité entre
la faute et le dommage.
En matière médicale, la causalité
peut s'appliquer soit en vertu du comportement passif du médecin (1),
soit en vertu de l'omission de certaines précautions concomitantes
à l'action thérapeutique (2).
1- Le lien de causalité et le comportement
passif du médecin.
Le médecin à la lumière de
l'arrêt MERCIER est lié à son patient en vertu d'une
relation contractuelle33. Il est tenu de ce fait à une
obligation de moyens. Toute inobservation de ses obligations par maladresse,
négligence, imprudence, ou inobservation des règlements est
constitutive de faute car dans l'exercice de sa profession, le médecin
se doit de prodiguer des soins attentifs et consciencieux, conformes aux
données acquises de la science.
C'est dans cette optique que le médecin qui
fait un diagnostic sans s'entourer de toutes les précautions verra sa
responsabilité retenue. Il en est ainsi lorsque le praticien n'effectue
pas les examens radiologiques34 et biologiques35
nécessaires pour déterminer la cause véritable de la
maladie et que le traitement recommandé s'avère
inapproprié.
En outre, la négligence de s'assurer de la
vacuité de l'estomac du malade avant de procéder à une
opération chirurgicale est condamnable. C'est ainsi que la Cour de
Paris36 a confirmé la condamnation pénale pour
blessures par imprudence prononcée contre le chirurgien et
l'anesthésiste qui avaient négligé de s'assurer que le
patient est à jeun avant l'opération. Il s'agissait d'un enfant
traité dans une clinique d'un pied bot latéral au moyen de
contentions plâtrées successives pratiquées sous
anesthésie générale. Après six opérations
pratiquées sans incident avec anesthésie au fluothane,
l'équipe médicale avait pratiqué la
32 C'est l'avis de la
jurisprudence en France. Voir à ce propos PENNEAU (J), op.cit. ,
p.103.
33 Arrêt MERCIER,
supra.
34 Rouen, 21 Avril
1923.S.1924.2.17, note E.H. PERREAU.
35 Pau, 8 Décembre
1953, J.C.P. 1961.II.11914, obs. R. SAVATIER.
36 Paris, 10 Décembre
1970, G.P. 1971.1.74.
septième sous anesthésie plus profonde
par une piqûre de pentothal. Aussitôt l'enfant régurgitait
un liquide épais qui, envahissant les voies respiratoires, provoquait
une asphyxie. Des moyens de réanimation furent mis aussitôt en
oeuvre ; l'enfant survécut, mais fut réduit à un
état végétatif à peu près total.
La faute de l'équipe chirurgicale et le lien de
causalité ont été affirmés par les experts d'une
manière très nette. Ils ont estimé que «
l'enfant devait être soumis à une anesthésie
générale, les praticiens avaient le devoir de le faire entrer
à la clinique la veille de l'intervention pour avoir la certitude qu'il
serait à jeun au moment de sa réalisation et qu'en ne prenant pas
cette précaution indispensable, les prévenus avaient commis une
faute en rapport direct avec l'accident ».
En outre, la faute prouvée d'un médecin
ne sera pas poursuivie si elle n'a pas été la cause du
décès du patient. C'est ainsi que dans un arrêt de la Cour
de cassation, les abstentions fautives d'un gynécologue accoucheur,
survenues alors que l'enfant à naître avait perdu toute chance de
survie, sont sans lien de causalité avec le décès, ce qui
a justifié la relaxe du médecin37. La faute du
médecin doit être une condition sine qua non du
décès pour être pénalement punissable.
S'il est établi que le lien de causalité
peut résulter du comportement passif du médecin, l'examen de
l'omission de certaines précautions concomitantes à l'action
thérapeutique s'avère nécessaire.
2- Le lien de causalité et l'omission de
certaines précautions concomitantes à l'action
thérapeutique.
Les soins que le médecin prodigue à son
patient doivent s'effectuer avec d'énormes
précautions ceci dans le but de garantir non
seulement leur efficacité, mais également d'assurer une meilleure
protection au patient. Dans l'exercice de son art, le praticien fait recours
à des produits très dangereux et à un outillage complexe.
Une mauvaise manipulation du médecin peut avoir des conséquences
dramatiques. Ces effets peuvent être directement imputables au praticien
en vertu de l'omission des précautions lors de l'acte médical.
C'est le cas lorsque le médecin omet d'administrer une injection
anti-tétanique avant de procéder à une intervention
chirurgicale38, de l'absence d'un anesthésiste
qualifié pendant l'opération39,
37 Crim., 5 Juillet
1997,96-84.524, inédit au Bulletin
38 Crim. 20 Juin 1968, Bull.
crim. No 201.
39 Paris 23 Avril 1968,
J.C.P. 1968.II15625).
ou encore de l'oubli de corps étrangers dans
l'organisme du malade (il s'agit de l'oubli des compresses, mèches de
gaze ou de bourrage, pinces, fragments d'aiguille)40.
S'il est de principe que la répression est la
résultante de la commission d'une faute, cette dernière peut
être exceptionnellement couverte pour des causes
exonératoires.
Paragraphe II : La diversité des causes
d'exonération de la responsabilité pénale du
médecin traitant.
L'exercice de la médecine pour le profane est
un univers de contradictions. C'est volontairement que le médecin
traitant porte atteinte à l'intégrité physique de son
patient ; mais c'est de façon exceptionnelle qu'il peut à ce
titre voir sa responsabilité engagée.
Le médecin a << un devoir
d'humanité ». C'est la raison pour laquelle la loi
encadre de façon stricte l'exercice de sa profession. En effet, le Code
pénal camerounais en son titre III, chapitre 1er
intitulé << DES ATTEINTES A L'INTEGRITE
CORPORELLE » réprime toute forme d'atteinte à
l'intégrité physique des personnes. Dans l'exercice de son art,
plusieurs actes du médecin portent atteinte à
l'intégrité physique du patient. Cela va de la simple injection
jusqu'au prélèvement des organes, en passant par des
opérations chirurgicales.
Le praticien lorsqu'il exerce est couvert par
l'article 286 du Code pénal intitulé <<
INTERVENTIONS MEDICALES » qui dispose que :
<< les articles 27741
à 28142 ne sont pas applicables aux
actes médicaux effectués par toute personne dûment
habilitée lorsqu'ils sont accomplis avec le consentement du patient ou
de celui qui en a la garde, toutefois, au cas oil le patient est hors
d'état de consentir, celui qui en a la garde ou son conjoint doit donner
son consentement sauf lorsqu'il est impossible de communiquer, sans risque pour
le patient, avec ceux-ci », son action se justifiant ici par
la recherche de la guérison du patient. Ainsi, toutes les fois que la
vie du patient est en jeu, l'intervention du médecin se trouve
justifiée. Les causes d'exonération du médecin sont de
plusieurs ordres. Elles peuvent être le fait d'une liberté
d'action consentie par le médecin (A). Toutefois, sous le fait d'actions
indépendantes de sa volonté, le médecin bien que fautif
peut se voir exonérer de sa faute (B).
40 Crim. 14 Juin 1957, D.
1957, p. 512.
41 Les blessures
graves.
42 Les blessures
légères.
A- Les causes d'exonération propres à la
liberté d'action du médecin.
L'intérêt du patient peut amener le
praticien à prendre des mesures visant à lui sauver la vie. C'est
le cas par exemple lorsque le médecin, dans le souci de préserver
la santé et de sauver la vie de la mère peut être
amené à procéder à un avortement dit <<
thérapeutique >> s'il est établi
que le fait de mener à terme la grossesse pourrait s'avérer
dangereux pour la mère (1). Dans la même optique, la
stérilisation de la mère vue comme mesure de contraception si la
conception peut présenter un danger pour sa vie (2).
1- Les avortements dits «
thérapeutiques ».
La Constitution de la République du Cameroun
<< protège et encourage la famille, base naturelle de
la société humaine >>43. C'est la
raison pour laquelle le législateur a mis en oeuvre des dispositions
pour protéger l'enfant et la famille44. Parce qu'il est
garant de la protection des droits et libertés conformément
à l'article 26 de la Constitution, le législateur camerounais
réprime l'avortement45. Le médecin qui s'expose
à de telles pratiques comme l'énonce le Code pénal, verra
sa peine doublée. En outre, étant donné que la pratique de
l'avortement va à l'encontre de l'éthique professionnelle, le
Code de déontologie en son article 29 énonce que : <<
Toutes pratiques ou manoeuvres d'avortement sont interdites
>>.
Toutefois, parce que le respect de la vie constitue en
toute circonstance le devoir premier du médecin, sauver la mère
d'un péril grave pour sa santé justifie le recours à
l'avortement. De ce fait, << en cas de grossesse
résultant d'un viol, l'avortement médical ne constitue pas une
infraction s'il est effectué après attestation du
ministère public sur la matérialité des faits
>>46. Dans le même ordre d'idée, le Protocole
à la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples, relatif aux
droits de la femme en Afrique adopté à Maputo (Mozambique) le 11
Juillet 2003 reconnaît à la femme en son article 14 le droit
à la santé et au contrôle des fonctions reproductrices.
C'est ainsi que l'alinéa 2c dudit article dispose que : <<
les Etats prennent toutes les mesures appropriées
pour...protéger les droits reproductifs de la femme,
particulièrement en autorisant l'avortement médicalisé, en
cas d'agression
43 Voir préambule de
la loi constitutionnelle du 18 Janvier 1996.
44 Chapitre 5 du titre 3,
C.P.
45 Art. 337 du Code
pénal : <<1- Est puni (...) la femme qui se procure l'avortement
à elle-même ou qui y consent.
2- Est puni (...) celui qui, même avec son
consentement procure l'avortement à une femme.
3- Les peines sont doublées :
a- A l' encontre de toute personne qui se livre
habituellement à l'avortement
b- A l' encontre d'une personne qui exerce une
profession médicale ou en relation avec cette profession.
4- La fermeture du local professionnel et l'interdiction
d'exercer la profession peuvent en outre être ordonnés dans les
conditions prévues aux articles 34 et 36 du présent code...
>>
46 Al.2, art.337,
C.P.
sexuelle, de viol, d'inceste et lorsque la grossesse met en
danger la santé mentale et physique de la mère ou la vie de la
mère ou du foetus ».
Le premier type d'avortement constitue ce que le Code de
déontologie qualifie
d' << avortement
thérapeutique». On y fait recourt si cette
intervention est le seul moyen susceptible de sauver la vie de la mère.
Les avortements thérapeutiques sont strictement
règlementés et obéissent à une procédure
particulière47dont l'inobservation peut engager la
responsabilité du médecin.
Si le recours à l'avortement peut être
envisagé dans le but de sauver la mère, les stérilisations
peuvent également être entreprises dans l'intérêt du
patient.
2- Les stérilisations «
thérapeutiques ».
La protection de la vie constitue en tout point une
priorité pour le médecin. Si la nécessité
d'opérer un choix entre sauver la vie de la mère et celui de
l'enfant est imposé au médecin, le praticien devra donner
priorité à celle de la mère. Il est des circonstances oil,
face à l'inefficacité des mesures contraceptives, et surtout aux
dangers que pourrait présenter une éventuelle grossesse pour la
mère, le médecin peut être sollicité pour
opérer la stérilisation de la patiente (les ligatures des trompes
sont les opérations les plus sollicitées dans ce cadre).
Opération délicate et complexe, elle doit s'effectuer avec le
consentement de la patiente. Si le but thérapeutique recherché
par le médecin est atteint, sa responsabilité ne peut être
retenue. Il serait loisible de relever que le Protocole de Maputo sus
cité reconnaît aux femmes un certain nombre de droits parmi
lesquels << le droit d'exercer un contrôle sur leur
fécondité ; le droit de décider de leur maternité,
du nombre d'enfants et de l'espacement des naissances ; le libre choix des
méthodes de contraception » 48.
Les causes d'exonération propres à la
liberté d'action du médecin ainsi présentées, il
s'avère nécessaire d'examiner les causes dues à des
agissements qui échappent à la volonté du
praticien.
47 Il s'agit des al. 2, 3, et
4 de l'art. 29 du Code de déontologie des médecins du
Cameroun.
48 Article 14 al. 1a, b, c,
Protocole à la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples,
relatif aux droits de la femme en Afrique adopté à Maputo
(Mozambique) le 11 Juillet 2003.
B- Les causes d'exonération relatives aux actes
échappant à la volonté du médecin.
Malgré l'évolution vertigineuse dont la
médecine fait l'objet, le corps humain continue d'entretenir des
mystères pour l'homme de l'art. L'aléa reste présent dans
l'acte médical. Pour cette raison, le praticien ne peut pas toujours
garantir de l'efficacité du traitement du patient (1). Bien que
professionnel, le médecin est un être humain qui peut, sous
l'effet de forces indépendantes de sa volonté être
amené à poser des actes non voulus. Il en est ainsi lorsqu'il est
sous l'effet de la contrainte ou de la démence (2). Tout cela ne doit
pas nous faire perdre de vue qu'un auxiliaire médical ou le patient peut
être à l'origine du préjudice (3).
1- La réaction défavorable du patient au
traitement à lui administré.
L'action thérapeutique commence par le diagnostic.
Diagnostiquer, c'est le fait pour un médecin de reconnaître et
d'identifier les maladies d'après leurs symptômes.
Le diagnostic médical est entouré de
certaines particularités. Il ne fait pas seulement appel à la
science, mais aussi à l'expérience et à
l'intelligence49. Néanmoins, tous les médecins ne
possèdent pas à la fois ces qualités et sont donc
exposés à commettre des erreurs. C'est dans cette optique que
MONNEROT-DUMAINE a soutenu que << le diagnostic ne fait pas
appel seulement aux connaissances et à la correction des examens
cliniques et biologiques, il dépend aussi de l'esprit critique, d'une
certaine forme d'intelligence. On peut être instruit et se tromper de
diagnostic parce qu'on manque d'intelligence...
»50.
Ensuite, le médecin choisit le traitement
convenant à l'état du malade et le met en application. Dans le
choix de la mise en oeuvre du traitement, la prescription d'une
thérapeutique n'est pas toujours une conséquence automatique du
diagnostic ; c'est un choix entre les risques car, le médecin
pèse entre le risque et l'efficacité de l'action
thérapeutique. Il choisit le traitement convenant à chaque
malade. En effet, << le médecin doit personnaliser le
traitement pour l'adapter à l'état de chaque malade en tenant
compte de l'âge, du sexe, de l'état d'altération plus ou
moins importante des organes ou des tissus
»51.
Il serait toutefois loisible de souligner que la
connaissance de l'état du malade est naturellement imparfaite, car il
faut tenir compte des aléas, des imprévus et des réactions
inattendues du patient. Bien qu'avec l'évolution de la médecine,
la marge d'imprévisibilité dans la réaction du patient se
trouve progressivement réduite, les secrets du corps humain
ne
49 AKIDA (M), op.cit.,
p.110.
50 Ibid.
51 Crim. 16 Avril 1921 DP
1921.1.184.
sont pas encore tous découverts. En outre,
l'organisme du patient surprend de temps à autre le médecin par
des réactions imprévisibles et inconnues. On parle de <<
prédispositions >> du malade. Le terme
<< prédispositions >>
désigne tout état pathologique, toute particularité
physique ou mentale anormale, propre à aggraver le préjudice
résultant d'un accident.
La jurisprudence française tient compte de ces
prédispositions imprévisibles pour affirmer soit l'absence de la
faute, soit surtout l'absence du lien de causalité entre la conduite du
médecin et le dommage subi par le malade. C'est dans cette logique que
la Cour de Cassation affirme qu' << aucune faute ne saurait
être relevée contre un médecin spécialiste qui a
procédé à l'examen d'un patient en se servant d'un
appareil classique en parfait état, employé sans maladresse ni
brutalité et alors que le fait dont les suites ont été
mortelles a consisté dans une érosion causée par une
contraction musculaire qui ne pouvait être prévue par
lui >>52. En effet, le praticien avait
été appelé pour pratiquer l'oesophagoscopie sur un malade,
et qu'au cours de cet examen il se produisit une érosion de la paroi du
pharynx à la suite de laquelle se déclarèrent une
pleurésie purulente et une médiasténite ayant
entraîné la mort.
L'imprévisibilité des réactions du
malade rompt dans ce cas tout lien de cause à effet entre l'action
médicale et le décès du patient.
Si le patient, en l'absence de toute faute du
médecin réagit négativement à un traitement auquel
il a été soumis, la responsabilité du médecin ne
peut être engagée car, après tout, ce dernier n'est soumis
qu'à une obligation de moyens et non de résultat. La
réaction défavorable du patient au traitement ainsi
examiné, qu'en est-il du médecin sous le coup de la
démence ou de la contrainte ?
2 - Le médecin sous le coup de la
démence ou de la contrainte.
<< L'intelligence est une
qualité fondamentale de l'être humain. Elle lui confère le
monopole de la responsabilité puisqu'elle lui donne la
possibilité de discerner le bien et le mal
>>53. Une personne dont les qualités
intellectuelles sont insuffisantes ou inexistantes ne comprend pas clairement
la portée de son acte qui ne peut lui être imputée. Aussi,
avant de déclarer un individu coupable d'une infraction, il faut
auparavant s'assurer qu'il dispose de toutes ses facultés mentales. Le
dément n'est pas imputable puisque son affection mentale exclut chez lui
la faculté de comprendre ce qu'il fait.
52 Cass. Req. 31 Octobre
1933.D.H.1933, p.537; G.P. 1933.2., p. 988.
53 NDOKO (N.C.), op.cit.,
p.32.
22
24
Le Professeur NDOKO retient deux acceptions de la
notion de démence : d'un point de vue psychiatrique et d'un point de vue
juridique. << En psychiatrie, le terme démence
désigne uniquement, la déchéance progressive et
irréversible de la vie psychiatrique due à la
sénilité ou à la paralysie générale
syphilitique... pour le juriste, c'est toute maladie de l'esprit, toute
aliénation mentale « exclusive du discernement » et de la
liberté de décision
>>54.
En effet, il est très rare qu'un médecin
puisse exercer dans des conditions où toutes ses facultés
mentales ne pourraient être mises à contribution. L'Ordre des
médecins est l'institution qui veille sur la qualité des
professionnels qui le constituent. Toutefois cela ne constitue pas une garantie
car, le médecin est un être humain et comme tel, peut être
atteint par une maladie de l'esprit. La démence est prévue par
l'article 78 du Code pénal camerounais. Sa détermination est
soumise à des conditions strictes, elle doit être
médicalement constatée (il s'agit du recours à l'expertise
psychiatrique), et doit être contemporaine à l'action. La <<
sanction >> résultant
généralement à l'issue d'une démence établie
est l'internement dans un centre psychiatrique de l'accusé.
Quant à ce qui concerne la contrainte,
contrairement au Code pénal français qui vise tout
type de contrainte, au Cameroun, <<
seule la contrainte matérielle irrésistible
conformément à
l'article 77 du Code pénal est une cause de non
imputabilité, la contrainte morale ne l'est
pas >>55. Néanmoins,
parmi les conditions de menace exonératoire, nous pouvons dire que
:
- les menaces constitutives de contrainte morale
doivent être des menaces de mort ou de blessures graves au sens de
l'article 277 du Code pénal, c'est à dire, faire craindre
<< la privation permanente de l'usage de tout ou partie d'un
membre, un organe, ou d'un sens >>. en somme, le
péril qui menace l'agent doit être
considérable.
- La menace doit être imminente, c'est à
dire être présente ou devant se produire
immédiatement.
- La menace doit être << non
autrement évitable56
>>.
- Il faut l'absence d'une faute antérieure, c'est
à dire que la menace doit surprendre
le prévenu. Tel ne serait pas le cas si ce
dernier s'est volontairement exposé au risque de telles menaces tel que
l'énonce l'alinéa 2 de l'article 81 du Code pénal. Dans ce
cas, il y aura seulement réduction de la peine par l'effet d'une excuse
légale atténuante.
54 Idem, p. 33.
55 Idem, p. 47 et
suiv.
56 Idem, p.54.
Qu'en est-il lorsqu'un auxiliaire médical ou le
patient est à l'origine de la faute ?
3- La faute de l'auxiliaire médical ou du
patient.
Dans certains cas, le médecin peut confier
l'exécution de certains actes médicaux à un auxiliaire
médical. Si à la suite d'une imprudence ou d'une
négligence commise par ce dernier, le patient subit un préjudice
ou décède, la question de la responsabilité sera
soulevée : qui doit répondre du résultat délictueux
: le médecin seul, l'auxiliaire seul, ou les deux respectivement ? Bien
que la jurisprudence française ait parfois condamné le
médecin malgré la faute de l'auxiliaire57, dans
d'autres cas, les tribunaux considèrent que l'auxiliaire est le seul
responsable du dommage subi par le malade.
<< Nul n'est punissable qu'à
raison de son fait personnel » affirme la Cour de
cassation58. La responsabilité pénale est une
responsabilité personnelle. Par conséquent, si les faits
révèlent que le médecin n'a pas commis une faute dans le
traitement et que le décès du malade est le résultat d'une
faute commise par une infirmière, le médecin impliqué dans
la poursuite doit être relaxé et la responsabilité
pénale de l'auxiliaire doit en revanche être retenue.
C'est ainsi qu'en a décidé le tribunal
correctionnel d'Abbeville59. Il s'agissait d'un
malade atteint
d'une syphilis héréditaire. Le médecin lui avait prescrit
une série d'injections
de sulfarsénol. En raison de
l'éloignement du lieu d'habitation du malade, le médecin
avait
confié l'exécution du traitement à une
infirmière diplômée et lui avait remis un
prospectus
relatif au mode d'emploi du sulfarsénol. Il lui avait
demandé de se conformer, pour l'ordre et
l'intervalle des injections,
aux indications qu'il avait soulignées d'un trait de
plume.
L'infirmière ne s'est conformée ni aux indications du
médecin ni à celles du prospectus et le
jeune malade est
décédé après la 9ème
piqûre. Le décès a été attribué
à une méningite suraigüe.
Le médecin et
l'infirmière furent poursuivis pour homicide par imprudence.
On
reprocha au médecin de confier à une infirmière le
soin de pratiquer des injections
57 Cette question a
été à l'origine d'une controverse entre la doctrine et la
jurisprudence en France. Certains actes ordinaires tels que la
stérilisation des instruments pendant l'opération, ou le
réchauffement du malade après l'opération par bouillotes,
peuvent être confiés à une infirmière. La doctrine
estime que les soins post-opératoires courants tels que le
réchauffement de l'opéré, fait partie des soins
hospitaliers et relèvent à ce titre, de la responsabilité
de l'établissement de santé et non pas de celle du
chirurgien.
La jurisprudence avait cependant refusé ce
point de vue et avait admis << la responsabilité
pénale du fait d'autrui » à l'encontre du
chirurgien, chef de l'équipe médicale (crim. 21 février
1946, B. crim. No 68, p. 98). Lire AKIDA (M), op.cit., p. 366 et
suiv.
58 Voir crim. 3 Mars 1933,
Bull. crim. No 49, p. 145; crim. 16 Décembre 1948, Bull.
crim. No 291, p. 1011.
59 Le 24 Octobre 1935, G.P.
1936.1. p. 76
extrêmement dangereuses. On reprocha à
l'infirmière une double faute : modifier de son propre chef les
prescriptions cependant précises qui lui avaient été
données et négliger d'informer le médecin de la
réaction douloureuse causée par la première piqûre
sur l'organisme du malade.
Le tribunal relaxa le médecin pour condamner
l'infirmière pour homicide par imprudence. Il estima que le
médecin n'avait commis aucune faute en relation de cause à effet
avec le décès : il avait ordonné un traitement correct,
adéquat et prudent. Ensuite, il pouvait s'en remettre à
l'infirmière compétente, avertie, expérimentée, qui
s'était chargée de l'exécution du traitement. Enfin, le
fait dont les suites avaient été mortelles consistait en une
mauvaise exécution de son ordonnance qui ne pouvait être
prévue par lui. Le tribunal a donc estimé que la faute de
l'infirmière constituait pour le médecin un cas de force majeure
l'exonérant de toute responsabilité.
En outre, la victime, par son imprudence ou sa
négligence, peut contribuer à la réalisation du dommage
qu'elle a subi. Mais dans ce cas généralement, il se trouve que
les responsabilités sont le plus souvent partagées entre le
médecin et le patient et/ou les personnes responsables du malade. En
effet, en cas de dommage, il est très souvent reproché au
médecin d'avoir failli à son devoir d'information (ne
s'être pas assuré de la vacuité de l'estomac avant de
procéder à une opération chirurgicale, prescrire au malade
un produit auquel il est allergique), car << le
médecin ne doit ... pas attendre que le malade lui fournisse
spontanément tous les renseignements utiles, mais il doit l'interroger
sur tout ce qui est utile pour éclairer son état
>>60. Tout comme << le
médecin ne doit pas attendre que les parents ou plus
généralement les responsables du patient lui fournissent
spontanément les renseignements utiles ou remplissent à sa place
le devoir de surveillance du malade >>61. De ce
fait, pour que la faute du médecin soit exonérée, la Cour
de cassation a estimé que << la faute de la victime
n'exonère le prévenu de la responsabilité de l'accident
que si elle a été la cause unique et exclusive, ou qu'elle a
été la cause unique, imprévisible et inévitable de
l'accident >>62.
Cerner les contours de la responsabilité
pénale du médecin n'est pas évident car, c'est un corps de
métier fait d'ambivalence, de confusions et de contradictions. Le
médecin traitant est permanemment pris entre les risques qu'il doit
prendre pour apporter soulagement à son patient et le respect de la loi.
Le législateur, soucieux de la sauvegarde des intérêts de
la société, tout comme l'Ordre National des Médecins du
Cameroun, garante de la préservation
60 AKIDA (M), op.cit., p.
376
61 Idem, p.377
62 Crim. 18 Juillet
1929.S.1932.1.159 ; Paris, 1er Mars 1974, J.C.P.1975.II.17922, note
A.C.
des valeurs dans l'exercice de l'art médical
ont mis en oeuvre un corps de règles (Code pénal et Code de
déontologie) qui ont pour but la préservation des droits du
malade. L'exemple a été donné par le préambule de
la Constitution, les dispositions du Code pénal et les dispositions du
Code de déontologie.
La Cour de cassation en France joue également
un rôle majeur dans le souci d'éclairer le mieux possible le champ
de la responsabilité du médecin traitant. Tout cela conduit
à l'accroissement des obligations du médecin, qui du fait qu'il
doit sauver des vies a un devoir d'humanité ; d'où le
renforcement de sa responsabilité pénale du point de vue de ses
obligations professionnelles, mais également, au vu des informations que
le patient met à sa disposition.
SECTION II : LE STATUT JURIDIQUE DU
MEDECIN TRAITANT : UN FACTEUR DE RENFORCEMENT DE
SA
RESPONSABILITE PENALE.
Le médecin dans l'exercice de son art est
soumis à un devoir d'humanité. Ce devoir se matérialise
par les obligations qu'il a de soigner et de sauver des vies, ces obligations
impliquent le respect de la vie du patient à tous les niveaux. En effet,
le médecin dans le cadre de l'exercice de son art est tenu au respect
des règles qui régissent sa profession. Lorsqu'il suit son
patient, il est tenu au respect de sa vie privée ; car, il prend
connaissance des informations qui lui sont personnelles. La
responsabilité du médecin peut être retenue au vu des
informations mises à sa disposition (Paragraphe II) ; ce qui n'est que
la résultante des obligations auxquelles ce dernier est tenu en vertu de
sa profession (Paragraphe I).
Paragraphe I: La responsabilité pénale
liée à la profession du médecin.
Le médecin qui exerce prête serment.
C'est HIPPOCRATE qui a posé les bases de ce serment. Il
révèle les principes de l'éthique et de la
déontologie médicales prononcés par tout médecin
avant de commencer à exercer. A sa lecture, nous pouvons recenser
l'essentiel des obligations inhérentes à l'exercice de la
profession de médecin. Il s'agit en substance de
26
28
30
32
34
l'obligation de fidélité
vis-à-vis de son « maître
»63 en médecine, de l'obligation de
désintéressement. Il a en outre un devoir de conseil aux malades,
de non recours au poison. Il ne doit pas procurer la mort à son patient
même si c'est ce dernier qui en fait lui-même la demande, il ne
doit pas recourir à l'avortement...et la liste est loin d'être
exhaustive. Nous pouvons regrouper ces obligations en deux types : l'obligation
de soigner et l'obligation de sauver des vies. En vertu du rôle important
qu'il tient dans la société, la responsabilité du
médecin est juridiquement encadré (A). De cet encadrement
procède une multitude d'obligations (B).
A- L'encadrement juridique de la responsabilité
du médecin.
Le Code de déontologie médicale du
Cameroun pose les bases éthiques et déontologiques de la
profession médicale, et, le médecin qui y contrevient s'expose
à des sanctions disciplinaires. Le législateur, garant de la
protection des droits et libertés, dans le souci d'assurer l'harmonie
sociale a mis sur pied un système répressif. Ce système
vise à réprimer les agissements qui troublent l'ordre social. Les
médecins, dans l'exercice de leur art ne sont pas exempts de poursuites.
Aussi, certains des devoirs contenus dans le Code de déontologie
trouvent leurs incriminations dans le Code pénal. Le praticien qui viole
la loi dans le cadre de ses obligations professionnelles peut voir sa
responsabilité engagée sur le plan pénal. S'il parait
indéniable que la sauvegarde et le respect de la vie humaine sont des
priorités pour le médecin ceci en vertu du droit universel qu'est
le droit à la santé (2), ces sujétions passent
préalablement par l'exigence de probité qui est faite au
professionnel (1).
1- L'exigence légale de probité faite au
professionnel médical.
De par l'importance qu'il revêt dans la
société, et surtout, au vu du serment qu'il a prêté
en s'engageant à sauver des vies, l'honnêteté et
l'intégrité morale doivent caractériser le médecin.
L'appât du gain facile ne saurait justifier ses interventions,
l'éloignant ainsi de ses missions, auquel cas, il serait assimilé
à un charlatan.
C'est dans cette optique que le Code de
déontologie médicale du Cameroun en son article 18 dispose que
« sont interdites toutes les supercheries propres à
déconsidérer la profession, en particulier toutes les pratiques
de charlatanisme ». Cette exigence est
63 C'est le terme
consacré par HIPPOCRATE dans son très célèbre
serment et qui vise à désigner celui qui initie le médecin
à l'exercice son art.
renforcée par l'article 24 du même Code
qui dispose que << le médecin dans ses prescriptions
doit rester dans les limites imposées par les conditions du malade. Il
ne doit en conscience lui prescrire un traitement très onéreux
qu'en éclairant celui-ci ou sa famille sur les sacrifices que comporte
ce traitement et les avantages qu'ils peuvent en espérer. Le
médecin ne doit jamais donner à un malade des soins dans un but
de lucre >>.
Il en découle donc que le médecin qui
contrevient à ses obligations peut être sous le coup des
infractions telles l'escroquerie64. Au Cameroun, il n'est pas rare
de rencontrer des médecins adoptant des comportements curieux. En effet,
à l'issue d'une consultation, un médecin peut recommander
à son patient de se rendre dans une pharmacie nommément
désignée ou chez tout autre vendeur agréé (un
opticien par exemple). Cette démarche permet au praticien de percevoir
des pourcentages par rapport au nombre de << clients
gagnés >>. Ces attitudes sont de nature à
ternir l'image des professionnels de la santé, et les
établissements hospitaliers gagneraient à combattre ces
agissements.
Si l'exigence de probité permet de comprendre les
dispositions pénales qui encadrent la responsabilité du
médecin, la valeur de la vie humaine n'est pas à
négliger.
2- Le droit à la santé : un droit
humanitaire universellement reconnu.
Le droit à la santé est sans cesse en
évolution. En effet, une diversité d'instruments a
été
mise sur pied pour garantir ce droit fondamental tant au
plan international qu'au plan interne.
Au plan international, l'outil de
référence en la matière est la Déclaration
Universelle des Droits de l'Homme qui en son article 3 stipule que <<
tout homme a droit à la vie, à la liberté et
à la sûreté de sa personne >>. A
côté de la Déclaration, le droit de la santé est
également consacré dans les instruments régionaux. A titre
d'exemple, nous pouvons citer la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des
Peuples, qui stipule en son article 4 que << la personne
humaine est inviolable. Tout être humain a droit au respect de sa vie et
à l'intégrité physique et morale de sa personne. Nul ne
peut être privé de ce droit arbitrairement >>.
Et plus proche de nous, le Protocole à la Charte Africaine des Droits de
l'Homme et des Peuples relatif aux Droits des Femmes plus connu sous le nom de
<< Protocole de Maputo >> en son article
14.
Au plan interne, la Constitution qui est la norme
fondamentale pose les jalons du droit
de la santé dans son préambule. En le
parcourant, on peut y lire que : << toute personne a
droit
64 Une escroquerie commise
dans la pratique de l'art médical a été retenue par la
Cour de Cassation contre un membre de l'église de scientologie (Crim., 7
Avril 1999, inédit au bulletin, pourvoi No
98-80.40).
à la vie et à l'intégrité
physique et morale ... ». Ce volet est complété
par les lois et règlements de la République. Tout ceci montre
combien est immense la mission dévolue au médecin. De ce fait, le
Serment d'Hippocrate que prêtent les médecins lorsqu'ils
s'engagent à exercer fait état des qualités que
révèle l'art de soigner. Le praticien en vertu du devoir
d'humanité qui est le sien se doit de respecter et de protéger la
vie humaine. Il ne doit par conséquent pas s'adonner à la
pratique d'activités dangereuses65, en administrant du poison
à son patient ou en lui procurant la mort, même si c'est ce
dernier qui lui en fait la demande66. Les atteintes à la vie
sont réprimées par le Code pénal camerounais.67
Cette disposition du Serment d'Hippocrate pose de nos jours le problème
de l'euthanasie que nous verrons dans le cadre de nos développements
ultérieurs.
Pour mener à bien sa mission, le médecin
doit travailler dans des conditions idoines, propres à assurer sa
sécurité et celle du patient. De ce fait, ses conditions de
travail doivent être améliorées. Cela passe par une
meilleure redéfinition du rôle du médecin dans la
société.
Le champ de l'encadrement juridique de la
responsabilité du médecin circonscrit, présenter ses
obligations devient plus évident.
B- Les obligations du médecin traitant.
Le Code de déontologie des médecins du
Cameroun en ses titres 1 et 2 intitulés respectivement : «
DEVOIRS GENERAUX DU MEDECIN » et «
DEVOIRS DU MEDECIN ENVERS LE MALADE »
présente les obligations auxquelles sont soumis les praticiens tant en
vertu de leur profession (1) que vis-à-vis de leurs patients
(2).
1- Les devoirs généraux du
médecin.
Il ressort des dispositions du Code de
déontologie que le médecin doit en toute circonstance respecter
la vie du patient. Et pour ce faire, il est tenu de soigner sans tenir compte
de la condition du patient, de sa nationalité de sa réputation ou
des sentiments que celui-ci lui inspire. Il ne doit en aucun cas exercer sa
profession dans les conditions qui puissent compromettre la qualité de
ses soins et de ses actes. En outre, il ne peut abandonner
65 Art. 228, alinéa 2c
Code pénal.
66 Cf. Serment
d'HIPPOCRATE.
67 Voir infra.
ses malades, même en cas de danger public, sauf
ordre écrit de l'autorité compétente68, sauf
s'il s'est assuré que d'autres soins médicaux de nature à
écarter le danger sont prodigués au malade en danger
immédiat. Le médecin doit porter secours quel que soit sa
fonction ou sa spécialité. Enfin, le médecin ne doit pas
exercer dans un but de lucre. Il doit délivrer des certificats
médicaux dans la forme règlementaire et ne doit pas
délivrer un rapport ou un certificat de complaisance.
Le médecin, dès l'instant qu'il est
appelé à donner des soins et qu'il a accepté de remplir
cette mission, s'oblige vis-à-vis du malade à lui assurer
aussitôt tous les soins médicaux en son pouvoir et
désirables en la circonstance, personnellement ou avec l'aide de tiers
qualifiés69, à agir avec courtoisie et
efficacité envers le malade et à se montrer compatissant envers
lui.
Le médecin doit toujours élaborer son
diagnostic avec le plus grand soin sans compter le temps que lui coûte ce
travail70. Ainsi, après avoir formulé un diagnostic et
prescrit le traitement, le médecin doit s'efforcer d'en obtenir
l'exécution, particulièrement si la vie du malade est en
danger.
2- Les devoirs du médecin envers le
malade.
