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Le BIR et la GP dans la politique de défense et de sécurité du Cameroun. Socioanalyse du rôle présidentiel, des concepts stratégiques et d'emploi des forces

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par Hans de Marie HEUNGOUP
Université catholique d'Afrique centrale - Master en gouvernance et politiques publiques 2011
  

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I.A- L'élaboration et la conduite de la politique de défense

La politique de défense d'un État peut être définie comme :

L'ensemble des grandes options et principes politiques, stratégiques et militaires qu'il adopte en vue d'assurer sa défense. La politique de défense précise le concept stratégique, la doctrine d'emploi des forces, la nature des relations internationales, notamment sa contribution à des alliances, accords militaires; les missions des forces armées, les relations entre l'armée et la nation.111

La politique de défense d'un État découle de sa doctrine stratégique. Au Cameroun, cette doctrine s'articule autour de trois axiomes fondamentaux: d'abord la neutralité, qui se définit en termes de non ingérence dans les affaires intérieures d'un autre État, de non recours à la force et de pacifisme; ensuite le non-alignement, qui se conçoit en termes de refus d'un protectorat quelconque; enfin la diversification des partenaires stratégiques et la coopération privilégiée avec la France (accords de défense) et Israël (sécurité présidentielle et BIR).

La politique de défense du Cameroun est élaborée par le Président de la République, d'une part; les organes d'aide à la prise de décision et des organes à l'échelon gouvernemental et régional, d'autre part. Dans l'État-président, le président est la clef de voute du système politique. A cet effet, le constituant du 18 janvier 1996 le consacre dans l'article 8 alinéas 2 comme le chef suprême des forces armées. L'article 8 alinéas 3 poursuit : «il veille à la sécurité intérieure et extérieure de la République ».112 L'article 9 alinéas 1 et 2 quant à lui fixe les pouvoirs de crise ou les pouvoirs exceptionnels du président de la République, notamment la déclaration de l'État d'urgence ou de l'État d'exception. Il établit ses prérogatives en cas de péril grave menaçant l'intégrité du territoire, la vie, l'indépendance ou les institutions de la République. Ce statut du président est explicité par la loi du 12 juin 1967:

111 OTAN, Op. cit., 2000.

112 Constitution du 18 janvier 1996 de la République du Cameroun.

Le président de la République définit la politique de défense et pourvoie à sa mise en oeuvre... Il est chef suprême de toutes les forces de défense, il assure la direction supérieure de maintien de l'ordre et décide de la préparation et de la conduite générale des opérations militaires...Il anime et coordonne à l'échelon national toutes les activités intéressant la défense.113

Le président définit donc la politique de défense qui est exécutée par le ministre de la défense. Ce dernier est du reste ministre délégué à la présidence, chargé de la défense. Il n'a donc qu'une délégation d'exécution, ce qui signifie clairement que le vrai patron de la défense camerounaise est le président de la République. Le décret de 1959, portant création de l'armée camerounaise et organisation générale de la défense, stipulait en son temps que les grandes orientations en matière de défense et de sécurité étaient prises en conseil de ministre, présidé par le premier ministre, chef du gouvernement. La loi du 12 juin 1967 quant à elle a précisé que le président de la République, responsable de la politique nationale de défense, est assisté : « d'un Conseil Supérieur de la défense nationale, d'un comité technique de défense nationale et dispose d'un secrétariat permanent à la défense nationale... et d'un comité de défense ».114 Ces deux textes ancêtres de la défense nationale consacraient la compétence de la production de la politique de défense au pouvoir civil. A titre comparatif, c'est le pouvoir civil, sous le commandement du président de la République, qui fabrique la politique de défense dans la plupart des pays dont le Cameroun s'est inspiré pour ses textes. En France, le président de la République définit la politique de défense avec la Commission du livre blanc, qui est majoritairement composée de civils. Aux États-Unis, c'est dans le cadre du National Council of Security, un organe administratif comprenant le vice-président, le secrétaire à la défense, le secrétaire d'État, le conseiller à la sécurité nationale, les comités départementaux que le président OBAMA définit la politique de défense des États-Unis, le Defence White Paper of US, distinct du Quadriennal Defence Review élaboré par le Département de la défense.

