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L'exigence démocratique en droit international

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par Zied AYARI
Université Jean Moulin Lyon 3 - Master 2 Droit international public 2012
  

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§3. L'Organisation des Etats Américains 

La consécration d'un engagement démocratique par les Etats américains est le fruit d'une longue et difficile évolution82(*).La Charte de l'Organisation des Etats Américains adoptée à Bogota le 30 avril 1948 introduit le principe de démocratie dans son préambule : « (...) le véritable sens de la solidarité américaine et du bon voisinage ne peut se concevoir qu'en consolidant dans ce continent et dans le cadre des institutions démocratiques, un régime de liberté individuelle et de justice sociale basé sur le respect des droits fondamentaux de l`homme ». Cela est confirmé par l'article 5 d de la Charte de Bogota qui diispose : « Les Etats américains réaffirment les principes suivants :...d) La solidarité des Etats américains et les buts élevés qu'ils poursuivent exigent de ces Etats une organisation politique basée sur le fonctionnement effectif de la démocratie représentative »83(*).

La démocratie apparaît comme le système politique de référence de l'O.E.A. Toutefois, la démocratie représentative semble être un but de l'Organisation, non dénué de portée juridique, mais ne représentant pas une obligation juridique contraignante. La référence au régime démocratique est tout d'abord tempérée par l'attachement des Etats membres au principe de non intervention84(*), par l'adoption de la déclaration anticommuniste85(*) et par le nombre de coups d'Etats tolérés86(*), voire soutenus87(*), par l'Organisation.

Il faut souligner que le système interaméricain des droits de l'homme a largement participé à l'évolution de la notion de démocratie au sein de l'O.E.A. D'abord par la Déclaration américaine des droits et devoirs de l'homme88(*), mais surtout par la Convention américaine relative aux droits de l'homme (CADH)89(*) qui met en relief le lien intrinsèque entre droits de l'homme et démocratie. En effet, le premier considérant du préambule de la CADH prévoit que : « Réaffirmant leur propos de consolider sur ce continent, dans le cadre des institutions démocratiques, un régime de liberté individuelle et de justice sociale, fondé sur le respect des droits fondamentaux de l'homme.». La Convention consacre un certain nombre de droits aux individus qui sont nécessaires dans une démocratie ; le droit de participer aux gouvernements, directement ou à travers des représentants librement élus, le droit de voter à des élections libres et honnêtes et périodiques (article 23). Mais, la contribution la plus importante réside dans les mécanismes de contrôle du respect des droits de l'homme prévus par la CADH, à savoir, la Commission Interaméricaine des droits de l'homme et la Cour Interaméricaine des droits de l'homme.

La pratique de la Commission a toujours insisté sur le lien entre droits de l'homme et démocratie. Sa pratique s'est développée par le biais de trois méthodes ; le système de pétitions (examen de plaintes ou de communications), le système des rapports (rapports sur la situation concernant les droits de l'homme dans les Etats de la région)90(*), le système d'enquêtes (missions d'observations)91(*).C'est ainsique dans son rapport annuel de 1979-1980, la Commission a souligné : « a democratic framework is an essential element for establishment of a political society where human values can be fully realized.».

La relation entre principes démocratiques et droits de l'homme a retenu également l'attention de la Cour Interaméricaine des droits de l'homme92(*), malgré le fait qu'elle a souffert pour un certain temps d'un réel manque de compétence93(*).A titre d'exemple, la Cour dans son arrêt Baena Ricardo et autres c. Panama déclare : « Therefore, in a democratic system it is necessary to intensify precautions in order for such measures to be adopted with absolute respect for the basic rights of individuals (...) »94(*).

Ce sont les années quatre-vingt-dix qui vont marquer le processus d'un véritable engagement démocratique de l'OEA. D'abord Avec la création de « l'Unité pour la promotion de la démocratie »95(*) qui, a la responsabilité d'offrir un programme d'appui en faveur de la promotion de la démocratie (son action doit être sollicitée par les Etats membres). Ces principales activités concernent le renforcement des institutions démocratiques, le renforcement des processus électoraux, l'information et le dialogue96(*).