Dans ses prescriptions, le médecin doit rester
dans les limites imposées par la condition du malade. Il ne doit en
toute conscience, prescrire au malade un traitement très onéreux
qu'en éclairant celui-ci ou sa famille sur les sacrifices que comporte
ce traitement et les avantages qu'ils peuvent en espérer. Les
ordonnances dressées à l'issue du diagnostic sontelles
suffisamment expliquées par le médecin au malade ? Il est
très courant de rencontrer des patients se plaindre des ordonnances
volumineuses ou mal écrites. Ne serait-ce pas la résultante d'une
information insuffisante de la part du médecin ou de l'ignorance de la
condition du malade ?
C'est ainsi que dans une affaire rendue par la Cour
d'Angers71, un médecin avait délivré à
une patiente une ordonnance très mal écrite. Voulant prescrire
vingt cinq gouttes de << Laudanum Sydenham
>>, pour un médicament à absorber en deux fois, il avait
commis une négligence grave : il avait écrit 25 en chiffres
arabes (contrairement aux prescriptions règlementaires) et le mot
« gouttes >> en abrégé
<< gt >> comme signifiant
« grammes >> et fit
68 Art. 3, al 2 Code de
déont.
69 Art. 22 Code de
déont.
70 Art. 23 Code de
déont.
71 Angers, 11 Avril 1946,
J.C.P. 1946.II.3163.
administrer à la patiente 25 grammes du
médicament prescrit. Après avoir absorbé la moitié
du médicament, la patiente tomba aussitôt dans un coma et
décéda sans avoir repris connaissance. Les experts ont
estimé que la victime avait succombé à une intoxication
massive due à l'absorption d'une dose mortelle de <<
Laudanum ».
Le médecin a été poursuivi pour
homicide par imprudence et condamné par les premiers juges, condamnation
que la Cour d'Angers a confirmé car, la responsabilité du
médecin dans la rédaction de l'ordonnance constitue une faute
caractérisée qui << est à l'origine de
l'erreur de lecture du préparateur et la malfaçon qui a
déterminé la mort de la cliente ».
En outre, le médecin peut légitimement
dissimuler un pronostic grave au malade. Un pronostic fatal ne peut lui
être révélé qu'avec la plus grande circonspection.
Il doit généralement le révéler à sa famille
à moins que la malade ait préalablement cette
révélation ou désigné les tiers auxquels elle doit
être faite72. Il est interdit au médecin toutes
pratiques ou manoeuvres d'avortement. Enfin, le médecin reste libre de
donner gratuitement ses soins quand sa conscience le lui demande.
La responsabilité pénale liée
à la profession de médecin ainsi examinée, l'examen de la
responsabilité relative aux informations mises à la disposition
de ce dernier s'avère nécessaire.
Paragraphe II : La responsabilité relative aux
informations mises à la
disposition du médecin traitant.
Dans l'exercice de son art, le praticien est
amené à prendre connaissance des informations qui sont
personnelles à son patient. Une fois ces renseignements connus, il est
tenu au secret professionnel (A). En outre, certaines communications que le
médecin doit transmettre au patient doivent faire l'objet de beaucoup de
précautions. Il en est ainsi du traitement spécifique des
patients à la suite d'un diagnostic grave ou fatal (B).
72 Art. 27 Code de
déont.
A- Le principe du secret médical.
L'information médicale est
protégée par le secret professionnel. Le Professeur PORTES a
affirmé à ce propos que : << il n'y a pas de
médecine sans confiance, de confiance sans confidence et de confidence
sans secret »73.
Le secret médical est une variété
du secret professionnel, c'est-à-dire une obligation pour les personnes
qui ont eu connaissance des faits confidentiels dans l'exercice de leurs
fonctions, de ne pas les divulguer hors des cas prévus par la loi.
Depuis longtemps, en effet, on considère que certaines activités
mettant nécessairement en cause l'intimité des particuliers
doivent être entourées d'une grande discrétion. Lorsque le
professionnel est un médecin, on parle de secret
médical.
Encore appelé obligation de se taire, le secret
médical est une obligation morale de dissimuler la connaissance que l'on
a pu avoir de l'intimité d'une autre personne. C'est dans cette optique
que peut se trouver le fondement du secret médical (1), ce qui produit
différents effets (2).
1- Le fondement du secret professionnel du
médecin.
Le secret professionnel se justifie par l'obligation
de discrétion et de respect de la personne d'autrui. Elle s'impose au
médecin parce qu'il << ...est celui qui a
accès aux secrets de la vie et qui connaît les lois de la vie, de
la mort, mais aussi du corps et du sexe, c'est-àdire de
l'intimité du patient »74.
Le secret médical a un fondement contractuel
parce que : << en examinant son malade, en prescrivant les
soins et les premiers examens complémentaires, le médecin noue le
dialogue et engage la relation médecin-malade
»75. Le secret médical se justifie
également par un intérêt d'ordre public.
En ce qui concerne le fondement contractuel de
l'obligation de se taire, nous dirons que le médecin et son patient sont
liés par un << contrat » tacite,
par une relation d'attente et d'espérance mutuelles. Le patient attend
la discrétion du médecin, le soulagement et si possible la
guérison ; le médecin attend la confiance et la reconnaissance de
son patient, moteurs indispensables pour une meilleure participation de ce
dernier au traitement. Ce cadre
73 Professeur PORTES
cité par TJOUEN, << Le médecin et son patient :
L'obligation de se taire », in Revue Africaine des Sciences juridiques,
Vol. 1, No 1 2000, p. 70.
74 JEAMMET cité par
TJOUEN, op.cit., p.73.
75 Idem.
contractuel a encore été clairement
affirmé par le célèbre Arrêt MERCIER du 20 Mai
193676 d'après lequel : << Il se forme
entre le médecin et son client un véritable contrat...
>>. Le droit du patient est que ses confidences ne soient
divulguées, ni son intimité révélée aux
tiers. Ce droit est si sacré que l'article 27 du Code de
déontologie médicale du Cameroun précise <<
in fine >> qu'en cas de pronostic fatal, la
famille doit généralement être prévenue, <<
...à moins que le malade ait eu préalablement cette
révélation ou désigné les tiers auxquels elle doit
être faite >>. Ce secret lui reste donc intime
même << post mortem >>.
L'on en déduit que dans cette conception
contractuelle, il s'agit beaucoup plus de l'intérêt privé
du patient que de celui du médecin.
Quant au fondement de l'obligation de se taire visant
un intérêt social d'ordre public, l'article 11, alinéa 2 du
Code de déontologie médicale français dispose que <<
le secret couvre tout ce qui est venu à la connaissance du
médecin dans l'exercice de sa profession, c'est-àdire non
seulement ce qui lui a été confié, mais aussi ce qu'il a
vu, entendu ou compris >>. Le malade le sait, c'est pourquoi
il se confie totalement au médecin en lui livrant tous les secrets de sa
santé et de sa vie intime. L'esprit du secret médical est donc
qu'aucun malade ne puisse penser pouvoir être trahi par celui qui le
soigne. En d'autres termes, le médecin ne doit pas garder le secret
à cause uniquement des règles à la base du contrat qui le
lie à son patient, mais, aussi et surtout parce que l'obligation du
silence est attachée à l'état du praticien. Il est
nécessaire que l'on sache que la société a
intérêt que tout être humain malade puisse s'adresser
à un membre du corps médical sans risque d'être trahi. Ceci
est d'autant plus important car on assiste << dans les pays
en voie de développement oil la légèreté, la
persistance et la montée des indiscrétions et négligences
de certains médecins sont indescriptibles
>>77. C'est dans cette optique que, après
avoir découvert que son patient est atteint d'une tumeur maligne du foie
et que ce dernier est condamné à mourir, un médecin d'un
hôpital privé au Cameroun a en 1992, révélé
le secret à son entourage qui, à son tour l'a porté
à la connaissance du malade. La mort s'en est précipitamment
suivie78.
La règle du secret professionnel fait partie
des traditions médicales les plus anciennes et les plus universelles, le
secret étant commandé par l'intérêt de la profession
médicale toute entière considérée comme garante de
la collectivité des malades, c'est-à-dire de
l'intérêt de la santé publique affirmée par la Cour
de cassation elle-même79.
76 Cf. Arrêt
MERCIER.
77 TJOUEN, op.cit.,
p.72.
78 Ibid.
79 Cass. crim. 27 Juin 1967:
Bull. crim. No194.
2- Les effets produits par le secret
médical.
Le secret médical s'applique à tous les
professionnels de la santé à savoir les médecins, les
internes, les externes, les étudiants en médecine, les
psychologues, les infirmiers, les aides soignants. Il serait loisible de
souligner que le secret médical ne s'applique pas à celui qui
exerce illégalement la médecine80.
Une question s'est posée de savoir si on peut
partager le secret médical en cas de médecine collégiale.
En principe, le secret appartient au patient et en conséquence, les
médecins entre eux ne peuvent en disposer librement. Toutefois, il
existe des dérogations au secret médical dans le cas de la
médecine collégiale. Ainsi, << un
médecin consulté par le patient de l'un de ses confrères
ne peut informer celui-ci de ses conclusions qu'avec l'autorisation du malade
>>81. Mais tel n'est pas le cas pour le
médecin appelé d'urgence, le consultant, répondant
à la demande du médecin traitant, de la famille ou du malade :
dans ce cas, le médecin qui prend en charge le malade à
l'occasion d'une hospitalisation doit communiquer le résultat de son
intervention au médecin traitant, sans que le malade puisse s' y
opposer. Le malade doit simplement en être
avisé82.
Si l'étude du principe du secret médical
a permis de comprendre la responsabilité liée aux informations
mises à la disposition du médecin traitant, cette
compréhension serait imparfaite si nous ne faisons état du
traitement spécifique des patients à la suite d'un diagnostic
grave ou fatal.
B- Le traitement spécifique des patients
à la suite d'un diagnostic grave ou fatal.
Le médecin doit adapter ses paroles au patient
et donc, avoir une idée de sa culture psychologique parce que les
conséquences d'une révélation inopportune peuvent
être d'une extrême gravité. S'il faut analyser le
comportement du médecin face à son patient en cas de pronostic
grave ou fatal (2), il faudrait au préalable dire qui est patient
(1).
80 Loi No 90-36 du
10 Août 1990 relative à l'exercice de la profession de
médecin.
81 DURRIEU-DIEBOLT, <<
le secret médical >>, in
http://www.caducee.net/Droit-Sante/DroitSante/secretmedical.asp
82 Ibid.
1- L'identification du patient.
Les notions de patient et celle de client prêtent
souvent à confusion quand il faut déterminer à qui
s'appliquent les obligations du médecin.
Le patient, c'est le malade. S'il est une personne
non en tutelle et consciente, il est luimême le client du médecin.
Dans cette situation, il n'y a pas d'équivoque. Le médecin est
lié à l'égard de son patient qui doit seul être le
destinataire de ses révélations. Mais les deux qualités de
patient et client ne sont pas toujours confondues.
Si le malade est un incapable, le client du
médecin << n'est pas le patient
(l'incapable), mais son représentant
légal (la mère, le père) et non
les grands-parents qui l'auraient conduit à l'hôpital
>> 83.
2- Le médecin face au patient en cas de
diagnostic grave ou fatal.
L'article 27 du Code de déontologie
médicale dispose que : << Un pronostic grave peut
légitiment être dissimulé au malade. Un pronostic fatal ne
peut lui être révélé qu'avec la plus grande
circonspection... >>. Si ce principe est respecté
dans certains pays, son observation reste difficile dans les pays en voie de
développement (voir cas du patient atteint d'une tumeur au
foie)84.
Toutefois, avec la découverte du
VIH/SIDA85 tout se complique car sa révélation au
malade est officiellement autorisée alors qu'il s'agit d'une maladie
redoutable qui pendant longtemps était synonyme de mort. La question a
souvent été posée par la doctrine de savoir pourquoi le
diagnostic du SIDA doit être publié alors que malgré
l'existence des antis rétroviraux, il n'y a pas encore de traitement
efficace contre une infection au VIH ou contre le SIDA. Les problèmes
psychosociaux d'un patient séropositif86 sont de plusieurs
ordres : << ils vont de l'angoisse, l'inquiétude,
l'incrédulité, la frustration aux sentiments de
culpabilité, au découragement en passant par
l'agressivité, la dépression, état de choc et pouvant
aller
83 Michèle Laure
RASSAT citée par TJOUEN, op.cit., p. 71.
84TJOUEN, op.cit.,
p.72.
85 Virus Immuno
déficitaire Humain qui est l'agent du SIDA (Syndrome immuno
déficitaire acquis) ; il altère progressivement le système
immunitaire de l'homme, pénètre dans certains globules blancs,
les lymphocytes T4 et les détruits.
Le SIDA est la phase capitale et la dernière du
développement de la maladie : après un diagnostic du SIDA
à ce stade, la moyenne de durée de vie du malade est de deux
ans.
86 Le patient
séropositif est celui qui est contaminé par le VIH et qui produit
déjà des anticorps qui en révèlent la
présence, c'est-à-dire l'infection.
jusqu'au suicide »87. Comment
le médecin doit-il dès lors se comporter face à un patient
atteint du VIII quand on sait que l'information du patient sur son état
porte une grave atteinte à la vie intime de ce dernier ?
Le médecin doit-il informer le patient ou non
au vu de la gravité de la maladie pour ce dernier, et surtout compte
tenu du trouble social qui serait élevé si le médecin
gardait le silence ? La rupture du silence revêt une importance capitale
tant pour le patient lui-même que pour la
société.
Il est communément admis qu'un patient a le
droit d'être informé du diagnostic. Cela découle de son
droit à l'intégrité physique et de la bonne foi qui
régit les rapports entre le médecin et le patient, d'une part.
D'autre part, l'obligation générale de prudence et de
prévoyance qui repose sur le médecin le pousse à
communiquer le diagnostic au patient qui pourra limiter les risques que le SIDA
se développe plus rapidement en prenant certaines mesures
d'hygiène, en évitant d'attraper d'autres maladies comme la
syphilis ou la jaunisse qui pourraient favoriser l'aggravation du SIDA. Il est
important pour le patient de connaître son état afin de pouvoir
prendre des dispositions nécessaires pour organiser sa vie
(rédaction d'un testament, des mémoires, construction d'une
maison pour sa famille, paiement des dettes, repentir, etc...)
Quant aux intérêts des tiers, ils sont
aussi protégés en ce sens qu'un patient informé peut
prendre des mesures pour éviter de leur transmettre le VIII. Le patient
donneur de sang dans certains pays comme la Belgique, grâce à
l'information de la Croix Rouge du résultat du test, est invité
à ne plus donner le sang dans l'avenir88.
Il est clair que la préservation de ces
intérêts se réalise donc par la révélation
prudente au patient et non aux tiers parce que le médecin et ceux qui
par leur état ou par leur profession détiennent des secrets qui
leur ont été confiés, restent liés par le secret
professionnel dont la violation en communiquant un diagnostic du SIDA à
des tiers peut les exposer à plusieurs types de sanctions.
En somme, nous pouvons dire qu'en dépit de la
technicité et de la complexité des tâches qui lui sont
confiées, et, malgré le fait que le médecin est investi
d'un devoir d'humanité, le praticien n'est ni plus ni moins un citoyen
comme un autre. La Cour de Cassation en France juge que les dispositions
prévoyant les infractions sont générales et s'appliquent
à toutes les
87 Thierry VANSWEEVELT
cité par TJOUEN, op.cit., p. 71.
88 TJOUEN, op.cit., p.80 et
suiv.
professions, y compris celle des
médecins89. Le législateur camerounais va dans le
même sens lorsqu'il énonce que : « la loi
pénale s'impose à tous ».
Le médecin est tenu dans l'exercice de son art
d'une obligation de moyens. Toutefois, l'établissement de sa
responsabilité révèle un caractère incertain. En
effet, si sa responsabilité ne peut être engagée que s'il
est établi que le médecin a commis une faute, il faut que cette
faute ait causé un dommage, et qu'elle soit liée par l'existence
d'un lien de causalité. Néanmoins, en vertu du devoir
d'humanité qui est le sien, la loi lui autorise dans un but
thérapeutique de transgresser certaines règles qui en temps
normal sont réprimées.
C'est la raison pour laquelle elle renforce le cadre
de sa responsabilité non seulement en vertu de sa profession, mais
également au regard des informations qui lui sont transmises dans le
cadre professionnel. Le praticien dans l'exercice de son art est amené
à porter atteinte à l'intégrité physique de ses
patients. L'article 286 du code pénal justifie ces atteintes
lorsqu'elles sont effectuées dans le respect de la
réglementation. Le cas échéant, il s'agit d'actes
constitutifs d'infractions qui peuvent être de plusieurs
types.
89 Crim., 28 Mai 1891, Bull
No 210.
CHAPITRE II :
LA DIVERSITE DES INFRACTIONS RELEVANT
DE LA
RESPONSABILITE PENALE DU MEDECIN TRAITANT.
36
En l'absence d'un Code de la santé publique, il
n'existe pas dans le Code pénal camerounais un titre contenant des
infractions relevant exclusivement du domaine médical. Aussi, les
infractions sous le coup desquelles peut se retrouver le médecin dans
l'exercice de son activité sont des infractions de droit
commun.
Les médecins, à l'occasion de l'exercice
de leur profession peuvent être amenés à commettre des
infractions de nature très diverses ; la liste serait impressionnante,
et il ne saurait être question d'en faire une énumération
exhaustive, encore moins de procéder à l'étude
détaillée de chacune d'entre elles. Il s'agira de faire
état non seulement des infractions d'atteinte à
l'intégrité corporelle et à la vie du patient (qui
constituent le versant pénal des règles qui ont été
précédemment examinées.), mais également des
infractions d'atteinte à l'honneur, à l'éthique et
à la déontologie. Le Nouveau Dictionnaire Juridique
définit l'infraction comme l'« atteinte de la personne
qui transgresse les interdits du législateur, autrement dit, il s'agit
de toute action ou omission que la société interdit sous la
menace d'une sanction pénale ».
Il existe de ce point de vue, d'ailleurs, un paradoxe
apparent. En effet, le plus souvent, c'est volontairement que le médecin
porte atteinte à l'intégrité corporelle de son patient,
mais ce n'est qu'exceptionnellement que sa responsabilité sera
engagée de ce chef, en raison du but que poursuivait l'acte
médical. Beaucoup plus rarement, c'est involontairement, par imprudence
ou négligence, que le médecin cause un préjudice corporel
à son patient. La règle ici est qu'une sanction pénale
sera normalement encourue. En outre les exigences professionnelles astreignent
le médecin à adopter un comportement responsable, notamment en
accordant au patient toute la compassion nécessaire au vu des
informations que ce dernier lui communique et qui concourent directement ou
indirectement à la guérison du patient. Il est tenu de ce fait au
respect de la vie privée de son patient qui est l'un des principes de
base de l'exercice même de la médecine (cf. Serment d'HIPPOCRATE)
sous peine d'aller à l'encontre des prescriptions éthiques et
déontologiques de sa profession.
C'est ainsi que dans l'exercice de sa profession, le
médecin peut être tenu responsable pénalement pour les
infractions résultant des atteintes à l'intégrité
physique de ses patients (section I), mais également pour les
infractions pour les manquements à l'éthique et à la
déontologie médicale (section II).
SECTION I : LES ATTEINTES À L'INTEGRITE
PHYSIQUE DU
PATIENT.
A notre époque, on ne saurait exercer la
médecine efficacement sans porter, presque à chaque instant, une
atteinte volontaire à l'intégrité corporelle des patients
: atteintes visibles, de la plus anodine injection intradermique à
l'amputation mutilante, atteinte infiniment plus subtile réalisée
par l'emploi de drogues ou de radiations ionisantes utilisées parfois
dans le but, précisément de détruire certaines des
cellules composant le corps du patient soumis à ce
traitement.
Or, bien que tous les éléments des
incriminations définis par les articles 278 et suivants du Code
pénal se trouvent réunis, le médecin échappe
normalement à toute répression car, lorsqu'il poursuit un but
thérapeutique, son action est justifiée par l'autorisation
explicite de la loi90. Dès l'instant oi le législateur
investit les médecins de la fonction sanitaire qui est la leur, il leur
en confie l'exclusivité. L'atteinte volontaire portée à
l'intégrité corporelle de son patient par tout médecin
remplissant les conditions légales d'exercice est justifiée dans
la mesure oi cette atteinte est la rançon du but poursuivi dans
l'exercice de l'acte médical : la guérison, le soulagement du
patient.
Il serait loisible de préciser ce que
recouvrent juridiquement les notions de guérison ou de soulagement du
patient ; et à cet égard, il est clair que l'on entend justifier
l'acte médical non seulement par la poursuite d'un but
thérapeutique, mais aussi lorsque le praticien recherche ce que la
jurisprudence française qualifie d'une manière on ne peut plus
vague d'« intérêt médical
»91. Il est certain que la notion d'intérêt
médical est infiniment plus souple, mais de contours infiniment plus
imprécis que la notion d'intérêt thérapeutique. On
peut en effet y inclure non seulement tout acte à but curatif ou
même préventif, mais également toute intervention
pratiquée sur le corps humain pour réaliser un acte
considéré comme licite par la société à un
moment donné de son évolution et ceci en fonction
d'éléments sociaux variés oi le sentiment collectif, les
moeurs tiennent une place de premier plan. Bien plus, le contenu de
l'intérêt médical peut, le cas échéant,
être en partie déterminé par la volonté de
l'individu dans les limites fixées par la société, lorsque
celle-ci, en fonction de son évolution, juge légitime de lui
laisser, entière ou partielle, sa liberté d'appréciation.
Il est très typique à cet égard que la chirurgie
esthétique, qui paraissait à l'évidence constituer le
délit de blessures volontaires au
90 art.286 Code
pénal.
91 PENNEAU (J), op.cit.,
p.89.
début du siècle, ne donne pratiquement
plus lieu à aucune poursuite pénale aujourd'hui 92 .
Les stérilisations chirurgicales ne poursuivant qu'un but de convenance
personnelle ne sont plus jamais incriminées. De ce point de vue, on peut
d'ailleurs s'interroger sur ce qui reste du traditionnel principe
d'indisponibilité du corps humain.
Cependant, quelque soit le contenu à
l'évidence variable selon l'état de la santé à un
moment donné, l'intérêt médical, à chaque
fois qu'il est reconnu justifie l'atteinte portée par le médecin
à l'intégrité corporelle de son patient. Il est toutefois
beaucoup plus difficile d'admettre qu'est en jeu l'intérêt
médical lorsque le médecin porte atteinte à la vie de son
patient. S'il est vrai que les infractions d'omission sont celles qui font le
plus souvent l'objet de plaintes de la part du patient (paragraphe II), les
infractions de commissions sont toutes aussi nombreuses (paragraphe
I).
Paragraphe I : La multiplicité des infractions
de commission.
Les infractions susceptibles d'être commises par
le médecin dans l'exercice de son art sont multiples. En plus de
l'élément matériel qui se caractérise par le
préjudice (corporel ou psychologique) subi par la victime, il faut
associer l'élément intentionnel qui est la volonté
manifeste de nuire. Des infractions pouvant être commises par le
médecin sont de deux types principaux, à savoir : les atteintes
à la vie (A), et les coups, blessures et voies de fait (B).
A- Les atteintes à la vie.
Le meurtre93 est constitué par un
acte positif et volontaire. Le mobile est indifférent et n'efface jamais
la volonté homicide ; et le consentement de la victime est,
lui-même, indifférent. Au premier abord, on imagine mal un
médecin dans l'exercice de ses fonctions, commettre volontairement un
homicide, ce qui est la définition légale du meurtre. Et
pourtant, au moins, une situation peut faire hésiter, et elle est
actuellement l'objet d'un débat passionné : l'euthanasie (1). Il
en est de même de l'infanticide qui peut, si la réunion de
certaines conditions est effective, retenir la responsabilité
pénale du médecin traitant (2).
38
92Idem, p.90.
93 Art. 275, C.P.
1- L'euthanasie.
Le sens d'origine, et sans aucun doute le sens exact
du terme euthanasie est celui de mort calme et exempte de souffrance, survenant
grâce à l'emploi des substances calmantes et stupéfiantes.
Actuellement, ce terme est employé dans un sens dérivé, et
l'on entend généralement l'euthanasie comme «
la mort procurée au malade dans le but d'abréger ses
souffrances »94.
Le débat sur l'instauration de l'euthanasie
dans la législation de divers pays a connu des fortunes diverses. Nombre
de pays occidentaux l'ont adopté, tandis que d'autres s'y sont
refusés. En effet, l'intérêt thérapeutique est
diversement apprécié.
Pour les partisans de cette pratique, on devrait
abréger les souffrances du patient lorsque celles-ci deviennent
insoutenables afin de leur permettre de mourir dans la
dignité95.
Pour ceux qui sont contre la pratique de l'euthanasie,
les arguments avancés sont de plusieurs ordres (déontologique,
social, religieux). A la lumière de ces différents courants, le
respect de la vie constitue en toute circonstance le devoir premier du
médecin, et que, compte tenu de l'évolution de la science, des
thérapeutiques peuvent venir améliorer l'état du patient
qui, maintenu dans un état végétatif ou non peut
être sauvé.
Au Cameroun, le problème de l'euthanasie a
certes alimenté les débats, mais le législateur n'a pas
pris position. Il en résulte que toute atteinte portée contre la
vie reste réprimée par les articles 275 et 276 du Code
pénal lorsqu'elle est volontaire, et 289 lorsqu'elle est involontaire.
Il serait toutefois loisible de relever que les cas cliniques n'ont pas encore
eu à attirer l'attention du législateur en la matière. En
outre, en Afrique en général et au Cameroun en particulier, la
vie de l'homme est hautement symbolique et ne saurait
délibérément être supprimée. Dieu est le seul
pourvoyeur de la vie.
Le débat sur l'euthanasie reste entier et
diffère selon les législations. Au Cameroun, il n'est ni plus ni
moins qu'une atteinte à la vie du patient et est réprimé
selon la loi. Qu'en est-il de l'infanticide ?
94 PENNEAU (J), op.cit.,
p.91.
95 Idem.
2- L'infanticide.
L'infanticide est défini comme le meurtre ou
l'assassinat d'un enfant dans le mois de la naissance par sa mère ou
avec sa complicité conformément à l'article 340 du Code
pénal. On entend par enfant nouveau-né, «
l'enfant entre le moment de la naissance et la déclaration
à l'état civil ou pendant le temps imparti pour effectuer cette
déclaration »96 . Il est évident que
l'infanticide peut être une variété de l'euthanasie
appliquée au nouveau-né lorsque celui-ci présente des
malformations ou une pathologie incompatible avec une vie
considérée selon les canons sociaux usuels comme normale. Dans le
cadre de cette étude, il sera question de lever un pan de voile sur la
comparaison entre l'interdiction de l'infanticide et l'autorisation de
l'interruption dite thérapeutique de grossesse qui théoriquement
peut avoir lieu à tout stade de la grossesse. Il est clair que lorsque
la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la
mère, un intérêt médical justifie l'interruption de
la grossesse, et que cette interruption peut être qualifiée de
thérapeutique.
Toutefois, on peut être surpris de l'emploi de
ce qualificatif lorsqu'aux yeux du législateur, l'interruption de la
grossesse est justifiée par l'existence d'une forte probabilité
que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une
particulière gravité reconnue comme incurable au moment du
diagnostic. Certains parlent d'eugénisme. Le terme est sans doute fort,
mais on s'interroge vraiment sur ce qui, dans cette intervention justifie le
terme thérapeutique, alors qu'il s'agit purement et simplement de
supprimer un être anormal. Et un esprit simple s'interrogea sur la
différence pratique (car d'un point de vue juridique, cette
différence existe, bien entendu entre une interruption de grossesse pour
une telle cause, théoriquement possible à un moment oil l'enfant
est viable puisqu'elle peut avoir lieu à toute époque de la
grossesse et un infanticide). Et aussi sur les modalités pratiques (qui
la distingueraient de l'infanticide, en raison, précisément, de
la viabilité de l'enfant). Il y'a là une incohérence dans
la loi. Peut-on la faire disparaître ? D'oil la nécessité
impérative pour le législateur de trancher car, en laissant le
libre choix aux parents de qualifier l'interruption volontaire de grossesse de
thérapeutique, c'est leur donner le libre choix du droit de vie ou de
mort sur leur progéniture. Cette attitude est moralement, et socialement
condamnable.
L'examen des atteintes à la vie permet
d'appréhender un volet de la multiplicité des infractions de
commission susceptibles d'être commises par le médecin. Cette
étude serait incomplète si nous omettions les coups, violences et
voies de fait.
40
96 PENNEAU, op.cit., p.
92.
42
44
46
48
50
52
54
56
B- Les coups, violences et voies de fait.
Il est exceptionnel qu'un médecin inflige des
souffrances à un patient par pure animosité. Lorsqu'un tel fait
se produit, il tombe sous le coup de la loi97. Tel est le cas du
dentiste qui, pour reprendre une espèce jurisprudentielle
française, arrache violemment de la bouche de son patient des
prothèses que celui-ci refusait de payer. Dans le même ordre
d'idée, le médecin, s'il administre des substances nuisibles
à son patient, peut se voir appliquer l'article 228 du Code
pénal.
Le législateur français a
autorisé un certain nombre de pratiques qui échappent ainsi
à l'application de la loi pénale. Mais l'immunité n'existe
évidemment que si les conditions et limites fixées par la loi
sont respectées.
Il en est ainsi des prélèvements des
organes effectués sur une personne vivante en vue d'une greffe. Mais il
est clair que si les conditions fixées par la loi98, et
celles régissant le consentement ne sont pas réunies, les
dispositions légales deviennent applicables. De la même
manière, les recherches biomédicales, y compris celles ne
procurant aucun bénéfice direct à la personne qui s'y
prête, ont été rendues licites par la loi99. Le
législateur camerounais n'a pas encore règlementé cet
aspect du droit qui constitue un vide juridique.
Il est clair, en outre que, actuellement, certaines
interventions de convenance échappent à la responsabilité
pénale, parce qu'en l'état actuel des moeurs, elles sont
légitimées par la seule volonté du sujet.
Il en est ainsi, en premier lieu, des
stérilisations volontaires. On peut appréhender les
stérilisations volontaires comme le choix reconnu à un être
humain de décider délibérément de ne pas ou plus
procréer. Certes, certaines d'entre elles ont chez la femme un
intérêt médical lorsque les méthodes de
contraception médicales se révèlent inadaptées.
Mais un grand nombre de cas chez l'homme (ligature des canaux
déférents), a un but de pure convenance. Aucune poursuite n'a
jamais été intentée dans ce sens.
En France par exemple, en 1975, on a souscrit une
résolution du Conseil de l'Europe aux termes de laquelle : «
la stérilisation volontaire est un acte médical
faisant partie des méthodes permettant aux couples et aux individus
d'exercer leurs droits de décider de la procréation
».
97 Article 278 et suivants du
Code pénal.
98 Il s'agit de la loi
Française du 22 Décembre 1976 et du décret du 31 Mars 1978
qui règlemente les greffes d'organes.
99 Art. L. 209-19 à L.
229-21, Code de Santé Publique Français.
Cependant, dans les milieux médicaux, on s'accorde
à ne considérer comme légitime les stérilisations
chirurgicales que lorsqu'elles sont effectuées :
« -Pour des motifs très
sérieux (ce qui reste d'ailleurs une définition à contenu
très variable)
-Avec le consentement de l'intéressé et en
recherchant l'accord de son conjoint. -Après un délai de
réflexion d'au moins deux mois.
-Par une méthode laissant la possibilité d'une
intervention réparatrice »100.
En second lieu, la chirurgie esthétique, qui
est actuellement, de plus en plus effectuée en raison de la seule
convenance du sujet, ne donne lieu, en pratique, à aucune poursuite
pénale101.
Ces aspects qui illustrent l'état actuel de la
médecine dans le monde connaissent encore un manque de
réglementation dans le droit camerounais qui gagnerait à
s'arrimer aux évolutions récentes de la
médecine.
On pourrait se poser la question de savoir si tel est le
cas dans les infractions d'omission ?
Paragraphe II : L'existence des infractions
d'omission.
Les dispositions de l'article 289 du Code pénal
réprimant l'homicide et les blessures causées par maladresse,
imprudence, inattention, négligence ou inobservation des
règlements sont applicables au médecin pour les dommages
corporels qu'il cause dans l'exercice de ses fonctions. La Cour de cassation
juge à cet effet que les dispositions du Code pénal
prévoyant les infractions sont générales et s'appliquent
à toutes les fonctions, y compris celle des
médecins102. Les infractions d'omission relevant de la
responsabilité pénale du médecin peuvent être
cernées autour de la faute pénale (A) non intentionnelle et de
l'omission de porter secours (B).
A- La faute pénale.
Le Code pénal ne définit pas la faute
intentionnelle, mais vise quatre types de conduite
qui peuvent chacune caractériser une faute. Il
s'agit de la maladresse, l'imprudence, la
100 PENNEAU, op.cit., p.94-95.
101 Ibid.
102 Crim., 28 Mai 1891, Bull. No
210.
négligence ou l'inobservation des
règlements. Les fautes médicales pénalement
sanctionnées sont commises soit, lors de la réalisation de l'acte
médical (1), soit à l'occasion du suivi médical, ces deux
fautes pouvant se conjuguer (2). L'erreur de diagnostic résultante de
l'acte médical mériterait d'être examinée
(3)
1- La faute dans la réalisation de l'acte
médical.
L'article 289 du Code pénal dispose en son
alinéa 1er que : « est puni ... celui qui,
par maladresse, négligence, imprudence ou inobservation des
règlements, cause le mort ou des blessures, maladies ou
incapacités de travail telles que prévues par l'article 277 et
280 ». Aussi examinerons-nous successivement la maladresse
(a) et l'imprudence (b) dans la réalisation de l'acte
médical.
a- La maladresse.
Les procédures fondées sur la
maladresse du médecin sont rares en matière répressive. Il
semble que ce contentieux soit plutôt déféré aux
juridictions civiles, la faute commise ne justifiant peut être pas une
poursuite pénale aux yeux de la victime.
A ainsi été pénalement
sanctionnée, la maladresse du chirurgien, qui, au cours d'une
opération de la cataracte, provoque, par de grands gestes malencontreux,
le passage du noyau cristallinien sous l'iris, entraînant, par le biais
d'une infection la perte de l'oeil103.
b- L'imprudence.
Quant à ce qui concerne la faute d'imprudence,
la jurisprudence récente a retenu la faute du médecin
anesthésiste qui s'absente de la salle d'opération à un
moment critique de l'intervention chirurgicale, pour effectuer dans une salle
voisine une autre anesthésie. Le patient a présenté des
troubles cardiaques ayant entraîné son décès
après que l'infirmière lui eut administré une dose
anesthésique en raison de son réveil
précoce104.
La jurisprudence a également retenu comme
imprudence, un chirurgien qui, pour dresser
un bilan de stérilité secondaire, pratique
un examen endoscopique sur une patiente à risque,
103 Crim., 27 Novembre 1990, D.P. 1991, No
103.
104 Crim., 26 Novembre 1997.
entrée dans le coma pendant l'intervention.
L'examen déconseillé, a été effectué sans
nécessité et sans avoir épuisé les autres moyens de
recherche105.
A en outre été sanctionnée,
l'imprudence du médecin gynécologue qui retarde de manière
excessive la décision de pratiquer une césarienne malgré
les tentatives infructueuses d'accouchement par ventouse puis forceps et les
anomalies du rythme cardiaque du foetus. Il s'en est suivi pour l'enfant des
lésions cérébrales sévères
consécutives à une asphyxie
périnatale106.
2- La faute dans le suivi médical : La
négligence.
C'est le type de faute le plus répandu,
résultant dans la plupart des cas d'un défaut de
précautions nécessaires avant, pendant et après une
intervention. La négligence est souvent associée à
l'imprudence du médecin.
Ont ainsi été sanctionnés le
chirurgien et l'anesthésiste qui se sont abstenus d'ordonner le
transfert d'une patiente dans un CHU (Centre Hospitalier Universitaire) alors
que cette solution s'imposait en raison de l'insuffisance manifeste des
possibilités techniques de l'hôpital local et de la divergence de
leurs diagnostics. La victime, gravement blessée dans un accident de la
route, avait subi trois interventions de chirurgie. Elle est
décédée le lendemain de son admission à
l'hôpital107.
