WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

L'exigence démocratique en droit international

( Télécharger le fichier original )
par Zied AYARI
Université Jean Moulin Lyon 3 - Master 2 Droit international public 2012
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Section 2 : Les« nouveaux » engagements démocratiques à l'échelle régionale:

Il s'agit d'organisations régionales qui, à une certaine époque, avaient la même approche que l'ONU, elles étaient indifférentes quant aux régimes politiquesde leurs Etats membres. Les objectifs initiaux de ces organisations étaient même à l'antipode de la notion de légitimité démocratique, en essayant de renforcer le pouvoir des Etats (L'OUA) ou de maintenir la sécurité, au titre d`une équivalence de régimes politiques(CSCE). Certes, ces organisations n'ont pas fait l'exception quant à la propagation de l'exigence démocratique au sein de la société internationale. Ainsi on traitera de l'exigence démocratique au sein de l'Union Africaine (§1), de l'Organisations pour la sécurité et la coopération en Europe (§2) et de l'Organisation du Commonwealth (§3).

§1. L'Union Africaine

Le mouvement de décolonisation qu'a connu l'Afrique jusqu'aux années 70 ne s'est pas soldé par la création d'Etats démocratiques, bien au contraire on a vu apparaitre des régimes autoritaires qui veulent à tout prix créer des Etats solides. La majorité des nouveaux Etats Africains étaientconfrontés à cette époque au problème des frontières tracées par la colonisation (de simples lignes administratives ne prenant pas compte de l'unité et des spécificités des populations locales) et par les tensions entre les différentes ethnies et tribus. Ainsi les régimes à « parti unique associé au culte du chef suprême »109(*) étaient censés exprimerla solidarité nationale selon l'adage « Une nation, un Etat, un parti »110(*).

C'est dans ce cadre que les principes initiaux de l'OUA étaient : « l'Egalité souveraine de tous les Etats membres; Non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats; Respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de chaque Etat et de son droit inaliénable à une existence indépendante (...) »111(*). La volonté des Etats africainsétait « de sauvegarder une souveraineté durement acquise »112(*)

Mais de peur de la tribalisation113(*) du pouvoir on a aboutit à sa personnalisation. La tyrannie, les guerres et la malversation des gouvernements qu'a connu et connaît encore l'Afrique a très vite couper court à l'enthousiasme des populations au moment de leur indépendance, et a donné lieu à des situations très gravesqui laissentleurs traces jusqu'à aujourd'hui.

Malgré le pas important que représente la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples de 1981114(*), vers la reconnaissance et la protection des droits humains au sein de l'OUA, ce texte ne fait aucune mention à la démocratie ou à un quelconque modèle de gouvernance. Il y a seulement l'article 13 de la Chartequi traite des élections115(*). Sauf qu'il n'ajoute rien de nouveau aux engagements déjà existants des Etats membres sur le plan universel (infra). De plus, sa formulation estcritiquable, puisque sa portée se trouve d'une certaine manière limitée par la disposition « conformément aux règles édictées par la loi. », qui essai de rappeler que cette question fait essentiellement partie du domaine interne des Etats.

La vague de démocratisation dans les années 90 qui a concernée plusieurs Etats africains116(*)et la prépondérance de l'idéologie libérale ont marqué l'Acte Constitutif de l'Union Africaine117(*), l'organisation qui a succédée à l'OUA.

Dés son préambule l'Acte Constitutif de l'UA énonce que les Chefs d'Etats et de gouvernements des Etats membres sont : « Résolus à promouvoir et à protéger les droits de l'homme et des peuples, à consolider les institutions et la culture démocratiques, à promouvoir la bonne gouvernance et l'Etat de droit ».

L'article 3 (g) fixe comme objectif pour l'UA de : « promouvoir les principes et les institutions démocratiques, la participation populaire et la bonne gouvernance ».

L'article 4 dispose que l'UA « fonctionne conformément aux principes suivants :   (...)

m) Respect des principes démocratiques, des droits de l'homme, de l'état de droit et de la bonne gouvernance; (...)

p) Condamnation et rejet des changements anticonstitutionnels de gouvernement ».

A la différence de l'OUA, l'exigence démocratique est clairement établie par l'Acte constitutif de l'UA. Il va même plus loin en prévoyant la création d'un Parlement panafricain « En vue d'assurer la pleine participation des peuples africains au développement et à l'intégration économique du continent » (article 17). Toutefois, le Protocole relatif au Parlement panafricain118(*) ne répond pas parfaitement à cette aspiration, mis à part les pouvoirs limités qu'il confère à cet organe, ses membres ne sont pas élus directement par les populations des Etas membres mais nommés par les différents parlements nationaux de ces derniers.

L'Article 30 de l'Acte constitutif de l'UA dispose que : « Les Gouvernements qui accèdent au pouvoir par des moyens anticonstitutionnels ne sont pas admis à participer aux activités de l'Union ». Cet article vise à éliminer les pratiques des coups d'Etats, putschs militaires (...) qui sont devenues monnaie courante dans plusieurs Etats africains. La Guinée a été suspendue pendant deux ans suite au coup d'état de décembre 2008 de Dadis Camara et retrouva sa place au sein de l'Union après l'élection fin 2010 du premier Président de la république élu démocratiquement depuis l'indépendance du pays en 1958. Il en est de même pour la Côte d'Ivoire qui, suite à l' élection présidentielle ivoirienne de 2010 et au refus de Laurent Gbagbo de céder son poste, l'UA a suspendu la Côte d'Ivoire le 9 décembre 2010 et avait conditionné sa réintégration à l'entrée en fonction d' Alassane Ouattara en tant que président effectif du pays.

