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L'usufruit des droits incorporels

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par Wyao POUWAKA
Université de Lomé Togo - Diplôme d'études approfondies 2011
  

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DEUXIEME PARTIE : LE RENOUVEAU DE L'USUFRUIT

Un rappel des fondamentaux du droit usufructuaire s'avère indispensable. L'usufruit est un droit réel qui porte sur la chose corporelle d'autrui140(*). A l'épreuve des droits incorporels, qui aujourd'hui sont des biens, deux difficultés majeures se posent : d'une part, l'immatérialité de ces droits qui rend problématique la nature réelle de l'usufruit dont ils sont l'assiette et d'autre part, le particularisme de leur droit de jouissance qui altère le mécanisme classique de l'institution. Ces difficultés font aujourd'hui plus que jamais de l'usufruit une institution mal définie, mal organisée avec un régime juridique hétérogène. L'usufruit devient une institution désuète et archaïque qui ne peut plus embrasser les nouvelles formes de richesses. En outre, il se détache du Code civil avec un contenu variable au gré des différentes disciplines juridiques qui l'abordent. Devant une telle situation, des voix se sont élevées et une profonde réforme a été entamée. Une proposition de réforme du livre ll du Code civil relatif aux biens en est résultée depuis le printemps 2008141(*) et est en attente d'adoption. Aussi, le droit positif s'adapte-t-il de plus en plus aux droits incorporels.

Il ressort que le développement des droits incorporels entraîne de profondes mutations dans le droit positif (Chapitre l). Toutefois, une nécessaire redéfinition de l'usufruit s'impose aujourd'hui afin que l'institution puisse embrasser aussi bien les biens corporels que les droits incorporels (Chapitre ll).

Chapitre l : LE DROIT POSITIF A L'EPREUVE DES DROITS INCORPORELS

Le développement rapide des droits incorporels s'impose aujourd'hui comme une réalité évidente et une importante source de richesse. Le droit des biens ne peut dès lors rester en marge devant ce nouvel environnement. Aussi bien la doctrine que la jurisprudence consolident-ils l'idée selon laquelle les droits incorporels sont du domaine du droit des biens. Aussi, l'immense tempête142(*) qui souffle depuis quelque temps sur le droit civil français n'a pas épargné le droit des biens. D'ailleurs, une proposition de réforme du livre ll du Code civil relatif aux biens a été présentée le 12 novembre 2008. Un constat se dégage à la lecture de cette proposition : la reconnaissance des droits incorporels notamment les droits personnels et les propriétés incorporelles comme des biens143(*). A ce propos J.- L. Bergel144(*) estime qu'ils intègrent « comme bien de propriété les biens incorporels et même les créances, tout en maintenant la distinction des droits réels et personnels ». 

Ceci dit, le droit positif se modèle à l'épreuve des droits incorporels par l'extension du domaine du droit des biens (Section l). Cette extension du domaine du droit des biens contraste avec l'incarnation de la volonté de maintenir la distinction droits réels-droits personnels (Section ll). Cette situation n'est pas anodine sur l'usufruit des droits incorporels puisqu'il est à l'image du droit de propriété.

Section l : L'EXTENSION DU DOMAINE DES BIENS

La nouvelle tendance observée de nos jours est la prise en compte des droits incorporels comme « bien de propriété »145(*) (Paragraphe 1). En outre, la summa divisio des droits patrimoniaux est de plus en plus mise en doute (Paragraphe 2).

Paragraphe l - L'incorporel pris en compte comme « bien de propriété »

L'extension du domaine des biens se manifeste par la reconnaissance de l'incorporel comme bien. Cette reconnaissance est l'oeuvre aussi bien de la doctrine (A) que de la jurisprudence (B).