Commet une négligence fautive le
gynécologue accoucheur qui s'est rendu coupable de carence dans le suivi
post-opératoire de sa patiente. Celle-ci avait donné naissance
par césarienne à des jumeaux après une grossesse à
risque. Hospitalisée depuis plusieurs mois et soumise à un
traitement anti-coagulant, elle aurait dû faire l'objet d'une
surveillance vigilante. Elle est décédée le surlendemain
de l'accouchement des suites d'une hémorragie intra
abdominale108.
A également été condamné
pénalement pour négligence dans le suivi post-opératoire
d'un enfant de quatre ans, opéré des amygdales, le médecin
anesthésiste qui s'est abstenu de toute prescription sur le volume, la
nature et le débit de la perfusion intraveineuse
pratiquée
105 Crim., 3 Décembre 19997, CHABERT,
Resp. civ. et
ass. 1998, No 251.
106 Crim., 3 Décembre1997, MIGNON,
Resp. civ. et
ass. 1998, No 254.
107 Crim., 19 Février 1997, Bull. No 67
; Dalloz 1998, p. 236, note B. LEGROS; JCP 1997, 22889 note J.Y. CHEVALLIER;
crim. 17 Décembre 1997,
resp. civ. et
ass. 1998, No 252.
108 Crim., 26 Février 1997, SOLQUES, Dr
pénal 1997, 109.
en salle de réveil et destinée à la
suite d'un oeudème cérébral causé par une
intoxication à l'eau administrée, par la perfusion de
sérum glucosé, car en trop grande
quantité109.
3- Le cas de l'erreur de diagnostic.
La jurisprudence française estime que l'erreur
due à une compétence médicale médiocre ne constitue
pas une imprudence ou une négligence, le médecin étant
tenu d'une obligation de moyens et non de résultat110.
L'erreur de diagnostic ne peut donc en elle-même servir de base à
des poursuites pénales lorsqu'elle ne procède pas d'une
négligence dans les examens
préparatoires111.
Le médecin doit ainsi prendre toutes les
précautions nécessaires et s'être suffisamment
informé sur l'état du malade, compte tenu des possibilités
scientifiques actuelles avant d'établir son diagnostic qui ne doit pas
être posé avec légèreté. A défaut,
l'erreur de diagnostic est pénalement punissable112. A ainsi
été sanctionnée l'abstention fautive dans un diagnostic
psychiatrique erroné à l'égard d'un patient atteint en
réalité d'un syndrome de Guillain-Barre,
décédé d'un arrêt cardiaque. Les juges du fond
avaient qualifié le diagnostic d'«
aberrant >> au regard de la personnalité
du malade113. Il serait loisible de relever que, en cette
matière, la jurisprudence pénale française est similaire
à la jurisprudence civile114.
La faute pénale non intentionnelle ainsi
examinée, qu'en est-il de l'omission de porter secours ?
B- L'omission de porter secours : une infraction
conditionnée par la réunion de
plusieurs
éléments.
Le délit d'omission de porter secours est
contenue dans l'article 283 du Code pénal qui dispose que : «
est puni (...), celui qui s'abstient de porter à une
personne en péril de mort ou de blessures graves, l'assistance que, sans
risque pour lui, ni pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son
action personnelle, soit en provoquant un secours
>>.
109 Crim., 28 Mai 1997, BEYRATH, Pourvoi No
96-83.511, inédit au Bulletin.
110 Crim., 28 Octobre 1971, Bull. No
287.
111 Crim., 3 Novembre 1988, Bull. No 366; 29
Juin 1999, Bull. No 161, Dalloz 2000, sommaires commentés par
Y. MAYARD p.30.
112 Crim., 29 Juin 1991, Thire, pourvoi No
98-84.977, inédit au bulletin.
113 Crim., 25 Septembre 1996, Guillet, No
95-86.076, inédit au bulletin.
114 Civ. 8 Juillet 1997, 2 arrêts, JCP 1997, II,
22921, rapport de P. SARGOS.
Le texte de portée générale,
fondé sur le devoir moral d'humanité, est applicable à
tous et plus particulièrement aux médecins. Il est repris par
l'article 3 du Code de déontologie médicale suivant lequel :
« quelle que soit sa fonction ou sa spécialité,
hormis le seul cas de force majeure, le médecin doit porter secours
d'extrême urgence au malade en danger
immédiat, sauf s'il s'est assuré que d'autres
soins médicaux de nature à écarter le danger
luisont prodigués.
Il ne peut abandonner ses malades, même en cas de
danger public, sauf ordre écrit de l'autorité compétente
»115 .
Toutefois, celui qui exerce illégalement la
médecine ne peut se justifier par l'obligation de porter secours
imposée par le Code pénal116.
Le délit comprend, outre un élément
intentionnel, trois éléments matériels :
· Ne pas prêter assistance,
· A une personne en péril,
· En l'absence de danger pour le prévenu ou
pour les tiers.
Les principales questions que soulève
l'application du délit au médecin ont trait au caractère
volontaire de l'abstention, au mode d'assistance et à la justification
avancée par le sauveteur.
1- La nécessité d'un
élément intentionnel.
L'abstention de porter secours est punissable lorsqu'elle
est volontaire. Il n'y a dès lors délit que si son auteur a eu
conscience du péril.
Suivant une formule ancienne de la Cour de Cassation,
les dispositions de l'article 223-6 du Code pénal français
exigent pour être applicables que le médecin ait eu
personnellement conscience du caractère de la gravité imminente
du péril auquel se trouvait exposée la personne dont
l'état requérait secours et qu'il n'ait pu mettre en doute la
nécessité d'intervenir immédiatement en vue de conjurer ce
danger.
De ce fait, le juge doit dans chaque espèce,
s'attacher à démontrer, en se fondant sur des circonstances de
fait relevant de son appréciation souveraine, que le médecin a eu
conscience du péril imminent menaçant le
malade117.
115 Art. 3, alinéa 2, Code de déontologie
médicale du Cameroun.
116 Crim., 2 Juillet 1975, Bull. No
173.
117 Crim., 3 Juin 1999, ROUSSEL et SELMA, Pourvoi
No 88-83.101, inédit au bulletin.
Lorsque le médecin est auprès du patient
et qu'il n'accomplit pas les soins nécessaires par suite d'une erreur
d'appréciation, il ne peut pas, faute d'élément
intentionnel, être déclaré coupable de non assistance
à personne en danger118. Ainsi l'erreur de diagnostic sur
l'utilité d'une réanimation, qui se caractérise par une
abstention volontaire, doit entraîner une
relaxe119.
Le droit de la santé et le régime de la
responsabilité pénale du médecin dans l'Hexagone est
rigoureusement réglementé (dans ces pays
développés, les habitants bénéficient de la
sécurité sociale qui leur garantit un meilleur accès aux
soins). L'omission de porter secours y a été étendue pour
les interventions d'urgence.
Ainsi, lorsque le médecin appelé par
téléphone n'est pas en présence du patient, il n'est pas
tenu, surtout s'il n'est pas de garde, de se déplacer
systématiquement sur-le-champ. Il doit recueillir un certain nombre
d'informations pour se faire une opinion de l'état du péril et
fournir une réponse adaptée à chaque cas. Le
médecin qui effectue un tri entre les appels peut commettre des erreurs
d'appréciation sur les symptômes qui lui sont
décrits120. C'est au médecin à qui l'appel est
adressé qu'il appartient, sous le contrôle de sa conscience et des
règles de sa profession, l'utilité et l'urgence de son
intervention121. Mais l'abstention délictueuse est
réalisée dès lors que le médecin dont le concours
est demandé, averti d'un péril dont il est le seul à
même d'apprécier la gravité, a refusé son concours
sans s'être préalablement assuré, comme il pouvait le
faire, que ce péril ne requérait pas son intervention
immédiate122. Autrement dit, si c'est par sa faute que le
médecin appelé par téléphone n'a pas conscience du
péril, il est coupable d'omission de porter secours. Et le délit
est constitué dès lors que le médecin dont le concours est
demandé ne pouvait se méprendre sur la gravité du
péril auquel se trouvait exposé le malade et qu'il s'est
volontairement abstenu de lui porter secours123.
A l'inverse, justifie sa décision de relaxe la
Cour d'Appel qui constate que le médecin, appelé au chevet d'un
enfant de quatre mois a pris la peine de se renseigner, par
téléphone sur l'état de santé de celui-ci qui
n'était pas alarmant, selon les indications fournies par les parents et
que les symptômes décrits n'étaient pas d'une
gravité suffisantes pour justifier
118 Crim., 26 Novembre 1989, Bull. No
317.
119 Crim., 3 Février 1993, Bull. No
58.
120 FERRARI (I), « Le médecin devant le juge
pénal », in http:/
www.courdecassation.fr/publications
cour
26/rapport annuel 36/rapport 1999 91/etudes documents
93/isabelle ferrari 5792.html
121 Crim., 31 Mai 1949, JCP 1949, II, 4945.
122 Crim., 21 Janvier 1954, Patin Rapp., JCP 1954, II,
8050.
123 Crim., 17 Février 1972, Bull. No
68; 26 Mars 1997, Bull. No 123
l'intervention du médecin dans un délai
plus rapide que celui dans lequel il envisageait de se
déplacer124.
Enfin, s'agissant d'un délit intentionnel, la
Cour de Cassation a jugé que le médecin de la Fonction Publique
hospitalière, définitivement condamné du chef d'omission
de porter secours dans l'exercice de ses fonctions, s'était rendu
coupable non d'une faute de service, mais d'un manquement inexcusable à
ses obligations d'ordre professionnel et déontologique. Elle en a
déduit que les juridictions répressives étaient
compétentes pour statuer sur la responsabilité civile de ce
médecin à la demande de la victime, constituée partie
civile125.
2- L'exigence d'un mode d'assistance.
Le Code pénal oblige celui qui a connaissance
de l'état de péril à porter assistance, soit par son
action personnelle, soit en provocant des secours. Le Code de
déontologie médicale impose au médecin, qui ne porte pas
lui-même assistance, de s'assurer que le malade ou le blessé
reçoit les soins nécessaires.
La jurisprudence ancienne décide que la loi n'a
pas entendu laisser à celui qui doit porter secours une option
arbitraire entre les deux modes d'assistance prévus par le Code. Elle
lui fait au contraire un devoir d'intervenir par celui-là de ces deux
modes que la nécessité commande et même, s'il le faut, par
leur emploi cumulatif 126.
Le médecin qui subordonne son intention
à l'appel préalable du médecin traitant, bien que
n'ignorant pas que son confrère ne pourra intervenir
immédiatement ainsi que l'exige l'état du patient, tombe sous le
coup de la loi127.
Toutefois, le médecin informé que le
malade est en péril, ne commet pas de délit si, dans
l'impossibilité de se déplacer, il s'assure que la personne
à secourir reçoit d'un tiers les soins nécessaires. C'est
dans ce sens que la Cour de Cassation a décidé que doit
être relaxé, le médecin du SAMU (Service d'Aide
Médical d'Urgence) qui ne pouvant quitter son poste, en l'absence de
l'autre médecin du service déjà en intervention, a mis en
oeuvre le moyen le plus approprié à la situation en demandant au
médecin traitant du malade de se rendre auprès de celui-ci pour
décider de son hospitalisation128.
124 Crim., 26 Mars 1997, Langlois, Dr pénal 1997,
125, Note M. VERON ; Dalloz 1999, sommaires commentés par J.
PENNEAU.
125 Crim., 2 Avril 1992, Bull. No
140.
126 Crim., 26 Juillet 1954, Bull. No 276; 9
Octobre 1956, Bull. No 616.
127 Crim., 20 Février 1958, Bull. No
186.
128 Crim., 26 Mars 1997, Langlois, supra.
3- L'absence de risque lors de
l'assistance.
L'incrimination du Code pénal écarte
l'obligation d'assistance en présence d'un risque pour le sauveteur.
L'absence de risque est, en conséquence, une condition du délit.
Les juges du fond apprécient concrètement, dans chaque cas
d'espèce, la gravité du péril auquel est exposée la
victime par rapport au risque encouru par le sauveteur du fait de son
intervention.
Un risque qui n'est pas sérieux ne peut pas
dégager le médecin de son obligation de porter secours.
L'appréciation de ce risque relève du pouvoir des juges du fond.
Ils peuvent ainsi décider que les conditions climatiques rendant le
déplacement difficile ne sont pas de nature à justifier le refus
du médecin de se rendre au chevet du malade en danger
imminent129.
A l'issue de nos développements, il ressort que
le professionnel qu'est le médecin, est un citoyen comme un autre et
qu'il reste soumis à l'obéissance de la loi et des
règlements dans l'exercice de son art. Toute violation de ces
dispositions expose le praticien à des mesures
répressives130.
Voilà très brièvement
présenté le volet de la responsabilité pénale du
médecin relatif aux atteintes à l'intégrité
physique. Toutefois, le champ de la responsabilité pénale ne se
limite pas seulement aux atteintes de l'intégrité corporelle du
patient. Le Code de déontologie réprime les comportements qui
ternissent l'image de la médecine. Ces agissements, lorsqu'ils vont
à l'encontre des intérêts du patient et perturbent l'ordre
social, sont également réprimés par le Code pénal.
Il s'agit notamment des atteintes à l'intégrité morale du
patient, à l'éthique et à la
déontologie.
SECTION II : LES ATTEINTES À L'INTEGRITE
MORALE DU PATIENT, À L'ETHIQUE ET À LA DEONTOLOGIE.
L'inobservation des prescriptions éthiques et
déontologiques donne lieu à des sanctions disciplinaires.
Toutefois, lorsque cette inobservation porte atteinte à l'ordre social
en préjudiciant au malade, le Code pénal incrimine ces
agissements. Les manquements issus de l'exercice de la profession de
médecin peuvent porter atteinte à l'intégrité
morale du patient, c'est-à-dire à sa vie privée ou
à sa pudeur. Ces dérapages peuvent également aller
à l'encontre des règles éthiques et déontologiques
qui, bien que condamnés par le Code de déontologie
129 Crim., 3 Février 1998, Dr pénal 1998,
96, note M. VERON ; Dalloz 1999, sommaires commentés par J. PENNEAU,
p.384.
130 Crim., 28 Mai 1891, Bull. No
210.
médicale, le sont également par le Code
pénal. Ces aménagements élargissent le champ de la
responsabilité pénale du médecin traitant. Il s'agira
dès lors d'examiner les atteintes à l'intégrité
morale du patient (paragraphe I) avant d'envisager la responsabilité
découlant des atteintes à l'éthique et à la
déontologie médicales (paragraphe II).
Paragraphe I : Les atteintes à
l'intégrité morale du patient.
La Déclaration Universelle des Droits de
l'Homme de 1948 consacre le droit au respect de la vie privée. Ce droit
est repris par le préambule de la loi constitutionnelle du 18 janvier
1996 révisant la Constitution du 02 juin 1972, modifiée et
complétée dans certaines de ses dispositions par la loi
No 2008/001 du 14 avril 2008. Le médecin, dans l'exercice de
son art, entre en possession des informations intimes concernant la vie du
patient. En vertu de la relation de confiance issue du contrat passé
entre le médecin et son patient, ce dernier est amené à se
confier auprès du médecin dans le souci premier que ces
informations ne seront pas divulguées, mais, surtout, qu'elles seront
indispensables pour lui procurer la guérison. La divulgation des
informations par le médecin ou toute pratique dégradante à
l'encontre du malade peut voir sa responsabilité
engagée.
C'est le cas lorsque le praticien viole le secret
médical (A) ou lorsqu'il commet des actes qui ne vont pas dans
l'intérêt médical et qui sont plutôt guidés
par la perversité du praticien. Il en est ainsi pour les atteintes
à la pudeur, les abus sexuels en l'occurrence (B).
A- La violation du secret médical.
« Je jure par Apollon,
médecin par Esculape, par Hygie et Panacée, par tous les dieux et
par toutes les déesses, et je les prends à témoin que
(...)Tout ce que je verrai ou entendrai autour de moi, dans l'exercice de mon
art ou hors de mon ministère, et qui ne devra pas être
divulgué, je le tairai et le considérerai comme un
secret»131. Et c'est en ces termes que le corps
médical a emprunté le fondement de sa doctrine. Ce serment est
une obligation morale à laquelle s'engage le médecin.
Le secret médical, variété du secret
professionnel en général, constitue tout autant un droit qu'une
obligation.
131 Cf. Serment d'HIPPOCRATE.
Entendu comme droit, << il s'agit
d'une prérogative essentielle de la personne humaine qui
nécessite à cet effet une protection juridique se fondant sur la
nécessaire sauvegarde de l'intimité de la vie
privée >>132.
Pris comme une obligation, il s'agit pour le
médecin d'une déontologie, d'une éthique médicale
dont la finalité est de préserver l'intégrité
physique et psychologique du malade autant que de conforter le pacte de
confiance établi entre le praticien de la santé et son patient.
La considération de cette double exigence d'une part, la
référence au texte de base en la matière, notamment
l'article 310 du Code pénal a donné lieu à de vives
controverses en doctrine aujourd'hui encore plus irréductibles sur la
nature juridique et le caractère du devoir au silence imposé au
praticien de la santé. Certains auteurs en France133 à
partir des premières années du XIXe siècle
estimaient que ce texte de base avait pour but de sanctionner la violation,
analogue à l'abus de confiance d'un contrat formé entre le
médecin et son client. La principale conséquence était que
le délit disparaissait toutes les fois que la révélation
avait eu lieu avec le consentement de l'auteur de la confidence ; ce qui
revenait en outre à conférer une portée relative à
cette règle. Une telle manière de voir semble confortée
aujourd'hui dans la pratique, eu égard aux nécessités de
la vie moderne avec en particulier le développement des assurances sur
la vie. La lettre même de l'article 310 du code pénal semble en
faire écho car << est puni (...) celui qui, sans
l'autorisation du propriétaire de la confidence...
>>.
Pour d'autres auteurs au contraire, l'intervention de
la loi pénale répond principalement à
l'intérêt social ; le devoir de silence consacré par les
textes a été imposé en faveur de tous les particuliers qui
pourraient un jour avoir affaire, volontairement ou non, aux membres d'une
profession appelée à connaître des secrets d'autrui. La
confiance qu'ils manifesteraient donc en leur confiant des secrets sans
arrière pensée mériterait ainsi une protection juridique
susceptible d'accroître la crédibilité de certaines
professions dont le fonctionnement est nécessaire au bien commun de la
société. Comme corollaire à une telle assertion, l'on
attribuera une portée générale et absolue à cette
règle; un caractère d'ordre public.
De cette controverse doctrinale, il ressort que le
secret confié au médecin est le symbole de la confiance qui
existe entre le patient et le praticien. Sa violation perturbe le
concerné et est susceptible de troubler l'ordre social. En vertu des
intérêts qu'il pourrait mettre en jeu, la violation du secret
médical est réprimée par l'article 310 du Code
pénal.
132 NONGA (J.-M.), << Le secret médical
>>, mémoire de maîtrise de Droit privé, année
académique 1990-1991 Université de Yaoundé, Faculté
de Droit et Science Economique. P.1-5.
133 Ibid, p.15.
L'examen de la violation du secret médical
permet de mieux appréhender les atteintes à
l'intégrité morale du patient. Toutefois, cette
compréhension serait incomplète si nous ne faisons état
des abus sexuels.
B- Les abus sexuels causés par le
médecin.
Le médecin, dans l'exercice de son art, doit
prodiguer des soins consciencieux à son patient. Il ne saurait avoir
d'autres motivations que la recherche de la guérison du malade. Aussi,
le médecin qui profite abusivement de son statut pour offenser
sexuellement son patient sous le couvert de l'acte médical (l'outrage
à la pudeur, le viol dans une certaine mesure car étant
également une atteinte à l'intégrité physique...)
s'expose à la répression prévue aux articles 295, 296 et
346 du Code pénal.
Seulement, l'article 295 du Code pénal qui fait
état de l'outrage à la pudeur subordonne cette infraction
à la présence d'une autre personne ou à la présence
d'un mineur conformément à l'article 346 du code pénal. Le
juge français, dans le cadre des offenses sexuelles, réprime les
attouchements de l'ostéopathe sur sa patiente134. Le Code de
déontologie médicale français, tout comme les Codes de
déontologie médicale belge et canadien proscrivent les relations
sexuelles entre le praticien et son patient dans le cadre de leurs liens
contractuels, le médecin pouvant profiter de l'état de faiblesse
du patient pour « abuser » de ce
dernier.
L'outrage à la pudeur qui est la plus
répandue des déviances du médecin mériterait
d'être arrimée aux évolutions des relations entre le
médecin et son patient dans le cadre juridique camerounais car,
l'absence d'incrimination appropriée en la matière crée un
vide juridique qui « confond » le patient
quant à la procédure à adopter pour que la justice soit
rendue.
La médecine est un art, nous dirons même
que c'est l'art de sauver des vies. L'élaboration des dispositions
éthiques et déontologiques est le souci d'éloigner tout
amateurisme et charlatanisme. Les médecins ont un devoir
d'humanité. Ceux des praticiens, qui s'adonnent à des errements
dans la pratique de leur métier troublent l'ordre social que le
législateur et le juge ont le devoir de protéger. Comme nous
l'avons dit plus haut, l'inobservation des obligations éthiques et
déontologiques résulte du domaine disciplinaire, donc interne au
fonctionnement de l'Ordre des médecins.
134 Affaire RABOUTET Joël, tribunal correctionnel de
Dax du 8 Août 2005.
Ces dispositions disciplinaires ne sauraient toutefois
pas écarter la répression pénale dont elles ne sont
nullement liées135. C'est la raison pour laquelle, bien que
les atteintes à l'honneur du patient soient réprimées,
d'autres agissements du professionnel sont susceptibles d'engager sa
responsabilité pénale, même lorsqu'ils portent atteinte
à l'éthique et à la déontologie
médicale.
Paragraphe II : La responsabilité
pénale du médecin relative à l'inobservation
des
principes éthiques et déontologiques.
L'éthique et la déontologie existent
dans tous les corps de métier et peuvent être
considérées comme un ensemble de valeurs morales.
L'éthique peut, lato sensu se définir comme la façon de se
diriger, de se comporter. L'éthique médicale en ce qui la
concerne, est l'ensemble des relations qualitatives des personnels de
santé vis-à-vis de leurs patients. Quant à la
déontologie, on peut l'appréhender comme une relation de bonne
conduite constituant la morale d'une profession.
Dans le cadre médical camerounais, un Code de
déontologie a été mis sur pied pour circonscrire le champ
des obligations auxquelles sont soumis les médecins. En vertu de ces
obligations, le médecin s'engage en toute circonstance à faire
prévaloir les droits du malade, ces droits sans lesquels toute tentative
de guérison serait vouée à l'échec. Le praticien ne
saurait exercer son métier dans un but de lucre. Autrement dit,
l'appât du gain facile ne doit en aucun moment motiver l'acte du
professionnel. C'est dans cette optique que l'éthique est exigée
dans la pratique de la médecine (A), ce qui justifie
l'établissement des règles déontologiques, ceci dans le
but du renforcement des droits des patients et de l'identification des
obligations du médecin (B).
A- Les exigences éthiques dans la pratique de la
médecine.
Il est interdit au médecin d'accorder toute
facilité à quiconque se livre à l'exercice illégal
de la médecine. Cette disposition de l'article 14 du Code de
déontologie médicale du Cameroun rappelle le principe selon
lequel la médecine est une profession qui obéit au respect des
règles édictées par la loi, et l'inobservation de ces
règles expose celui qui y contrevient à
135 La sanction disciplinaire vise la punition
résultant de l'inobservation de dispositions éthiques et
déontologiques, tandis que la sanction pénale recherche la
préservation, la réparation de l'acte du médecin ayant
préjudicié à son patient et faisant donc de celui-ci un
danger pour la société.
des poursuites judiciaires. La médecine, comme
nous l'avons vu plus haut, est constituée d'une multitude de
spécialités. Il existe des médecins
généralistes et des médecins spécialistes. C'est la
raison pour laquelle, parce que chaque praticien a une sphère de
compétence qui est la sienne, il ne saurait intervenir sur des questions
techniques qui ne ressortissent pas de son champ de
compétence.
Ainsi en est-il du jugement No 223/CRIM
rendu par le Tribunal de Grande Instance (TGI) du Wouri, affaire NDEUMENI
NOUBEVAN Charles Dechateau du 23 Décembre 2004. Dans cette
espèce, le sieur NDEUMENI, chirurgien dentiste de son état, s'est
engagé à opérer l'un de ses patients qui souffrait
d'hémorroïdes. L'issue de l'opération s'est
révélée tragique dans la mesure où, n'étant
pas habilité à effectuer une telle intervention, il a gravement
mutilé les organes de base du patient qui a dû par la suite faire
recours à des sondes pour pouvoir excréter.
Dans cette espèce, les parties demanderesses
à savoir : l'Ordre National des Médecins du Cameroun (O.N.M.C.)
et, le sieur NKOUAMO Charles séraphin, se sont constituées partie
civile. L'un des griefs reprochés par l'O.N.M.C. au sieur NDEUMENI est
<< l'atteinte de l'image de la profession du médecin
». Ce dernier contrevenait à l'article 18 du Code de
déontologie médicale qui dispose que : << Sont
interdites toutes supercheries propres à déconsidérer la
profession, en particulier toutes les pratiques de charlatanisme
».
En outre, le médecin dans l'exercice de son
art, peut délivrer des certificats, attestations ou documents dans les
formes règlementaires. La délivrance d'un rapport tendancieux et
d'un certificat de complaisance constitue une faute grave136. Cette
pratique, qui est condamnable sur le plan éthique, l'est
également sur le plan pénal car, le Code pénal dans son
article 259, intitulé << Faux certificat
médical », il est énoncé en
l'alinéa 1 que : << est puni (...) le médecin,
(...), qui pour favoriser ou nuire à quelqu'un, certifie faussement ou
dissimule l'existence d'une maladie ou infirmité ou certifie faussement
l'existence ou le résultat d'une vaccination ou fournit des indications
mensongères sur l'origine d'une maladie, la durée d'une
incapacité ou la cause d'un décès
».
Au Cameroun, dans les centres hospitaliers,
très souvent, les certificats sont établis avec
légèreté, au mépris des dispositions
légales. Plusieurs plaintes sont déposées à l'aide
des certificats médicaux complaisants qui lorsqu'ils sont
découverts entraînent généralement la
rétractation des parties poursuivantes. Dans le cadre, des certificats
médicaux permettent également d'attribuer des <<
jours d'incapacité » injustifiés
cela avec la complicité de certains
136 Cf. article 21 Code de déontologie
médical.
personnels hospitaliers. Il apparaît donc que
dans bien des cas, la délivrance de certificat médical, qui
devrait servir à la découverte de la vérité, est
plutôt utilisée dans un but de fabrication de preuve. D'où
la question sur le fondement même de l'établissement des
règles éthiques. Il ressort que, si le Code de déontologie
est un code de conduite, le but qu'il recherche est la garantie des droits du
patient qui passe par une bonne administration des soins.
B- Le fondement de l'établissement des
règles éthiques et déontologiques : le renforcement des
droits du patient.
Le Code de déontologie est un code de conduite
qui accompagne le médecin dans l'exercice de son art. Dans son contenu,
nous prenons connaissance des comportements que doivent adopter les
médecins avec pour souci premier << le respect de la
vie », et les précautions dont ils sont tenus de
s'entourer pour une meilleure prise en charge du patient. Les règles
éthiques et déontologiques gagneraient à être
connues du médecin et du patient, car y sont contenues pour le patient,
dans le cadre de ses relations avec le médecin, des garanties telles :
le libre choix du médecin par le malade, la liberté de
prescription par le médecin et le règlement des honoraires par le
malade137.
Dans la pratique de la médecine, le patient,
qui est un profane, devrait être tenu informé des droits qui sont
les siens, tout comme des obligations auxquelles il est tenu. Malheureusement
au Cameroun, le manque criard du personnel médical ne contribue pas
à améliorer cet état des choses138.
En effet, les indicateurs de performances actuellement
disponibles montrent que notre système de santé est <<
malade » et devrait être remis en
état pour mieux répondre aux besoins de santé publique du
pays. On constate par exemple que 15°/° seulement des camerounais ont
accès aux soins.
S'agissant de l'offre de soins, elle représente
de très grandes insuffisances dans toutes ses composantes, à
savoir : les ressources humaines, les infrastructures et les
équipements. Le déficit de personnel de santé est une
réalité tant sur le plan qualitatif que quantitatif ; on compte
un médecin pour 10 000 habitants et un infirmier pour environ 2200
habitants139.
137 Art. 5, Code de déontologie médicale du
Cameroun.
138 STRATEGIE SECTORIELLE DE SANTE 2001-2010
du Ministère de la Santé Publique de la République du
Cameroun, op.cit., p.3 et suiv.
139 Ibid p.3
Le patrimoine d'infrastructures et
d'équipements a connu d'importantes dégradations pendant que les
nouveaux investissements ont été limités du fait de la
récession économique ; la gestion et le développement de
toutes ces ressources s'effectue sans aucune référence
normative.
Ces lacunes devraient-elles justifier le «
mystère » que constitue pour le profane
le corps médical au Cameroun ? En effet, l'absence criarde de personnel
et d'infrastructures n'est pas propice à l'exercice de la
médecine dans de bonnes conditions, tant pour le professionnel, que pour
le patient. Il n'en demeure pas moins que, le patient est lié à
son médecin en vertu d'un lien contractuel et, en se
référant aux règles du droit des obligations, les parties
à un contrat sont tenues d'être informées de leurs droits
et de leurs obligations réciproques. Par conséquent, tout patient
devrait être informé de ses droits lorsqu'il se rend dans un
établissement hospitalier, ainsi que de ses obligations et ceux du
médecin. Cette tâche devrait revenir concurremment aux pouvoirs
publics et aux établissements hospitaliers.
En définitive, nous pouvons dire que, au vu de
la complexité des aspects dont elle fait l'objet, le médecin dans
l'exercice de son art peut être sous le coup de plusieurs infractions.
Ces infractions, qui peuvent avoir un caractère volontaire (le meurtre)
ou involontaire, sont susceptibles de porter atteinte à
l'intégrité physique, et même à l'honneur du
patient, tout comme aux principes éthiques et déontologiques.
Certes, les atteintes à l'intégrité physique ne sont pas
seulement applicables aux médecins, d'où leur aspect
général développé dans le Code pénal. Seuls
sont spécifiques au corps médical les errements allant contre
l'éthique et la déontologie. Le constat est clair : Le
médecin est un citoyen comme les autres, bien que, lorsqu'il recherche
la santé du patient, ses actes soient couverts par l'article 286 du code
pénal. Cette disposition ne le met pas à l'abri des poursuites
judiciaires lorsque son action est motivée par l'intention de nuire, ou
lorsque son abstention a entraîné des conséquences
dommageables pour le patient. Le médecin est tenu d'une obligation de
moyens et non de résultat. En vertu de cette obligation, il doit
justifier qu'il a mis tout son savoir-faire en prodiguant des soins attentifs
et consciencieux, et conformes aux données acquises de la science pour
apporter la santé à son patient sans toutefois la
garantir.
Tout acte médical n'ayant pas satisfait à
ces exigences peut entraîner la mise en oeuvre de la
responsabilité du praticien.
58
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE.
De l'analyse menée sur le domaine de la
responsabilité pénale du médecin traitant, un constat se
dégage : la médecine est une discipline scientifique pleine de
subtilités et de complexités. En effet, il n'est pas toujours
aisé pour le profane de saisir aisément les contours de la
responsabilité pénale du médecin traitant tant ils sont
incertains. L'établissement de la responsabilité pénale du
médecin ne va pas de soi. Si c'est volontairement que le médecin
porte atteinte à l'intégrité physique de son patient,
c'est exceptionnellement que sa responsabilité peut être retenue.
Car, pour en arriver là, le médecin doit avoir commis une faute,
et cette faute doit avoir causé un préjudice au patient. Ce
préjudice est établi par l'existence d'un lien de
causalité.
La notion de faute est retenue parce que c'est en
vertu d'un contrat que le médecin et son patient sont liés.
Toutefois, il est des circonstances où, bien qu'étant fautif, le
médecin s'exonère en justifiant que son action était
motivée par le souci de la sauvegarde de la vie du patient, ou lorsque
ce dernier est atteint d'une maladie de l'esprit. Cette justification
l'exonère de sa responsabilité. En outre, la
responsabilité du médecin peut-être établie sur le
fondement des informations détenues par ce dernier.
La médecine est un corps qui, comme celui des
avocats ou des ministres du culte, est soumis au secret professionnel. Le
secret médical a été instauré pour protéger
la vie privée du patient. Il symbolise la confiance qui existe entre le
patient et son médecin. Toute violation expose le médecin
à des poursuites pénales, sauf si cette transgression est
survenue à l'initiative du patient.
Une fois le champ de la responsabilité du
médecin cerné, il ressort qu'il existe une diversité
d'infractions ressortissant de l'exercice de la médecine. Nous avons
reparti ces infractions en deux ordres. Tout d'abord, celles portant atteinte
à l'intégrité corporelle, et celles résultant de
l'inobservation des valeurs éthiques et déontologiques. Il
ressort donc que, contrairement à la France où le contentieux
contre le corps médical est << effectif
» car fortement réglementé et s'arrimant aux
évolutions de la science et de la technique, au Cameroun, il a encore du
mal à prendre son envol. Cela à cause de l'ignorance
caractérisée dont font preuve les profanes en la matière,
ignorance due en grande partie à l'inaccessibilité et à la
<< mystification » faite autour du corps
médical. Les vides juridiques dont fait l'objet la sphère
médicale au Cameroun témoigne des progrès qui
mériteraient d'être effectués dans cette
branche.
De ce fait, bien que les contours de la
responsabilité du médecin soient cernés et même des
agissements qualifiés (du point de vue pénal), la mise en oeuvre
de la responsabilité du médecin traitant est-elle chose
aisée au Cameroun ?
DEUXIEME PARTIE :
LA MISE EN CEUVRE DE LA RESPONSABILITE PENALE
DU
MEDECIN TRAITANT.
60
Le Cameroun, à l'image de tous les pays, fait
face à des réalités qui lui sont propres et qui
influencent tous les secteurs de la vie. La justice140, institution
qui, pour son fonctionnement a besoin que certaines conditions soient
réunies afin d'assurer des services efficaces n'échappe pas
à ces réalités. En effet, tous les principes
énoncés, consacrés et garantis par la Constitution pour le
bon fonctionnement de l'appareil judiciaire (il s'agit des principes
d'égalité, de gratuité et de continuité du service
public de la justice141), sont fortement entravés par des
réalités de natures diverses. En outre, lorsque la
procédure est engagée devant les juridictions, les étapes
qui conduisent à la manifestation de la vérité, font appel
à des aspects hautement techniques si bien que la connaissance de ces
différents rouages est cruciale pour la manifestation de la
vérité.
La justice a un prix. Ce prix n'est pas toujours
à la portée de tous les Camerounais. Cette raison,
conjuguée à bien d'autres facteurs (notamment d'ordre culturel,
socio-économique, juridique et procédural) font que la mise en
oeuvre de la responsabilité pénale du médecin traitant
soit confrontée à des difficultés (chapitre 1). Le juge
est tenu de rendre la justice selon la loi et selon son intime conviction. La
tâche qui lui incombe n'est pas toujours aisée dans la mesure
où des aspects techniques qui interviennent au courant du procès
nécessitent l'intervention des experts142 dont les rapports
influenceront sans doute le prononcé du jugement. La pluralité
des aspects techniques dans un procès mettant en cause le médecin
contribue à rendre la procédure complexe (chapitre
2).
140 SOCKENG (R),
LES INSTITUTIONS JUDICIAIRES AU CAMEROUN,
2e éd., 1998, p.2 et suiv.
141 Idem, p.16 et
suiv.
142 YOHO Fils (Raphaël),
« L'expertise judiciaire en matière répressive au Cameroun
», université de Yaoundé, 1986.
CHAPITRE I :
LES DIFFICULTES RELATIVES A LA MISE EN
OEUVRE
DE LA RESPONSABILITE PENALE DU
MEDECIN TRAITANT.
|
Depuis son accession à l'indépendance en
1960, le Cameroun a mis sur pied des mécanismes pour accroître
l'offre sanitaire par la formation des médecins et la construction des
hôpitaux et des centres de santé. Le but recherché
était d'assurer à tous les citoyens le droit d'avoir accès
aux soins de santé. Les années post indépendances ont
été relativement prospères du point de vue
économique. Lorsque survient à la fin des années 1980 la
crise économique, le pays est économiquement
ébranlé et mis sous ajustement structurel. Tous les grands
projets entrepris par l'Etat (mise sur pied des infrastructures de base
à savoir des routes, des écoles, des hôpitaux) sont
suspendus, car l'une des exigences des Plans d'Ajustement Structurel (P.A.S.)
était, pour l'Etat camerounais de réduire ses dépenses.
L'une des résultantes directes de cette solution (la réduction du
niveau de vie de l'Etat) a été l'accroissement de la
pauvreté. Cette situation handicape sensiblement le niveau de vie des
populations. Il en résulte dès lors que les obstacles relatifs
à la mise en oeuvre de la responsabilité pénale du
médecin sont de plusieurs ordres. Ils peuvent être propres
à l'environnement camerounais (section I) ou relever des
difficultés dans l'établissement de la preuve en matière
médicale (section II).
SECTION I : UNE PLURALITE D'OBSTACLES PROPRES A
L'ENVIRONNEMENT CAMEROUNAIS.
Pays d'Afrique subsaharienne, le Cameroun de par son
histoire et sa situation économique est confronté à des
réalités qui empêchent ses habitants en
général, et les patients qui y vivent en particulier d'assurer le
respect de leurs droits les plus fondamentaux. S'il est vrai que ces obstacles
peuvent être d'ordre juridique (paragraphe II), l'influence
réalités culturelles et socio-économiques n'est pas
à négliger (paragraphe I).
62
64
66
68
Paragraphe I : Les réalités culturelles
et socio-économiques.
Parce que le Cameroun sur son sol abrite une
mosaïque de peuples et de cultures, il est appelé <<
Afrique en miniature ». De par sa position
géographique, le Cameroun se situe au croisement des courants
migratoires séculaires des peuples soudanais, peulhs et bantous. En
outre, après une vingtaine d'années sous ajustements structurels
et malgré l'atteinte du point d'achèvement de l'initiative
PPTE143 , le Cameroun reste en proie à la pauvreté.
S'il est vrai que les réalités culturelles représentent un
obstacle sérieux à la mise en oeuvre de la responsabilité
du médecin (A), les réalités socio-économiques le
sont tout autant (B).
A- Les réalités culturelles.
Le brassage des peuples et des cultures au Cameroun
fait que des phénomènes tels que l'intégrisme religieux ou
le tribalisme sont marginaux. Néanmoins, il influence le mode de vie des
camerounais en les prédisposant à apprécier de
manière quasi-unanime certains événements qui surviennent
dans leur vie. La notion de fatalité (1) et la survivance des
mentalités mystico-religieuses (2) sont des phénomènes qui
sévissent au Cameroun et qui concourent à décourager les
camerounais à saisir la justice afin de rentrer dans leurs
droits.
1- La prédominance de la notion de
fatalité
La fatalité peut être définie
comme une force surnaturelle par laquelle, selon certains, tout ce qui arrive
est déterminé d'avance. Cette croyance est ancrée dans les
moeurs au Cameroun. Il est courant de relever certaines réactions face
à certaines situations de la vie. En effet, lorsqu'en Afrique en
général et au Cameroun en particulier, on est frappé par
un drame (deuil, accident de toute nature...), on y voit rapidement la sanction
de la divinité. Des formules telles << c'était
écrit » , << c'était son
destin », ou << c'est Dieu qui a
voulu » sont monnaie courante, et suffisent à elles
seules à justifier la survenance d'un décès ou d'un
sinistre.
143 Initiative Pays Pauvres Très
Endettés. Ce programme a été mis sur pied pour pallier les
insuffisances qu'ont présentées les plans d'ajustement
structurels. Il vise à transformer la dette des pays pauvres en une aide
au développement.
Un médecin qui opère ou qui prescrit un
traitement est guidé par le destin, la faute du praticien ne peut
être retenue car prédestinée à arriver. D'oil
l'indifférence, voire la réticence qu'ont certains individus
à saisir les juridictions face aux errements
médicaux.
Si la notion de fatalité permet de comprendre les
réalités culturelles, on ne peut pas la dissocier des
mentalités mystico-religieuses qui contribuent à avoir une vue
plus éclairée.
2- La survivance des mentalités
mystico-religieuses.
L'évolution prodigieuse des technologies de
l'information et de la communication (TIC) avec notamment l'essor d'Internet
permet aujourd'hui d'avoir un avis plus éclairé sur les diverses
évolutions des sciences et de la technique.
A l'exemple des autres sciences, la médecine
commence à être démystifiée par le profane qui peut
avoir les éclairages par le biais d'Internet sur tous les
éléments qui par le passé lui semblaient obscurs. Sur
Internet, on retrouve les évolutions les plus récentes de la
médecine, le fondement des relations médecin - patient, les
droits du patient, les obligations dont est tenu le médecin
vis-à-vis de son patient et les sanctions au manquement à ces
obligations.
Au Cameroun, l'influence de l'islam et du
christianisme sur les cultures locales, jadis utilisés pour
contrôler les autochtones a contribué à les rendre
passifs144. C'est à juste titre que Karl MARX a pu dire que
<< la religion c'est l'opium du peuple
>>. En outre, la pratique des religions importées n'a pas
complètement déconnecté les camerounais des croyances et
pratiques traditionnelles. Les rites traditionnels côtoient sans trop
d'incompatibilité les rites religieux. C'est ainsi que la providence et
la divination trouvent des défenseurs solides dans la
société, justifiant en quelque sorte les errements
médicaux. Accuser un grand parent est plus plausible que rechercher les
causes scientifiques d'une maladie. Toutes les maladies, qu'elles soient
bénignes ou malignes se << lancent au
village >>. On attrape le Sida non pas parce qu'on n'a pas
pris les précautions y afférentes, mais parce que le sorcier, qui
arrime sa pratique aux évolutions de la science et de la technique a
tôt fait de << lancer >> cette
maladie. C'est ainsi que ceux des patients qui souhaitent se faire rendre
justice et rentrer dans leurs droits en cherchant à établir la
responsabilité du médecin sont généralement
considérés comme des individus dotés d'une volonté
manifeste de nuire au médecin. Les dommages causés par ce dernier
étant souvent irréversibles, on ne trouve plus
l'intérêt d'entreprendre des poursuites.
144 Cf. Discours du Roi belge Léopold II aux
émissaires du Congo en 1883.
Après ce bref examen des réalités
culturelles, qu'en est -il des réalités socioéconomiques
?
B- Les réalités socio -
économiques.
La récession économique survenue au
Cameroun dans les années 1980 a considérablement réduit le
niveau de vie des populations (réduction des salaires, licenciements,
fermeture des sociétés étatiques, gel des concours
administratifs). Cela a entraîné la persistance du
phénomène de pauvreté. La pauvreté est un obstacle
face aux charges exorbitantes de la justice, ce qui conduit très souvent
à des réticences et à des désistements.
Un rapport de ECAM145 en 2007 fait
état d'un pourcentage de 40.2% de ménages vivant dans la
pauvreté146. L'indicateur de pauvreté humaine (IPH)
renseigne que 38.5% des citoyens sont touchés par la pauvreté
humaine alors que du point de vue du revenu (seuil de pauvreté
monétaire), ce sont 40.2% des camerounais qui sont pauvres, 40.6%
d'entre eux appartiennent à la tranche intermédiaire et 19.2%
sont considérés comme riches.
Fort de ce constat, il apparaît que les
problèmes auxquels font face la majeure partie des camerounais sont
d'ordre primaire (se nourrir, se vêtir, se soigner). Dans ces
circonstances, la justice apparaît plus être un luxe qu'une
nécessité, ce qui justifie les réticences, voire le
désistement face aux charges de la justice. Pour cause, <<
Les procédures judiciaires sont extrêmement
onéreuses en dehors des causes en matière sociale oil la
gratuité de la justice est clairement affirmée. L'accès
à la justice et la conduite d'un procès entraînent de
nombreux frais »147.
Pourtant, l'érection de la justice en service
public avait pour but de faciliter l'accès de tous à la justice
et d'assurer l'égalité de tous les citoyens devant les lois de la
République. Le principe de gratuité du service public de la
justice ne signifie toutefois pas l'absence de frais car, à cause de
toutes les dépenses qu'elle génère, la justice est
onéreuse.
Pour permettre de couvrir les frais du procès,
le demandeur à l'action ou le plaignant en matière pénale
doit au préalable payer une consignation. En outre, <<
à cause de l'inégale répartition des
juridictions sur l'ensemble du territoire national, les justiciables se
trouvent souvent obligés de parcourir des centaines, voire des milliers
de kilomètres pour assurer la
145 Enquête Camerounaise auprès des
Ménages.
146 Institut National de la Statistique, ECAM 3, <<
tendances, profil et déterminants de la pauvreté au Cameroun en
2007 ».
147 SOCKENG (Roger), op.cit., p.171.
défense de leurs droits. Les zones rurales
souffrent d'une absence perceptible de juridictions ; et en termes
d'hébergement, de nutrition et de frais de transport, cela coûte
extrêmement cher >>148. Le fait que les
causes avant d'être connues soient renvoyées plusieurs fois avant
de connaître leur dénouement explique les désistements
réguliers pour absence de moyens pouvant permettre de soutenir une
action déjà introduite.
Face à cette situation, on serait tenté
de croire comme SOCKENG Roger que << la justice glisse
sensiblement vers une situation de hiérarchie sociale, les plus nantis
pouvant défendre leurs droits pendant que les indigents faute de moyens,
verront malgré eux, leurs droits piétinés et
vilipendés >>149. Cela pousse à
<< se demander à quoi bon parler de service public de
la justice, si à la longue, la grande majorité de la population
se trouve dans l'impossibilité de faire valoir ses droits pour des
raisons d'ordre financier >>150? Et à
s'interroger sur le point de vue de LA FONTAINE quant il écrivait :
<< Selon que vous serez puissant ou misérable, les
jugements de cour vous rendront Blanc ou Noir
>>151.
Certes la compréhension de la pluralité
des obstacles propres à l'environnement camerounais passe par la
maîtrise des réalités culturelles et
socio-économiques, mais, elle est aussi liée aux
réalités d'ordre juridique.
Paragraphe II : Les réalités d'ordre
juridique.
La mise en oeuvre de la responsabilité
pénale du médecin connaît également des
difficultés d'ordre juridique. Cela pourrait être dû
à l'absence d'un encadrement strict de la profession médicale au
Cameroun (A). On relève toutefois une avancée significative avec
la promulgation d'une loi relative à l'assistance judiciaire
(B).
A- L'absence d'un encadrement strict de la profession
médicale au Cameroun.
L'existence des dispositions légales et
règlementaires qui encadrent la profession médicale au Cameroun
ne suffit pas à faire de ce métier une référence.
En effet, certains actes répréhensibles posés par le
professionnel sont rarement condamnés. En outre, le caractère
épars des textes qui encadrent la profession du médecin
témoigne du manque de rigueur de la part du législateur
camerounais dans le contrôle de la profession
médicale.
148 Ibid.
149 Ibid.
150 Ibid.
151 Les Fables de La Fontaine, extrait de la fable
<< Les animaux malades de la peste >>.
Tout d'abord en ce qui concerne la répression
des certains actes condamnables posés par le médecin, on note
l'existence d'une certaine tolérance. Il en est ainsi par exemple des
actes tels que la délivrance des certificats médicaux et la
violation du secret professionnel. La délivrance de faux certificats
médicaux bien que régie par le Code pénal en son article
259 est foulée au pied au quotidien dans les hôpitaux et autres
centres hospitaliers. Chacun peut se prévaloir de se fabriquer un
certificat médical « sur mesure »
selon les nécessités, et souvent pour des besoins juridiques
(plaintes, constitution de partie civile). Nous nous demandons si les
autorités qui délivrent de tels actes sont conscientes de la
gravité de leurs actions ou alors, profitent-elles tout simplement d'un
encadrement poreux de leur profession pour pouvoir à loisir transgresser
les règles qui la fondent ? Il en est de même de la divulgation du
secret médical. L'article 310 du Code pénal lie certes les
praticiens au secret professionnel. Au quotidien, il n'est pas rare de
constater des errements dans ce domaine. TJOUEN estime à ce propos que
« dans les pays en voie de développement (...) la
légèreté, la persistance et la montée des
indiscrétions et négligences de certains médecins sont
indescriptibles >>152. C'est dans cette logique
que, « après avoir découvert que son patient
est atteint d'une tumeur maligne du foie et que ce dernier est condamné
à mourir, un médecin d'un hôpital privé au Cameroun
a en 1992, révélé le secret à son entourage qui,
à son tour l'a porté à la connaissance du malade. La mort
s'en est précipitamment suivie
>>153. Ces situations illustrent
à loisir l'existence d'un certain «
laisser-aller » chez
les médecins. Le caractère épars des textes qui
régissent la profession ne joue pas en faveur de l'amélioration
de cette situation.
En parcourant la législation de certains pays
occidentaux, on se rend à l'évidence que la
légèreté n'est pas admise dans l'encadrement des
professions médicales en général, et dans celles des
médecins en particulier. Ils ont mis sur pied des instruments qui
permettent de recenser l'essentiel des textes qui mettent en lumière la
profession du médecin. Il en est ainsi du Code de la santé
publique en France. Au Cameroun, c'est avec beaucoup de peine qu'on peut
rassembler tous les textes relatifs à la profession du médecin.
Le praticien qui est le premier concerné en ignore
l'essentiel154. Le législateur camerounais tout comme les
autorités judiciaires devraient chacun en ce qui le concerne revoir ce
volet du droit national dans sa conception pour le législateur, et dans
son application pour les autorités judiciaires.
152 TJOUEN, op.cit., p.72.
153 Ibid.
154 Dans le cadre de nos recherches, la plupart des
médecins rencontrés reconnaissent l'existence des textes
règlementant leur profession, mais plusieurs avouent ne les avoir jamais
parcourus. Il a fallu se rapprocher du siège de l'ONMC pour rencontrer
des médecins éclairés en la matière. Mais combien
sont-ils ?
Dans un contexte marqué par la
précarité et la pauvreté, le législateur, garant de
la protection des droits et libertés des citoyens n'est pas resté
inactif. Il a mis sur pied une institution dont la mission est d'assister le
justiciable dans le monde complexe et onéreux qu'est celui de la
justice. Il s'agit de l'assistance judiciaire.
B- L'assistance judiciaire : une avancée
significative dans la résolution des difficultés d'ordre
économique et juridique.
Régie au Cameroun par la loi No 2009
/ 004 du 14 Avril 2009 portant organisation de l'Assistance Judiciaire,
l'assistance judiciaire est une institution créée pour aider le
citoyen pauvre à accéder à la justice. Elle a pour but
d'assurer la gratuité totale ou partielle à ceux dont la
pauvreté ou le manque de ressources ne permet pas de faire face aux
dépenses exigées pour une procédure. L'assistance
judiciaire est une institution pour le justiciable indigent (1) et
s'avère être un gage d'égal accès à la
justice (2).
1- L'assistance judiciaire : Une institution pour le
justiciable indigent.
« La gratuité de la justice
ne signifie pas que les justiciables n'ont aucun frais à payer. Il
était dès lors à craindre qu'au mépris de
l'égalité de tous devant la justice, et la gratuité
affirmée de celle-ci, que les indigents fussent en fait dans
l'impossibilité de faire valoir leurs droits en justice, tant en demande
qu'en défense »155. C'est dans cette
optique que le législateur a mis sur pied l'assistance judiciaire. Elle
est, soit prévue de plein droit par des dispositions légales
spéciales en raison de la nature du litige, soit accordée sur
demande, dans les conditions prévues par la loi. L'assistance judiciaire
permet à la personne qui en bénéficie d'obtenir, soit une
décision de justice, soit l'exécution de celle-ci avec dispense
de l'avance de tout ou partie des frais qu'elle devrait normalement supporter.
Aussi, l'assistance judiciaire concerne tous les frais afférents
à l'instance, procédures ou actes pour lesquels elle a
été accordée : ces frais sont avancés par l'Etat.
Elle est dite totale lorsque la décision ne limite ni les actes ni les
phases de la procédure, et partielle si la décision qui l'accorde
indique qu'elle ne porte que sur certains actes ou certaines phases
spécifiées de la procédure. La loi du 14 avril 2009 fixe
les conditions de fond et de forme d'admission au bénéfice de
cette institution.
S'agissant des conditions de fond, il faut :
155 SOLUS et PERROT cités par SOCKENG, op.cit.,
p.23.
- D'abord faire partie d'une catégorie
donnée de personne (indigents, les hommes de rang, les personnes
assujetties au tarif du taux A de l'impôt libératoire,... les
personnes qui ne peuvent supporter les frais du procès à cause de
leurs ressources initialement réputées insuffisantes, le conjoint
en charge d'enfants mineurs en instance de divorce qui ne dispose d'aucun
revenu propre) ;
- ensuite faire valoir un droit déterminé,
c'est-à-dire avoir une action à porter devant une juridiction ou
un jugement à exécuter ;
- enfin justifier d'une insuffisance de ressources ;
pour apprécier l'insuffisance des ressources, il est tenu compte des
éléments extérieurs du train de vie, de l'existence des
biens meubles ou immeubles, qu'ils soient ou non productifs de revenus,
à l'exclusion toutefois de ceux qui ne pourraient être vendus ou
donnés en gage sans qu'il n'en résulte un
déséquilibre de la situation économique du
propriétaire. Les ressources du conjoint du demandeur et de celles des
personnes vivant habituellement à son foyer sont également prises
en considération.
S'agissant des conditions de forme, le sollicitant
doit faire une demande écrite ou orale au secrétaire de la
commission d'assistance judiciaire compétente avec toutes les
pièces justificatives d'indigence (un extrait du rôle pour ses
impositions ou un certificat de non-imposition ou encore un certificat du chef
de la circonscription administrative précisant, le cas
échéant, si elle est soumise à l'impôt
libératoire ; un certificat d'indigence délivré par le
Maire, après une enquête du service social
compétent).
A l'issue de l'examen de la commission d'assistance
judiciaire, le requérant peut être
admis au bénéfice de l'assistance
judiciaire. Cela concourt à garantir un égal accès
à la justice.
2- L'assistance judiciaire : un gage d'égal
accès à la justice.
L'admission au bénéfice de l'assistance
judiciaire dispense en principe partiellement ou totalement l'assisté
des frais de justice et l'assure de l'assistance gratuite des auxiliaires de
justice. L'assisté est dispensé des frais de justice
156(droit de timbre, d'enregistrement et de greffe ainsi que de
toute consignation), sauf la taxe prévue en cas de pourvoi qui peut lui
être exigée. De même, l'assisté est pourvu
gratuitement aux auxiliaires de justice. L'article 32, alinéa 2 de la
loi du 14 avril dispose que : « la dispense concerne
également le paiement total ou partiel des sommes dues aux avocats,
greffiers, huissiers, notaires et commissaires priseurs pour droit,
émoluments et honoraires ».
156 Art. 32 de la loi No 2009/004 du 15 Avril
2009 portant Organisation de l'Assistance Judiciaire.
Toutefois, une partie du coût de la justice est
prise en charge par le justiciable qui sollicite l'assistance judiciaire (droit
de timbre, d'enregistrement, de greffe et frais de procédure).
L'avènement de la nouvelle loi sur l'assistance judiciaire est porteur
d'espoirs pour les justiciables camerounais. Venue abroger le décret
No 76/521 du 09 Novembre 1976 lacunaire, la loi du 14 Avril
érige des commissions d'assistance judiciaire dans toutes les
juridictions de droit commun, d'où les énormes défis
auxquels elle sera confrontée. En effet il faudra s'assurer que les
mesures d'assistance judiciaire profitent effectivement aux personnes
visées et prémunir lesdites commissions et toutes les
institutions qui y sont rattachées de tout phénomène de
corruption qui annihilerait le souci du législateur d'assurer une
justice équitable pour tous.
La pluralité d'obstacles propres à
l'environnement camerounais à elle seule ne permet pas de comprendre les
difficultés de la mise en oeuvre de la responsabilité
pénale du médecin. Les difficultés relatives à
l'établissement de la preuve sont celles que nous pouvons
considérer comme « le ventre mou »
de la mise en oeuvre de cette responsabilité.
SECTION II : LES DIFFICULTES LIEES A L'ETABLISSEMENT DE
LA
PREUVE
Le corps médical est tenu au secret
professionnel et se doit de ce fait de protéger ses patients. Il le fait
non seulement par le truchement du secret médical, mais aussi par le
biais du dossier médical qui est une des manifestations du secret
médical. Le dossier médical permet à
l'établissement hospitalier de protéger et de conserver les
informations qui concernent leurs patients. De ce fait, s'il est
indéniable que l'accès au dossier médical relève
d'un véritable parcours du combattant (paragraphe I), force est de
rappeler qu'un revirement jurisprudentiel a en 1997 renversé la charge
de la preuve en matière médicale (paragraphe II).
Paragraphe I : Les difficultés d'accès au
dossier médical.
De par l'extrême complexité que
révèle la profession de médecin, ces professionnels sont
tenus d'encadrer, mieux de protéger les informations mises à leur
disposition à l'aide des dossiers médicaux. C'est la raison pour
laquelle leur accès est interdit au public, et que même lors des
perquisitions, on veille à leur inviolabilité.
L'inviolabilité dont bénéficie le dossier médical a
pour principal but la protection des informations intimes concernant le
patient.
70
Toutefois, dans un souci de clarté quant aux
causes d'une incommodité dont la raison pourrait être
médicale, le caractère secret du dossier médical le rend
difficile d'accès (A). Cet obstacle est généralement
considéré comme la manifestation de l'esprit de corps qui existe
entre les médecins surtout quand on sait qu'en matière
pénale, le principe « actori incumbit probatio
» prévaut (B).
A- Le caractère secret du dossier médical.
Contenant l'ensemble des informations ayant trait au
patient, notamment les pathologies dont il souffre, et au suivi auquel il est
soumis, le dossier médical apparaît comme un élément
qui garantit non seulement de la confidentialité des informations
relatives au patient, mais aussi des traitements qui lui sont
administrés. Si la cause principale de l'établissement du dossier
médical est la protection de l'intimité du patient, il en
résulte que le public n'y a pas accès.
Le dossier médical contient toutes les phases
de la thérapie du patient et toutes les informations y
afférentes. Il en résulte que sa connaissance relève du
domaine exclusif du médecin traitant et de son malade. Il peut toutefois
arriver que dans le souci de soumettre un cas complexe de maladie à ses
collègues, le médecin traitant puisse communiquer des
informations concernant son patient. Ces informations qui sont soumises aux
collègues imposent à ceux-ci de les taire sous le couvert du
secret médical, à ne divulguer sous aucun prétexte. Bien
que n'étant pas les médecins traitant du malade, cette exigence
professionnelle s'impose à eux.
S'il ressort que le dossier médical est un gage de
la protection de l'intimité du patient, quel effet produit-il
?
La conséquence immédiate de la protection
de l'intimité du patient par la mise sur pied du dossier médical
est son accès limité au public.
En effet, le dossier médical échappe
à la connaissance du public. Les tiers n'y ont accès que dans des
conditions bien précises. En matière d'accessibilité au
dossier médical, on entend par tiers, « toutes les
autres personnes en dehors du patient et du client ... à l'égard
de qui le médecin n'est pas lié
»157. Ces personnes peuvent avoir un intérêt
à entrer en possession des informations contenues dans le dossier
médical. Il s'agit en l'occurrence des membres de la famille, des
héritiers, des ayants droits qui en vertu de l'intérêt que
revêt pour eux l'accession au dossier médical de leur parent,
peuvent être autorisés à y avoir accès.
157 TJOUEN, op.cit., p. 71.
Toutefois, cette accession ne doit pas avoir pour but de
divulguer des informations qui pourraient entacher l'image du patient,
même après sa mort au sein de la
société.
Il en résulte dès lors que, outre les
raisons de justice (la manifestation de la vérité) dans un
procès, ou bien en cas de nécessité pour les ayants droits
de se voir accorder un privilège, le dossier médical est
protégé. Cette protection se manifeste également au moment
de la perquisition dans les établissements hospitaliers et autres
cabinets médicaux qui ne doivent se faire qu'en présence des
membres de l'Ordre158.
Le problème de l'accessibilité au
dossier médical ne serait qu'imparfaitement appréhendé si
en plus des raisons visant à protéger le patient, on ne faisait
pas état de l'esprit de corps qui prévaut entre les
médecins et surtout des dispositions légales en matière de
la charge de la preuve.
B- L'esprit de corps et la règle de principe
« actori incumbit probatio » : des
freins
supplémentaires dans l'établissement des preuves.
Il sera question d'examiner ici l'esprit de corps (1),
avant de s'appesantir sur la charge de la preuve en matière
pénale (2).
1- L'esprit de corps.
Dans leurs relations réciproques, les
médecins sont tenus mutuellement à << un
devoir de confraternité >>159 dont l'une
des caractéristiques principales est la solidarité. Cette
solidarité si elle est très poussée peut être un
danger pour la manifestation de la vérité.
Dans le souci de maintenir l'harmonie entre
confrères, le devoir de confraternité a été
institué entre les médecins. Le devoir de confraternité
pose les bases d'une collaboration entre professionnels du même corps en
ce sens qu'ils << doivent entretenir entre eux des rapports
de bonne confraternité >>,
et qu' << ils se doivent assistance morale
>>160.
C'est dans cette optique que les confrères
peuvent se consulter mutuellement dans le but de se soumettre des cas cliniques
afin de trouver des solutions idoines pour la guérison du patient. Le
devoir de confraternité instaure la solidarité entre les
médecins. Cette solidarité est
158 Il s'agit de l'Ordre National des Médecins du
Cameroun (ONMC).
159 Titre IV du Code de déontologie des
médecins du Cameroun.
160 Art. 42 Code de déontologie médicale du
Cameroun.
bénéfique pour le patient. Toutefois, un
usage autre que celui recherchant l'intérêt du patient peut se
révéler comme un danger, notamment en ce qui concerne la
manifestation de la vérité.
Le devoir de confraternité qui renforce la
solidarité entre les médecins pourrait représenter un
danger pour le patient. En effet, parce que le dossier médical
appartient à l'établissement hospitalier et non au malade, les
professionnels qui y ont accès pourraient le falsifier dans le but de
protéger leur confrère. Bien qu'illégale, la raison
d'être de cette pratique pourrait se trouver dans la préservation
de l'image de marque de l'établissement hospitalier et même celui
des médecins. Mais surtout, le souci d'éviter d'admettre la
commission par le professionnel de son propre chef d'une
infraction.
Les problèmes issus de la solidarité entre
les praticiens influent sur la charge de la preuve.
2- les difficultés résultant de la
règle de principe « actori incumbit probatio
»
Dans le souci de protéger la partie poursuivie,
le législateur a mis sur pied des mécanismes afin d'assurer la
garantie des droits de la partie défenderesse. C'est la raison pour
laquelle, à l'exception de l'instruction qui est de type inquisitoriale,
la poursuite se caractérise par son aspect accusatoire. C'est en vertu
de cette caractéristique que la charge de la preuve incombe à la
partie qui accuse. Ce principe bien que difficilement efficace en
matière médicale (b) mérite d'être
présenté (a).
a- L'économie du principe.
L'article 307 du Code de procédure
pénale dispose que « la charge de la preuve incombe
à la partie qui a mis en mouvement l'action publique
». Il ressort de cette disposition que c'est la partie qui accuse, la
partie demanderesse en l'occurrence à qui il revient d'apporter les
preuves qui accablent la partie défenderesse.
Ce principe vient renforcer la présomption
d'innocence énoncée dans l'article 8 du Code de procédure
pénale qui dispose en son alinéa 1er que «
Toute personne suspectée d'avoir commis une infraction est
présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité
ait été légalement établie au cours d'un
procès oil toutes les garanties nécessaires à sa
défense lui seront assurées ». L'alinéa
2 poursuit que « la présomption d'innocence s'applique
au suspect, à l'inculpé, au prévenu et à
l'accusé ». Il est donc évident qu'au regard de
la protection faite
par le législateur au présumé auteur
de l'infraction, l'établissement de la preuve s'avère difficile
en matière médicale.
b- Les difficultés de son efficacité en
matière médicale.
Au vu de la complexité qui la
caractérise, la médecine pour le patient n'a qu'un but : lui
procurer la guérison. Aussi, l'efficacité d'un traitement pour le
profane s'apprécie par son résultat et non par les moyens
utilisés pour y parvenir. Il en résulte que lorsque un patient
vient à se plaindre, il lui est très difficile, voire impossible
d'apporter la preuve de ses déclarations, sauf s'il a des connaissances
en matière médicale. Prouver l'usage d'une substance nocive, d'un
traitement inapproprié sans y être habilité a toujours
été << le ventre mou » de la
mise en oeuvre de la responsabilité du médecin.
En outre, le médecin a une obligation de moyens
et non de résultat. Son traitement ne peut pas toujours garantir la
guérison même s'il s'est entouré de toutes les
précautions requises, à savoir l'attention, la conscience, la
conformité aux données acquises de la science. La faute ne
pourrait être relevée que s'il a méconnu l'une de ces
exigences professionnelles.
Au vu des difficultés résultant de la
règle de principe << actori incumbit
probatio » en matière médicale, laquelle avait
quasiment << immunisé » le
médecin de toute poursuite pénale, il s'avérait
impérieux de trouver une solution. Le juge, créateur subsidiaire
de la loi a par une révolution jurisprudentielle redéfini
l'établissement de la preuve en matière
médicale.
Paragraphe II : L'Arrêt dit HEDREUL : une
révolution procédurale
dans la manifestation de la vérité.
Dans son arrêt du 25 Février 1997, la
Cour de Cassation en sa Chambre Civile 1ère a rendu une
décision qui a révolutionné la procédure en
matière de détermination de la preuve. D'origine
française, cette jurisprudence pourrait inspirer le juge camerounais
à faire une avancée notable dans le contentieux médical au
Cameroun. Il s'agit de l'Arrêt dit HEDREUL161 dont la
substance (A) a consacré le renversement de la charge de la preuve en
matière médicale (B).
A- Le contenu de l'arrêt HEDREUL.
Après avoir été
débouté en appel, le sieur HEDREUL s'est pourvu en cassation dans
une espèce qui l'opposait au Docteur Roland COMTE et à la
société polyclinique Sévigné.
72
161 Cass. Civ. 1ère, Arrêt
no 426, 25 Février 1997.
Dans cette affaire, le sieur HEDREUL a intenté
une << action en responsabilité à l'encontre
des médecins et chirurgiens, en raison des troubles dont il est
resté atteint à la suite d'une intervention chirurgicale, et pour
le manquement à leur devoir de conseil... >>. Pour
prouver ses prétentions, un expert a été commis. Dans ses
conclusions, l'expert a commis des erreurs de datation lorsqu'il <<
mentionne que le malade a pu sortir le 17 Février, alors
que c'est le 16 qu'il a quitté la clinique, enfin, il parle des radios
pratiquées le 17 Février alors qu'il s'agit du 16 et de celles du
18 Février alors qu'elles ont été réalisées
le 17 >>.
La Chambre Civile de la Cour de Cassation a
estimé que << l'expert a effectivement commis une
erreur de datation des différentes opérations chirurgicales
subies à cette période par monsieur
HEDREUL >> et que, <<
toutefois, cette simple erreur de date
est sans incidence sur la valeur de l'analyse de
l'expert... >>. L'autre raison et non des moindres du
recours intenté par monsieur HEDREUL est que << les
parties ont soumis à l'expert l'ensemble des
documents jugés utiles aux débats
>>, et, << l'expert a procédé à
l'examen approfondi de ceuxci, il n'a pas estimé nécessaire pour
formuler l'avis technique qui lui était demandé d'en examiner
d'autres». La prétention du sieur HEDREUL était
fondée sur le fait qu' << il y a lieu de relever un
certain degré de maladresse au cours de cette intervention tardive
aboutissant à une colostomie
>>.
Pour justifier ses propos, le demandeur procède
par << affirmation et sans
démonstration >> alors qu' <<
il lui appartient de rapporter la preuve de ce que le
médecin ne l'aurait pas averti des risques inhérents à une
polypectomie et notamment celui qualifié de
non négligeable par l'expert d'une perforation
digestive >>.
Monsieur HEDREUL ne produit aux débats aucun
élément accréditant cette thèse, c'est la raison
pour laquelle << une nouvelle expertise ne saurait
être ordonnée pour suppléer la carence des parties dans
l'administration de la preuve >>.
La Chambre Civile 1ère de la Cour de
Cassation a motivé sa décision sur trois points en se fondant
d'abord sur l'article 146 du Nouveau Code de Procédure Civile
Français (NCPC) d'après lequel << une mesure
d'instruction peut être ordonnée si la partie qui la sollicite ne
dispose pas d'éléments suffisants pour prouver un fait...
>>. Ensuite, sur le principe selon lequel <<
le médecin est tenu à un devoir d'information et de
conseil à l'égard de son patient, lequel doit être ainsi
dûment informé des risques encourus ». Enfin, la
Cour s'est fondée sur l'article 1315 du Code Civil, qui dispose que :
<< celui qui est légalement ou contractuellement tenu
d'une obligation particulière d'information doit rapporter la preuve de
l'exécution de cette obligation >>.
74
C'est sur la base que ces différentes exigences
ont été violées en appel, que le sieur HEDREUL s'est
pourvu en cassation. L'auguste chambre a rendu un arrêt infirmatif
qu'elle a motivé en ces termes : << par ces motifs,
et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deux premières branches du
moyen :
Casse et annule, dans toutes ses dispositions,
l'arrêt rendu le 5 Juillet 1994, entre les parties, par la Cour d'Appel
de Rennes, remet, en conséquence, la cause et les parties dans
l'état oil elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour
être fait droit, les renvoie devant la Cour d'Appel d'Angers...
».
Une fois le contenu de cet arrêt parcouru, quel a
été son apport ?
B- l'apport déterminant de l'arrêt
HEDREUL : le renversement de la charge de la preuve.
L'arrêt de la Chambre Civile 1ère
de la Cour de Cassation du 25 Février 1997 a révolutionné
la charge de la preuve en matière médicale à plus d'un
titre.
Face à la complexité que revêt la
médecine pour le patient, le juge a reprécisé à
travers des textes juridiques des règles qui régissent l'exercice
de la profession de médecin.
En matière procédurale, il rappelle
qu'en vertu de l'article 146 du NCPC, <<une mesure
d'instruction peut être ordonnée si la partie qui la sollicite ne
dispose pas d'éléments suffisants pour prouver un
fait ».
En matière contractuelle, le juge de la Cour de
Cassation a réaffirmé d'une part que << le
médecin est tenu d'un devoir d'information et de conseil à
l'égard de son patient, lequel doit être ainsi dûment
informé des risques encourus ...» ; et d'autre part
que, au vu de l'article 1315 du Code Civil, << celui qui est
légalement ou contractuellement tenu d'une obligation
particulière d'information doit rapporter la preuve de
l'exécution de cette obligation... ».
De cet arrêt, il ressort que, parce que <<
le médecin est tenu d'une obligation particulière
d'information vis-à-vis de son patient...il lui incombe de prouver qu'il
a exécuté cette obligation ». La
décision de la Cour de Cassation devrait conforter le justiciable ou le
patient dans le sens que la mise en oeuvre de la responsabilité du
médecin traitant ne saurait être limitée par l'exigence de
preuve.
La réflexion menée sur les
difficultés de la mise en oeuvre de la responsabilité
pénale du médecin traitant a abouti à un constat
édifiant : la mise en oeuvre de la responsabilité du
médecin traitant est entravée par une pluralité
d'obstacles propres à l'environnement
camerounais. Il s'agit notamment des
réalités d'ordre culturel, socio-économique, et juridique.
Un autre aspect tout aussi important est l'existence des obstacles liés
à l'établissement de la preuve en matière médicale.
En effet, à cause des difficultés d'accès au dossier
médical, ceci en vertu de son caractère secret ; de l'esprit de
corps qui prévaut entre les praticiens, et surtout au principe qui
régit la charge de la preuve, les obstacles rencontrés dans
l'établissement de la preuve accentuent les difficultés relatives
à la mise en oeuvre de la responsabilité pénale du
médecin traitant. C'est au vu de ces difficultés que la
jurisprudence française, à la suite de la décision rendue
dans l'arrêt HEDREUL a consacré le renversement de la charge de la
preuve. De ce fait, si la mise en oeuvre de la responsabilité se
caractérise par tant de difficultés, cela préfigure sans
doute une procédure complexe qui se caractérise par une
pluralité d'aspects techniques.
CHAPITRE II :
LA PLURALITE DES ASPECTS TECHNIQUES :
LA
COMPLEXITE DE LA PROCEDURE.