La résolution 1080 adoptée par l'assemblée générale en 199197(*), permet au secrétairegénéral de convoquer la réunion duConseil permanent, la tenue d'une réunion ad hoc des ministres des Affaires étrangères des Amériques ou d'une session extraordinaire de l'Assemblée générale pour décider d'une action collective spécifique dans le cas où se produirait une interruption brusque et irrégulière du processus politique, institutionnel et démocratique98(*).

Le 14 décembre 1992 a été adopté le Protocole de Washington qui a ajouté l'article 9 à la Charte de l'O.E.A prévoyant des sanctions à l'encontre de coups d'Etats allant jusqu'à la suspension de l'Etat concerné de l'Organisation si l'ordre constitutionnel n'est pas rétabli99(*).

La déclaration de Managua du 8 juin 1993 pour la promotion de la démocratie et le développementreconnaît la nécessité de développer des dispositifs « qui promeuvent et renforcent intégralement le système démocratique de gouvernement »100(*) .C'est dans ce sens que le Protocole de Managua101(*) a envisagé des réformes structurelles dans l'OEA. Ainsi le Conseil interaméricain pour le développement intégré a pour mission « Le renforcement de la conscience civique des peuples américains considéré comme l'un des éléments fondamentaux de l'exercice effectif de la démocratie et du respect des droits et des devoirs de la personne humaine »102(*).

La Charte démocratique interaméricaine adoptée le 11 septembre 2001103(*) traduit l'évolution de l'O.E.A dans le renforcement de la démocratie en Amérique. Elle reconnaît expressément le droit à la démocratie104(*), elle identifie de manière non exhaustive les composantes de la démocratie et elle renforce la volonté exprimée dans la résolution 1081 et le Protocole de Washington, de doter l'Organisation de mécanismes d'action collective destinés à défendre la démocratie105(*).

La Charte a élargi les atteintes à la démocratie des coups d'Etat à toute « interruption inconstitutionnelle de l'ordre démocratique ou altération de l'ordre constitutionnel qui menace sérieusement l'ordre démocratique »106(*). Elle prévoit un système de gradation pour la mise en oeuvre des différents moyens d'action collective. D'abord les Etats dont leurprocessus démocratique est menacé peuvent demander une assistance aux organes de l'O.E.A (articles 17 et 18). Ensuite, s'il y a atteinte à l'ordre constitutionnel dans un Etat membre pouvant constituer une menace pour sa démocratie, « tout État membre ou le Secrétaire général peut demander la convocation immédiate du Conseil permanent afin de procéder à une évaluation collective de la situation et d'adopter les décisions qu'il juge utiles »107(*) Le Conseil permanent peut entreprendre des démarches diplomatiques pour remédier à la situation, en cas d'échec il convoque une session extraordinaire de l'Assemblée générale. D'après l'article 21, l'Assemblée générale : « vérifie qu'il y a eu une interruption inconstitutionnelle de l'ordre démocratique dans un État membre et que les démarches diplomatiques se sont révélées infructueuses, à la lumière de la Charte de l'OEA, elle décidera de la suspension de l'exercice par cet État membre de son droit de participation à l'OEA, par le vote affirmatif des deux tiers des États membres. La suspension prend effet immédiatement. » L'alinéa 2 de l'Article 21 dispose que l'Etat qui a fait l'objet d'une suspension doit continuer à respecter ses engagements en matière de droits de l'homme.

L'O.E.A comprend trente cinq Etats membres ayant contracté un engagement démocratique. Certes, il y a certains qui critiquent encore la fragilité des démocraties dans le continent américain108(*) pour plusieurs raisons, dont notamment, le haut niveau de pauvreté.

La pauvreté et le manque de développement expliquent aussi la fragilité ou l'ineffectivité parfois de l'engagement démocratique dans certains Etats membres des organisations régionales « nouvellement » démocratiques.