Cette tradition s'inscrit dans le cadre des pays démocratiques où le pouvoir militaire est séparé et soumis au pouvoir civil. Or en Afrique en général, on ne peut dire qu'il y a une séparation étanche entre l'armée et le pouvoir politique. Au contraire, les armées africaines sont au coeur de la fabrication et de la production du pouvoir politique. Si dans certains pays comme la Lybie ou la Mauritanie ou encore le Congo Brazzaville, cela apparaît de façon évidente, étant donné que les chefs d'État des ces pays sont des officiers arrivés au pouvoir

113 Loi n° 67 /LF/9 du 12 juin 1967 portant organisation générale de la défense.

114 Article 7 et 8 de la loi n° 67 /LF/9 du 12 juin 1967.

par putsch ; au Cameroun, l'immixtion de l'armée dans le champ politique s'est effectuée de façon insidieuse depuis l'épisode crisogénique de 1984. C'est la politique de l'échange ; du don contre don. C'est dans ce sens qu'il faut interpréter le « cadeau » fait aux forces armées par le président BIYA en leur confiant l'élaboration de la politique de défense.

Figure3 : Schéma simplifié des acteurs intervenants dans l'élaboration de la politique de défense

ETAT-MAJOR
PARTICULIER

LE PRESIDENT DE LA
REPUBLIQUE

MINISTERE DE LA
DEFENSE

CONSEIL NATIONAL DE
SECURITE

SECRETARIAT D'ETAT A
LA DEFENSE

DELEGATION GENERALE
A LA SURETE NATIONALE

Source : Hans De Marie HEUNGOUP NGANGTCHO

I.B- La préséance de la sécurité présidentielle et le travestissement préto-présidentiel de la politique de défense et de sécurité nationale

Le travestissement s'exprime ici en termes de construction hégémonique et de monopole présidentiel dans le champ de la défense et de la sécurité. Il commence avec le décret le décret n° 83/539 du 5 novembre 1983, qui créé l'état-major particulier du président de la République. Celui-ci a pour mission de « tenir le président de la République au courant de toutes les affaires militaires. Toutes ces prérogatives lui confèrent les pleins pouvoirs sur le plan de la défense ».115 Ce décret nomme également trois généraux : James TATAW, WANGALI, NGANSO SUNDJI. L'opportunité de ce décret est à mettre en relation avec la crise politique liée à la querelle de succession entre les deux présidents. La crise politique permet le renforcement des mécanismes présidentiels en matière de modalités de défense. Ce travestissement a comme effet induit : la prééminence de la sécurité du président.

L'obsession du coup d'état et l'obsession sécuritaire du président de la République du Cameroun constituent les leitmotive de la préséance de la sécurité présidentielle. Cette préséance se caractérise par la prévalence de la sécurité présidentielle, le surinvestissement de la sécurité présidentielle et la spectacularisation des dispositifs de protection du président.

S'agissant de la prévalence accordée à la sécurité du président de la République du Cameroun, elle est incontestable. Cette incontestabilité est elle-même liée à l'incontestabilité de la prééminence présidentielle au sein de l'État-président. Comme nous le faisait remarquer un enquêté, « depuis le coup d'état manqué d'avril 1984, le président ne pense plus qu'à sa sécurité »116. La prévalence est marquée par la monopolisation des appareils de sécurité et de défense aux fins de la sécurité du président. De façon immédiate, la sécurité présidentielle est assurée par la Direction de la Sécurité Présidentielle et la Garde Présidentielle. Mais de facto, la Sécurité Militaire (SEMIL), la Direction de la Recherche Extérieure (DRE), le Secrétariat d'État à la Défense, la DGSN contribuent à la sécurité du président. Dans le collectif bureaucratico-présidentiel, le président de la République est le coeur du système, et la transition néopatrimoniale est la meilleure chance pour le système de se perpétuer. De ce fait, un assassinat contre la personne du président perturberait l'équilibre des forces et des tensions. La sécurité présidentielle ne concerne pas que le président, elle concerne également les membres de la famille présidentielle et les édifices présidentiels. La sécurité présidentielle se caractérise en outre part son « ethnomorphisme ». Le Colonel AMOUGOU Emmanuel a