76
La mise en cause du médecin
soupçonné d'avoir commis une infraction obéit à une
pluralité d'exigences dont la maîtrise des contours est
indispensable pour pouvoir mettre en oeuvre la responsabilité
pénale de ce dernier.
De la plainte au prononcé du jugement,
plusieurs aspects techniques surviennent tout au long de la procédure de
mise en oeuvre de la responsabilité pénale du médecin. Le
corps médical est protégé par le principe sacro-saint du
secret professionnel, en l'occurrence, le secret médical. Le
procès où est mis en en cause le médecin a besoin
d'être éclairé dans certains de ses aspects, d'où
l'intervention de l'expert qui est commis pour apporter au courant du
procès des réponses aux questions techniques auxquelles les
parties et le juge seront confrontés. S'il paraît évident
que les étapes qui interviennent dans la mise en oeuvre la
responsabilité pénale du médecin traitant sont
spécifiques (section I), il serait toutefois nécessaire de mettre
en oeuvre des dispositions appropriées dans le but de garantir
l'efficacité de la justice pénale en matière
médicale au Cameroun (section II).
SECTION I : LA SPECIFICITE DES ETAPES
INTERVENANT DANS LA MISE EN OEUVRE DE LA RESPONSABILITE PENALE DU MEDECIN
TRAITANT.
Le médecin comme tout citoyen est soumis dans
l'exercice de sa profession au respect de la loi. Certes l'article 286 du Code
pénal l'exempte d'un certain nombre d'actes (coups et blessures)
lorsqu'ils sont commis dans le but de donner des soins. Toutefois, le praticien
qui, dans l'exercice de son art commet une faute est tenu de la réparer.
Il en est de même lorsque l'acte posé par le médecin est
constitutif d'infraction. Il peut dès lors être sous le coup de la
loi et faire l'objet de poursuites judiciaires.
La procédure de mise en oeuvre de la
responsabilité pénale du médecin est complexe
;
d'où l'importance de cerner les étapes
allant de la constatation de l'infraction à la mise en
oeuvre des poursuites pénales (paragraphe I),
qui sont des préalables à l'instruction préparatoire
(exception faite des cas de flagrance et de citation directe), phase fatidique
en cas de crime, pour l'entame du procès ou de l'abandon des poursuites
contre le médecin (paragraphe II).
Paragraphe I : La constatation de l'infraction et la
mise en oeuvre des
poursuites pénales.
La date du 27 Juillet 2005 restera mémorable
dans l'histoire des institutions du Cameroun comme celle de la promulgation du
tout premier Code de procédure pénale. En effet, le
législateur camerounais a en vertu de la loi No 2005/007,
voté la loi portant Code de procédure pénale. Loi de
procédure, elle est venue harmoniser la procédure applicable dans
les parties francophone et anglophone du territoire national en abrogeant les
dispositions du Code d'Instruction Criminelle (CIC)162 et du
<< Criminal Procedure Ordinance »163.
Le Code de procédure pénale est
présenté comme un instrument ultramoderne mis sur pied pour
assurer la célérité de la procédure pénale
tout en garantissant une meilleure protection des droits du justiciable. C'est
ainsi que de la constatation de l'infraction (A) à la mise en oeuvre des
poursuites pénales (B), la procédure à suivre doit
obéir à un formalisme bien particulier, bien que parsemé
d'obstacles.
A- La constatation de l'infraction pénale en
matière médicale.
Le Code de procédure pénale
édicte le formalisme requis dans la constatation des infractions
pénales. S'il est vrai que les principes par lui énoncés
sont généraux pour toutes les infractions, force est de constater
que, en matière médicale les obstacles tant de fait que de droit
constituent une entorse à la manifestation de la
vérité.
Contenue dans le Livre II du Code de procédure
pénale, intitulé << DE LA CONSTATATION ET DE
LA POURSUITE DES INFRACTIONS »164, il ressort que
l'infraction pénale est soit directe (flagrant délit), soit
secondaire à une plainte ou à une
dénonciation.
162 Ordonnance du 14 Février 1838 portant Code
d'Instruction Criminelle.
163 Cap. 43 of the Laws of Nigeria 1958.
164 Art. 59 et suiv.
La recherche des éléments constitutifs
de l'infraction peut se faire ainsi, soit dans le cadre d'une enquête
préliminaire au cours de laquelle les actes pratiques, dans le cadre de
cette enquête ne s'imposent pas à l'intéressé, en
dehors de la garde à vue ; soit dans le cadre de l'enquête de
crime ou de flagrant délit.
Comment s'effectue dès lors cette phase dans le
domaine médical ?
<< L'acte du médecin est un
acte salvateur, autorisé par la loi et consenti par le
malade >>165. Hormis les cas oh il est surpris en
train d'exercer illégalement la médecine, il n'est pas
évident pour le profane de dire à quel moment le médecin
contrevient aux exigences de sa profession et partant, de le prendre en
flagrant délit. Ceci s'explique par le fait que le médecin est
couvert par l'article 286 du Code pénal. Ce dernier peut donc invoquer
cette disposition pour justifier son intervention.
Le médecin doit prodiguer des soins attentifs
et consciencieux, conformes aux données acquises de la science.
L'expression << données acquises de la
science >> doit tenir compte de plusieurs facteurs. En
effet, elle s'apprécie différemment en fonction de
l'environnement dans lequel on se trouve. Au Cameroun par exemple, les
médecins des campagnes ne disposent pas de mêmes moyens techniques
que leurs confrères des grands centres urbains. Ils exercent dans des
conditions spéciales dont il faut tenir compte : l'isolement, la
distance à parcourir, l'équipement réduit, les conditions
sociales de la clientèle qui rendent la tâche incontestablement
plus délicate. Ils ne peuvent pas dès lors être soumis aux
mêmes exigences que leurs confrères des grands centres
urbains.
Par exemple, le médecin qui en campagne
procède à un accouchement hors de son centre hospitalier, parce
que cela est courant à cause de l'éloignement des centres
hospitaliers, pourra t-il se voir reprocher d'avoir méconnu les
données acquises de la science ? Au vu de l'environnement pauvre et
précaire dans lequel il exerce, le médecin de campagne ne dispose
pas toujours de tous les médicaments, de tous les instruments
adéquats, du courant électrique, de l'eau
stérilisée, du linge, des chaussures, des masques lui permettant
d'entreprendre une intervention chirurgicale en toute
sérénité. Pourra t-on dès lors parler d'exercice
illégal de la médecine dans la mesure oh les soins
prodigués par le médecin ne le sont pas dans un cadre
approprié? Nous répondrons par la négative car, le
médecin, en vertu de son devoir d'humanité se doit de tout mettre
en oeuvre pour apporter un soulagement à son patient.
En outre, lorsqu'un patient porte plainte à un
médecin, il revient à l'officier de police
judicaire dans le cadre de l'enquête
préliminaire de réunir les indices qui contribueront à
la
78
165 AKIDA (M), op.cit. p.382.
manifestation de la vérité. Il revient
donc à ces officiers de police judiciaires d'entendre à la fois
la partie qui accuse et le médecin qui est soupçonné
d'avoir commis une faute. De quels moyens dispose l'officier de police
judiciaire au Cameroun pour vérifier les déclarations du
médecin lorsqu'on sait que la nomenclature médicale est
hermétique et pas toujours accessible à l'enquêteur ? S'il
est évident que l'interrogatoire est le moyen le plus usité pour
la collecte des indices, il serait loisible de faire aussi état de la
perquisition.
L'article 107 du Code de procédure
pénale dispose que << les perquisitions dans un
cabinet de médecin ... ou au bureau de toute autre personne tenue au
secret professionnel, sont faites en présence du magistrat
compétent et, le cas échéant, de l'intéressé
et du représentant de son organisation professionnelle s'il en existe
une ».
De ce qui précède, il ressort que la
constatation de l'infraction commise par le médecin n'est pas
aisée. Cela a pour conséquence qu'il est très rare que le
médecin soit poursuivi pour des coups mortels. C'est surtout lorsqu'il y
a mort d'homme que l'on cherche généralement à retenir la
responsabilité de ce dernier. Pour les premières infractions (les
coups mortels), il paraît presque impossible d'établir le lien de
causalité entre le coup et la conséquence surtout si le drame
intervient dans un intervalle de temps assez long de sa commission. L'officier
de police est donc limité dans la constatation des infractions relatives
au médecin de par les moyens limités dont il dispose et surtout
des aspects techniques qui interviennent dans la détermination de la
faute du médecin.
Ces difficultés sont elles aussi
rencontrées dans la mise en oeuvre des poursuites pénales
?
B- La mise en oeuvre des poursuites pénales en
matière médicale.
Trois principales voies de poursuites sont
prévues à l'encontre d'un médecin fautif par le Code de
procédure pénale. Il s'agit respectivement de la citation
directe, le mandat de comparution, l'ouverture d'une instruction.
Les citations sont règlementées par le
Chapitre II du Titre V du Code de procédure pénale
intitulé << DES NOTIFICATIONS, CITATIONS ET
SIGNIFICATIONS ». De manière générale, l'article
40 dudit Code en ses alinéas 1 à 4 définit la citation
comme :
<< (1) ... une sommation à
comparaître devant une juridiction.
(2) Elle est délivrée par exploit d'huissier
à l'inculpé, au prévenu, à l'accusé,
à la partie civile, aux témoins, au civilement responsable et
éventuellement à l'assureur.
(3) La citation est délivrée à la
requête du ministère public, de la personne lésée
par l'infraction ou de toute personne intéressée.
(4) Elle est servie à personne, au lieu de travail,
à domicile, à mairie ou à parquet
».
De manière plus laconique, le lexique des
termes juridiques définit la citation directe comme «
un acte de procédure par lequel le Ministère Public
ou la victime peuvent saisir directement la juridiction de jugement en
informant le prévenu des coordonnées de l'audience
».
Le mandat de comparution quant à lui peut
s'appréhender comme une mise en demeure adressé par un magistrat
à un inculpé de se présenter devant lui à la date
et à l'heure indiquées par le mandat.
En outre, il s'avère que lorsque les indices
concordent vers la thèse de l'existence de la commission d'une
infraction, le juge d'instruction peut procéder à l'ouverture
d'une instruction. A l'inverse, l'absence d'indices concordants peut donner
lieu à l'abandon des poursuites par la délivrance d'une
ordonnance de non-lieu.
Certes, la constatation de l'infraction et la mise en
oeuvre des poursuites pénales sont des étapes importantes dans la
mise en oeuvre de la responsabilité pénale du médecin
traitant. Toutefois, cette phase pour être bien comprise nécessite
l'examen de l'instruction préparatoire, étape déterminante
de l'ouverture du procès pénal.
Paragraphe II : De l'instruction préparatoire
à l'audience.
Passée la phase de la constatation des
infractions, qui est suivie de l'ouverture d'une enquête, le Procureur de
la République saisit le juge instructeur par le biais d'un
réquisitoire introductif d'instance166. Il serait loisible de
rappeler que « le Juge d'Instruction ne peut ouvrir une
information judiciaire que s'il est saisi par un acte du Procureur de la
République »167. Lors de cette phase
capitale, les charges rassemblées par le Juge instructeur seront
déterminantes pour la suite de la procédure. En effet, selon leur
consistance, les charges retenues contre le médecin lors de
l'instruction préparatoire (A) conduiront soit à un non-lieu,
soit, à un renvoi. Cette deuxième option ouvre la porte à
la phase de jugement (B).
80
166 Art. 143, al. 2, C.P.P.
167 Art. 143, al. 1 C.P.P.
A- L'instruction préparatoire mettant en cause le
médecin.
L'instruction est << la phase de
l'instance pénale constituant une sorte d'avant-procès qui permet
d'établir l'existence d'une infraction et de déterminer si les
charges relevées à l'encontre des personnes poursuivies sont
suffisantes pour qu'une juridiction de jugement soit saisie
>>168. Facultative en matière de
délit et de contravention, elle est << obligatoire en
matière de crime >>169. Cette phase de la
procédure relève de la compétence exclusive du juge
d'instruction170.
Pendant l'instruction préparatoire, les
investigations porteront sur les faits et sur les personnes. On ne juge pas les
faits, mais des personnes ayant commis des faits : c'est le principe de la
personnalité des faits. Pour ce faire, le juge d'instruction dispose de
moyens consistants (1) et c'est de ses conclusions que dépendra la suite
de la procédure (2).
1- La consistance des moyens du juge
d'instruction.
Le juge d'instruction tout au long de la phase
d'instruction recherche des charges contre l'inculpé. Il accomplit de ce
fait des actes sur les personnes et sur les choses.
En ce qui concerne les actes sur les personnes, il
procède aux interrogatoires, aux auditions, aux confrontations, aux
détentions provisoires et à la surveillance judiciaire. Quant en
ce qui concerne les actes sur les choses, il assure le transport sur les lieux,
les constatations matérielles, les perquisitions et saisies. En outre,
il existe des actes accomplis par d'autres personnes à la demande du
juge instructeur ; il s'agit notamment des rapports d'expertise et des
commissions rogatoires.
La profession de médecin est
protégée par le secret professionnel et toutes les perquisitions
et saisies qui s'effectuent dans un cabinet de médecin ou dans un
établissement hospitalier doivent avoir lieu en présence d'un
membre de l'Ordre National des Médecins du Cameroun.
Le juge d'instruction à l'issue de la phase
préparatoire, décidera en fonction des charges à sa
disposition si la procédure doit suivre son cours ou si elle doit
s'estomper.
168 Lexique des termes juridiques, op.cit., p.
311.
169 Art. 142 (1), C.P.P.
170 Art. 142 (3), C.P.P.
2- La clôture de l'information
judiciaire.
Les mesures relatives à la clôture de
l'information judiciaire sont contenues dans le Chapitre X du Titre III du
Livre 2 du Code de Procédure pénale intitulé « DE
LA CLOTURE DE L'INFORMATION JUDICIAIRE ». Dans ce Chapitre, il est
énoncé que, << dès qu'il estime que
l'information judiciaire est achevée, le juge d'instruction communique
le dossier au Procureur de la République pour son réquisitoire
définitif >>171. En outre, à
l'issue de l'information judiciaire, << ... il s'assure
qu'il existe ou non contre l'inculpé des éléments
constitutifs d'infraction à la loi pénale et rend, soit une
ordonnance de non-lieu, de non-lieu partiel, soit une ordonnance de
renvoi >>172.
L'issue de l'information judiciaire détermine
la suite de la procédure. Si l'ordonnance de non-lieu entraîne la
mise en liberté immédiate de l'inculpé, sauf s'il n'est
détenu pour une autre cause, ainsi que la cessation des mesures de
surveillance prises à son encontre ; l'ordonnance de renvoi quant
à elle << ... pour les faits constitutifs d'un
délit, ... ne met pas fin à la détention provisoire ou
à la mesure de surveillance judiciaire, lorsque le maximum de la peine
encourue est supérieure à la durée de la
détention >>173. Il en est de même,
lorsque l'inculpé détenu ou placé sous surveillance
judiciaire est renvoyé devant le tribunal pour crime, l'ordonnance de
renvoi ne met pas fin à la détention provisoire ou à la
mesure de surveillance judiciaire. En outre, l'inculpé en liberté
le demeure jusqu'à sa comparution devant la juridiction de jugement
compétente.
Il serait loisible de rappeler que de ces deux cas, seul
celui du médecin ayant des charges contre lui nous intéresse car,
c'est celui qui conduit au procès.
B- Le déroulement du procès pénal
mettant en cause le médecin.
Le médecin qui exerce dans les limites du
territoire d'un Etat est tenu de se soumettre aux lois et règlements en
vigueur. Au Cameroun, la loi pénale s'impose à tous. Aussi,
lorsqu'il sera soupçonné d'avoir enfreint la loi dans l'exercice
de ses fonctions, la détermination de la juridiction dépendra de
la qualification de l'infraction qu'il aura commise. S'il est poursuivi pour un
délit commis dans l'exercice de son art, c'est en principe le
Tribunal
82
171 Art. 256, al. 1, C.P.P.
172 Art. 256, al. 3, C.P.P.
173 Art. 262, al. 1b, C.P.P.
84
de Première Instance (TPI) qui sera
compétent. Le Tribunal de Grande Instance (TGI) le sera s'il s'agit d'un
crime commis par le praticien.
Toutefois, le procès du médecin
connaît des particularités qui lui sont propres. Ces
particularités relèvent de l'administration de la preuve. S'il
paraît évident que l'expertise est une particularité du
procès du médecin car incontournable (2), force est de rappeler
que la charge de la preuve y revêt un caractère exceptionnel
(1).
1- Le caractère exceptionnel de la charge de la
preuve.
En vertu du principe de l'unité des fautes
civile et pénale consacré par l'arrêt BROCHET et DESCHAMPS
du 18 Décembre 1912174, le médecin sur la base des
principes du droit civil peut voir sa responsabilité engagée sur
le plan pénal175. Le principe voudrait que,
conformément aux dispositions de l'article 307 du Code de
Procédure pénale, que << la charge de la
preuve incombe à la partie qui a mis en mouvement l'action publique
».
Toutefois en matière médicale,
l'arrêt HEDREUL a renversé la charge de la preuve, ce qui est une
exception procédurale en matière pénale. Si cette exigence
est bénéfique pour la partie civile ou pour le ministère
public, elle l'est moins pour le médecin qui pour sa défense
pourrait être tenté de violer le secret professionnel.
En outre, cette exigence vient battre en brèche
la présomption d'innocence pourtant consacrée et qui est une
garantie des droits de la défense176, et est d'ordre public.
En effet, apporter la preuve de son innocence à la suite d'une
accusation sans que la partie adverse n'apporte la sienne et se limite aux
seules accusations est une situation difficile pour le praticien.
Le médecin qui se trouve dès lors
poursuivi par son patient est tenu de justifier l'acte qu'il a posé.
L'un des dangers que pourrait présenter la jurisprudence HEDREUL, c'est
une augmentation de poursuites abusives diligentées contre le
médecin, transformant de ce fait l'obligation de moyens à
laquelle il est soumis en une obligation de résultat. Cela pourrait
être une cause de rupture de la relation de confiance entre le
médecin et son patient. Face à cette situation, les
médecins pourraient être amenés à <<
repenser leur éthique professionnelle, à songer
à agir pour se couvrir contre les actions judiciaires, avant d'agir de
la façon la plus efficace pour le malade et la moins coûteuse pour
la société. Les hospitalisations abusives, les
174 Supra.
175 Voir arrêt HEDREUL supra.
176 Art. 8, C.P.P.
examens inutiles et coûteux se multiplieront, entre
deux solutions, le médecin ...choisira la moins dangereuse pour
lui-même, non la meilleure pour le malade
>>177. C'est la raison pour laquelle l'expertise se
révèle indispensable pour établir les
responsabilités.
2- L'expertise, une particularité du
procès pénal.
Le procès qui met en cause le médecin
peut comporter une pluralité d'éléments techniques
difficiles à cerner pour le profane. C'est la raison d'être du
recours à l'expertise. L'expertise peut être définie comme
<< la procédure de recours à un technicien
consistant à demander à un spécialiste, dans le cas oil le
recours à des constatations ou à une consultation ne permettrait
pas d'obtenir les renseignements nécessaires, d'éclairer le
tribunal sur certains aspects du procès nécessitant l'avis d'un
homme de l'art >>.178
Ainsi, dans le souci de la manifestation de la
vérité, le juge d'instruction, toute juridiction de jugement
peuvent ordonner une expertise à la demande du ministère public
soit d'office, soit à la demande des parties. Les modalités de
l'expertise sont contenues dans la Section V intitulée << DE
L'EXPERTISE >> du Chapitre 2, du Titre IV du Livre II du Code de
Procédure pénale. De ces modalités, il ressort que
l'expert est sollicité lorsqu'une question d'ordre technique se pose. La
médecine est un art qui regorge d'une multiplicité d'aspects
techniques. Et lorsqu'un médecin est accusé, le juge ou les
parties ne disposent pas toujours de moyens propres, de connaissances
adéquates pour comprendre les choix du praticien lorsque ce dernier
exerce. De ce fait, les éclaircissements de l'expert s'avèrent
indispensables pour éclairer des faits qui peuvent paraître
incompréhensibles pour le profane.
L'expert dispose de ce fait d'un délai qui lui
est imparti pour effectuer son expertise à l'issue de laquelle il
adresse un rapport en autant d'exemplaires qu'il y a de parties. L'expert
apprécie l'acte posé par le médecin du point de vue
théorique (quant aux textes régissant l'exercice de la profession
de médecin), et du point de vue pratique en s'assurant que le praticien
a administré consciencieusement les soins, conformément aux
données acquises de la science. Il doit dès lors se limiter
à répondre uniquement à la question qui lui a
été posée sans chercher à influencer par son
rapport le cours du procès.
L'expertise peut consister à la pratique d'une
autopsie, des investigations chimiques et
physiques sur les animaux. Elle est menée par un
médecin légiste qui << aura à partir
de
177 AKIDA (M), op.cit., p.394.
178 Cf. lexique de termes juridiques, op.cit., p.
253.
l'autopsie et des différentes investigations
menées, la lourde responsabilité d'établir la
réalité ou la fausseté de certains atteintes telles
:
-les atteintes à la Santé Publique,
-les atteintes à l'intégrité
corporelle >>179.
Bien que le rapport de l'expert apporte un
éclairage sur les questions techniques survenues lors du procès
du médecin, il n'est pas exclu qu'il comporte des insuffisances. En
pratique, ce rapport est déterminant pour la suite du procès ;
d'où la prévision par le législateur des mesures d'
<< expertise complémentaire >> ou
de << contre expertise >>180
afin de ne pas être tenu par l'unique version de l'expert commis en cas
de doute sur son rapport.
Tout comme ces mesures d'expertise
complémentaire et de contre expertise sont venues renforcer la
fiabilité de cette institution, la mise en oeuvre d'autres dispositions
s'avère nécessaire pour garantir l'efficacité de la
justice pénale en matière médicale.
SECTION II : LA NECESSITE DE LA MISE EN OEUVRE DES
DISPOSITIONS APPROPRIEES EN VUE D'UNE
MEILLEURE
PROTECTION DES PATIENTS.
Depuis son accession à l'indépendance,
le Cameroun est tourné vers la modernisation de ses institutions. Les
exemples les plus récents sont d'une part, l'adoption par la loi No
2005/007 du 27 Juillet 2005 portant Code de procédure pénale, et
d'autre part de la loi du 29 Décembre 2006 portant Organisation
judiciaire. Le domaine médical ne devrait pas être en reste quand
on connaît les évolutions spectaculaires dont il est l'objet. La
mise en oeuvre de la responsabilité du médecin connaît des
écueils aux différentes phases de la procédure. Il
s'avère donc nécessaire d'apporter des innovations tant du point
de vue de la procédure de mise en oeuvre de la responsabilité de
ce dernier (paragraphe I), que quant aux autres aspects qui concourent à
la protection des patients (paragraphe II).
179 YOHO Fils (R), op.cit. P.26.
180 Art. 216, C.P.P.
86
88
90
92
Paragraphe I : Les défis relatifs à
la procédure de mise en oeuvre de la responsabilité du
médecin.
Le médecin est un professionnel qui dans
l'exercice de son art fait recours à des techniques et à des
outils complexes. Un auteur a pu écrire qu'un médecin <<
assoupi en 1930, et tiré de sa léthargie en 1960, ne
reconnaît plus rien : les méningites aigues, la méningite
tuberculeuse, les tuberculeuses aigues, les infections générales,
l'endocardite maligne, les bronchopneumonies évoluent vers la
guérison. La maladie d'Addison peut être équilibrée,
l'anémie pernicieuse n'est plus pernicieuse ; les chirurgiens ouvrent
les coeurs et les cerveaux, les hématologistes sauvent les
nouveaux-nés en changeant tout leur sang, les psychiatres devenus
chimistes, corrigent les graves désordres de l'esprit. Les sondes, les
rayons et les microscopes explorent les viscères, les tissus et les
cellules et leurs molécules mêmes
»181.
La constatation de l'infraction causée par le
médecin n'est pas évidente lorsqu'on est profane en la
matière. C'est la raison pour laquelle, étant donné que
les autorités en charge de constater les infractions et d'en
appréhender les auteurs disposent de moyens limités. On pourrait
dès lors envisager leur spécialisation dans la constatation des
infractions en matière médicale (A) ; cette spécialisation
passerait aussi par le recours à l'expertise dès la phase de
l'enquête préliminaire (B).
A- La spécialisation des agents et officiers de
police judiciaire dans la constatation des infractions en matière
médicale.
L'évolution de la société
s'accompagne de l'évolution du phénomène de la
criminalité. Pendant plusieurs siècles, les formes
utilisées par les criminels étaient assez rébarbatives
(pillages, razzias). De nos jours, elles sont plus complexes, plus
sophistiquées à l'exemple du piratage informatique, et sont le
fruit de l'évolution de la science et de la technique. La
médecine n'est pas restée en marge de cette évolution. Des
maladies jadis incurables (peste, syndrome du charbon), on est arrivé
à la réussite des opérations chirurgicales encore
inenvisageables il n'y a pas longtemps. << Le médecin
devient maître de la vie et de la mort : les survies artificielles dues
au progrès de la réanimation remettent en question la
définition même de la mort. Les progrès de la biologie
moléculaire et de la génétique illustrés par
la
181 J. BERNARD cité par AKIDA, op.cit.,
p.51.
découverte de l'A.D.N. font envisager la
possibilité d'une manipulation génétique, source de
grandes espérances, mais aussi de craintes sérieuses. Le
développement de l'immunologie fournit, par le typage des tissus, des
connaissances essentielles pour les transplantations de tissus et d'organes qui
à leur tour soulèvent de nouvelles questions d'ordre social et
éthique. La neurobiologie et la neurochirurgie, la psychiatrie et la
psychopharmacologie susceptibles de modifier le comportement humain,
fournissent un exemple encore plus manifeste du pouvoir qui est
désormais donné à l'homme
>>182.
Face à cet état de choses, les moyens
mis à la disposition des officiers de police judiciaire ont-ils
également augmenté ? Si l'on note l'existence des moyens face
à la lutte contre le grand banditisme, qu'en est-il des infractions
nettement plus subtiles, mais toutes aussi dévastatrices, car portant
atteinte à l'ordre social en général, à
l'intégrité physique et même morale du malade.
Le corps médical n'est pas uniquement
composé de bons professionnels, on y retrouve aussi des individus qui
exercent au mépris des règles fondamentales qui régissent
l'exercice de la profession183. C'est la raison pour laquelle, les
officiers de police judiciaire devraient être spécialisés
dans la constatation de l'infraction en matière médicale en
étant imprégnés des principes et des textes qui
régissent l'exercice de la profession des médecins, de leur Code
de déontologie.
Cette spécialisation des agents et officiers de
police judiciaire pourrait concourir à ramener la phase d'expertise au
niveau de l'enquête préliminaire.
B- Le recours à l'expertise dès la phase de
l'enquête préliminaire.
En occident et dans les pays développés,
les structures de police disposent de leurs propres laboratoires dans lesquels
elles peuvent effectuer différents types d'analyses. Au Cameroun, il
existe un laboratoire de police scientifique et technique situé à
Yaoundé. Cette structure est la seule du genre dans le pays et souffre
d'un manque criard de personnel et de matériel. La spécialisation
des officiers de police judiciaire serait bénéfique si elle
était suivie de la mise sur pied à travers le pays de
laboratoires et de personnels dépendant de la police et dans lesquels
les analyses techniques pourraient être menées si l'infraction
porte atteinte à la vie ou à l'intégrité physique
du patient. La mise sur pied d'une police scientifique
182 M. REVEILLARD, « rapport de synthèse de
Colloque de droit européen sur la responsabilité civile des
médecins >>, cité par AKIDA, op.cit, p.52.
183 Affaire NDEUMENI NOUBEVAN Charles Dechateau,
supra.
contribuerait à ramener l'expertise à la
phase de l'enquête préliminaire, et garantirait des dossiers bien
ficelés à transmettre au juge d'instruction.
L'élucidation des questions techniques
dès la phase d'enquête, qui passerait par la mise à la
disposition dans les structures de police de matériel adéquat
serait une garantie non négligeable de protection des droits du malade,
et un moyen objectif de discernement quant à la continuation ou à
l'arrêt de la procédure.
S'il parait clair que la mise en oeuvre des
dispositions appropriées en vue d'une meilleure protection des patients
passe par les innovations quant à la procédure de mise en oeuvre
de la responsabilité du médecin, il faudrait tout aussi envisager
d'autres innovations.
Paragraphe II : Les autres innovations
envisageables.
Etre comptable du bien-être des êtres
humains, de leur santé et de leur vie est une énorme
responsabilité pour celui qui y est assigné, en l'occurrence le
médecin. De ce fait, des innovations significatives devraient être
opérées au cours de la formation de médecins et dans la
pratique de la médecine au Cameroun (A), tout comme le
législateur gagnerait à créer un cadre propice à la
protection des patients (B).
A- Les innovations propres à la formation des
médecins et à la pratique de la médecine au Cameroun.
La médecine ou l'art de guérir est
enseignée au Cameroun tant dans les institutions universitaires
publiques (Facultés de médecines et de sciences
biomédicales) que privées. Nombreux sont également les
pays étrangers dans lesquels nos médecins vont se former. Bien
qu'il s'avère impérieux d'améliorer les conditions de
travail de nos praticiens (2), il est déplorable de savoir que dans la
formation locale, << le droit humain »184 soit
insuffisamment enseigné (1).
1- L'enseignement du « droit humain
» dans les facultés de médecine.
Dans sa politique de formation des médecins,
l'Etat doit former plus et mieux les
praticiens. Le nombre des médecins étant
très réduit, on compte au Cameroun un médecin
184 ELONG NGONO (S), << Droits des malades, devoirs
des médecins », op.cit.
pour 10 000 habitants. De ce fait, le nombre de
médecins doit être accru. Bien que les facultés de
médecine aient été créées dans plusieurs
universités d'Etat, le constat qui se dégage et qu'il faudra
attendre plusieurs années pour avoir des médecins
opérationnels, et plus d'années encore pour que la moyenne soit
conforme aux exigences de l'Organisation Mondiale de la Santé
(OMS).
En outre, un accent particulier devrait être mis
sur la formation des médecins qui s'avère lacunaire. Lorsqu'il
est opérationnel, le médecin doit assurer la continuation de sa
formation universitaire, doit sans cesse se recycler. En effet, <<
l'enseignement de la médecine légale n'est pas
suffisamment dispensé dans nos facultés et écoles de
médecine >>185.
Dans le quotidien national Cameroon Tribune du 20
Novembre 2007, M. MUNA, président du Conseil de l'Ordre national des
médecins du Cameroun a formulé des blâmes à
l'encontre de plusieurs de ses confrères. Ces sanctions avaient pour
cause : la survenance des résultats fatalement imprévus au cours
d'une intervention chirurgicale et, la délivrance de certificats
médicaux complaisants. Les auteurs de ces méfaits
connaissaient-ils les dispositions légales qui encadraient leurs
agissements ? Comment peut-on savoir délivrer un certificat
médical alors qu'on ne l'a pas appris et qu'on n'en connaît pas
les dispositions légales ? Bien sûr, l'article 75 du Code
pénal Camerounais dispose que nul n'est censé ignorer la
loi.
De ce qui précède, il ressort qu'au
Cameroun, les médecins ne sont pas suffisamment formés quant en
ce qui concerne le domaine de leur responsabilité, et notamment les
dispositions légales qu'ils devraient respecter dans l'exercice de leur
profession. Un accent devrait dès lors être mis sur ces
différents aspects au courant de leur formation. Mais ne perdons pas de
vue que l'efficacité de la médecine passe aussi par
l'amélioration des conditions de travail des
médecins.
2- L'amélioration des conditions de travail des
médecins.
La médecine telle que pratiquée par
HIPPOCRATE et telle que présentée dans son très
célèbre serment s'apparente à un sacerdoce. La vie des
patients et leur bien-être devrait primer sur l'appât du gain ; le
médecin ne devrait pas se livrer à ce que la jurisprudence
française qualifie de << médecine en
série >>186.
185 ELONG NGONO, << Devoirs de médecins
>>, op.cit.
186 Tribunal correctionnel de Marseille, 24
Février 1977, G.P. 1978.1.79, note P.J. DOLL.
Parce que << le médecin n'a
que des devoirs vis-à-vis du malade >>187,
il faudrait que la société pour laquelle il travaille
améliore ses conditions de travail en le protégeant contre les
actes de ceux qui peuvent nuire à ses devoirs. De ce fait, le
médecin Camerounais devrait être exempté d'un certain
nombre de servitudes, en l'occurrence, les barrages routiers sur son
itinéraire professionnel, les pénalités de stationnement
en cours d'activités, ou encore des contraintes de péage en
mission sanitaire.
Si les garanties de l'efficacité de la
médecine au Cameroun passent par les innovations dans la formation des
médecins et dans l'amélioration de leurs conditions de travail,
la mise en place d'un cadre propice en vue de la protection des patients
s'avère opportune.
B- La mise en place d'un cadre propice en vue de la
protection des patients.
Le patient qui se rend dans un centre hospitalier a
pour souci premier la quête de la guérison, du soulagement. Il se
confie dès lors entièrement au corps médical dont
l'accueil, selon qu'il est professionnel ou pas est déterminant pour la
suite du traitement de celui-ci. Ils sont nombreux les médecins qui au
Cameroun ne connaissent pas les textes qui régissent leur profession.
C'est la raison pour laquelle la création d'un corps de règles
à l'exemple d'un Code de la Santé publique semble être plus
qu'impératif (1), bien que pour l'heure, le problème qui se pose
avec acuité est celui de l'assainissement des comportements dans nos
hôpitaux (2).
1- La mise sur pied d'un Code de la Santé
Publique.
Le caractère épars des textes relatifs
à la santé publique dans un pays qui connaît une inflation
législative ne contribue pas à encourager les usagers et
même les professionnels à les connaître. La mise sur pied
d'un Code de la Santé Publique qui contiendrait tous les textes
régissant l'organisation, le fonctionnement du corps médical
s'avère nécessaire. Un tel instrument serait d'une grande
utilité pour le citoyen qui pourrait s'en imprégner, et surtout
pour les médecins car il constituerait un code de conduite plus
complet.
Si la mise en place d'un Code de la Santé
Publique s'avère indispensable, une politique d'assainissement et de
réglementation des pouvoirs publics des comportements dans les
hôpitaux serait d'un très grand intérêt.
187 ELONG NGONO, << Devoirs de médecin
>>, op.cit.
2- La nécessité d'assainir les
comportements et la réglementation dans les hôpitaux.
L'accès aux soins dans les
établissements hospitaliers est soumis à une pluralité
d'exigences pour le patient. Il faut s'acquitter de ses frais de consultations
ou les honoraires des médecins lorsqu'ils exercent en clientèle
privée. A côté de ces exigences se sont greffés dans
la pratique hospitalière camerounaise des comportements aussi
déplorables les uns que les autres. Il s'agit en l'occurrence du
phénomène de corruption qui a cours dans ces structures
(monnayage divers pour rencontrer le praticien, abandon des malades indigents,
vol de médicaments, recommandations chez des pharmaciens pour l'achat
des médicaments, vente des médicaments par les
infirmières). C'est la raison pour laquelle pour une meilleure
qualité de soins, il serait important de procéder à
l'organisation des contrôles à propos de la qualité des
soins dans les hôpitaux. Ces contrôles pourraient être faits
par des agents du Ministère de la Santé Publique ou par voie de
sondage sur les usagers, et dont les résultats seraient rendus
publics.
Bien que salutaire, cette mesure gagnerait à
être appréciée par les usagers eux-mêmes par la
création au sein des établissements hospitaliers, à
l'exemple des cellules anticorruption érigées dans les
différents ministères, des cellules de protection des droits des
patients qui auraient pour rôle de recenser les plaintes des patients
suite aux mauvais traitements dont ils auraient pu être victimes, et
s'assurer que ces derniers rentrent dans leurs droits.
