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Le malaise dans l'oeuvre de Ken Bugul: cas de "la folie et la mort " et "de l'autre côté du regard "

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par Kouessi Jacques Richard CODJO
Université d'Abomey- Calavi Bénin - Maà®trise ès- lettres modernes 2004
  

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2- Les « tropicalités ».

Pour définir le terme de « tropicalités », nous nous référons simplement à la définition qu'en donne Georges Ngal  pour qui c'est une : « manière de nommer, de dire, (qui) a quitté les pages du dictionnaire de l'Académie française, pour la rue, le trottoir. La langue s'est dévergondée, elle a perdu ses tabous en route, tout est permis sous la plume »146(*). Ainsi définies, les « tropicalités », qui apparaissent comme des marques d'originalité de la langue chez les écrivains africains, deviennent des emplois gênants lorsqu'elles abondent dans le texte et que l'écrivain sent le besoin de les expliquer pour se faire comprendre des lecteurs qui sont originaires d'autres cultures. Sous la plume de Ken Bugul, « les tropicalités » prennent diverses formes. Ce sont des mots composés obtenus à partir de la traduction de certaines expressions ou certains proverbes d'origine africaine, ou des mots qui relèvent des emprunts à la langue locale.

Dans La folie et la mort, le narrateur n'hésite pas à employer les termes « bokonon », «  », « tongolo » et « dantchiki » qui sont des mots tirés du groupe linguistique « gbé » du sud-Bénin. Il transcrit des proverbes comme : « Celui qui veut dire la vérité doit avoir un bon cheval pour s'enfuir » et précise qu'ils sont du continent. Il fait également allusion à la divinité « Oro » qui est une divinité des peuples Yoruba.

C'est dans De l'autre côté du regard que les tropicalités abondent. Nous avons par exemple l'expression « personne-connaissance » qui est la traduction littérale d'une expression locale béninoise dont le correspondant en « fongbé »147(*) pourrait être : « mètounmè ». A la page 56, le narrateur parle de « filles données », il s'agit là également d'une traduction littérale, car, en réalité, les filles ne sont pas données mais elles sont confiées à une parente généralement plus nantie que les parents biologiques, qui s'occupe de les éduquer. Cette hyperbole : « Quand tu attendais une réponse d'elle, tu pouvais aller faire un tour au marché. En revenant, elle n'avait pas encore fini sa phrase »148(*), au sujet du débit d'élocution de la fille de Sîndoni est d'origine africaine, puisque le marché en Afrique symbolise le lieu où l'on peut ou doit prendre son temps pour faire des emplettes. Quant aux mots et expressions wolof et arabes, ils jonchent le texte : « marakis », « pône », « tuur », « tangal pobar », «tabanani », « ruxu », « kel », « ndiar », « baw-nane », « haram », « zikr ». L'auteur prend le soin de mettre ces mots en italique dans le texte. Mais cela n'enlève rien au malaise que leur présence engendre pour le lecteur qui n'est pas de cette sphère culturelle, puisque, dans le cas de ce livre, ils n'ont pas souvent été expliqués.

On se rend bien compte, en lisant La folie et la mort et De l'autre côté du regard, que leur auteur, Ken Bugul, adopte volontairement un langage cru et a recours aux tropicalités qui créent, chez le lecteur, un sentiment de gêne par rapport à la mentalité et aux usages conventionnels de la société.

* 146 Georges NGAL, op.cit.p.81

* 147 Le « fongbé » est une langue du groupe linguistique « gbé » qui s'étant dans tout le golfe de Guinée, sur la côte ouest de l'Afrique.

* 148 De l'autre côté du regard, p.81

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