115 Article 3 du décret n° 83/539 du 5 novembre 1983 portant création d'un État-major particulier du président de la République.

116 Entretien avec un officier de police le 18 mai 2011.

été nommé par décret n° 2011/055 du 11 mars 2011 Chef d'État-major Particulier du Président de la République. Le Colonel ETOUNDI NSOE Raymond Thomas a été nommé par décret n° 2011/057 du 11 mars 2011 Commandant de la Garde Présidentielle. Tous les deux sont de l'ethnie présidentielle. Le nouveau commandant du BIR, le Ministre de la défense et le chef d'État-major des armées sont de l'ethnie présidentielle. Seul le General de Brigade Yvo DESCANCIO, Directeur de la sécurité présidentielle n'est pas ressortissant du même groupe ethno-régional que le président. Toutefois, cette exception est relative, lorsqu'on sait le rôle qu'il a joué dans la protection du président pendant la tentative d'avril 1984. Alors capitaine en 1984, il avait assuré avec une équipe de six éléments de la DSP la protection du bunker présidentiel pendant 36 heures. Et surtout, il a passé toute sa carrière militaire, dès sa sortie de formation, à la DSP. Il a certes été affecté une fois, mais il ne fit pas six mois et revint à son bercail, la sécurité présidentielle. Sa présence à ce poste relève de la gratification pour son fidéisme au président Paul BIYA. Par ailleurs, le recensement ethnique des éléments qui composent la GP et la DSP laisse apercevoir une forte communauté du groupe ethno-régional présidentiel. C'est à ce titre que l'on peut parler d'ethnomorphisme de la sécurité présidentielle. Cet ethnomorphisme est « normal » dans le système politique camerounais. La construction du charisme présidentiel depuis juin 1983 s'appuyait déjà sur la dimension ethnique. Lorsque Luc SINDJOUN parle du président de la République qui a les mains liées; ce qu'il évoque, c'est la pesanteur de son clan ethnique. Au-delà de la rhétorique sur l'unité nationale et l'équilibre régional, la production ethnique du « eux » et de « nous » fait partie de la psychologie de la protection du président. De plus, cette situation est amplifiée par l'illégitimité du président.

En ce qui concerne le surinvestissement de la sécurité présidentielle, il se présente en termes de troupes et de budget. Le budget de la sécurité du président n'est pas connu. Il est donc difficile d'y pérorer. Sauf que des témoignages des personnalités telles Pierre ELA ou Sadou DAOUDOU, Samuel EBOUA, ayant travaillé très étroitement dans ce domaine sont unanimes sur le surinvestissement financier dans la protection du président de la République. Ce surinvestissement concerne également les effectifs de la garde présidentielle. En France, 3200 Garde républicains travaillent en tout au service de la sécurité présidentielle. Aux ÉtatsUnis, ce sont 3200 agents spéciaux de l'United States Secrets Service (USSS) qui travaillent pour la sécurité présidentielle. Dans ce dernier cas, la sécurité présidentielle concerne également celle des candidats à la présidence, 120 jours avant le début des élections présidentielles; celle des anciens présidents, jusqu'à dix ans après leur fin de mandat. Au