* 82 MARISTELA RODRIGUES (R), Le système interaméricain et les principes démocratiques : l'évolution de son engagement, Paris, L'Harmattan, 2009, pp. 77-146.

* 83 C'est l'actuel article 3 d de la Charte de l'Organisation des Etats américains.

* 84Cette tendance subsiste jusqu'à aujourd'hui en effet l'article 2 b de la Charte de l'organisation des Etats américains dispose que : « Encourager et consolider la démocratie représentative dans le respect du principe de non-intervention » et l'article 3 e «Chaque Etat a le droit de choisir, sans ingérence extérieure, son système politique, économique et social, et le mode d'organisation qui lui convient le mieux. Il a pour devoir de ne pas intervenir dans les affaires des autres Etats. Sous réserve des dispositions précédentes, les Etats américains coopèrent largement entre eux, indépendamment de la nature de leurs systèmes politiques, économiques et sociaux. »

* 85 La Dixième Conférence interaméricaine réunis le 13 mars 1954 à Caracas adopte la « déclaration de solidarité pour la préservation de l'intégrité politique des Etats américains contre l'intervention du communisme international. », XCIII. Declaración de solidaridad para la preservación de la integridad política de los Estados Americanos contra la intervención del comunismo internacional, Conferencias internacionales americanas, Segundo suplemento, 1945-1954, p. 363.

* 86 Malgré les dispositions de la Charte de Bogota plusieurs coups d'Etats ont eu lieu contre des gouvernements démocratiquement élus en Amérique et cela sans une véritable réaction de l'O.E.A. Ce fut le cas par exemple pour le coup d'Etat contre le gouvernement de João Goulart au Brésil en 1964, les coups d'Etat en Argentine en 1966 et en 1976, le coup d'Etat contre le gouvernement d'Allende au Chile en 1973.

* 87 C'était le cas lors du coup d'Etat en 1954 au Guatemala, qui a été soutenu par les Etats Unis d'Amérique contre le gouvernement communiste démocratiquement élu de Jacobo Arbenz. L'O.E.A a eu un comportement critiquable ; sur l'affaire guatémaltèque MARISTELA RODRIGUES (R), op cit., pp. 177-179.

* 88 Adoptée en même temps que la Charte de Bogota en 1948. Malgré qu'elle soit une déclaration et qu'elle ne fait pas référence explicitement à l'engagement démocratique, elle souligne les droits des citoyens américains de participer à des élections libres et honnêtes et d'être élus (article 20). De plus l'article 29 d de Convention Américaine relative aux Droits de l'homme dispose : « Aucune disposition de la présente Convention ne peut être interprétée comme...d) supprimant ou limitant les effets que peuvent avoir la Déclaration américaine des Droits et Devoirs de l'Homme et tous autres actes internationaux de même nature ». Et la Cour Interaméricaine des Droits de l'homme affirme dans son Avis Interpretation of the American Declaration of the Rights and Duties of Man within the framework of Article 64 of the American Convention of Human Rights  que : « For the member states of the Organization, the Declaration is the text that defines the human rights referred to in the Charter. », Advisory Opinion OC-10/89, July 14, 1989, Inter-Am. Ct. H.R. (Ser. A) No. 10 (1989), par. 45.

* 89 Adoptée le 22/11/1969, entrée en vigueur le 18/7/1978.

* 90Annual report of the Inter-American Commission on Human Rights 1979-1980, Chapter VI, OEA/Ser.L/V/II.50?Doc., 13 rev. 1,?2 October 1980.

* 91 Sur la pratique de la Commission Interaméricaine dans le développement de la notion de démocratie, MARISTELA RODRIGUES (R), op cit., pp.358-369.

* 92Ibid., pp376-382.

