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Guerre, éducation et paix dans la philosophie politique de Rousseau et de Kant. Argument pour la paix et la bonne gouvernance.

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par Jonathan Kankonde Bakamana
Université de Kinshasa - Maà®trise en philosophie 2009
  

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2. LIVRE PREMIER99(*) : LES FONDEMENTS DE LEGITIMITE DU POUVOIR

« L'homme est né libre, et partout il est dans les fers ». Ainsi commence le livre premier du contrat social, exactement comme commençait l'Emile : « Tout est bien, sortant des mains de l'auteur des choses : tout dégénère entre les mains de l'homme »100(*). Ces deux extraits résument suffisamment les raisons de la critique sociale amorcée par Rousseau. Il s'agit d'un ordre social qui corrompt la nature de l'homme. Il faut faire table rase et reconstruire !

L'ordre social, affirme Rousseau, est un droit sacré, qui sert de base à tous les autres. Cependant ce droit ne vient point de la nature, il n'est fondé ni sur la nature ni sur le droit divin, mais sur les conventions. Les conventions impliquent, par définition, une construction en commun du sens de ce sur quoi on veut se convenir. Toute la politique sera ainsi l'oeuvre d'une pluralité des volontés en train de chercher à se « convenir ». Le problème traditionnel du meilleur régime est résolu : seul le régime où la fondation et la règlementation de l'ordre politique est l'oeuvre d'une mise en commun des volontés est légitime.

CETTE CONCEPTION DE L'ORDRE SOCIAL ÉMERGE D'UNE REMISE EN QUESTION PAR ROUSSEAU DE SES INTERLOCUTEURS PHILOSOPHIQUES, NOTAMMENT GROTIUS ET HOBBES. POUR ROUSSEAU, GROTIUS NIE QUE TOUT POUVOIR HUMAIN SOIT ÉTABLI EN FAVEUR DE CEUX QUI SONT GOUVERNÉS : IL CITE L'ESCLAVAGE EN EXEMPLE. SA PLUS CONSTANTE MANIÈRE DE RAISONNER EST D'ÉTABLIR TOUJOURS LE DROIT PAR LE FAIT. ON POURRAIT EMPLOYER UNE MÉTHODE PLUS CONSÉQUENTE MAIS NON FAVORABLE AUX TYRANS101(*).

Rousseau prétendait, peut-être avec raison, substituer à la méthode historique et génétique de ses prédécesseurs, une méthode hypothético-déductive102(*), plutôt tournée vers la norme que vers le fait.

AFFIRMER QUE LE POUVOIR POLITIQUE N'EST PAS ÉTABLI POUR LE PEUPLE (EN FAVEUR DU PEUPLE) C'EST ACCRÉDITER L'IDÉE QUE LES PEUPLES SONT DES « TROUPEAUX DE BÉTAIL, DONT CHACUN A SON CHEF POUR LE DÉVORER »103(*). C'EST AUSSI PENSER QUE LES CHEFS SONT DES DIEUX ET LES PEUPLES DES BÊTES. COMME UN PÂTRE EST D'UNE NATURE SUPÉRIEURE À CELLE DE SON TROUPEAU, LES PASTEURS D'HOMMES, QUI SONT LEURS CHEFS, SONT AUSSI D'UNE NATURE SUPÉRIEURE À CELLE DE LEURS PEUPLES. AINSI RAISONNAIT CALIGULA, AU RAPPORT DE PHILON.... CONCLUANT ASSEZ BIEN DE CETTE ANALOGIE QUE LES ROIS ÉTAIENT DES DIEUX, OU QUE LES PEUPLES ÉTAIENT DES BÊTES. LE RAISONNEMENT DE CE CALIGULA REVIENT À CELUI DE HOBBES ET DE GROTIUS.104(*)

ON VOIT BIEN QUE LA PENSÉE DE ROUSSEAU S'INSCRIT DANS UNE DÉMARCHE DE RENVERSEMENT THÉORIQUE DES FONDEMENTS TRADITIONNELS DE LA POLITIQUE. ARISTOTE, EN AFFIRMANT QUE LES HOMMES NE SONT PAS NATURELLEMENT ÉGAUX, CERTAINS SONT NÉS POUR L'ESCLAVAGE ET D'AUTRES POUR LA DOMINATION, ABONDAIT DANS LE MÊME SENS QUE CALIGULA. AUSSI ROUSSEAU DÉMANTÈLE-T-IL LA NOTION DE FORCE ET D'ESCLAVAGE COMME FACTEURS ESSENTIELS QUI DÉTERMINENT LES RAPPORTS POLITIQUES.