Cameroun, la GP a 2000 effectifs. Ces effectifs sont certes moins nombreux que ceux des pays précités, mais il faut se rappeler qu'aux États-Unis, 3200 personnes travaillent pour la sécurité présidentielle sur une armée de plus d'un million de combattants. Au Cameroun, ce sont 2 000 Gpistes pour une armée de 40 000 hommes, y compris la gendarmerie. Si l'on ajoute les effectifs de la DSP, estimés à 150, on atteint le ratio de 6% des effectifs des forces armées. Surtout, cette protection est restreinte à la personne du président, sa famille et les logements présidentiels ; alors qu'elle est plus élargie aux États-Unis et en France, dont le Cameroun tire l'essentiel de son organisation militaire. En outre, les soldats de la GP sont les mieux formés et les mieux équipés, du moins en logistique et matériel de guerre terrestre.

Enfin, le travestissement de la sécurité présidentielle est également caractérisé par la sécurité-spectacle, notamment le spectacle des sorties présidentielles. Au-delà du pré-débat sur l'efficacité ou non des dispositifs de sécurité présidentielle, vu qu'il n'y a jamais eu de coup d'État au Cameroun, le barrage et le nettoyage des routes, la disposition des Gpistes « armés jusqu'aux dents » sur les toits des immeubles et des habitations, le polissement vestimentaire des forces de l'ordre participent de l'ostentation et de la sécurité-spectacle. Cette spectacularisation sécuritaire est une forme de théâtralisation du pouvoir et de réaffirmation de l'ordre politique.

II- Les ressources de l'hégémonie présidentielle dans le champ de la défense et de

la sécurité

Le président de la République est le chef de l'État et chef suprême des forces armées camerounaises. Ace titre, il dispose déjà de la primauté dans le champ de la défense et de la sécurité. Cette primauté se fait hégémonie par la maîtrise que lui confère sa position des chances de puissance dans le champ de la défense et de la sécurité et par le contrôle effectif de l'engagement des forces armées.

II.A- Le contrôle des chances de puissance dans le champ sécuritaire et de défense

Le contrôle des chances de puissance constitue la ressource principale de l'hégémonie présidentielle dans le champ de la défense et de la sécurité. Il entraîne la subordination de la personne nommée vis-à-vis de la personne du président. Cette subordination est plus accrue dans le champ militaire. C'est un champ très hiérarchisé et les logiques de domination sont encore plus accentuées qu'au sein du champ civil. D'après la constitution du 18 janvier 1996, le président de la République nomme aux emplois civils et militaires. Dans la pratique, le

président nomme à quasiment tous les empois militaires. Une étude des 21 textes du 25 juillet 2001 montre que ce pouvoir nominatif est total et s'exerce jusqu'aux échelons les plus réduits du Ministère de la défense, de la DGSN, du SED, de l'État-major général et des États-majors spécialisés. En effet, ces différents textes prévoient que président nomme jusqu'aux chargés d'étude assistant et secrétaires des chargés d'étude. L'objectif, c'est qu'il n'y ait pas de médiateur dans la subordination des forces armées au prince. Cette tactique politique est fort intéressante. Elle permet de fragiliser le pouvoir des officiers généraux et du MINDEF vis-à-vis des officiers subalternes. La relation entre le président et l'officier est directe, elle ne passe pas par la médiation des officiers généraux. En fait, la puissance du décret présidentiel dans la trajectoire du soldat fait davantage de lui un subordonné et crée un lien personnel avec la personne du président de la République qui l'a fait roitelet. Par le décret, l'armée est associée à la formation dirigeante et à la « société de Cour ».117

Le système de défense et de sécurité est organisé de telle enseigne que l'allégeance se fasse directement à la personne du président. Cette organisation obéit également à une logique vieille de l'alliance hégémonique. Toutes les armées, tous les secteurs militaires, sont surveillés, mis en concurrence et se contrôlent les uns les autres. Chaque armée (Terre, Mer, Air) dispose de son service de renseignement. Chacun de ses services contrôle l'autre. La SEMIL contrôle les trois armées, mais elle est elle-même surveillée par le Renseignement Militaire (CRM), que la SEMIL surveille rétroactivement. La DGSN surveille le territoire, mais est également surveillée par la DGRE, qu'elle surveille aussi par ailleurs. La DSP ellemême espionne et surveille les forces. Bref, il s'agit d'un maillage intelligent qui permet au système de défense et de sécurité de s'autoréguler, de s'autocontrôler. Il s'agit d'un schéma établi pour éviter toute alliance contre l'exécutif présidentiel des différents secteurs de l'armée.