A- La consécration doctrinale

C'est d'abord la doctrine qui est la première à reconnaître aux droits incorporels la qualité de bien. Justement, Demolombe146(*) admettait déjà dans la doctrine classique les droits incorporels comme des biens à travers la définition qu'il donnait de ces derniers. Ses idées ont été reprises et systématisées par S. Ginossar147(*). La thèse récente de Ginossar repose sur les idées suivantes : En matière de droits patrimoniaux, il n'est que des propriétés d'une part, des créances d'autre part ; ces dernières constituent d'ailleurs elles-mêmes des cas de propriété. Le droit de propriété porte indifféremment sur des éléments corporels ou incorporels. Les créances sont donc l'objet de propriété, et de ce fait appartiennent au droit réel. Le droit réel de la propriété doit se comprendre simplement comme la propriété des choses corporelles, laquelle, absorbant la res, se confond avec elle148(*). Cependant, le droit réel disparaît à son tour pour se fondre en une obligation passive universelle. Il reclasse les droits réels sur la chose d'autrui (usufruit, servitude, droit d'usage) dans la catégorie des obligations propter rem, le titulaire d'un droit sur la chose d'autrui étant considéré comme le bénéficiaire d'une telle obligation à la charge du propriétaire ; c'est ce que G. Cornu149(*) qualifie de « rebrassage en chaîne des concepts ».

Cette construction doctrinale est de plus en plus insistante que le législateur a consacré à son tour l'idée de la propriété des droits incorporels. Aujourd'hui, on soutient la propriété des créances150(*). En effet, la notion de propriété de créance est redevenue d'actualité sous l'effet de l'utilisation répétée du concept par le législateur. L'article 1983 C.civ. parle du « propriétaire d'une rente viagère », les articles L. 511-34, L.511-35 et L.511-36 du Code de commerce français parlent de « propriétaire de la lettre de change ». Les mêmes expressions sont utilisées par le règlement N° 15/2002/CM/UEMOA151(*) relatif aux systèmes de paiement dans les Etats membres de l'UEMOA et spécialement sur la lettre de change. Le problème qui se pose est de savoir s'il s'agit d'une approximation du langage, sans conséquence juridique, ou bien si le modèle traditionnel de la propriété n'a pas éclaté. L'idée de propriété des droits personnels purs se généralise. Pour rester sur ce terrain, on peut noter que les forces des prérogatives du commerçant en vue d'obtenir le renouvellement de son bail a conduit le législateur à qualifier le droit du commerçant de propriété commerciale152(*) alors qu'il est titulaire d'un simple droit personnel contre le propriétaire. Aujourd'hui, l'expression « propriété culturale » se répand du fait que la quasi-perpétuité des droits du preneur à bail rural invite à un rapprochement avec les prérogatives du propriétaire. Egalement, la proposition de réforme du droit des biens intègre-il de son côté «les choses incorporelles» dans le domaine des biens à son article 520.

Consacrée par la doctrine et entérinée par le législateur, la propriété des droits incorporels est également reconnue par la jurisprudence.

* 140 C. Larroumet, Doit civil, Les biens-droits réels principaux, Paris, Economica1988, t.ll, 2e éd., p. 281, n°469.

* 141 Proposition de réforme du livre ll du Code civil relatif aux biens, capitant@club-internet.fr. La commission a été présidée par le Professeur Hugues Périnet-Marquet. Le groupe de travail de onze membres a présenté ses travaux le 12 novembre 2008.

* 142 Nous pensons notamment aux différents projets de réformes dans le domaine du droit civil tel le droit des obligations, le droit des sûretés et le droit de la propriété des personnes publiques entre autres.

* 143 En effet, l'article 520 de la proposition dispose : « Sont biens, au sens de l'article précédent, les choses corporelles ou incorporelles faisant l'objet d'une appropriation, ainsi que les droits réels et personnels tels que définis aux articles 522 et 523 ».

* 144 J. - L. Bergel, op. cit., p. 11.

* 145 J. - L. Bergel, op. cit., p. 10.

* 146 Demolombe cité par R. Rivière, ibid.

* 147 S. Ginossar, Droit réel, propriété et créance. Elaboration d'un système rationnel des droits patrimoniaux, Paris, LGDJ 1960, 212 pages.

* 148 J. Dabin, « Une nouvelle définition du droit réel », RTD civ. 1962, p. 20.

* 149 G. Cornu, Droit civil, Introduction-Les personnes-Les biens, Paris, Montchrestien 2001,10e éd., p 413, n° 1000.

* 150 Y. Emerich, « Faut-il condamner la propriété des biens incorporels ? Réflexions autour de la propriété des créances », www.lexisnexis.com.

* 151 De son côté, le législateur de l'UEMOA dans les articles 182 et 183 du règlement utilisent l'expression « le propriétaire de la lettre de change ».

* 152 Art. L 145-1 C.com. français.

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