EN EFFET, LA FORCE, POUR LUI, EST UNE PUISSANCE PHYSIQUE, AUCUNE MORALITÉ NE PEUT PROCÉDER D'ELLE. SI UN INDIVIDU CÈDE À LA FORCE, IL LE FAIT PAR NÉCESSITÉ ET NON PAR VOLONTÉ. OR, SELON ROUSSEAU, LE SEUL ACTE FONDATEUR DU CORPS POLITIQUE AYANT UNE CONSISTANCE MORALE, C'EST LA VOLONTÉ, LA LIBERTÉ105(*). TOUT POUVOIR QUI SE FONDE SUR L'ÉLÉMENT DE FORCE N'A PAS DE PERTINENCE MORALE ET DONC EST UNE TYRANNIE, AU SENS OÙ H. ARENDT L'ENTENDRA PLUS TARD EN RÉFÉRENCE AU TOTALITARISME D'HITLER COMME « ...UN RÉGIME SANS LOIS, OÙ LE POUVOIR EST MONOPOLISÉ PAR UN HOMME »106(*). EN CONSÉQUENCE, AUCUN DROIT NE PEUT DÉCOULER DE LA FORCE BRUTE, ÉLÉMENT INTERCHANGEABLE, CAR LE DROIT EST LA BASE DE LA PERMANENCE SOCIALE. CONVENONS DONC, AFFIRME ROUSSEAU, QUE FORCE NE FAIT PAS DROIT, ET QU'ON N'EST OBLIGÉ D'OBÉIR QU'AUX PUISSANCES LÉGITIMES.107(*)

En ce qui concerne l'esclavage volontaire qui consiste selon Grotius et Aristote, pour un homme ou un peuple, à se donner gratuitement auprès d'un tyran, Rousseau le considère comme une chose « absurde et inconcevable ». Dire cela de tout un peuple, c'est supposer un peuple des fous108(*). Toute personne qui « aime » l'esclavage n'a pas de bon sens. Car, renoncer à sa liberté, c'est renoncer à sa qualité d'homme, aux droits de l'humanité, même à ses devoirs.109(*). C'est ôter toute moralité à ses actions que d'ôter toute liberté à sa volonté.110(*).

IL S'ENSUIT QUE, CONTRAIREMENT À GROTIUS ET LES AUTRES, LA GUERRE NE PROCÈDE PAS D'UN PRÉTENDU DROIT D'ESCLAVAGE DONT CERTAINS PEUVENT USER SUR D'AUTRES, C'EST LE RAPPORT DES CHOSES ET NON DES HOMMES QUI CONSTITUENT LA GUERRE. IL N'Y A PAS POUR ROUSSEAU DES GUERRES PRIVÉES, QUI DÉCOULERAIENT DES RELATIONS PERSONNELLES, IL N'Y A QUE DES GUERRES PUBLIQUES, QUI PROCÈDENT DES RELATIONS RÉELLES. LA GUERRE N'EST DONC PAS UNE RELATION D'HOMME À HOMME, MAIS UNE RELATION D'ETAT À ETAT.111(*).

POURQUOI ROUSSEAU SITUE-T-IL L'ORIGINE DE LA GUERRE, NON AU NIVEAU PERSONNEL MAIS AU NIVEAU ÉTATIQUE ? C'EST PRÉCISÉMENT POUR PRÉSERVER SON HYPOTHÈSE ORIGINELLE : L'HOMME EN LUI-MÊME EST BON, CE SONT LES INSTITUTIONS POLITIQUES QUI LE DÉNATURENT. PAR VOIE DE CONSÉQUENCE, SI ON AMÉLIORE LES INSTITUTIONS POLITIQUES QUI ENGENDRENT LA GUERRE, ON AURA COMBATTU LA GUERRE PAR SA CAUSE, QUI EST POLITIQUE.