Dernièrement, la Guinée Bissau a été suspendue par l'UA le 17 avril 2012, suite àla prise du pouvoir des militaires survenue dans cet Etat le 12 avril 2012, avant les élections présidentielles anticipées.119(*)

C'est une avancée considérable de l'UA vers la démocratie et la bonne gouvernance. Néanmoins, mis à part la condamnation des changements inconstitutionnels des régimes, l'effectivité des dispositions relatives à la transition démocratique de plusieurs Etats se trouve battue en brèche par la question non résolue du principe de la souveraineté des Etats dans la construction du panafricanisme (la Commission est généralement freinée dans son élan par la Conférence des chefs d'Etats et de gouvernement, organe éminemment politique, donc plus enclin au compromis qu'à l'application des principes et des règles constitutionnels) et les contraintes financières qui, ne peuvent favoriser le bon fonctionnement des institutions communes, encore moins la prise en charge des opérations d'intervention sur le terrain. Seuls 12 Etats-membres sur les 53 s'acquittent régulièrement de leurs cotisations120(*).

De plus, le système judiciaire de protection des droits de l'homme de l'UA est très controversé, voire inopérant. La Cour africaine des droits de l'homme et des peuples créée par le Protocole du 9 juin 1998121(*) ne peut être saisie par les individus qu'en cas d'acceptation expresse des Etats selon l'article 34 § 6 du dit protocole. Outre la restriction faite aux individus, la Cour a connu une grande période d'inactivité, son premier arrêt a été rendu le 15 décembre 2009, « l'arrêt Yogogombaye »122(*)que le professeur Stéphane Doumbé-Billé a qualifié de « non arrêt »123(*), puisque la Cour a déclaré son incompétence faute d'acceptation du Sénégal de la faculté des individus de saisir la Cour.

L'exigence démocratique au sein de l'UAa été renforcée par l'adoption le 30 janvier 2007 de la Charte Africaine de la Démocratie, des Elections et de la Gouvernance124(*) qui est entrée en vigueur le 15 février 2012. « L'adoption de ce texte est l'aboutissement d'un long processus, certes lent mais irréversible, amorcé au début des années 1990s »125(*). C'est un texte très ambitieux qui met tout d'abord l'accent sur le lien entre démocratie et droits de l'homme dans son article 3 §1 sur les principes et dans le Chapitre IV intitulé « De la Démocratie, de l'Etat de droit et des Droits de l'Homme ».

Le Chapitre V relatif à la culture démocratique et la paix, prévoit que « Les Etats parties s'engagent à élaborer les cadres législatif et politique nécessaires à l'instauration et au renforcement de la culture, de la démocratie et de la paix ». Elle élargit les situations dans lesquelles il y a changement inconstitutionnel de gouvernement. L'article 23 de la Charte dispose : « Les Etats parties conviennent que l'utilisation, entre autres, des moyens ci-après pour accéder ou se maintenir au pouvoir constitue un changement anticonstitutionnel de gouvernement et est passible de sanctions appropriées de la part de l'Union:

1. Tout putsh ou coup d'Etat contre un gouvernement démocratiquement élu.

2. Toute intervention de mercenaires pour renverser un gouvernement démocratiquement élu.

3. Toute intervention de groupes dissidents armés ou de mouvements rebellespour renverser un gouvernement démocratiquement élu.

4. Tout refus par un gouvernement en place de remettre le pouvoir au parti ou au candidat vainqueur à l'issue d'élections libres, justes et régulières.

5. Tout amendement ou toute révision des Constitutions ou des instruments juridiques qui porte atteinte aux principes de l'alternance démocratique. ». L'article 24 a un aspect préventif dans le cas où une situation menacerait le processus démocratique dans un Etat membre. L'article 25 est relatif aux sanctions que peut prendre le Conseil de la paix et de sécurité s'il y a une situation visée à l'article 23 survient.

Certes, le Charte ne traite pas des mesures à prendre pour absence de démocratie dans un Etat membre. Au contraire les gouvernements non démocratiques peuvent se voir protégés par les dispositions relatives aux changements inconstitutionnels qui sont inconditionnées. En effet le respect de l'ordre constitutionnel ne peut servir la démocratie que si la constitution est réellement démocratique et n'est pas manipulé par le gouvernement en place.

On peut affirmer que l'exigence démocratique au sein de l'UA est désormais une règle bien établie pour ses cinquante-quatre Etats membres. Mais l'ancrage d'une culture démocratique est moins évident. Plus de 42% des conflits dans le monde se déroule en Afrique126(*). En 2008 69,2% de la population de l'Afrique subsaharienne gagne 2$ par jour (le taux le moins faible)127(*). Il faudrait un développement économique et social pour garantir une démocratie véritable.

* 109 CONAC (G), « