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L'application du "jus ad bellum" et du "jus in bello" dans les conflits internes africains : etude du cas lybien


par FREDDY AMANI CHISHIBANJI
Université de Bukavu - Licence en droit 2011
Dans la categorie: Droit et Sciences Politiques > Relations Internationales
   

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B. APPLICATION DE LA RESOLUTION 2105 (XX) PAR LE CNT

Rappelant la déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux pays et aux peuples coloniaux figurant dans la résolution 1514 (XV) du 14 Décembre 1960, ainsi que ses

50 B. Ben Yahmed, in Hebdomadaire International Indépendant Jeune Afrique, 51ème année, n°2620, du 27 Mars au 2 Avril 2011, p. 15

51 H. Köhler, mémorandum reletif a la résolution 1973 du conseil de sécurité et a son application par une `' coalition de volontaires» sous le commandement des Etats-Unis et de l'OTAN, in http://www.horizons-etdebats.ch n°19, du 16 mai 2011.

résolutions 1654 (XVI) du 27 Novembre 1961, 1810 (XVII) du 17 Décembre 1962, 1956 (XVIII) du 11 Décembre 1963, 1805 (XVII) du 14 Décembre 1962 et 1899 (XVIII) du 13 Novembre 1963 ; l'Assemblée Générale de l'ONU déplore l'attitude de certains Etats qui continuent à persister dans le régime colonial pourtant déjà indépendant, et réaffirme encore le droit à l'autodétermination dont doit jouir chaque peuple.

Dans la recherche de cette autodétermination, il est permis a chaque peuple d'user des moyens nécessaires (même la force) pour y parvenir. Et cela ne viole a n'aucun cas les prescrits de l'article 2§4 de la Charte.

Se référant à cette résolution qui donne droit aux peuples de participer à l'élaboration de la politique de leur pays, le peuple libyen en fera usage pour introduire la liberté et la démocratie qui n'existaient pas dans leur Etat. Mais les aspirations et les inquiétudes du peuple libyen n'ont pas été respectées et entendues par les autorités du pays.

Etant convaincu de la légalité de la lutte des insurgés, l'OTAN leur viendra en aide. Mais qu'en est-il de la légalité de cette intervention de l'OTAN ?

§2. LA LEGALITE DE L'INTERVENTION DE L'OTAN EN JAMAHIRIYA ARABE LIBYENNE

Le droit a ses raisons que la logique de puissance ignore. L'application de la résolution 1973 (A), qui a donné a l'OTAN une mission en Libye (B) a été beaucoup critiquée.

A. L'APPLICATION DE LA RESOLUTION 1973 PAR L'OTAN

Cette résolution a été adoptée en vertu de l'article 42 de la Charte de l'ONU, qui donne au conseil de sécurité le pouvoir de recourir aux mesures coercitives. Mais avant d'en arriver là, les modes pacifiques de règlement de conflit ont préséance sur la force, c'est pourquoi la résolution 1970 (1) a été adoptée avant l'application du chapitre VII de la Charte des Nations Unies (2).

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1. La resolution 1970

Adoptée par le conseil de sécurité de l'ONU a sa 6491ème séance le 26 Février 2011, cette résolution fait preuve de l'application du chapitre VI de la Charte (a), et de la préoccupation du conseil de sécurité à protéger la population civile libyenne (b).

a. L'application du chapitre VI de la Charte de l'ONU dans le conflit libyen

Ce chapitre composé de 6 articles, oblige le règlement pacifique de conflit. Parmi les modes de règlement pacifique de conflit, dans le conflit interne libyen le recours a été fait à la négociation mais sans solution (1°) et à la médiation mais ratée (2°).

1°. Négociation sans solution

Les représentants des insurgés et ceux du gouvernement libyen se sont rencontrés plusieurs fois mais sans résultat. Le colonel lui était prêt a toutes les concessions pourvu qu'il reste au pouvoir et que les rebelles déposent les armes. Pour les insurgés, le guide libyen devait partir du pouvoir et il n'était pas question de déposer les armes avant le départ du colonel Kadhafi.

Chacune des parties tenait à sa position et les négociations étaient farinées jusqu'à l'intervention médiatique ratée de cinq chefs d'Etat africains.