En définitive, parce qu'il comporte une
pluralité d'aspects techniques, la procédure de mise en oeuvre de
la responsabilité pénale du médecin est complexe. Elle est
similaire que toutes les procédures en matière pénale en
tant qu'elle va de la constatation de l'infraction au prononcé du
jugement en passant par la phase d'information. Il faut rappeler que face
à la complexité de l'établissement des faits, il est
souvent fait recours à l'expertise. L'expertise a pour but d'apporter
des éclaircissements face à une question technique qui survient
au courant de la procédure. Toutefois, il s'avère
nécessaire de mettre en oeuvre un cadre approprié en vue de la
protection du patient. Cela passe par les innovations dans le domaine la
procédure de mise en oeuvre de la responsabilité pénale du
médecin. Il s'agit notamment de la spécialisation des officiers
de police judiciaire dans la constatation des infractions en matière
médicale, et du recours à l'expertise à la phase de
l'enquête préliminaire. Quant aux autres innovations
envisageables, elles devraient s'appesantir sur la formation continue des
médecins,
notamment, dans son aspect pratique ; d'où la
nécessité de mettre en place un cadre propice de protection des
droits des patients dans nos centres hospitaliers.
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE.
De l'analyse menée sur la mise en oeuvre de la
responsabilité pénale du médecin traitant, il ressort que
c'est un domaine au Cameroun qui est caractérisé non seulement
par les difficultés dont il fait l'objet, mais également par une
pluralité d'aspects techniques, ce qui complexifie la
procédure.
En effet, les obstacles qui surviennent peuvent
être de deux ordres. Soit ils sont propres à l'environnement
camerounais, soit ils sont relatifs aux difficultés liées
à l'établissement de la preuve. Les réalités
culturelles et socio-économiques, ainsi que les obstacles d'ordre
juridique sont autant de freins qui dans une mesure atténuent
l'initiative des patients à établir la responsabilité de
leur médecin traitant. D'un autre côté,
l'établissement hospitalier est garant de la protection des informations
mises à sa disposition par les patients. Tl les consigne dans des
dossiers médicaux. Sa connaissance ne peut être transmise aux
tiers que dans des conditions strictement limitées, qui ne
préjudicient pas au patient. Cette protection rend difficile
l'établissement de la preuve. Pour pallier cet obstacle, la Cour de
Cassation a, dans l'arrêt dit HEDREUL, rendu en 1997 renversé la
charge de la preuve en matière médicale.
En outre, s'agissant de la complexité de la
procédure, elle est due à la spécificité des
étapes qui interviennent dans la mise en oeuvre de la
responsabilité pénale du médecin traitant. En effet,
l'intervention des aspects techniques aux divers stades de la procédure
fait qu'il n'est pas aisé pour le profane d'établir qu'un
médecin a, dans l'exercice de ses fonctions commis une faute. C'est la
raison pour laquelle le législateur a institué l'expertise, dont
le but est de répondre aux questions d'ordre technique qui sont
soulevées tout au long de la procédure.
Mais, face au caractère embryonnaire de la
responsabilité pénale du médecin au Cameroun, il est
nécessaire de mettre en place des dispositions visant à assurer
une meilleure protection des patients. Ces innovations devraient être
engagées d'abord au niveau de la procédure de mise en oeuvre de
la responsabilité pénale, ensuite au niveau de la formation des
médecins et de la pratique de la médecine au Cameroun, et enfin
dans la mise en place d'un cadre propice de protection des droits du
patient.
94
CONCLUSION GENERALE.
En définitive, de la réflexion portant
sur la responsabilité pénale du médecin traitant dans le
système pénal camerounais, un constat se dégage : le temps
est révolu où Montaigne pouvait écrire que «
les médecins ont le gros avantage que leurs échecs
sont sous terre et que leurs succès se promènent au
soleil ». Au Cameroun, le médecin, dans l'exercice de
sa profession doit respecter la loi auquel cas, il s'expose à des
poursuites judiciaires.
L'appréciation de la responsabilité
pénale du médecin traitant exige qu'on puisse au préalable
cerner son étendue. Le médecin est un professionnel dont la
mission est de procurer la guérison à ses patients. De ce fait,
la loi lui permet de transgresser certaines règles, si son acte vise un
but thérapeutique. C'est ce qui rend incertains les contours de la
responsabilité pénale de ce dernier. En effet, si la commission
d'une faute est l'élément indispensable pour engager la
responsabilité du praticien, il faut néanmoins que cette faute
ait causé un préjudice, et qu'elle soit établie par
l'existence d'un lien de causalité : l'arrêt MERCIER a posé
les fondements de la relation médecin-patient comme issue d'un lien
contractuel. Toutefois, certains actes constitutifs de faute posés par
le médecin l'exonèrent de sa responsabilité. Ces actes
peuvent être commis de façon volontaire par le praticien, ou
échapper à sa liberté d'appréciation. En vertu de
la protection faite par la loi à l'homme de l'art, il peut voir sa
responsabilité renforcée eu égard à son statut
juridique. Il doit de ce fait se soumettre à ses obligations
éthiques et déontologiques dont la violation de certaines d'entre
elles connaît une répression sur le plan pénal. Il en est
ainsi du secret médical qui est en même temps un engagement
déontologique et une infraction au sens de l'article 310 du Code
pénal.
Le risque est inhérent dans la pratique de la
médecine. C'est la raison pour laquelle un acte positif posé par
le praticien peut avoir des conséquences dramatiques, tout comme son
abstention à agir. C'est ainsi que dans l'exercice de son art, le
professionnel peut porter atteinte à l'intégrité physique
et morale du patient, ainsi que se heurter à des principes
éthiques et déontologiques. Tous ces éléments
lorsqu'ils sont établis, rendent le médecin
responsable.
Toutefois, il n'est pas aisé de mettre en
oeuvre la responsabilité pénale du médecin. En vertu de la
pluralité des aspects techniques qui la caractérise, c'est une
procédure qui se heurte à plusieurs types d'obstacles qui sont
soit précontentieux, soit, ils surviennent tout au long de la
procédure.
En ce qui concerne les difficultés
précontentieuses, elles sont de plusieurs types. D'une
part, elles sont propres à l'environnement
camerounais. A côté des réalités culturelles
qui
occupent une place importante dans le quotidien des
populations, il y a également le phénomène de
pauvreté qui ne permet pas la protection efficace des droits des
justiciables. La promulgation d'une loi sur l'assistance judiciaire permettra
certainement aux justiciables indigents de se faire rendre justice.
L'institution qu'est l'assistance judiciaire mériterait toutefois
d'être vulgarisée afin de toucher ceux à qui elle est
destinée, à savoir les pauvres.
D'autre part, le point épineux dans la
procédure de mise en oeuvre de la responsabilité pénale du
médecin a de tout temps été celui de la preuve. Comment un
profane peut-il porter des accusations contre un professionnel qui
connaît mieux que quiconque le fonctionnement du corps humain et qui
connaît les secrets de la vie et de la mort ? Ce d'autant que l'outil
crucial dans l'apport de la preuve n'est pas toujours à la portée
des tiers : le dossier médical. On retiendra que l'arrêt HEDREUL
de 1997, rendu par la Cour de Cassation a facilité la tâche au
patient et à ses ayants droit en renversant la charge de la preuve en
matière médicale. Dorénavant, c'est au médecin
qu'il incombe d'apporter la preuve qu'il a agi en bon
professionnel.
En ce qui concerne la procédure de mise en
oeuvre de ladite responsabilité, elle est très complexe car, elle
fait intervenir des étapes spécifiques. Ces étapes se
justifient par la nécessité d'éclaircir des questions
d'ordre technique qui peuvent ombrager la procédure. Le statut de
professionnel du médecin ne permet pas toujours au juge
d'apprécier l'opportunité de l'acte posé par le praticien.
C'est la raison pour laquelle l'expertise est une mesure importante en ce sens
qu'elle permet de répondre aux questions d'ordre technique qui
pourraient intervenir tout au long de la procédure, et contribue ainsi
à la manifestation de la vérité.
C'est la raison pour laquelle, il faudrait envisager
la mise en place des dispositions appropriées en vue d'une meilleure
protection des patients. Cela passe d'une part, par des innovations quant
à la procédure de mise en oeuvre de la responsabilité
pénale du médecin. Il s'agit notamment de la
spécialisation des agents et officiers de police judiciaire dans la
constatation des infractions en matière médicale, et du recours
à l'expertise dès la phase de l'enquête
préliminaire. D'autre part, il faudrait améliorer la formation
des médecins, ainsi que les conditions de la pratique de la
médecine au Cameroun. La mise sur pied d'un cadre propice en vue de la
protection des patients s'avère nécessaire. Pour y parvenir, il
serait impérieux d'adopter un Code de la santé publique, et
surtout, d'assainir les comportements et la réglementation dans nos
hôpitaux. La protection de la vie et surtout, une bonne prise en charge
des patients sont à ce prix.
96
De ce fait, si le médecin est le principal mis
en cause à l'issue de la survenance d'un préjudice
résultant de l'acte médical, cette faute ne peut t-elle provenir
d'un acteur étranger à l'acte médical, à l'exemple
du fabricant de médicament ?
BIBLIOGRAPHIE
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4e édition, Paris, Montchrestien, 1997, 272
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II- OUVRAGES SPECIALISES
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chirurgie, éd. L.G.D.J 1986, 495 pages
2. PENNEAU (J), LA RESPONSABILITE DU
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3. SERIAUX (A), NEIRINCK (C), LABRUSSE-RIOU(C),
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en matière répressive au Cameroun », mémoire de
maîtrise de Droit privé, Septembre 1986, Université de
Yaoundé, Faculté de Droit et Science Economique.
V- TEXTES JURIDIQUES
1. Loi No 96-06 du 18 Janvier 1996 portant
révision de la Constitution du 2 Juin 1972.
2. La Déclaration Universelle des Droits de
l'Homme du 10 décembre 1948.
3. La Charte Africaine des Droits de l'Homme et des
Peuples.
4. La Convention des Nations Unies relative aux Droits
de l'enfant de 1989.
5. Protocole à la Charte Africaine des Droits de
l'Homme et des Peuples, relatif aux droits de la femme en Afrique adopté
à Maputo (Mozambique) le 11 Juillet 2003.
6. Loi No 65-DF-24 du 12 Novembre 1965
portant Code pénal Camerounais.
7. Loi No 90-36 du 10 Août 1990
relative à l'exercice de la profession de médecin au
Cameroun.
8. Loi N° 2003/014 du 22 Décembre 2003
portant sur la transfusion sanguine.
9. Loi No 2005-007 du 27 Juillet 2005 portant
Code de procédure pénale.
10. Loi No 2009/003 du 14 Avril 2009
autorisant le Président de la République à ratifier le
Protocole à la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples,
relatif aux droits de la femme en Afrique adopté à Maputo
(Mozambique) le 11 Juillet 2003.
11. Loi No 2009/004 du 14 Avril 2009 portant
organisation de l'assistance judiciaire.
12. Code de Santé Publique de la
République de France.
13. Code Civil applicable au Cameroun.
14. Décret No 78-480 du 8 Novembre
1978 fixant les modalités et la procédure du contrôle
médical et d'expertises médicales.
15. Décret No 83-166 du 12 Avril 1983
portant Code de déontologie des médecins du Cameroun.
16. Décret No 92-265-Pm du 22 Juillet
1992 fixant les modalités d'application de la Loi No 90-36 du
10 Août 1990.
VI- DICTIONNAIRES, ENCYCLOPEDIE ET LEXIQUE
1. Nouveau Dictionnaire juridique, édition
Presses Universitaires Libres, 2008, 216 pages.
2. Petit LAROUSSE ILLUSTRE 2005.
3. Encyclopédie DALLOZ, Droit Pénal III
J-Z.
4. Lexique des termes juridiques, 13e
édition, DALLOZ, 2001.
VII- SITES INTERNET VISITES
·
www.google.fr
·
www.googlescholar.com
·
www.courdecassation.fr
·
www.chu-rouen.fr
·
www.assembleenationale.cm
·
www.prc.cm
·
www.belsurg.org
ANNEXES
· Annexe I : Serment d'HIPPOCRATE.
· Annexe II : Loi No 90-36 du
10 Août 1990 relative à l'exercice de la profession de
médecin au Cameroun.
· Annexe III : Décret No
92-265-PM du 22 Juillet 1992 fixant les modalités d'application de la
loi No 90-36 du 10 Août 1990 relative à l'exercice et
à l'organisation de la profession de médecin.
· Annexe IV : Décret No
83-166 du 12 Avril 1983 portant Code de déontologie des médecins
du Cameroun.
· Annexe V : Arrêt HEDREUL
(Cassation Civile 1ère, Arrêt no 426, 25
Février 1997).
· Annexe VI : Affaire ministère
public et NKOUOMO Charles Séraphin contre NDEUMENI NOUBEVAN Charles
Dechateau, jugement No 223/Crim. Du 23 Décembre 2004.
ANNEXE I
Serment d'Hippocrate
Traduction de Littré.
"Je jure par Apollon medecin, par Esculape, Hygie et Panacee,
par tous les dieux et toutes les deesses, et je les prends à temoin que,
dans la mesure de mes forces et de mes connaissances, je respecterai le serment
et l'engagement ecrit suivant :
Mon Maître en medecine, je le mettrai au même rang
que mes parents. Je partagerai mon avoir avec lui, et s'il le faut je
pourvoirai à ses besoins. Je considererai ses enfants comme mes
frères et s'ils veulent etudier la medecine, je la leur enseignerai sans
salaire ni engagement. Je transmettrai les preceptes, les explications et les
autres parties de l'enseignement à mes enfants, à ceux de mon
Maître, aux elèves inscrits et ayant prêtes serment suivant
la loi medicale, mais à nul autre.
Dans toute la mesure de mes forces et de mes connaissances, je
conseillerai aux malades le regime de vie capable de les soulager et
j'ecarterai d'eux tout ce qui peut leur être contraire ou nuisible.
Jamais je ne remettrai du poison, même si on me le demande, et je ne
conseillerai pas d'y recourir. Je ne remettrai pas d'ovules abortifs aux
femmes.
Je passerai ma vie et j'exercerai mon art dans la purete et le
respect des lois Je ne taillerai pas les calculeux, mais laisserai cette
operation aux praticiens qui s'en occupent. Dans toute maison où je
serai appele, je n'entrerai que pour le bien des malades. Je m'interdirai
d'être volontairement une cause de tort ou de corruption, ainsi que toute
entreprise voluptueuse à l'egard des femmes ou des hommes, libres ou
esclaves. Tout ce que je verrai ou entendrai autour de moi, dans l'exercice de
mon art ou hors de mon ministère, et qui ne devra pas être
divulgue, je le tairai et le considererai comme un secret.
Si je respecte mon serment sans jamais l'enfreindre, puis-je
jouir de la vie et de ma profession, et être honore à jamais parmi
les hommes. Mais si je viole et deviens parjure, qu'un sort contraire m'arrive!
"
www.chu-rouen.fr/documed/serment.html
-
ANNEXE II
République du Cameroun
Loi relative à l'exercice et à
l'organisation
de la profession de médecin
Loi N° 90-36 du 10 août
1990
Loi N° 90-36 du 10 août
1990
Relative à l'exercice et à l'organisation
de la Profession de Médecin
Article premier.-- La présente loi et les textes
pris pour son applicationréglemententl'exercice et l'organisation de la
profession de médecin.
Titre premier - De l'exercice de la Profession
Chapitre premier - Des conditions d'exercice de la
profession de médecin
Art. 2. -- (1)Nul ne peut exercerla professionde
médecin au Cameroun s'il n'est inscrit au tableau de
l'Ordre.
(2) Toutefois, peutexercerla professionde médecin
au Cameroun, le praticien de nationalité étrangère
remplissant les conditions supplémentaires suivantes:
- être ressortissant d'un pays ayant signé
un accord de réciprocité avec le Cameroun;
- n'avoir pas été radié de l'Ordre
dans son pays d'origine ou dans toutautre pays où il aurait
exercé auparavant;
- être recruté sur contrat ou en vertu
d'un accord de coopération pour le compte exclusif de l'administration,
d'un Ordre confessionnel ou d'une O.N.G. (Organisationnon gouvernementale)
à but non lucratif;
- servir pour le compte d'une entreprise privée
agréée.
Art. 3. --L'accomplissement d'actes professionnels
à caractèreadministratif et judiciaire, la rédaction et la
délivrancedes documents yafférents sont assurés par le
médecin,soit dans l'exercice normalde ses fonctions,soit en
exécution d'une mission spéciale dont il est chargé. Il
est
tenu à cet égard de déférer
à toute réquisition qui peut lui être
décernée.
Art. 4. -- Le médecin en service dans
l'administration ou dans le secteur privé est soumis : - au secret
professionnel;
- au Code de déontologie de
laprofessionadopté par "Ordre Nationaldes Médecins puis
approuvé par
l
l'autorité de tutelle ;
- aux dispositions statutaires de l'Ordre.
Chapitre II. - De l'exercice de la Profession
clientèle privée Section I. - Des conditions
d'exercice
Art. 5. -- (1) L'exercice de la professionen
clientèle privée est soumiseà une autorisation
délivrée par le Conseil de l'Ordre dans les conditions et
modalités fixées par la présente loi.
(2) Le Conseil de l'Ordre statue égalementsur
les demandesde remplacement temporaire, de changement derésidence
professionnelle oud'aire géographique d'activité,de reprise
d'activité après interruption à la suite d'une sanction
disciplinaire, dans des conditions fixées par voie
réglementaire.
(3) Les autorisations accordées parle Conseil de
l'Ordre doivent être, conformesà la carte sanitaire établie
par voie réglementaire.
Toute autorisation accordée en violation de la
carte sanitaire est nulle et de nul effet.
Art. 6. -- Nul ne peut exercer la profession de
médecin en clientèle privée s'il ne remplit les conditions
suivantes:
- être de nationalité Camerounaise et jouir
de ses droits civiques;
- être inscrit au tableau de l'Ordre;
- justifier de cinq (5) années de
pratiqueeffective auprès d'une administrationpubliqueou d'un organisme
privé à l'intérieur du territoire national ou à
l'étranger;
- produire une lettre d'accord de principe de
libération lorsqu'il occupe un emploi salarié ou est assistant
d'un confrère exerçant en clientèle
privée;
- être de bonne moralité;
- produire une police d'assurance couvrant des risques
professionnels;
- avoir payé toutes ses cotisations à
l'Ordre.
Art. 7. -- Sauf conventionde réciprocité,
le médecinde nationalité étrangère ne peut exercer
à titre privé au Cameroun.
Art. 8. -- (1) Les demandesd'agrémentsont
déposées en double exemplaire au Conseil de l'Ordre contre
récépissé.
(2) Le Conseil de l'Ordre est tenu dese prononcersur le
dossier dont il est saisi dans un délai de trente (30) jours à
compter de la date de dépôt de celui-ci.
(3) La décision du Conseil de l'Ordre est soumise
à l'approbation préalable de l'autorité de tutelle
dès le premierjour ouvrable suivant cettedécision.
L'autorité de tutelle disposed'un délai de trente(30) jours pour
se prononcer.Passé ce délai, la décision du Conseil de
l'Ordre devientexécutoireet doit être notifiée au
postulant.
(4) Dans tous les cas, passé un délai
de quatre-vingt-dix(90) jours à compterdu dépôtdu dossier,
le silence gardé par le Conseil de l'Ordre vaut acceptationde la
demandedu postulantqui peut s'installer.
(5) Toute décision de rejet doit être
motivée.
Art. 9. -- (1) Les décisionsdu Conseil de
l'Ordre rendues sur les demandes d'agrément peuvent,dans les trente(30)
jours de leur notification, être frappéesd'appel devant la
Chambred'appel du Conseil de l'Ordre par le postulants'il s'agit d'une
décision de rejet ou par tout membrede l'Ordre ayant
intérêt pour agir s'il s'agit d'une décision
d'acceptation.
L'appel n'a pas d'effet suspensif sauf lorsqu'il s'agit
d'une décision d'acceptation.
(3) La Chambre d'appel doit seprononcerdansun
délai de deux (2) mois à compter de la saisine. Ses
décisions sont notifiées dans les formes prévuespar la
présente loi et ne sont susceptiblesde recours que devant la Cour
suprême, dans les formes de droit commun.
(4) Passé le délai de deux (2) mois, le
silence gardépar la Chambre d'appel vaut décision favorable
à la demande du postulant.
Art. 10. -- (1) Un cabinet ou uneclinique ne peut
resterouvert en l'absence de son titulaire que si ce dernier s'est fait
régulièrement remplacer.
(2) En cas d'empêchement,le médecin peut se
faire remplacer auprès de sa clientèle soit par un
confrère exerçant en clientèle privée, soit par un
médecin assistant.
Le Conseil de l'Ordre en est immédiatement
informé.
(3) La durée normale d'un remplacementne
peutexcéder un (1)an ; sauf cas de force majeure où elle est
portée à deux (2) ans renouvelable une fois.
Art. 11. -- (1) Le médecin peut se faire assister
par un ou plusieurs confrères.
(2) La rémunération du médecin
assistant est fixée d'accord parties. Le Conseil de l'Ordre en est
informé.
Art. 12. -- En cas de décès d'un
praticien installé en clientèle privée, le délai
pendant lequel ses ayants droit peuventmaintenir le cabinet en activité
en le faisant gérer par un remplaçant ne peut excéder cinq
(5) ans, renouvelable une fois.
Si au cours de la périodesusvisée, l'un des
enfantsdu défuntse trouve engagé dans des études de
médecine, ce cabinet peut lui être
réservé.
Les modalités de remplacement sont les mêmes
quecelles prévues pour l'agrément à l'exercicede la
profession en clientèle privée.
Section II. - Des incompatibilités
Art. 13. -- Sous réserve des textes
particuliers, l'exercice de la profession de médecin en clientèle
privée est incompatible avec la qualité de fonctionnaire,d'agent
contractuel de l'administrationen activité ou de salarié en
général.
Section III. - Les sociétés civiles
professionnelles de médecins
Art. 14. -- Les médecins installés en
clientèleprivée dansunemême localité peuvent
s'associer entre eux, et exercer leur profession sous forme de
société civile professionnelle dont l'organisation et le
fonctionnement sont fixés par des textes particuliers.
Section IV. - De l'obligation d'assurance
Art. 15. -- (1) Le praticien ou la
société civile professionnellede médecinsest tenu de
souscrire auprès d'une compagnie d'assurances agréée une
police destinée à couvrir ses risques professionnels. Quittance
en est remise au Conseil de l'Ordre au début de chaque année
civile.
(2) Le défaut de police d'assurance
entraîne,à la diligence du Conseil de l'Ordre ou de
l'autorité de tutelle saisie à cet effet, la
fermeturetemporairede l'établissement. Celui-ci ne peut être
réouvert qu'une fois que la quittance justifiant du paiement de la
police d'assurance est présentée.
Chapitre III. - De l'exercice illégal de la
profession de médecin
Art. 16. -- Est reconnu coupable d'exercice
illégal de la médecine:
1 - Tout praticien qui exerce son art sous un pseudonyme
ou qui donne des consultations dans des locaux à usage commercial
où sont vendus des appareils qu'il prescrit ou utilise;
2 - Toute personne non habilitée qui,même
enprésence d'un praticien, prend part habituellement ou par direction
suivie, à l'établissement de diagnostics ou aux
traitementsd'affections par actes professionnels, consultations ou par tous
autres procédés:
3 - Tout praticien qui exerce son art en infraction aux
dispositionsde l'article deux (2) ci-dessus ou qui prête son concours aux
personnes non habilitées;
4 - Tout praticienqui exerce son art en dépitd'une
peined'interdiction temporaire ou définitive dont il est
l'objet.
Art. 17. -- (1) Sans préjudice des sanctions
administratives, disciplinaires ou pénales plus sévères,
toute personne reconnuecoupable d'exercice illégalde la profession de
médecin est passibled'un emprisonnement de six (6) jours à six
(6) mois et d'une amende de 200 000 à 2 000 000 de F ou de l'une de ces
deux peines seulement.
2) Le tribunal peut, le cas échéant,
prononcer la confiscation du matériel ayant servi à la commission
de l'infraction et la fermeture de l'établissement.
(3)Toute personne reconnue coupabled'infraction
à la présenteloi cesse immédiatement son activité.
En outre, la fermeture de son cabinet ou de sa clinique peut être
ordonnée par le Conseil de l'Ordre indépendamment de toute
décision judiciaire.
Art. 18. -- Le Conseil de l'Ordre peut saisir la
juridiction d'instruction ou la Juridiction de jugement ou le cas
échéant, se constituer partiecivile dans toute poursuite
intentée par le ministère public contre toute personne
inculpée ou prévenue d'exercice illégal de la profession
de médecin.
Titre II. - De l'ordre national des médecins
Art. 19. -- L'Ordre National des Médecins
ci-après également désigné l'Ordre, institué
par l'article 1er de la loi n° 80-07 du 14 juillet 1980 comprend
obligatoirement tous les médecins exerçant au
Cameroun.
Art. 20. -- (1) L'Ordre veille au maintiendes principesde
moralité et de dévouement indispensables à l'exercice de
la profession de médecin, ainsi qu'au respect des règles
édictées par le Code de déontologie.
(2) L'Ordre exerce également toute attributionqui
peutlui être confiée par la présente loi ou par des textes
particuliers.
(3) L'Ordre est doté de la personnalité
juridique. Son siège est fixé à
Yaoundé.
Il est placé sous la tutelle de l'autorité
responsable des services de la Santé publique.
Chapitre premier. - De l'organisation de l'ordre
national des médecins
Art. 21. -- L' Ordre accomplit sa mission et exerce ses
attributions par l'intermédiaire des deux organes suivants:
- l'Assemblée générale;
- le Conseil.
Section I. - De l'Assemblée
Générale
Art. 22. -- (1) L'Assemblée générale
est constituéede tous les médecins inscrits au tableau de
l'Ordre.
(2) Elle se réunittous les ans en session
ordinairesur convocationde son président,et le cas
échéant, en session extraordinaire à la demande soit de la
majorité absolue de ses membres, soit du Conseil de l'Ordre ou de
l'autorité de tutelle pour:
- élire les membres du Conseil de
l'Ordre;
- élire six membres pour la Chambre
d'appel;
- statuer sur le rapport d'activités du
président du Conseil de l'Ordre;
- fixer les orientations susceptibles d'assurer la bonne
marche de la profession;
- adopter le Code de déontologie de la profession
et le règlement intérieur de l'Ordre.
(3) L'Assemblée générale
élit le Présidentde l'Ordre et un Commissaire auxcomptes pourun
mandat de trois (3) ans. Ils sont rééligibles.
Art. 23. -- (1) L'ordre du jour des sessions de
l'Assemblée généraleporte exclusivementsur les questions
relatives à l'exercice de la profession. Il est établi par le
Présidentdu Conseil de l'Ordre qui peutêtre saisi un mois avant la
session, des questions émanant soit des membres de l'Ordre, soit de
l'autorité de tutelle.
(2) L'ordre du jour de toute session de
l'Assemblée généraleest communiqué quinze (15)
jours au moins avant la date de la session à l'autorité de
tutelle qui se fait représenter aux travaux de l'Assemblée
générale.
(3) L'autorité de tutelle peut interdire la tenue
d'une session ordinaire ou extraordinaire de l'Assemblée
générale si l'ordre du jour n'a pas été conforme
aux dispositions de l'alinéa qui précède.
Art. 24. -- L'organisation et le fonctionnementde
l'Assemblée générale sont définis par le
règlement intérieur.
Section II. - Du Conseil de l'Ordre
Art. 25. -- (1) Le Conseil de l'Ordre est l'organe
exécutif de ce dernier.Il comporte12 membres élus pour 3 ans dans
les proportions suivantes:
- quatre membres de la division A élus et un
suppléant (fonctionnaires).
- quatre membres de la division B élus et un
suppléant (privés laïcs).
- quatre membres de la division C élus et un
suppléant (privés confessionnels).
(2) Sont électeurs et éligibles tous les
médecins inscrits au tableau de l'Ordre. Les membresdu Conseil de
l'Ordre sont rééligibles.
(3) Les modalités pratiquesde l'organisation des
élections des membresdu Conseil, et les règles relatives à
leur remplacement en cas de défaillance sont fixées par le Code
de déontologie.
Art. 26. -- Outre le Présidentélu en
Assemblée générale,le Conseil de l'Ordre élit en
son sein pour un mandat de trois (3) ans un bureau comprenant:
- un Vice-Président;
- un Secrétaire Général;
- un Trésorier.
Art. 27. -- (1) Après élection, le
procès-verbal est notifié dès le premier jour
ouvrablesuivantcelle-ci à l'autorité de tutelle.
(2)Les contestations concernant les élections
peuvent être déférées à la Chambre
administrative de la Cour suprême, par tout médecin ayant droit
devote, dans un délai de quinze (15) jours suivant le scrutin.
L'autorité de tutelle doit en être informée.
Art. 28. -- La qualité de membre du Conseil de
l'Ordre cesse :
1. En fin de mandat;
2. En cas d'absence non justifiée à trois
(3) réunions consécutives du Conseil de l'Ordre;
3. En cas d'invalidité permanente ou de
décès;
4. En cas de démission dûment
constatée ;
5. En cas de radiation du tableau de
l'Ordre.
Art. 29. -- Le Conseil de l'Ordre ne peut
valablementdélibérer qu'en présence des 3/5 de ses
membres. Ses sessions sont présidées par son Président ou,
encas d'empêchement et dans l'ordre ciaprès, par le
Vice-Président ou le doyen des membres du Conseil de
l'Ordre.
Art. 30. -- (1) Le Conseil de l'Ordre se réunit
deux (2) fois par an en session ordinaire sur convocationde son
Président. Il peut en cas de besoin, se réunir en session
extraordinaire,soit sur sa propre initiative, soit à la demandede la
moitié au moins de ses membres ou de celle de l'autorité de
tutelle.
(2) Le Président détermine les date, lieu
et heure des réunions.
(3) Chaque membredu Conseil de l'Ordre a le droit de
vote. Les décisions du Conseil de l'Ordre sont prises à la
majorité simple des membres présents.
(4) Les délibérations du Conseil de
l'Ordre ne sont pas publiques.
Toutefois, le Président peut inviter toute
personne de son choix en raison de ses compétences, à prendre
part aux délibérations du Conseil de l'Ordre avec voix
consultative.
Art. 31. -- (1) Dans le cadre des dispositions des
articles 20, alinéas 1 et 2 et 21 ci-dessus, le Conseil de l'Ordre
:
- statue sur les demandes d'inscription ou de
réinscription au tableau et sur l'élection de ses membres; -
agrée les demandesd'exercice de la profession en clientèle
privée ainsi que les demandes d'établissement, de remplacement
temporaire,de changement de résidence professionnelle ou d'aire
géographique, et de reprise d'activité après interruption
à la suite d'une sanction disciplinaire ;
- exerce toute compétence qui lui est
attribuée par la présente loi ou par les textes particuliers ; -
étudie toutes questions à lui soumises par l'autorité de
tutelle ;
- inflige les sanctions disciplinaires aux membresde
l'Ordre dans les conditions prévues par la présente
loi.
(2) En aucuncas, le Conseil de l'Ordre n'a à tenir
comptedes actes, attitudes, opinions politiques ou religieuses des membres de
l'Ordre.
Art. 32. -- Le Conseil de l'Ordre fixe le montantdes
cotisationsdes membresde l'Ordre. Celles-ci sont obligatoires sous peine de
sanctions disciplinaires.
Art. 33. --Le Président du Conseil de l'Ordre
représente l'Ordre danstous les actes de la vie civile et en justice. Il
gère les biens de l'Ordre par délégation du Conseil de
l'Ordre.
Chapitre II. - De l'inscription au tableau de
l'Ordre
Art. 34. --Nul ne peutexercer la profession de
médecin au Cameroun s'il n'est préalablement inscrit au tableau
de l'Ordre.
Ce tableau est tenu à jour par le Conseil de
l'Ordre et est régulièrement communiqué à
l'autorité de tutelle, aux préfectures, aux mairies et aux
parquets de tribunaux.
Art. 35. -- Les conditions d'inscription au tableau de
l'Ordre sont les suivantes:
a) être de nationalité camerounaise et
jouir de ses droits civiques;
b) avoir la majorité civile ;
c) êtretitulaire d'un diplômed'État
ou d'Université de Docteuren médecine ou de tout
autrediplôme reconnu équivalent par l'autorité
compétente au moment du dépôt du dossier;
d) n'avoir subi aucune condamnation pour fait contraire
à la probité (vol, détournement de deniers publics.
escroquerie, abus de confiance, faux et usage de faux) ou aux bonnes
moeurs;
e) n'avoir été ni déclaré en
faillite, ni en état de liquidation judiciaire.
Art. 36. -- (1) Le dossier d'inscription au tableaude
l'Ordre est déposéen doubleexemplaire au Conseil de l'Ordre,
contre récépissé.
(2) Le Conseil de l'Ordre est tenude se prononcersur le
dossier d'inscription au tableaude l'Ordre, dont il est saisi dans un
délai de trente (30) jours à partir de la date de son
dépôt.
(3) Toute décision du Conseil de l'Ordre sur
une demande d'inscriptionau tableau de l'Ordre doit être soumise à
l'approbationpréalablede l'autorité de tutelle dès le
premier jour ouvrable suivant cette décision. L'autorité de
tutelle dispose d'un délai de trente(30) jours pourse
prononcer.Passé ce dé1ai, la décision du Conseil de
l'Ordre devient exécutoire et doit être notifiée au
postulant.
(4) Dans tous les cas, passé un délai
de quatre-vingt-dix(90) jours à compterdu dépôtdu dossier,
le défaut de réponse par le Conseil de l'Ordre vaut acceptation
de la demandedu postulantet son inscription d'office au tableau de
l'Ordre.
(5) Toute décision de rejet doit être
motivée.
Art. 37. -- (1) Les décisions du Conseil de
l'Ordre renduessur les demandesd'inscription ou de réinscription au
tableau de l'Ordre peuventdans les quinze (15) jours de leur notification,
être frappéesd'appel devantla Chambre d'appel du Conseil de
l'Ordre par le postulants'il s'agit d'un refus d'inscription, ou par toutmembre
de l'Ordre ayant intérêt pour agir, s'il s'agit d'une inscription
ou d'une réinscription.
(2) Dans l'un ou l'autre cas, si la Chambre d'appel ne
prend aucunedécision dans un délai de deux(2) mois suivant sa
saisine, le postulant est inscrit au tableau de l'Ordre.
(3) L'appel n'a pas d'effet suspensif, sauf lorsqu'il
s'agit d'une décision d'acceptation.
Art. 38. --Sans préjudice des dispositions des
articles 18 et 36 ci-dessus, les décisions, délibérations,
résolutions ou tout autre acte de l'Assemblée
généraleou du Conseil de l'Ordre sont, à peine de
nullité absolue,soumis à l'approbation préalablede
l'autorité de tutelledès le premier jour ouvrablesuivant leur
intervention.
L'autorité de tutelledispose d'un délai de
trente(30) jours pourse prononcer. Passé ce délai, ces actes
deviennent exécutoires de plein droit.
Art. 39. -- En cas de cessationd'activité,
déclarationen est faite par l'intéressé dans les quinze
(15) jours au Conseil de l'Ordre qui procède à l'annulation de
son inscription.
Art. 40. -- (1) Le Secrétaire
général du Conseil de l'Ordre assure la tenue du tableau de
l'Ordre.
(2) Le tableau de l'Ordre ne fait mention que des seuls
diplômes et qualifications professionnelles reconnus par
l'autorité compétente dupays où ils ont été
obtenus. Toutefois peuvent y être portés les grades et distinction
décernés au médecin par l'État.
Chapitre III. - De la discipline
Art. 41. -- (1) Le Conseil de l'Ordre exerce, au sein de
la profession de Médecin, la compétence disciplinaire en
première instance.
(2) À ce titre, il désigneen son sein
uneChambre de discipline, présidée par le Président du
Conseil et composéede quatre (4) membres élus. Le
Président peut être suppléé en cas de
récusation ou d'empêchement.
Art. 42. --(1) La Chambre de discipline peut
êtresaisie par l'autorité detutelle, le ministère public ou
par tout médecin inscrit au tableau de l'Ordre et ayant
intérêt pour agir.
(2) Le Médecin au service de l'Etat ne peut
êtretraduit devant la Chambre de discipline à l'occasion des actes
de ses fonctions, que par l'autorité responsable de la Santé
publique,ou par le Conseil de l'Ordre après avis de l'autorité de
tutelle.
L'autorité de tutelle doit se prononcerdans les
trente (30) jours de sa saisine. Passé ce délai, le silence
gardé par celle-ci vaut acceptation.
(3) La Chambre de discipline ne peutvalablement statuer
qu'en présence des 3/5 de ses membres au moins.
Art. 43. -- Peuvent notamment justifier la saisine de la
Chambre de discipline:
-toute condamnation pour une infraction quelconque
commise à l'intérieur ou à l'extérieur du
territoire national, et de nature à porter atteinte au crédit ou
à la réputation de la profession;
- toute condamnation pour faute relative à la
conduite ou au comportement vis-à-vis de la profession.