Par ailleurs, l'embourgeoisement des soldats, et principalement des officiers généraux, participe de la logique générale de curialisation et de néo-patrimonialisation qui est déjà effective dans le volet civil du système étatique. L'embourgeoisement au Cameroun est une marque de la distinction et de la noblesse d'État. Il paraît donc normal que les officiers généraux soient rétribués de leur alliance au collectif bureaucratico-présidentiel. Le gouvernement perpétuel au Cameroun ou le gouvernement ne varietur concerne également le gouvernement de l'armée camerounaise. La longévité de carrière des généraux et contre-

117 ELIAS Norbert, La civilisation des moeurs, Paris, Calmann-Lévy, 1991.

amiraux comme SEMENGUE, James TATAW, NGANSO SUNDJI est le penchant de la longévité politique. Quand bien même ceux-ci auraient déjà dépassé l'âge légal d'exercice pour les officiers généraux fixé à 63 ans. Le cas de Pierre SEMENGUE, âgé de 73 ans est emblématique à cet égard. Ceci ne concerne pas que l'armée, mais également la police et les services de renseignement camerounais. La nomination d'un commissaire divisionnaire retraité à la tête de la DGSN le montre bien. La reconversion des anciens commissaires divisionnaires à la tête des ambassades et consulats du Cameroun montre que la logique est de maintenir les acteurs dans le système. Maintenir les acteurs dans le système permet de calmer la frustration qu'ils subissent lorsqu'on leur retire la mangeoire. Parallèlement, cela permet également de les surveiller et les contrôler, de réduire leur « zone d'incertitude ».118 Un général ou un commissaire divisionnaire à la retraite, ca peut être dangereux. On reste donc toujours dans le collectif et le système, même lorsqu'on est en retraite.

II.B- Le contrôle effectif de l'engagement des instruments de défense et de sécuritéLe président de la République du Cameroun, en plus de sa maîtrise des chances de

puissance, exerce un contrôle effectif et direct sur les forces armées du Cameroun. Ce contrôle est plus prononcé et encadré textuellement lorsqu'il s'agit des forces spéciales. Il exerce également un contrôle immédiat sur les appareils de répression policière.

La politique de défense du Cameroun consacre de plus en plus une place importante aux forces spéciales. Vu le contexte néopatrimonial qui entoure la sélection des candidats et la gestion de leur carrière, les forces spéciales se présentent comme un atout stratégique majeur pour la défense du territoire. Les forces spéciales dont il s'agit sont : le BSA, le BIMA, le BTAP, les FAI, les FMC, le BBR, le BQG, etc. En effet, d'après le Décret n° 2001-183 du 25 juillet 2001 portant réorganisation des formations de combat de l'Armée de Terre, l'engagement, le déplacement et l'exécution des missions du BQG, du BBR, du BTAP, du BSA sont soumis à l'autorisation préalable du président de la République. Le président est donc le seul à valider les missions, l'engagement et le déplacement des forces spéciales de l'armée de terre, regroupées autour de la Brigade d'Intervention Rapide (BIR). Le cas spécifique du BIR sera évoqué en deuxième partie de ce travail. Sur le plan logistique, le déplacement et l'engagement des régiments d'artillerie sol-sol et sol-air, de l'infanterie, des blindés et hélicoptères de combat de l'armée de terre se fait sur aval du président.