APRÈS AVOIR REMIS EN CAUSE LA FORCE COME FONDEMENT DE L'ORDRE SOCIAL, IL NE RESTE QUE L'EXERCICE LIBRE DES VOLONTÉS QUI DÉTERMINE LE POLITIQUE. D'OÙ LA NOTION DE PACTE SOCIAL. LES HOMMES À L'ÉTAT DE NATURE SONT SUPPOSÉS PARVENUS AU POINT OÙ LES OBSTACLES QUI NUISENT À LEUR CONSERVATION DANS L'ÉTAT DE NATURE L'EMPORTENT PAR LEUR RÉSISTANCE SUR LES FORCES QUE CHAQUE INDIVIDU PEUT EMPLOYER POUR SE MAINTENIR DANS CET ÉTAT.112(*). L'INVIVABILITÉ DE L'ÉTAT DE NATURE EST UN PRÉTEXTE ÉLOQUENT DE L'INSTITUTION DE LA SOCIÉTÉ POLITIQUE. IL SE POSE ALORS LA QUESTION DE SAVOIR COMMENT LA FORCE ET LA LIBERTÉ DE CHAQUE HOMME, INSTRUMENTS DE SA CONSERVATION DANS L'ÉTAT DE NATURE, SERONT ASSOCIÉES AUX AUTRES SANS QUE CET ACTE D'ASSOCIATION N'ENTRAÎNE L'AUTODESTRUCTION DES ASSOCIÉS, CHACUN PRIS INDIVIDUELLEMENT.

Ainsi, ''trouver une forme d'association qui défende et protège de toute la force commune la personne et les biens de chaque associé, et par laquelle chacun s'unissant à tous n'obéisse pourtant qu'à lui-même et reste aussi libre qu'auparavant. Tel est le problème fondamental dont le contrat social donne la solution''113(*).

Le pacte social permet donc un passage de la liberté naturelle à la liberté conventionnelle. Il engendre ainsi la volonté générale. En effet, issue du pacte social, la volonté générale découle du fait que tous sont aliénés envers tous et pour l'intérêt de tous. La volonté générale suppose l'unanimité sur les conditions de maintien en vie de tous. Elle est « un corps moral et collectif composé d'autant des membres que l'assemblée a de voix (...). Cette personne publique qui se forme ainsi par l'union de toutes les autres prenait autrefois le nom de cité, et prend maintenant celui de république ou de corps politique, lequel est appelé par ses membres Etat, quand il est passif, souverain quand il est actif, puissance en le comparant aux autres »114(*).

En posant l'égalité originelle de tous les associés, Rousseau ramène tous les hommes au degré nul de l'évolution, où les classes sociales et les différences des forces n'existent pas encore. Son intuition fondamentale est que poser a priori tous les hommes comme égaux c'est définir le présupposé moral d'une société juste. Il y a là un ascendant théorique à la théorie de la justice comme équité. En effet, Rawls reprendra la notion de l'égalité naturelle sous le vocable de « situation originelle » pour élaborer sa pensée de la justice comme équité.

En fait, le corps politique ainsi constitué par le pacte est souverain dans la mesure où il ne peut jamais s'obliger, même envers autrui, à rien qui déroge à cet acte primitif, comme celui d'aliéner quelque portion de lui-même ou de se soumettre à un autre souverain. Violer l'acte par lequel il existe serait s'anéantir, et ce qui n'est rien ne produit rien115(*). Cette souveraineté se manifeste encore plus lorsque «  quiconque refusera d'obéir à la volonté générale y sera contraint par tout le corps : ce qui ne signifie autre chose sinon qu'on le forcera à être libre ... »116(*).

En effet, « c'est alors seulement que la voix du devoir succédant à l'impulsion physique et le droit à l'appétit, l'homme, qui jusque là n'avait regardé que lui-même, se voit forcé d'agir sur d'autres principes, et de consulter sa raison avant d'écouter ses penchants »117(*). La citoyenneté qu'avait préparée l'Emile est atteinte. L'homme a subi des changements remarquables, d'un animal stupide et borné, il est au sein de la polis un être intelligent et un homme. Quel instant heureux ! La nature s'achève dans la culture et les deux peuvent collaborer pour le bonheur de l'homme.

* 99 Les citations sont tirées du contrat social, Chronologie et introduction par Pierre Burgelin, Paris, Flammarion, 1966.

* 100 EE, p.245.

* 101 CS, p.41

* 102 Encyclopedia universalis, Paris, S.A., 1988, p.

* 103 CS, P.42.

* 104 CS, P.43

* 105 CS, p.44

* 106 H. Arendt, Les origines du totalitarisme. Le système totalitaire, Paris, Seuil, 1972, p.204

* 107 CS, P.45

* 108 CS, p.46

* 109. CS, P.46

* 110. CS, P.46

* 111. CS, p.47

* 112 CS. 50.

* 113. CS ,51.

* 114. CS, p.53.

* 115. CS , P.53

* 116. CS , P.54.

* 117. CS, p.55.

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"Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait"   Appolinaire