Art. 44. -- La Chambre de discipline peut, sur la
demande des parties ou sur sa propre initiative, ordonner une enquêtesur
les faits dont la constatation lui parait utile à l'instruction de
l'affaire. La décision qui ordonne l' enquête indique les faits
sur lesquels elle doit porter et précise suivant le cas, si elle aura
lieu devant la Chambre de discipline, ou si elle sera diligentée par un
de ses membres qui se transportera sur les lieux.
Art. 45. -- (1) Tout Médecin mis en cause peut se
faire assister d'un défenseur de son choix. (2) Il peut exercer le droit
de récusation dans les formes de droit commun.
Art. 46. -- (1) L a Chambre de discipline tient un
registre des délibérations:
(2) Un procès-verbal est établi à
la suite de chaque séance et signé de tous les
membres.
(3) Les procès-verbaux d'interrogatoire ou
d'audition doivent également être établis et signés
des intéressés.
Art. 47. -- (1)Aucune sanction disciplinaire ne peut
être prononcéesans que le Médecin en cause n'ait
été entendu ou appelé à comparaître dans un
délai de trente (30) jours après réceptionde sa
convocation contre récépissé.
(2) La Chambre de discipline peut statuer lorsque le mis
en cause n'a pas déféré à une convocation
dûment notifiée.
Art. 48. -- (1) La Chambre de discipline peut prononcer
l'une des sanctions suivantes: - l'avertissement;
- le blâme;
- la suspension d'activité allant de trois (3)
mois à un an, selon la gravité de la faute commise; - la
radiation du tableau de l'Ordre.
(2) Les deux premières de ces sanctions emportent
l'inéligibilité au Conseil de l'Ordre pendant deux (2) ans
à compterde la notification de la sanction. La troisième sanction
entraîne l'inéligibilité pour trois (3) ans à
compter de la notification.
Art. 49. -- (1) Les décisions de la Chambre de
discipline doivent être motivées.
(2) Elles sont communiquées dès le premier
jour ouvrable suivant leur intervention à l'autorité de tutelle,
au ministère public et au médecin mis en cause contre
récépissé.
Art. 50. --(1) Lorsque la décision a
étérenduepar défaut, le mis en cause peut faire opposition
dans un délai de dix (10) jours à compter de la notification
faite à sa personne contre récépissé.
2)Lorsque la notification n'a pas été
faite à sa personne, le délai d'opposition est de trente (30)
jours à compter de la date de notification à sa résidence
professionnelle.
(3) L'opposition est reçue par simple
déclaration au secrétariat du Conseil de l'Ordre qui en donne
récépissé.
Art. 51. -- (1) En cas de procédure
contradictoire, le médecin mis en cause peut interjeter appel devant la
Chambre d'appel visée à l'article 52 ci-dessous, dans un
délai de soixante (60) jours à compter de la date de notification
de la décision de la Chambre de discipline.
(2) Passé ce délai, la décision est
réputée définitive et devient
exécutoire.
Art. 52. -- La Chambre d'appel est constituée
comme suit :
- un magistrat de la Cour suprême
désigné par le Président de ladite Cour,
Président;
- un médecin désigné par
l'autorité de tutelle;
- trois membres de l'Ordre, élus au sein de
l'Assemblée générale et n'ayant pas connu de l'affaire en
première instance.
Art. 53. -- (1)Sans préjudice des dispositions des
articles 9 et 37 ci-dessus, la Chambred'appel est saisie des appels des
décisions du Conseil de l'Ordre en matière
disciplinaire.
(2) Ses décisions sont prises à la
majorité simple des membres présents.
Art. 54. --(1)L'appel est effectué sous forme de
motion explicative déposée au secrétariat du Conseil de
l'Ordre contre récépissé.
(2)L'appel peut êtreinterjeté par le
médecin intéressé, l'autoritéde tutelle, le
ministère public ou tout membrede l'Ordre ayant intérêt
pour agir, dans les trente(30) jours suivant la notification de la Chambre de
discipline.
(3) Il n'a pas d'effet suspensif.
Art. 55. -- (1)La Chambre d'appel doit se prononcer
dans un délai de deux (2) mois à compter de sa saisine. Ses
décisions sont prises et notifiées dans les formes
prévuesà l'article 53 ci-dessus et ne sont susceptibles de
recours que devant la Cour suprême, dans les formes de droit
commun.
(2) Passé le délai de deux (2) mois, la
décision prise en premier ressort est suspendue de plein
droit.
Art. 56. -- (1) En cas de radiation du tableau de
l'Ordre, le médecin concerné peut, après un délai
de cinq (5) ans, introduire auprès du Conseil de l'Ordre une demande de
reprise d'activité.
(2) En cas de suite favorable, l'intéressé
est réinscrit au tableau de l'Ordre.
(3) En cas de rejet de sa demande, il ne peut la
réintroduire qu'après un nouveau délai de deux (2)
ans.
Art. 57. -- L'exercice de l'action disciplinaire dans les
formes décrites ci-dessus ne fait obstacle:
- ni aux poursuitesque le ministère public, les
particuliers de l'Ordre peuvent intenterdevant les tribunaux dans les formes de
droit commun;
- ni à l'action disciplinaire que
l'autorité de tutelle peut intenterà l'encontre d'un
médecin à son service.
Titre III. - Dispositions transitoires et finales
Art. 58. -- Sont autorisés à continuer
à exercer la profession de médecin :
1 - Les médecins agréés dans le
cadre des dispositions de la législation et de la réglementation
antérieures.
2 - Les médecins recrutés pour le service
exclusif de l'Administration.
3- Les médecins de nationalité
étrangère exerçant leur profession au Cameroun ou
engagés sur contrat avant la date de publication de la présente
loi.
Art. 59. --Sont d'office inscrits au tableau de l'Ordre
conformément aux dispositions de la présente loi, tous les
médecins exerçant légalement pour le compte de
l'Administration, des entreprises privées ou en clientèle
privée à la date de promulgation de la présente
loi.
Art. 60. -- Les dossiers en cours d'instruction à
la datede promulgation de la présente loi, doivent répondre aux
conditions et procédures prévues par la présente
loi.
Art. 61. --Les modalités d'application de la
présente loi seront, en tant que de besoin, fixées par voie
réglementaire.
Art. 62. -- Sont abrogéestoutes les
dispositions antérieures contraires notamment celles des lois n°
80-07 du 14 juillet 1980 portant création de l'Ordre national des
médecins et 80-06 du 14 juillet 1980 portant réglementation de
l'exercice de la profession de médecin.
Art. 63. --La présente loi sera
enregistrée, publiée suivant la procédure d'urgence, puis
insérée au journal officiel en français et en
anglais.
Yaoundé le 10 août 1990.
Le Président de la République, Paul Biya.
ANNEXE III République du Cameroun
Décret fixant les modalités d'application
de la loi relative à l'exercice et à l'organisation de la
profession de médecin
Décret N° 92-265-PM du 22 juillet
1992
fixant les modalités d'application de la loi
n° 90-36 du 10 août 1990
Décret N° 92-265-PM du 22 juillet
1992
Fixant les modalités d'application de la loi
n° 90-36 du 10 août 1990 relative à l'exercice et à
l'organisation de la profession de médecin
Article premier. -- Le présent décret fixe
les modalités d'application de la loi n° 90-036 du 10 Août
1990 relative à l'exercice et à l'organisation de la profession
de médecin.
Chapitre Premier. -- De l'inscription au Tableau de
l'Ordre National des Médecins
Art. 2. --L'inscription au tableau de l'Ordre National
des Médecins, ci-après désigné« l'Ordre
», est autorisée par décision du Conseil dudit
Ordre.
Art. 3. -- (1)Le dossier d'inscription au tableau de
l'Ordre, déposé au siège du Conseil de l'Ordre, en double
exemplaire et contre récipissé, comprend :
- une demande timbrée au tarif en vigueur
;
- une copie certifiée conforme de l'acte de
naissance datant de moins de trois (3) mois ;
- une copie certifiée conforme du diplôme de
docteur en médecine reconnu par l'autorité
compétente au moment du dépôt du
dossier, ainsi qu'une attestation de présentation de
l'original dudit diplôme;
- un extrait du casier judiciaire datant de moins de
trois (3) mois;
- un certificat de nationalité datant de moins de
trois (3) mois.
(2) Outre les pièces
énumérées à l'alinéa (1), le médecin
de nationalité étrangère doit produire, à l'appui
de sa demande :
- une attestation de non-interdictiond'exercer et une
attestation de non-inscription au tableau de l'Ordre des Médecins de son
pays d'origine, ou de tout autre pays étrangeroù il aurait
exercé auparavant;
- une copie de l'acte de recrutement pour le compte
d'une administration publique ou d'une organisation non gouvernementale, ou
d'un contrat de travail de droit camerounais lorsqu'il s'agit d'une entreprise
privée agréée ou d'une oeuvre médicale
confessionnelle.
(3) Les attestations visées à
l'alinéa (2) sont délivrées conformément aux normes
applicables dans les pays étrangers concernés.
(4) Les frais d'inscription sont à la charge du
postulant.
Art. 4. -- La demande d'inscription visée à
l'article 3 est instruite suivant la procédure prévue à
l'article 36 de la loi n° 90-036 du 10 août 1990
susvisée.
Chapitre II. -- Du fonctionnement de l'Ordre
Art. 5. -- (1) Le Code dedéontologiede la
profession et le règlement intérieur de l'Ordre sont
adoptés par l'Assemblée générale duditOrdre et
rendus exécutoires par l'arrêté du Ministre chargé
de la Santé publique.
(2) Le Ministre chargé de la Santé
publique est tenu de se prononcer sur le Code de déontologie et sur le
règlement intérieur dont il est saisi dans un délai de
trente (30) jours à compter de la date de leur dépôt
conformément aux dispositions de l'article 38 de la Loi n° 90-034
du 10 août 1990 susvisée. Passé ce délai, ces textes
sont réputés, approuvés et deviennent exécutoires
de plein droit.
Art. 6. -- Le règlementintérieur ne
peut, à peine de nullité relative, instituer au sein de l'ordre
d'autres organesde représentationqueceux prévus aux articles 21,
22, 25, 41 et 52 de la loi n° 90-036 susvisée, ni comporter des
dispositions contraires à ladite loi.
Art. 7. -- Les modalitésd'élection du
Présidentde l'Assemblée générale,des membreset du
Président du Conseil de l'Ordre, ainsi que les membres de la Chambre de
discipline et de la Chambre d'appel sont fixées par le règlement
intérieur.
Art. 8. -- Les fonctions de Président de
l'Assemblée générale de l'Ordre sont incompatibles avec
celles de Président ou de membredu conseil de l'Ordre, ainsi que de
membrede la Chambre de discipline ou de la Chambre d'appel.
Art. 9. -- (1)Tout membre qui perdla qualité
ouquittela division au titre de laquelle il a été élu
cesse de faire partie du Conseil de l'Ordre.
(2) Le membre suppléant remplace le membre
titulaire toutes les fois que ce dernier se trouve dans l'empêchement de
siéger; il le remplace définitivement lorsque le membre titulaire
cesse, pour l'un quelconque des motifs prévus par la loi n° 90-036
du10 août 1990 susmentionnée, de faire partie du Conseil de
l'Ordre.
(3) Lorsque, plus de six (6) mois avant son
renouvellement,le Conseil de l'Ordre ne peut atteindre le quorum requis
parcequele membre suppléant devenu titulaire a perdu la qualité
au titre de laquelle il avait été élu, ou qu'un ou
plusieurs siège(s) est ou sont devenu(s) vacant(s) pour l'un des motifs
visés aux alinéas (1) et (2) , des membres supplémentaires
sontélus dans les mêmesconditions, pour la durée du mandat
restant à courir.
(4) Les modalités d'application du présent
article sont fixées par le Code de déontologie de la
profession.
Art. 10. -- (1) Le vice-Président, le
secrétaire général et le trésorier du bureau sont
obligatoirement élus parmi les membres titulaires du Conseil de
l'Ordre.
(2) Leurs attributions sont, en tant que de besoin,
précisées par le règlement intérieur.
Chapitre III. -- Des dispositions concernant le
fonctionnement des chambres de discipline et d'appel
Art. 11. -- (1) La Chambre de discipline ne peut
siéger qu'en nombre impair. Le plus jeune des membres se retire lorsque
les membres présents sont en nombre pair.
(2)En cas d'empêchement ou de récusation du
Président,la séance est présidée par le membre le
plus âgé.
(3) Un secrétaire désigné par le
Président assiste à la séance.
Art. 12. -- (1) Le Présidentde la Chambre de
discipline désignepour chaqueaffaire un rapporteur parmi les membres de
la Chambre.
(2) La plainte est notifiée au médecin
incriminé, lequel dispose d'un délai de quinze (15) jours
à compter de la date de notification pour produire sa défense
écrite.
Ce délai est augmenté d'autant, s'il y a
lieu, si le médecin en cause est domicilié en dehors de la
circonscription où il exerce sa profession, ou du siège de
l'Ordre.
(3) Le rapporteur instruit l'affaire, examine les
témoignages écrits et procède s'il y a lieu à
l'interrogatoire du médecin en cause, à l'audition des
témoins. Il établit les procès-verbaux d'interrogatoire ou
d'audition signés des intéressés. Il a qualité pour
procéder à toutes constatations utiles.
(4) Lorsqu'il a achevé l'instruction, le
rapporteur transmet le dossier, assorti d'un rapport au Président de la
Chambre de discipline.
Art. 13. -- (1) La Chambrede discipline peut,avant de
prononcer une décision définitive, ordonner par décision
avant dire droit, toutes les mesures d'instruction qu'elle juge à
propos.
(2) Le médecin frappéd'une
sanctiondisciplinaire par la Chambrede discipline est tenu au paiement des
frais résultant de l'action engagée. Le Conseil de l'Ordre assure
le recouvrement de ces frais.
Art. 14. -- (1) Le médecin incriminé ou
mis en cause est convoquéà l'audience, par tout moyen laissant
trace écrite, par le Président de la Chambre de discipline, dans
un délai de trente(30) jours par rapport à la date de
l'audience.
(2)L'autorité ou la personne qui a saisi la
Chambre de discipline est convoquéeà l'audience dans les
mêmes forme et délai prévus à l'alinéa
(1).
(3) La personne en cause est en outre, invitée
par la convocation correspondante à faire connaître dans un
délai de huit (8) jours, si elle fait choix d'un ou de plusieurs
défenseur(s) et, dans ces cas, les nom(s), prénoms et adresse(s)
de ce(s) dernier(s).
La convocation visée au paragraphe
précédent indique aumédecin incriminé le
délai pendant lequel il pourra, lui ou son (ses) défenseur(s),
prendre connaissance du dossier au siège du Conseil de
l'Ordre.
(4) Lorsque l'autorité qui a saisi la
Chambrede discipline est le Ministre chargéde la Santé publique
ou le Procureurde la République, elle peutse faire représenter et
peut formuler ses observations par écrit.
Art. 15. -- (1) Le Président de la Chambre de
discipline dirige les débats. Il donne la parole au rapporteur qui
présente un exposé des faits. Il interroge la mise en
cause.
Tout membre de la Chambre de discipline peut
égalementposer des questions, avec l'autorisation du Président de
ladite chambre.
Le Président de la Chambre de discipline peut,
s'il le juge nécessaire, dans l'intérêt des débats,
retirer la parole à quiconque en abuserait.
(2) Le mis en cause doit comparaîtreen personne.Il
peut se faire assister par un ou plusieurs défenseur(s) de son
choix.
Si le médecin incriminé ne se
présente pas après une(1) convocation dûment
notifiéedans le délai prévu à l'article 14,
alinéa (1), l'affaire peut être jugée sur pièces
après audition du rapporteur.
3) L'audience n'est pas publique et la
délibération demeure secrète.
Elle donne lieu à l'établissement d'un
procès-verbal signé de tous les membres.
Art. 16. -- (1)La décision de la Chambre de
discipline mentionne les noms et prénomsdes membres
présents.
(2) Elle est inscritedans le registre des
délibérations. Ce registreest coté et paraphé par
la Président de la Chambre de discipline et ne peut être
communiqué aux tiers.
(3) La minute de chaque décision est
signée par le Président de la Chambre de discipline et le
secrétaire de séance.
Art. 17. --(1) La décision de la Chambre de
discipline est notifiée àtoutesles personnes en cause par le
Conseil de l'Ordre, par tout moyen laissant trace écrite, dans les
délais prévus par la loi. Elle est adressée dans les
mêmes formes au Ministre chargé de la Santé
publique.
(2)La personne dont la plainte a provoqué la
saisine de la Chambre de discipline est informée par écrit de la
décision prise par celle-ci.
(3) Lorsqu'il s'agit d'une personnede nationalité
étrangère,la décision est, en outre, notifiée
à l'autorité compétente de l'État d'origine et, le
cas échéant, celle de l'État de provenance.
Art. 18. -- Les dispositions des articles 11, 12, 13, 14,
15, 16 et 17 s'appliquent à la Chambre d'appel. Le secrétaire de
séance est choisi parmi les membresdu Conseil de l'Ordre n'ayant pas
connu de l'affaire en première instance.
Toutefois, les délais prévusaux articles 12
et 14, alinéa (1) sontramenés à huit (8) et quinze(15)
jours respectivement. Celui prévu à l'article 14, alinéa
(3) est ramené à cinq (5) jours.
Chapitre IV. -- Des autorisations relatives a la
médecine en clientèle privée
Art. 19. -- (1) L'exercice de la médecineen
clientèle privée est autorisé par décision du
Conseil de l'Ordre.
(2) Le changement de résidence professionnelle
ou d'aire géographique d'activité, et la reprise
d'activité après interruptionà la suite d'une sanction
disciplinaire sont autorisés par décision du Conseil de
l'Ordre.
(3) Les autorisationsd'exercer visées aux
alinéas (1) et (2) peuventêtre retirées dans les
mêmes formes en cas de suspension du praticien, ou pour infraction aux
dispositions régissant l'exercice de la profession de
médecin.
Section I. -- De l'autorisation d'exercice de la
profession de médecin en clientèle privée
Art. 20. -- (1) L'autorisation d'exercer la profession
de médecinen clientèle privée est subordonnée
à la productiond'un dossier, en double exemplaire,
déposéau siège de Conseil contre
récépissé et comprenant :
- une demande timbrée au tarif en
vigueur;
- un certificat de nationalité datant de moins de
trois (3) mois;
- une copie certifiée conforme de l'acte de
naissance datant de moins de trois (3) mois;
- une copie certifiée conformedu diplômede
docteur enmédecine et, le cas échéant, des
certificats
de spécialisation, ainsi qu'une attestation de
présentation de l'original desdits diplôme et
certificats;
- un extrait de casier judiciaire datant de moins de
trois (3) mois;
- uneattestation depratique professionnelle effective
d'au moins cinq(5) ans à la date de la demande pour exercer à
titre personnel, délivrée par une administration publique ou
l'organisme employeur;
- une attestation d'inscription au tableau de l'Ordre,
délivrée par le Conseil de l'Ordre;
- une lettre d'accord de principe de libération,
délivrée par le dernier employeur, s'il y a lieu;
- une attestationdu règlementde toutesles
cotisationsdues à l'Ordre, délivrée par le Conseil
de
l'Ordre.
(2) Le médecin de nationalité
étrangère ne peutêtre autorisé à exercer en
clientèle privée que si le pays dont il est ressortissant a
conclu une convention de réciprocité avec la République du
Cameroun. À l'appui de sa demande, ildoit, outreles pièces
énumérées à l'alinéa (1), produire une copie
de ladite convention de réciprocité, authentifiée par le
Ministre chargé des Relations extérieures.
(3) La procédured'agrémentdu dossier
visé aux alinéas (1) et (2)demeure celle prévuepar
l'article 8 de la Loi n° 90-036 du 10 août 1990
susvisée.
(4)Toute demande obtenue dans les conditions
prévues à l'article 8 alinéa (4) de la Loi n° 90-036
du 10 août 1990 précitée est nulle, de nul effet si elle
n'est pas conformeaux prescriptionsde la carte sanitaire.
Art. 21. -- (1) L'autorisation d'exercice en
clientèle privée est personnelleet incessible. Elle indique la
localité où le postulant est appelé à exercer son
art.
Elle est accordée pour permettre de travailler
dans une formation sanitaire privée, ou pour ouvrir une formation
sanitaire privée.
(2) L'autorisation d'exercer doit, à peinede
nullité absolue,être conformeà la carte sanitaire
fixée par arrêté du Ministre chargé de Santé
publique.
Art. 22.--(1) Le médecin autorisé
à exerceren clientèle privée dispose d'un délai de
douze (12) mois suivant la notification de la décision
d'agrémentou l'entrée en vigueur de celle-ci lorsqu'il est
implicite, pour ouvrir sa formationsanitaireau public, lorsqu'il a
décidé d'en créer une. Passé ce délai et
sauf prorogation accordée par le Conseilde l'Ordre,
conformémentaux dispositions de l'article38 de la Loi n° 90-036 du
10 août 1990 susvisée, l'autorisation devient caduque.
(2) Le médecinautorisé à exercer
en clientèle privée doit, dès notification de la
décision d'agrément ou d'entrée en vigueur de celle-ci
lorsqu'elle est implicite et avant l'ouverture de sa formation sanitaireau
public, remettre auConseilde l'Ordre une copiede la policed'assurance
prévue à l'article 15 de la Loi n° 90-036 du 10 août
1990 susvisée. Celle-ci couvre les risques professionnels dontla nature
est précisée par le règlement intérieur de la
profession. Quittance en est remise au Conseilde l'Ordre au début de
chaque année civile.
(3) Les dispositions de l'alinéa (2) s'appliquent
également aux sociétés civiles professionnelles de
médecins prévues à l'article 14 de la loi n° 90-036
du 10 août 1990 susmentionnée.
Art. 23. -- (1) Lorsque le médecin estime qu'il
a achevé d'aménager sa formation sanitaire conformément
à la réglementation en vigueur, il en informe le Conseil de
l'Ordre, qui à son tour, saisit le Ministre chargé de la
Santé publique par tout moyen laissant trace écrite.
(2)Le Conseil de l'Ordre et l'Administration
chargée de la Santé publique disposent, dès
notification
de l'achèvementdes travaux, d'un délai de
trente(30) jours pour visiter cette formation avant son
ouverture au public.
Si à l'expiration de ce délai, le Conseil de l'Ordre et
l'Administration chargée de
la Santé publique ne sont pas manifestés,
le médecin peut ouvrir sa formation sanitaire au
public.
Art. 24.--(1) Lorsque la visite des lieux
relève que les installations ne per-mettent pas d'exercer la profession
selon les règles minimales de l'art, les insuffisances sont
notifiées au postulant qui doit y remédier.
(2) L'ouverture de la formation sanitaire au public n'est
autorisée qu'après vérification par le Conseil de l'Ordre
et l'Administration chargée de la Santé publique, des
modifications exigées.
La vérification s'effectue suivant les
modalités prévues à l'article 23, alinéa
(2).
Art. 25. -- (1) La délivrance de la lettre
d'accord de principe de libérationest obligatoirelorsque le postulant
remplit la condition d'ancienneté prévue par la loi pour exercer
en clientèle privée.
(2) Le refus par tout employeurde délivrer la
lettre d'accord de principe de libération, sans motif valable, au
postulant qui la demande, peutentraînercontrele contrevenant lessanctions
pouvantaller jusqu'au retrait de la décision d'exercice.
Lorsquel'employeur visé au paragraphe
précédentest une sociétécivile professionnelle de
médecins, une oeuvre médicale professionnelleou une
personnemorale de droit privé, celui-ci en court des sanctions pouvant
aller jusqu'à la fermeture de la formation sanitaire où travaille
de postulant.
(3) La libération du postulant n'est effective
qu'à compter du jour où, dans la limite du délai prescrit
à l'article 22 alinéa (1), il peut s'installer pour son propre
compte.
Toutefois, l'Administration chargée de la
Santé publique peut, pour des raisons impérieuses de service,
reporter la date de libérationdu postulant employé parelle,
sansque ce report puisse excéder une période de douze (12)
mois.
Art. 26. -- Le médecin autorisé à
exercer en clientèle privée doit exercer personnellementet
effectivementsa profession. Il ne doit exercer dans plus d'une formation
sanitaire à la fois ou être propriétaire de plus d'une
formation sanitaire.
Section II. --De l'autorisation de changement de
résidence professionnelle d'aire géographique ou de reprise
d'activité
Art. 27. -- (1) L'autorisation de changement de
résidence professionnelle ou d'aire géographique est
subordonnée à la production d'un dossier en double exemplaire,
déposé contre récépissé au siège du
Conseil de l'Ordre et comprenant :
- une demande motivée et timbrée au tarif
en vigueur;
- une copie de l'autorisation d'exercer.
(2) Le changementde résidence professionnelle
ou d'aire géographique doit, à peine de nullité absolue,
répondreauxcritères d'éligibilité fixés par
le règlement intérieurde l'Ordreet être conforme à
la carte sanitaire visée à l'article 21 alinéa
(2).
Art. 28. -- L'autorisation de reprise
d'activité après interruption à la suite d'une sanction
disciplinaire est subordonnéeà la productiond'un dossier en
double exemplaire, déposécontre récépissé du
Conseil de l'Ordre et comprenant:
- une demande timbrée au tarif en
vigueur;
- un certificat de réhabilitation
délivré par le Conseil de l'Ordre.
Art. 29.--Les demandes d'agréments
visées aux articles 27 et 28 sontinstruitessuivant la procédure
prévue à l'article 8 de la Loi n° 90-036 du 10 août
1990 susmentionnée, sans préjudice des dispositions de l'article
20 alinéa (4) du présent décret.
Chapitre V. -- De l'exercice de la tutelle
Art. 30. --(1) L'Ordre est placé sous la
tutelle du Ministre chargé de la Santé publique,qui exerceles
pouvoirs s'y rapportant, conformément aux dispositions de la Loi n°
90-036 du 10 août 1990 susmentionnée et à celles du
présent décret, ou de textes particuliers.
(2) Le Ministre chargé de la Santé publique
est, en outre, investi d'une mission permanente de contrôle des
formations sanitaires.
Art. 31. -- (1) Pour l'accomplissementde ses missions
prévuesà l'article 30, le Ministre chargéde la
Santé publique peut notamment :
- demanderau Conseil de l'Ordre de suspendre ou le cas
échéant, de retirer définitivement l'autorisation
d'exercice, en cas de carence, de défaillance professionnelle ou de
fraude d'un médecin, dûment constatée par ledit Conseil,
les autorités sanitaires ou judiciaires;
- enjoindre le Conseil de l'Ordre d'exercer les
attributions qui lui sont reconnues par la Loi n°90-036 du 10 août
1990 suscitée et ses textes d'application.
(2) Lorsque ses mises en demeure ou ses injonctions ne
sont pas suivies d'effet dans les délai qu'il fixe, le Ministre
chargé de la Santé publique peut se substituer d'office au
Conseil de l'Ordre.
Art. 32. -- (1) Lorsque, pour une cause autre que
celle prévue à l'article 9, alinéa (3) du présent
décret, les organesde l'Ordre sont défaillants ou se trouventdans
l'empêchementde siéger ou de fonctionner,le Ministre chargé
de la Santé publique peut prendre toutesles mesures conservatoires,de
nature à faire cesser le défaillance, à rétablir le
bon fonctionnementdesorganesen causeou à,assurer une saine application
de la Loi n°90-036 du 10 août 1990 précitée et ses
textes d'application.
(2) Il peut, à cet effet, convoquer une session
extraordinaire de l'Assemblée générale de
l'Ordre.
Art. 33. -- Un arrêté du Ministre
chargé de la Santé publique fixe les conditions minimales de
fonctionnementdes formations sanitaires avec ou sans hospitalisation,
après avis du Conseil de l'Ordre.
Chapitre VI. -- Dispositions diverses et finales
Art. 34. -- Le médecin dont la demande
d'inscription au tableaude l'Ordre a été conformémentaux
dispositions de la Loi n° 90-036 du 10 août 1990 susvisée,
doit, au momentde son inscription, s'acquitter de ses cotisations à
l'Ordre.
Art. 35. --La grille d'honoraires est fixée par
arrêté conjoint du Ministre chargéde la Santé
publique et du Ministre chargé des prix, sur proposition de
l'Assemblée générale de l'Ordre.
Art. 36. -- Le médecin exerçant en
clientèle privée peut, à titre subsidiaire, dispenser dans
les établissements deformation, des enseignements correspondant à
sa spécialité.
Art. 37. --Lors de l'inscription des demandes
d'inscription au tableau de l'Ordre ou d'autorisation
d'exercer en
clientèle privée, l'appréciation du Conseil de l'Ordre ou
de l'Administration de tutelle
porte, à l'exclusion de toute
considération d'opportunité, sur la seule conformité du
dossier à la Loi n° 90-036 du 10 août 1990
susmentionnée, au présent décret, au règlement
intérieur et/ou au Code de déontologie de la
profession.
Art.38.--Sont abrogées toutes dispositions
antérieures contraires, notamment celles du décret n° 82-
231 du 17 juin 1982 fixant les modalités d'exercice de la profession de
médecin en clientèle privée.
Art. 39. --Le Ministre chargé de la
Santé publique et le Conseil de l'Ordre sont chargés, chacun en
ce qui le concerne,de l'exécution du présent décretqui
sera enregistré et publié suivant la procédure d'urgence,
puisinséré au journal officiel en français et en anglais
et prendra effet à compter de la date de sa publication.
Yaoundé le 22 Juillet 1992. Le Premier Ministre.
ANNEXE IV
Décret n° 83-166 du 12 avril 1983
portant Code de Déontologie des
médecins
Le Président de la République,
Vu la constitution;
Vu la loi n° 80-06 du 14 juillet 1980 portant
réglementation de l'exercice de la profession de
médecin;
Vu la loi n° 80-07 du 14 juillet 1980 fixant
l'organisation de l'Ordre des médecins;
Sur avis Conseil de l'Ordre. Décrète
:
Titre premier. -- Devoirs généraux du
médecin
Article premier. -- Le respect de la vie constitue en
toute circonstance le devoir primordial du médecin.
Art. 2. -- (1) Le médecin doit soigner avec la
même conscience tout malade quels que soient sa condition, sa
nationalité, sa religion, sa réputation et les sentiments qu'il
lui inspire.
(2) Il ne doit en aucun cas exercer sa profession dans
les conditions qui puissentcompromettre la qualité de ses soins et de
ses actes.
Art. 3. -- (1) Quelle que soit sa fonction ou sa
spécialité, hormis le seul cas de force majeure, le
médecin doit porter secours d'extrême urgence au malade en danger
immédiat, sauf s'il s'est assuré que d'autres soins
médicaux de nature à écarter le danger lui sont
prodigués.
(2) Il ne peut abandonnerses malades, même en cas
de danger public, sauf ordre écrit de l'autorité
compétente.
Art. 4.--Sauf dispositions contraires de la loi, le
secret professionnel s'impose au médecintant qu'en conscience, il ne
porte pas atteinte à l'intérêt du malade.
Art. 5. -- Dans leurs relations, le médecin et le
malade disposent chacun des garanties suivantes
:
· libre choix du médecin par le
malade;
· liberté de prescription pour le
médecin;
· règlement des honoraires par le
malade.
Art. 6. --(1) Le médecin ne doit aliéner
son indépendance professionnellesous quelque forme que ce
soit.
(2) Il doit s'abstenir, même en dehors de
l'exercice de sa profession de tout acte de nature à
déconsidérer celle-ci.
(3) Il ne peut exercer, en même temps que la
médecine, toute autre activité incompatible avec la
dignité de sa profession.
Art. 7. -- La médecine ne doit pas être
pratiquée comme un commerce. A ce titre:
a) sont interdits tout procédédirect ou
indirect de publicité ou de réclame et toute manifestation
spectaculaire touchant à la médecine et n'ayant pas exclusivement
un but scientifique ou éducatif;
b) les seules indications qu'un médecin est
autorisé à mentionner sur ses feuilles d'ordonnance ou dans un
annuaire sont:
- celles qui facilitent ses relations avec les
patients;
- les titres, fonctions et qualifications officiellement
reconnues et ayant trait à la profession; - les distinctions
honorifiques scientifiques ayant trait à la profession.
c) les seules indications qu'un médecin est
autorisé à faire figurer porte de son cabinetsont: les noms,
prénoms, titres, qualifications, jours et heures de consultations et
éventuellement l'étage. Ces indications doiventêtre
présentées avec mesure et selon les usages des professions
libérales. La plaque destinée à leur inscription ne doit
pas dépasser 25 cm sur 30 cm.
En cas de confusion possible, la mention du ou des
prénoms peut être exigée par le Conseil de
l'Ordre.
Art. 8. -- Sont interdits l'usurpation de titre ou
l'usage de ceux non autorisés par le Conseil de l'Ordre, ainsi que tous
procédés destinés à tromper le public à ce
sujet.
Art. 9. -- L'exercice de la médecine sous un
pseudonyme est interdit.
Art. 10. --Le médecin doit exercer sa profession
dans les conditions lui permettantl'usage régulier d'une installation et
des moyens techniques nécessaires à la pratique de son
art.
Art. 11. -- Il est interdit de faire gérer un
cabinet par un confrère, sauf en cas de remplacement. Art. 12. --
L'exercice de la médecine foraine est interdite.
Art. 13. -- Sont interdits :
- tout acte de nature à procurer à un
malade un avantage matériel injustifié ou illicite;
- toute ristourne en argent ou en nature faite à
un malade;
- tout versement, acceptation ou partage clandestin
d'argent entre praticiens;
- toute commission à quelque personnel que ce
soit;
- l'acceptation d'une commission pour un acte
médical quelconque, et notamment pour examens, prescription de
médicaments, d'appareils, envoi dans un cabinet ou clinique
précis, station de cure, ou maison de santé.
Art.14.--Est interdit à tout médecin
d'accorder toutefacilité à quiconque se livre à l'exercice
illégal de la médecine.
Art. 15. --Tout compérage entre médecin et
pharmaciens, auxiliaires médicaux et toutes autres personnes, est
interdit.
Il est interdit de donnerdes consultationsdans les locaux
commerciaux où sont mis en vente des médicaments ou des
appareils, ainsi que dans les dépendances desdits locaux.
Art. 16. -- Il est interditd'exercer un
autremétierou uneautreprofessiondontles bénéficesseraient
accrus par des prescriptions ou des conseils d'ordre professionnel.
Art. 17.-- Il est interdit d'user d'un mandat
électifou d'une fonction administrative pour accroître sa
clientèle.
Art. 18. -- Sont interdites toutes supercheries propres
à déconsidérer la profession, en particulier toutes les
pratiques de charlatanisme.
Art. 19. -- Constitue une faute grave, le fait de
tromper la bonne foi des praticiens ou de la clientèle en leur
présentant comme salutaire ou sans danger un procédé de
diagnostic ou de traitement nouveau insuffisamment
éprouvé.
Art. 20. -- Dans l'exercice de son art, le médecin
peut délivrer des certificats, attestations ou documents dans les formes
réglementaires.
Tout certificat, attestation oudocument
délivré par un médecin doit comporter sa signature,
ainsique la mention de son nom et de son adresse.
Art. 21. --La délivrance d'un rapport tendancieux
ou d'un certificat de complaisance constitue une faute grave.
Titre II -- Devoirs du médecin envers le
malade
Art. 22. --Le médecin dès l'instant qu'il
est appelé à donner des soins à un maladeet qu'il a
accepté de remplir cette mission, s'oblige à :
- lui assurer aussitôt tous les soins
médicaux en son pouvoir et désirables en la circonstance,
personnellement ou avec l'aide de tiers qualifiées;
- agir toujours avec correction et aménité
envers le malade et à se montrer compatissant envers lui.
Art. 23. -- Le médecin doit toujours
élaborer son diagnostic avec le plus grandsoin sans compter le temps que
lui coûte ce travail.
Après avoir formulé un diagnosticet
prescrit le traitement,le médecindoit s'efforcer d'en obtenir
l'exécution, particulièrement si la vie du malade est en
danger.
Art. 24.-- Le médecin, dans ses
prescriptions,doitresterdansles limites imposées par la conditiondu
malade. Il ne doit en conscience, lui prescrire un traitement très
onéreux qu'enéclairant celui-ci ou sa famille sur les sacrifices
que comporte ce traitement et les avantages qu'ils peuvent en
espérer.
Le médecin ne doit jamais donner à un
malade des soins dans, un but de lucre.