2°. Médiation ratée

Le 21 Mars 2011, cinq chefs d'Etat membres du conseil de paix et de sécurité de l'Union Africaine ont tenté de se rendre en Libye, mais ils n'ont pas été autorisés. Etant donné que le conseil de sécurité s'était déjà prononcé sur l'affaire a travers la résolution 1973, il était normal que ce panel de cinq chefs d'Etat demande l'autorisation de l'ONU avant de se rendre en Libye. Mais leur demande a été rejetée.

b. La protection de la population civile libyenne

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conflit interne ; en prenant quelques mesures entre autres : la saisine de la Cour Pénale Internationale pour faire le suivi de la situation en Jamahiriya Arabe Libyenne depuis le 15 Février 2011, l'embargo sur les armes qui a frappé le pays, l'interdiction de voyager pour limiter l'arrivée des mercenaires recrutés a l'étranger par le régime, le gel des avoirs qui permettaient au régime de s'approvisionner en arme et l'assistance humanitaire dont bénéficiait les populations en situation difficile.

Etant donné que malgré ces mesures la population civile libyenne n'était pas totalement a l'abri des exactions, l'application du chapitre VII s'est avérée importante.

2. L'application du chapitre VII de la Charte de l'ONU

La communauté internationale après l'échec de voies pacifiques de règlement de conflit, s'est vue obliger d'utiliser d'autres moyens pour venir en aide aux populations civiles libyennes. « Aucun pays ne sait mieux que le mien le coût que cela représente quand la communauté internationale n'intervient pas pour empêcher a un Etat de tuer son propre peuple52.

Ainsi pour ne pas tomber sous le coup de la non assistance à personne en danger, la communauté internationale via le conseil de sécurité de l'ONU, a le 17 Mars 2011 dans la soirée, adopté la résolution 1973 en application du chapitre VII de la Charte.

Bien que l'article 27 §3 de la Charte exige l'accord de tous les membres permanents, cette résolution a été adoptée sans le consentement de la Chine et de la Russie, et considérée comme légalement valide, puisqu'il est devenu coutumier parmi les membres permanents du conseil de sécurité de l'ONU de considérer l'abstention comme un consentement53.

Avant l'application du fameux chapitre VII qui contenait un concept flou « mesures nécessaires ))(b), les insurgés vont d'abord bénéficier d'une reconnaissance (a).

52 Président rwandais Paul KAGAME, cité par B. Ben Yahmed, Op Cit, p. 4

53 H. Köhler, Op Cit, in http://www.horizons-et-debats.ch n°19, du 16 mai 2011.

a.

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La reconnaissance des insurgés

L'insurrection interne, parce qu'elle remet en cause l'unité nationale et l'effectivité gouvernementale, oblige les Etats tiers à prendre position en vue de protéger leurs intérêts54. Le soucis de ne pas s'ingérer dans les affaires intérieures des autres Etats, incitent les gouvernements étrangers a éviter de reconnaitre un état de guerre, et s'abstiennent a procéder a une reconnaissance prématurée d'Etat. La reconnaissance des insurgés remplit cet office55.

Lorsque les insurgés réussissent a prendre le contrôle d'une partie du territoire national, il devient donc difficile de leur nier une certaine capacité juridique internationale. La reconnaissance de la belligérance permet alors de leur attribuer la personnalité juridique internationale d'un gouvernement « de fait ~ local. Ce qui fait que l'ordre juridique qu'ils ont mis en place soit opposable aux sujets du droit international, et cela justifie la responsabilité internationale des autorités insurgées lorsqu'elles triomphent au gouvernement légal.

Dans le cas des insurgés libyens, leur reconnaissance comme seuls représentants légaux du peuple libyen a été reconnue premièrement par la France, la Grande-Bretagne, les Etats-Unis, l'ONU ; par après d'autres Etats vont leur emboîter les pas.

b. Concept flou « mesures nécessaires »

Ce concept « mesures nécessaires ~ est qualifié de flou pace qu'il n'a pas été défini et est vague et imprécis. Il a été abandonné a l'interprétation des Etats ayant participé du côté de l'OTAN pour fragiliser le régime du colonel Kadhafi, qui l'ont utilisé comme prétexte a un usage pratiquement illimité de la force.

L'absence d'une définition précise de ce concept, empêche d'entrée de jeu d'affirmer la compatibilité des mesures adoptées avec les buts affirmés dans la résolution 1973, ce qui a permis aux Etats d'agir en dehors de tout contrôle et dans une totale impunité.

Comme nous le remarquons, le concept « mesures nécessaires » invite à exercer un pouvoir arbitraire, permet de n'importe quoi et ressemble à un appel médiéval à la croisade.

54P. DAILLER, M. Forteau, A. Pellet, N. QUOCDIN, Op Cit, p. 632 55Ibidem.

De ce constat, il serait souhaitable que le conseil de sécurité précise dans ses résolutions les mesures a prendre au lieu d'utiliser ce genre de concept imprécis.

Bien que le concept « mesures nécessaires » qui gouvernait les actions de l'OTAN soit ambigu, ses missions ont au moins été connues du public.

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