118 CROZIER Michel, FRIEDBERG Erhard, L'acteur et le système, Paris, 1981.

La même disposition revient lorsque l'on étudie le décret portant organisation de l'armée de l'air. En effet, l'article premier du Décret N° 2002/037 du 04 Février 2002 portant création et organisation des forces de l'armée de l'air dispose que: « l'engagement et l'exécution des missions des forces de l'armée de l'air et spécialement des Fusiliers de l'Armée de l'Air sont soumis à l'autorisation préalable du président de la République ».119 C'est au sein de l'armée de l'air que le déplacement et l'engagement de la logistique est le plus contrôlé par le président. Tout avion et hélicoptère de combat reçoit avant son déplacement et son engagement dans une mission, l'autorisation du président. Son itinéraire est bien précisé. Cette dernière mention est d'une part liée au fait que l'avion constitue une ressource stratégique pour l'armée camerounaise, le pays ne disposant que de vingt aéronefs et trente hélicoptères. D'autre part, cela s'inscrit également dans le sillage de la protection du palais présidentiel, étant donné que la garde présidentielle ne dispose ni d'avion, ni d'hélicoptère pour neutraliser une éventuelle mutinerie d'un pilote de l'Armée de l'air.

Du côté de la Marine nationale, la tutelle présidentielle concerne les FMC et les Palmeurs de combat. Leur engagement et l'exercice de leur mission est soumis également à l'accord préalable du président de la République. D'après le décret N°2002/036 du 04 février 2002, portant création et organisation des Forces de la Marine Nationale, la logistique de combat naval, notamment les forces de surface, composées de Bâtiments et d'Embarcations ; les Forces de Fusiliers Marins et de Palmeurs de combat ; les éléments de soutien, est directement contrôlée par le président. L'exécution de leur mission est soumise à l'autorisation préalable du président de la République. En plus du contrôle effectif et direct des fores spéciales des trois armées du Cameroun, le président de la République exerce un contrôle immédiat sur les appareils répressifs.

Parler d'appareils répressifs est un abus de langage, vu que les forces armées sont aussi souvent employées à des fins répressives. Mais il s'agit ici de s'arrêter sur le contrôle que le président a de la sureté nationale, de la gendarmerie nationale et de la police politique. S'agissant de la Sureté nationale, l'article2 du Décret n° 2002/003 du 4 janvier 2002 portant organisation de la Délégation Générale à la Sûreté Nationale dispose que : « La Sûreté nationale est un corps de commandement et d'administration placé sous l'autorité du

119 Décret N° 2002/037 du 04 Février 2002 portant création et organisation des forces de l'armée de l'air.

Président de la République qui en est le chef suprême ».120 L'article 5 du même Décret poursuit :

La Sûreté nationale relève de l'autorité directe du Président de la République. Elle exécute les missions qui lui sont confiées par les autorités gouvernementales dans le cadre de leurs compétences respectives, en se conformant aux directives du Président de la République (...) En matière de défense et en situation opérationnelle, elle est mise en oeuvre par le Président de la République et coopère étroitement avec les ministères chargés de la Défense et de l'Administration territoriale.121

La profusion de l'évocation du président de la République et des mentions expresses de l'autorité directe qu'il exerce sur le DGSN, montre clairement que la mainmise présidentielle sur les forces nationales de police. Comme nous l'avons souligné pour le Ministère de la Défense, ici, le responsable de la sûreté nationale, comme son nom l'indique n'est qu'un délégué. Ce qui revient à dire que le vrai patron de la sureté nationale, c'est le président de la République.

Enfin, le contrôle est immédiat, direct et effectif en ce qui concerne la DGRE, l'ex CENER. Il suffit de lire les révélations de Jean FOCHIVE, qui a été directeur de la DRG, du CND, du CENER, puis de la DGRE pour comprendre le lien direct que le président entretien avec ses services de renseignement. Il précise tout de même que ce lien fut moins étroit sous le régime BIYA que sous celui d'AHIDJO.

120 Décret n° 2002/003 du 4 janvier 2002 portant organisation de la Délégation Générale à la Sûreté Nationale.

121 Ibidem.

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