Art. 25. --Le médecin appelé à
donnerles soins dans une famille ou dans un milieu quelconque doit assurer la
prophylaxie. Il met le malade et son entourage en présence de leurs
responsabilités vis-à-vis d'eux-mêmeset leur voisinage, ou
à défaut, l'obligation de transporterle malade dans une formation
sanitaire.
Il doit éviter de s'immiscer dans les affaires de
la famille ou du milieu intéressé.
Art. 26. --Lorsqu'il est appelé d'urgence
auprès d'un mineurou d'un autre incapable, et qu'il lui est impossible
de recueillir en tempsutile le consentement du représentant
légalde celui-ci, le médecin doit donner les soins qui
s'imposent.
Art. 27. -- Un pronostic grave peut légitimement
être dissimulé au malade.
Un pronostic fatal ne peut lui être
révélé qu'avec la plus grande circonspection; il doit
l'être généralement à sa famille à moins que
le malade aiteu préalablementcetterévélation ou
désigné les tiers auxquels elle doit être
faite.
Art. 28.-- Hormis le cas d'urgence et celui où il
manquerait à ses devoirs d'humanitéle médecin peut refuser
ses soins pour des raisons professionnelles ou personnelles, à
condition:
- de ne pas nuire de ce fait au malade;
- de s'assurer de la continuité des soins
prodigués au malade et de fournir à cet effet des renseignements
utiles.
Art. 29. -- (1) Toutes pratiques ou manoeuvres
d'avortement sont interdites.
(2) Cependant, il peut être
procédé à un avortement thérapeutique si cette
intervention est le seul moyen susceptible de sauvegarder la vie de
lamère. Dans ce cas, le médecindoit obligatoirement prendre
l'avis de deux confrères choisis respectivement parmi les experts
judiciaires et les membres du Conseil de l'Ordre. Ceux-cidoivent attester par
écrit quela vie de la mère ne peut êtresauvegardée
qu'au moyen d'une telle intervention.
Le protocole de la consultation est établi en
trois exemplaires dont l'un est remis au malade, et les deux autres
conservés par les médecins consultants.
En outre, un protocole de la décision prise
n'indiquant pas le nom du malade, doit être adressé sous pli
recommandé au Président du Conseil de l'Ordre.
(3) Dans les localités où il n'existe
qu'un seul médecin,et où l'avis de deux confrères ne
peutêtre facilement obtenu, la décision de provoquer un avortement
thérapeutique est laissée à l'appréciationdu
médecin traitant, à charge pour lui de transmettre
immédiatement un rapport circonstancié au Ministre de la
Santé Publique et au Président du Conseil de l'Ordre
(4)Le médecin doit s'incliner devant le refus
éventuel du malade dament informé. Cette règle ne peut
souffrir d'exception que dans les cas d'extrême urgence,lorsque le malade
est hors d'état de donner son consentement.
(5) Si le médecin ne peut, en raison de ses
convictions pratiquerl'avortement, il peutse retirer en assurant la
continuité des soins par un confrère qualifié.
Art. 30.--Au cours d'un avortement dystocique ou
prolongé; le médecin doit se considérer comme
étantle seul juge des intérêts respectifs de la mère
et de l'enfant, sans se laisser influencer par les considérations
d'ordre familial.
Art. 31.-- Le médecin doit établir
lui-mêmesa noted'honoraires. Il ne peut refuser à son client des
explications sur cette note.
Il reste libre de donner gratuitement ses soins quand sa
conscience le lui commande.
Art. 32.-- Le forfait pour la durée de
traitement est interditsauf pourun accouchement, une opération
chirurgicale, un traitement physiothérapique, ou obtenu dans une station
de cure ou dans un établissement de soins.
Le forfait pour l'efficacité d'un traitement est
interdit en toutes circonstances.
Art. 33. -- Tout partage d'honoraires entre
médecin traitant, d'une part, médecin consultant, chirurgien ou
spécialiste, d'autre part, lors d'une consultation ou d'un acte
opératoire, est formellement interdit. Chaque praticien doit
présenter distinctement sa note d'honoraires. L'acceptation, la
sollicitation ou offre d'un partage d'honoraires même non suivie d'effet,
constitue une faute professionnelle grave.
Art.34.-- Le chirurgien a le droit de choisir son aide
ou ses aides opératoires ainsi que l'anesthésiste. Les honoraires
de ceux-ci peuvent,soit êtreréclamés par eux directement
aumalade, soit figurer sur la note du chirurgien.
Toutefois, lorsque le chirurgien croit devoir confier les
fonctions d'aide opératoireou d'anesthésiste au médecin
traitant, celui-ci doit réclamer distinctement ses
honoraires.
Art. 35. -- La présence du médecin traitant
à une opération chirurgicale lui donne droit à des
honoraires distincts si elle est demandée ou acceptée par le
malade ou sa famille.
Titre III -- Devoirs du médecin en
matière de médecine sociale
Art. 36.-- Le médecin doit, compte tenu de son
âge, de son état de santé et éventuellement de sa
spécialisation prêterson' concoursà l'action des
autorités publiques en matièrede protection de la santé et
d'organisation de la permanence des soins.
Il doit également informer les services de
santé des maladies transmissibles, ainsi que les éléments
de statistiques nécessaires à la santé
publique.
Art.37.--(1)Les praticiens agréés comme
médecins de travail auprès des entreprises industrielles et
commerciales doivent communiquer leurs contrats de travail au ministère
chargé de la santé publique ainsi qu'au Conseil de l'Ordre dans
le mois qui précède leur prise de service.
(2) Les médecins privés qui ne sont pas
propriétairesdu matériel qu'ils utilisent ou du local dans lequel
ils exercentleur profession doivent communiquer les contrats y afférents
dans les conditions fixées au paragraphe
précédent.
Art. 38. -- Il est interdit au médecin faisant la
médecine des soins, et la médecine préventive dans une
collectivité ou une consultation publique de dépistage, d'user de
cette fonction pour augmenter sa clientèle.
Art. 39. -- Nul ne peut être à la fois
médecin expert et médecin traitant d'un même malade, sauf
nécessité absolue procédant de l'absence du médecin
dans la localité.
Sauf accord des parties, un médecinne doit pas
accepterune mission d'expertise dans laquelle sont en jeu les
intérêtsd'un de ses clients, amis, prochesou d'un groupementqui
fait appelà ses services. Il en est de même lorsque ses propres
intérêts sont en jeu.
Art. 40. -- Le médecinexpert doit, avant
d'entreprendretouteopérationd'expertise, informer de sa mission la
personne qu'il doit examiner.
Art. 41. -- Lorsqu'il est investi de sa mission, le
médecinexpert doit se récuser s'il estime que les questions qui
lui sont posées sont étrangères à la technique
proprement médicale.
Dans son rapport, il ne doit révéler que
les élémentsde natureà fournir les réponsesaux
questions posées dans la décision qui l'a nommé, et taire
tout autre renseignement qu'il a pu apprendre à l'occasion de sa
mission.
Titre -- Devoirs de confraternité
Art. 42. --(1)Les médecins doivent entretenir
entre eux des rapports de bonne confraternité. Ils se doivent assistance
morale.
Celui qui a un dissentiment professionnel avec son
confrère doit d'abord tenter de se réconcilier avec lui. En cas
d'échec, il doit en aviser le Président du Conseil de l'Ordre aux
fins de conciliation.
(2) Il est interdit de calomnier un confrère, de
médire de lui, ou de se faire l'écho de propos de nature à
lui nuire dans l'exercice de sa profession.
(3) Il est de bonne confraternité de prendre la
défense d'un confrère injustement attaqué.
Art. 43. -- Tout détournement et toute tentative
de détournement de clientèle sont interdits.
Art. 44. -- Le
médecinappeléauprèsd'un maladeque soigneun de ses
confrères doit respecter les règles suivantes :
- si le malade entend renoncer aux soins de son premier
médecin: s'assurer de cette volonté expresse et prévenir
le confrère;
- si le malade a voulu simplement demander un avis
sans changer le médecin traitant : proposer une consultation en commun
et se retirer après avoir assuré les seuls soins d'urgence. Au
cas où pour une raison valable, la consultation paraîtrait
impossible ou inopportune, le médecin peut examiner le malade, mais doit
réserver à son confrère son avis surie diagnostic et le
traitement;
- si le malade l'a appelé, en raison de l'absence
de son médecinhabituel: assurer les soins jusqu'au retour du
confrère et donner à ce dernier toutes les informations
utiles.
Art. 45. --Sous réserve des dispositions de
l'article 57, le médecin peut accueillir dans son cabinet tous les
malades, quel que soit leur médecin traitant.
Art. 46.-- Le médecin traitant d'un malade doit
proposer une consultation dès que les circonstances
l'exigent.
Il doit accepter toute consultation demandée par
le malade ou son entourage.
Dans les deux cas, le médecin traitant propose le
consultant qu'il juge le plus qualifié, mais il doit tenir compte des
désirs du malade et accepter en principe, sauf raison sérieuse,
de rencontrer tout autre médecin. Il a la charge d'organiser les
modalités de la consultation.
Si le médecin traitant ne croit pas devoir donner
son agrément au choix formulé, il a la possibilité de se
retirer sans être contraint d'expliquer son refus.
Art.47.-- A la fin d'une consultation entre deux ou
plusieurs médecins, leurs conclusions doivent être
rédigées en commun et par écrit, signées par le
médecin traitant et contresignées par le ou les médecins
consultants.
Quand il n'est pas rédigé de consultations
écrites, le consultant est sensé partager entièrement
J'avis du médecin traitant.
Art. 48. -- Quand, au cours d'une consultation entre
médecins, les avis du consultant et du médecin traitant
diffèrent sur des points essentiels, le médecin traitant est
libre de cesser les soins si l'avis du consultant prévaut.
Art. 49.--Sauf,cas d'urgence, le médecin qui a
été appelé en consultation ne doit pas revenir
auprès du maladeexaminéen commun,en l'absence du
médecintraitant, ou sans son approbation, au cours de la maladieayant
motivé la consultation.Dans ce cas, il en informe le
médecintraitantdans les plus brefs délais.
Art. 50. -- Le médecin ne peut se faire remplacer
dans sa clientèle que temporairement par un confrère, un
étudiant ou un médecin non inscrit au tableau de l'Ordre; le
Conseil informé
obligatoirement et immédiatement apprécie
si le remplaçant remplit les conditions de moralité
nécessaire.
Pendant la période de remplacement,
l'étudiant ou le médecin relève de la juridiction
disciplinaire. .
Art.51.-- Un médecin qui, pendant ou après
ses études, a remplacé un confrère pendant une
durée supérieure de trois mois, ne doit pas, pendant un
délai de deux ans à compter de la fin de ce remplacement,
s'installer à un poste lui permettant d'entrer en concurrence directe
avec le médecin qu'il a remplacé à moins qu'il y ait entre
eux un accord qui doit être notifié au Conseil de l'Ordre. Lorsque
cet accord ne peut être obtenu, le cas doit être soumis au Conseil
de l'Ordre.
Un médecin ne peut se faire remplacer par un
confrère fonctionnaire ni par un médecin au service de l'Etat au
titre de l'assistance technique ou un confrère servant dans une oeuvre
confessionnelle, à moins de pénurie de médecins
privés.
Art. 52. -- Le médecinne doit pas s'installer dans
un immeubledans lequel exerce un confrère de même
spécialité.
Art. 53. --Toute association ou société
entre médecins doit faire l'objet d'un contrat écrit qui respecte
l'indépendance professionnelle de chacun d'eux.
Les projets de contrats doivent être soumis au
ministre chargé de la Santé publique etau Conseil de
l'Ordre.
Art. 54. -- Il est interdit au
médecinexerçantà titre individuel de se faire assister
dans l'exercice normal, habituel et organisé de la profession, sauf cas
d'urgence et pour une durée maximum de quinze jours, d'un médecin
exerçant sous son nom.
Titre V -- Devoirs des médecins envers les membres
des professions paramédicales et les auxiliaires
médicaux
Art. 55. -- Dans leurs rapports avec les membres des
professions paramédicales, notamment les pharmaciens et les
chirurgiens-dentistes,les médecins doivent respecter
l'indépendance de ceux-ci. Ils doivent éviter tout agissement
injustifié tendant à leur nuire vis-à-vis de leur
clientèle et se montrer courtois à leur égard.
Art. 56. -- Le médecin doit se montrercourtois et
bienveillant envers les auxiliaires médicaux et s'attacher à ne
pas leur nuire inconsidérément.
Art.57. --Tout projet de contrat d'association ou de
société ayant un objet professionnel entre un ou plusieurs
membres de l'une des professions visées aux articles 55 et 56 ci-dessus
doit être soumis à "approbation du Conseil de l'Ordre.
Titre VI -- Dispositions diverses
Art. 58. -- Les infractions aux dispositionsdu
présentCode relèventde la juridiction du Conseil de l'Ordre
constitué en Chambre de discipline conformément à la
loi.
L'initiative de la saisine de cette instance appartient
concurremment à l'Ordre et au ministre chargé de la Santé
publique.
Art. 59. -- Sauf cas de force majeureou lorsque l'objet
de la réquisition concerne un conjoint, un parent ascendantoudescendant
l e , médecin requis doit obtempérer à la
réquisition dans les meilleurs délais.
Art. 60. -- (1) En vue de la suspensiond'un praticien en
cas d'infirmité ou d'état pathologique rendant dangereux
l'exercice de son art, trois experts sont habilités à
rédiger le rapport.
(2) Ces experts sont désignés de la
manière suivante:
- le premier par "intéressé ou sa
famille;
- le second par le Conseil de l'Ordre;
- le troisième par les deux premiers
experts.
En cas de désaccord entre les deux premiers sur le
choix du troisième, celui-ci est désigné par
l'autorité chargée de la Santé publique.
Art. 61. -- Lorsqu'il est saisi danstous les cas
visés par le présentCode, le Conseil de l'Ordre doit se prononcer
dans un délai de 30 jours suivant sa saisine.
Si une enquêtes'avère nécessaire, ce
délai peutêtre prorogépour une nouvelle périodene
pouvant excéder deux mois.
À l'expiration de ces différents
délais l'avis du Conseil est réputé favorable.
Art. 62. --Tout médecin, lors de son
inscription au tableau,doit affirmer devantle Conseil de l'Ordre qu'il a eu
connaissance du présentCode de Déontologie,et s'engagersous
serment et par écrit à le respecter.
Art. 63. -- Tout médecin qui cesse d'exercer est
tenu d'en avertir le Conseil de l'Ordre. Celui-ci donne actede sa
décision, et si l'intéressé le demande
expressément, il n'est plus maintenuautableau. Cette décision est
notifiée au ministre chargé de la Santé
publique.
Titre VII -- De l'Assemblée
Générale
Chapitre premier. -- Organisation et fonctionnement de
l'Assemblée Générale Section 1 - Organisation et
fonctionnement de l'Assemblée Générale.
Art. 64. -- Constituée de tous les médecins
inscrits au tableau de l'Ordre, l'Assemblée générale
comprend trois divisions :
Division A : médecins particuliers ou des
entreprises;
Division 8 : médecins des oeuvres confessionnelles
;
Division C : médecins des services
publics.
Art. 65.-- (1) Lorsqu'elle est convoquée en
assemblée constitutive, l'Assemblée générale est
présidée par le doyen des médecins, assisté de deux
jeunes confrères.
Les fonctions de ce bureau provisoire prennent fin
dès l'élection du bureau du Conseil.
(2)Les sessions ordinaires ou extraordinaires sont
présidées par le Président du Conseil de l'Ordre, ou en
cas d'empêchement par le Vice- Président.
Art. 66. -- (1) Pour siéger
valablement,l'Assemblée généraledoit réunir les 2/3
des membresde chaque division.
(2) Les membres empêchéspeuventêtre
représentés par procuration. Chaque médecin ne peut
présenter qu'une seule procuration. Ces procurations sont
enregistrées au bureau de l'Assemblée générale
dés le début de la session.
(3)Lorsque le quorum n'est pas atteint,
l'autorité qui a convoqué l'Assemblée
générale procède à une nouvelle convocation dans un
délai minimum de 15jours et maximum d'un mois. L'Assemblée
générale peut alors siéger valablement quel que soit le
nombre des membres présents et représentés. (4) Seuls les
membres s'étant acquittés de toutes leurs cotisations participent
au vote.
Section 2 -- Fonctionnement de l'Assemblée
Générale
Art. 67.-- La convocation de l'Assemblée
générale constitutive relève de la compétence de
l'autorité responsable de la Santé publique. Les convocations des
assemblées générales ordinaires ou extraordinaires sont
effectuées par les soins du Président du Conseil de
l'Ordre.
Elles doivent être
adresséesaccompagnées de l'ordre du jour, au membre un mois avant
la date fixée pour la session.
Art. 68. -- Les délibérations de
l'Assemblée générale sont acquises à la
majorité simple. En cas de partage de voix, celle du président
est prépondérante.
Le vote est public.
Art. 69. -- Lors des sessions extraordinaires,
l'Assemblée ne peut délibérer que sur l'objet de sa
convocation.
Chapitre II -- Election et remplacement des membres du
conseil de l'Ordre
Art. 70. -- Lorsqu'elle siège pour élire
les membres et le bureau du Conseil de l'Ordre, l'Assemblée
générale doit réunir au moins les 2/3 des membres de
chaque division.
Art. 71. -- Les membresdu Conseil sont élus par
l'Assemblée générale, division par division, au scrutin
uninominal secret, et à la majorité simple des voix.
Chaque division présente ses candidats. Les
membres titulaires et le suppléant sont élus individuellement les
uns après les autres.
Art.72.--Les membres du bureau sont élus par
l'Assemblée générale parmi les membres du Conseil au
scrutin uninominal secret et à la majorité absolue des
voix.
Art.73.-- En cas de décès ou
dedéfaillance dûment constaté d'un membre du Conseil, le
suppléant le remplace de droit jusqu'aux nouvelles élections en
Assemblée générale.
Lorsqu'il s'agit d'un membrede bureau du Conseil, il est
pourvu à son remplacementpar voie d'élections au sein du
Conseil.
Titre VIII - Dispositions finales
Art. 74.--Sont abrogées toutes dispositions
antérieures, notamment le décret n° 66-DF-311 du 7 Juillet
1966 portant Code de déontologie médicale.
Art. 75. -- Le présent décret sera
enregistré puis publié au journal officiel en français et
en anglais.
Yaoundé le 12 avril 1983.
Le Président de la République, Paul Biya.
ANNEXE V
La Cour de cassation, Première Chambre civile, 25
février 1997 Arrêt n° 426. Cassation
Pourvoi n° 94-19.685
Sur le pourvoi formé par M. Jean-Pierre HEDREUL,
demeurant...,
En cassation d'un arrêt rendu le 5 juillet 1994 par la Cour
d'appel de Rennes (1re Chambre, section A), au profit :
1°/ de M. C., demeurant...,
2°/ de la société Polyclinique
Sévigné, dont le siège est rue du Chêne Germain,
35510 Cesson Sévigné,
3°/ de M. T., demeurant..., Défendeurs à la
cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen
unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Moyens produits par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux
Conseils pour M. HEDREUL. MOYEN UNIQUE DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif
attaqué d'avoir débouté Monsieur HEDREUL de sa demande en
désignation d'un expert avec une mission similaire à celle du
précédent expert désigné par les premiers juges et
de son action en responsabilité à l'encontre des médecins
et chirurgiens, en raison des troubles dont il est resté atteint
à la suite d'une intervention chirurgicale, et pour manquement à
leur devoir de conseil,
AUX MOTIFS QU'
il n'est pas contesté que Monsieur HEDREUL a eu un
important accident matériel de la circulation la veille de l'expertise,
l'expert d'ailleurs en page 2 de son rapport note que ce fait l'avait mis dans
un "état psychique un peu perturbé",
toutefois, il n'est pas démontré que cette
circonstance de même que l'absence de son avocat à ses
côtés lors de ses opérations d'expertise ait pu avoir une
incidence sur l'appréhension de ce dossier par l'expert, notamment
celui-ci a pu faire un recensement très complet (p. 3, 4 et 5) des
doléances de Monsieur HEDREUL, il n'est en rien démontré
qu'un élément déterminant ait été omis ou
que l'examen de Monsieur HEDREUL n'ait pu utilement être pratiqué
le jour des opérations d'expertise.
Monsieur HEDREUL reproche à l'expert d'avoir commis des
erreurs quant à la date des opérations en indiquant que
l'exérèse du polype s'est réalisé le 16
février alors qu'elle a eu lieu le 15, de même, l'expert mentionne
que le malade a pu sortir le 17 février alors que c'est le 16 qu'il a
quitté la clinique, enfin, il parle des radios pratiquées le 17
février alors qu'il s'agit du 16 et de celles du 18 février alors
qu'elles ont été réalisées le 17 février,
L'expert a effectivement commis une erreur de datation des
différentes opérations chirurgicales subies à cette
période par Monsieur HEDREUL, toutefois cette simple erreur de date est
sans incidence sur la valeur de l'analyse de l'expert puisque la chronologie
des diverses interventions et laps de temps les séparant a
été très exactement prise en compte par l'expert, le
rapport d'expertise n'a fait que décaler d'un jour l'ensemble des
événements, objet du litige,
Les parties ont soumis à l'expert l'ensemble des documents
jugés utiles aux débats,
L'expert a procédé à un examen approfondi de
ceux-ci, il n'a pas estimé nécessaire pour formuler l'avis
technique qui lui était demandé d'en examiner d'autre,
Monsieur HEDREUL ne produit aucun avis médical
démontrant que l'examen d'autres documents aurait pu permettre une
appréciation différente de l'expert, ne saurait être
considéré comme tel l'avis établi le 27 décembre
1985 par le Docteur Roland COMTE à la demande de Monsieur HEDREUL, en
effet, ainsi que l'a relevé le premier juge, ce rapport est sommaire et
peu argumenté, procédant par affirmation et sans
démonstration : "il y a lieu de relever un certain degré de
maladresse au cours de cette intervention puisqu'il y a eu perforation... le
diagnostic de cette opération a été long à poser...
ce qui a entraîné une intervention tardive aboutissant à
une colostomie",
Au contraire le Professeur BLOCH a procédé
à une discussion approfondie des différents problèmes
soulevés, il a recherché de façon très minutieuse
en interrogeant le Docteur C. et en examinant les documents qui lui
étaient soumis si la perforation colique pouvait être en rapport
avec une erreur ou une imprudence du Docteur C.,
De même, il a relaté de façon très
précise la chronologie des interventions pour rechercher s'il y avait eu
un retard dans le diagnostic de perforation colique et dans le traitement,
Enfin c'est également après un examen
très complet du dossier au regard tant des faits que des données
acquises de la science médicale, que l'expert a apprécié
l'opportunité des traitements.
Monsieur HEDREUL invoque encore la jurisprudence relative
à l'absence de consentement éclairé du malade,
toutefois il lui appartient de rapporter la preuve de ce que
le médecin ne l'aurait pas averti des risques inhérents à
une polypectomie et notamment celui qualifié de non négligeable
par l'expert d'une perforation digestive,
Monsieur HEDREUL ne produit aux débats aucun
élément accréditant cette thèse,
Une nouvelle expertise ne saurait être ordonnée pour
suppléer la carence des parties dans l'administration de la preuve,"
ALORS D'UNE PART QU'aux termes de l'article 146 du nouveau
Code de procédure civile, une mesure d'instruction peut être
ordonnée si la partie qui la sollicite ne dispose pas
d'éléments suffisants pour prouver un fait et, seule se voir
opposer sa carence, la partie dont les allégations ne s'appuient sur
aucun élément précis permettant de lui faire crédit
si bien qu'en statuant de la sorte alors que Monsieur HEDREUL faisait valoir
qu'aucun document histologique, ni compte-rendu opératoire n'avait
été communiqué, ce que n'avait pas manqué de
relever le Conseil de l'Ordre des Médecins de BRETAGNE, ce qui
caractérisait à tout le moins l'existence
d'éléments sérieux de nature à justifier une
nouvelle expertise, la Cour a violé le texte susvisé,
ALORS D'AUTRE PART QU'en refusant d'ordonner une expertise,
alors que les faits invoqués par Monsieur HEDREUL ne pouvaient
être prouvés que par des recherches de pièces en la seule
possession des médecins, document histologique et compte rendu
opératoire, soit des pièces auxquelles il ne pouvait
accéder, les juges ont encore violé l'article 146 du nouveau Code
de procédure civile,
ALORS ENSUITE QUE le médecin est tenu à un
devoir d'information et de conseil à l'égard de son patient,
lequel doit être ainsi dûment informé des risques encourus,
qu'en mettant dès lors à la charge de Monsieur HEDREUL,
l'obligation de prouver qu'il n'avait pas été informé des
risques, qualifiés par la médecine de "non négligeables",
qui pouvaient survenir à la suite de l'intervention subie, la Cour a
renversé le principe de la preuve et violé ainsi l'article 1315
du Code civil,
ALORS ENFIN QUE en jugeant que Monsieur HEDREUL n'apportait
pas la preuve d'un défaut d'information sur les risques encourus
qualifiés par la Cour de "non négligeables", tout en tenant pour
acquis le fait qu'il n'avait pas bénéficié d'examen de
contrôle après sa première intervention chirurgicale, et
que c'est seulement le surlendemain que le diagnostic de perforation avait
été établi, ce dont il résultait à
l'évidence que les médecins
n'avaient pas pris les mesures qui s'imposaient afin de
prévenir les complications redoutées, la Cour n'a pas tiré
les conséquences légales de ses constatations, et par suite a
violé l'article 1147 du Code civil.
LA COUR, en l'audience publique du 22 janvier 1997. Sur le moyen
unique pris en ses deux dernières branches :
Vu l'article 1315 du Code civil ;
Attendu que celui qui est légalement ou contractuellement
tenu d'une obligation particulière d'information doit rapporter la
preuve de l'exécution de cette obligation ;
Attendu qu'à l'occasion d'une coloscopie avec ablation
d'un polype réalisée par le Docteur C., M. HEDREUL a subi une
perforation intestinale ; qu'au soutien de son action contre ce
médecin,
M. HEDREUL a fait valoir qu'il ne l'avait pas informé
du risque de perforation au cours d'une telle intervention ; que la Cour
d'appel a écarté ce moyen et débouté M. HEDREUL de
son action au motif qu'il lui appartenait de rapporter la preuve de ce que le
praticien ne l'avait pas averti de ce risque, ce qu'il ne faisait pas
dès lors qu'il ne produisait aux débats aucun
élément accréditant sa thèse ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le médecin est
tenu d'une obligation particulière d'information vis-à-vis de son
patient et qu'il lui incombe de prouver qu'il a exécuté cette
obligation, la Cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deux
premières branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt
rendu le 5 juillet 1994, entre les parties, par la Cour d'appel de Rennes ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état
où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait
droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Angers ;
Condamne M. C. aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
rejette la demande de M. T. et de la polyclinique Sévigné.
Sur le rapport de M. Sargos, conseiller, les observations de
la SCP Peignot et Garreau, avocat de M. Hédreul, de la SCP Coutard et
Mayer, avocat de la société Polyclinique... et de M. T., de Me Le
Prado, avocat de M. C., les conclusions de M. Roehrich, avocat
général. M. LEMONTEY, Président.
La Cour de cassation, Première chambre civile, 14 octobre
1997
TABLE DES MATIERES
Dédicace i
Remerciements . ii
Avertissement iii
Résumé . .iv
Abstract v
Liste des abréviations vi
Sommaire .. vii
INTRODUCTION GENERALE . P.1
PREMIERE PARTIE
LE DOMAINE DE LA RESPONSABILITE PENALE DU MEDECIN TRAITANT p.
7
CHAPITRE I: LES CONTOURS FLUCTUANTS DES CONDITIONS DE LA
RESPONSABILITE PENALE DU MEDECIN TRAITANT . .. p. 8
Section I : Le caractère ambivalent de la
responsabilité pénale du médecin traitant . p. 8
Paragraphe I : Les conditions de la mise en oeuvre de la
responsabilité pénale du médecin traitant .. p. 9
A- L'existence d'une faute, élément indispensable
pour engager la responsabilité
pénale du médecin traitant ..... p. 9
1-La thèse de l'unité des fautes civile et
pénale ... p. 10
2- La thèse de la dualité des fautes civile et
pénale .. p. 12
B- La survenance d'un préjudice et la
nécessité d'un lien de causalité p. 13
1- Le lien de causalité et le comportement passif du
médecin p. 14
2- Le lien de causalité et l'omission de certaines
précautions concomitantes à l'action thérapeutique p.
15
Paragraphe II : La diversité des causes d'exonération de la
responsabilité pénale du médecin
traitant p. 16
A- Les causes d'exonération propres à la
liberté d'action du médecin p. 17
1- Les avortements dits « thérapeutiques »
|
.. p. 17
|
2- Les stérilisations « thérapeutiques
»
|
. p. 18
|
|
B- Les causes d'exonération relatives aux actes
échappant à la volonté
du médecin
|
. p. 19
|
1- La réaction défavorable du patient au
traitement à lui administré
|
. p. 19
|
2- Le médecin sous le coup de la démence ou de la
contrainte
|
p. 20
|
3- La faute de l'auxiliaire médical ou du patient
|
p. 22
|
|
Section II : Le statut juridique du médecin traitant : un
facteur de renforcement
de sa responsabilité pénale
|
. p. 24
|
Paragraphe I : La responsabilité pénale liée
à la profession du médecin
|
... p. 24
|
A - L'encadrement juridique de la responsabilité du
médecin
|
.. p. 25
|
1- L'exigence légale de probité faite au
professionnel médical
2- Le droit à la santé : un droit humanitaire
universellement reconnu
|
p. 25
p. 26
|
B- Les obligations du médecin traitant.
|
.. p. 27
|
1-Les devoirs généraux du médecin
|
. p. 27
|
2-Les devoirs du médecin envers le malade
|
. p. 28
|
Paragraphe II : La responsabilité relative aux
informations mises
à la disposition du médecin traitant
|
p. 29
|
A- Le principe du secret médical .. p. 30
1-Le fondement du secret professionnel . p. 30
2- Les effets produits par le secret médical p. 32
B- Le traitement spécifique des patients à la
suite d'un diagnostic grave ou fatal ...p. 32
|
1- L'identification du patient
|
p. 33
|
2- Le médecin face au patient en cas de diagnostic grave
ou fatal
|
.. p. 33
|
|
CHAPITRE II: LA DIVERSITE DES INFRACTIONS RELEVANT DE LA
|
|
RESPONSABILITE PENALE DU MEDECIN TRAITANT
|
p. 36
|
|
149
|
Section I: Les atteintes à l'intégrité
physique du patient
|
p. 37
|
Paragraphe I : La multiplicité des infractions de
commission
|
... p. 38
|
A- Les atteintes à la vie
|
p. 38
|
1- L'euthanasie
|
p. 39
|
2- L'infanticide
|
p. 40
|
B- Les coups, violences et voies de fait
|
p. 41
|
Paragraphe II : l'existence des infractions d'omission
|
p. 42
|
A-
|
La faute pénale
|
p. 42
|
1-
|
La faute dans la réalisation de l'acte médical .
|
p. 43
|
|
a- La maladresse
|
p. 43
|
|
b- L'imprudence
|
p. 43
|
2-
|
La faute dans le suivi médical : La négligence
|
p. 44
|
3-
|
Le cas de l'erreur de diagnostic.
|
p. 45
|
B- L'omission de porter secours : une infraction
conditionnée
par la réunion de plusieurs éléments
|
p. 45
|
1- La nécessité d'un élément
intentionnel
|
p. 46
|
2- L'exigence d'un mode d'assistance
|
p. 48
|
3- L'absence de risque lors de l'assistance
|
p. 49
|
SECTION II : Les atteintes à l'intégrité
morale du patient, à l'éthique et à la déontologie
|
p.49
|
Paragraphe I : Les atteintes à l'intégrité
morale du patient
|
p. 50
|
A- La violation du secret médical
|
p. 50
|
B- Les abus sexuels causés par le médecin
|
. p. 52
|
|
Paragraphe II : La responsabilité pénale du
médecin relative à l'inobservation
des principes éthiques et déontologiques
|
p. 53
|
|
150
|
A- Les exigences éthiques dans la pratique de la
médecine . p. 53
B- Le fondement de l'établissement des règles
éthiques et déontologiques : le renforcement des droits du
patient p. 55
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE p. 57
DEUXIEME PARTIE
LA MISE EN OEUVRE DE LA RESPONSABILITE PENALE DU MEDECIN
TRAITANT..p. 59
CHAPITRE I: LES DIFFICULTES RELATIVES A LA MISE EN OEUVRE DE LA
RESPONSABILITE PENALE DU MEDECIN TRAITANT p. 60
Section I: Une pluralité d'obstacles propre à
l'environnement camerounais p. 60
Paragraphe I : Les réalités culturelles et
socio-économiques p. 61
A- Les réalités culturelles . p. 61
1- La prédominance de la notion de fatalité p.
61
2- La survivance des mentalités mystico-religieuses .....
p. 62
B- Les réalités socio-économiques .. p.
63
Paragraphe II : Les réalités d'ordre juridique p.
64
A- L'absence d'un encadrement strict de la profession de
médecin
au Cameroun .. p. 64
B- L'assistance judiciaire : une avancée significative
dans la résolution
des difficultés d'ordre économique et juridique p.
66
1- L'assistance judiciaire : une institution pour le justiciable
indigent
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.. p. 66
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2- L'assistance judiciaire : un gage d'égal accès
à la justice
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p. 67
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Section II : Les difficultés liées à
l'établissement de la preuve
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p. 68
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Paragraphe I : Les difficultés d'accès au dossier
médical
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p. 68
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A- Le caractère secret du dossier médical ..... p.
69
B- L'esprit de corps et la règle de principe «
actori incumbit probatio » : des freins
supplémentaires dans l'établissement des preuves p.
70
1- L'esprit de corps . p.70
2- Les difficultés résultant de la règle de
principe « actori incumbit probatio » ...... p. 71
a- L'économie du principe p. 71
b- Les difficultés de son efficacité en
matière médicale . p. 72
Paragraphe II : L'arrêt dit HEDREUL : Une révolution
procédurale dans
la manifestation de la vérité p. 72
A- Le contenu de l'arrêt HEDREUL p. 72
B- l'apport déterminant de l'arrêt HEDREUL :
le renversement de la charge de la preuve .. p. 74
CHAPITRE II : LA PLURALITE DES ASPECTS TECHNIQUES :
LA COMPLEXITE DE LA PROCEDURE .... p. 76
Section I : la spécificité des étapes
intervenant dans la mise en oeuvre de
la responsabilité pénale du médecin traitant
p. 76
Paragraphe I: La constatation de l'infraction et
la mise en oeuvre des poursuites pénales p. 77
A- La constatation de l'infraction pénale en
matière médicale p. 77
B- La mise en oeuvre des poursuites pénales en
matière médicale .. p. 79
Paragraphe II : De l'instruction préparatoire à
l'audience . p. 80
A- L'instruction préparatoire mettant en cause le
médecin p. 81
1- La consistance des moyens du juge d'instruction p. 81
2- La clôture de l'information judiciaire . p. 82
B- Le déroulement du procès pénal mettant en
cause le médecin ... p. 82
1- Le caractère exceptionnel de la charge de la preuve p.
83
2- l'expertise, une particularité du procès
pénal. . p. 84
Section II : La nécessité de la mise en oeuvre des
dispositions appropriées
en vue d'une meilleure protection des patients p. 85
Paragraphe I : Les défis relatifs à la
procédure de mise en oeuvre
de la responsabilité du médecin p. 86
A- La spécialisation des agents et officiers de police
judiciaire
dans la constatation des infractions en matière
médicale . p. 86
B- Le recours à l'expertise dès la phase de
l'enquête préliminaire .. p. 87
Paragraphe II : Les autres innovations envisageables ... p.
88
A- Les innovations propres à la formation des
médecins et à
la pratique de la médecine au Cameroun p. 88
1- L'enseignement du « droit humain » dans les
facultés de médecine .. p. 88
2- L'amélioration des conditions de travail des
médecins p. 89
B- La mise en place d'un cadre propice en vue de la protection
des patients . p. 90
1- La mise sur pied d'un Code de la Santé Publique p.
90
2- La nécessité d'assainir les comportements et
la réglementation dans les hôpitaux p. 91
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE . p. 93
CONLUSION GENERALE p. 94
BIBLIOGRAPHIE p. 97
ANNEXES p.102
TABLE DES MATIERES . p. 148