* 93 Pour que la Cour soit saisie il faut non seulement que l'Etat ratifie la CADH, mais qu'il reconnaisse expressément sa compétence. Au début des années quatre-vingt, quatre Etats seulement on reconnu la compétence de la cour (Costa Rica, Honduras, Pérou et Venezuela). Aujourd'hui sur les 24 Etats signataires de la CADH, 21 d'entre eux reconnaissent la compétence de la Cour, http://www.oas.org/juridico/english/sigs/b-32.html

* 94 Inter-American Court of Human Rights, Case of Baena-Ricardo et al. v. Panama, Judgment of 02/2/2001, § 106.

* 95 La résolution 1063 de l'Assemblée générale a demandé la création d'un mécanisme permanent de promotion de démocratie au sein du Secrétariat général, AG/RES. 1063 - XX-O/90. Le Secrétaire général a créé l'U.P.D par l'instruction N° 90-3 du 15/10/1990.

* 96 MARISTELA RODRIGUES (R), op cit., pp 408-415.

* 97 AG/RES. 1080 (XXI - 0/91), 05/6/1991.

* 98Ibid, pp. 296-301.

* 99 L'article 9 de la Charte de l'O.E.A dispose que : « Un membre de l'Organisation dont le gouvernement démocratiquement constitué est renversé par la force peut être l'objet d'une suspension de l'exercice de son droit de participation aux Session de l'Assemblée générale, à la Réunion de consultation, au sein des Conseils de l'Organisation et des conférences spécialisées, ainsi qu'aux séances des commissions, groupes de travail et autres organes subsidiaires qui existent.

a. La faculté d'imposition d'une mesure de suspension n'est exercée que lorsque se seront révélées infructueuses toutes les démarches diplomatiques entreprises par l'Organisation pour arriver à rétablir la démocratie représentative dans l'Etat membre concerné;

b. La décision relative à la suspension doit être adoptée au cours d'une session extraordinaire de l'Assemblée générale, par le vote affirmatif des deux tiers des Etats membres;

c. La suspension prend effet immédiatement après son approbation par l'Assemblée générale;

d. L'Organisation tâchera, en dépit de la mesure de suspension, d'entreprendre de nouvelles initiatives diplomatiques en vue de contribuer au rétablissement de la démocratie représentative dans l'Etat membre concerné;

e. Le membre qui a été frappé de suspension doit continuer à respecter ses engagements envers l'Organisation;

f. L'Assemblée générale peut lever la suspension au moyen d'une décision arrêtée avec l'approbation des deux tiers des Etats membres;

g. Les attributions visées dans le présent article sont exercées en conformité avec la présente Charte. »

* 100 AG/DEC. 4 (XXIII-O/93) ; OEA/Ser.P/XXIII.O.2, 30 septembre 1993, vol. I.

* 101Adoptée par la XIXème Session spéciale de l'Assemblée générale, 10/06/1993.

* 102 Article 95 de la Charte de l'O.E.A.

* 103AG/RES.1 (XXVIII-E/01), 11/9/2001.

* 104 L'article 1 par. 1 de la Charte démocratique interaméricaine prévoit que : « Les peuples des Amériques ont droit à la démocratie et leurs gouvernements ont pour obligation de la promouvoir et de la défendre.»

* 105 ST-FLEUR (L), « La Charte démocratique interaméricaine : un nouvel outil pour la démocratie dans les Amériques », C.E.D.I.M., 19 mars 2002, page de l'internet : http://www.ieim.uqam.ca/IMG/pdf/St-Fleur-Un_nouvel_outil_pour_la_democratie_dans_les_Ameriques.pdf

* 106 Les articles 17, 18, 19, 20 et 21 de la Charte démocratique interaméricaine

* 107 Article 20 de la Charte démocratique interaméricaine.

* 108 DOIRE (V), « La protection et la promotion de la démocratie par l'Organisation des Etats Américains », Centre d'études interaméricaines, décembre 2005, p. 6. Article disponible sur internet :

http://www.cei.ulaval.ca/fileadmin/cei/documents/Actualite_des_relations_interamericaines/Articles_et_thematiques/Chroniques/CEI_VD_Democratie.pdf

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon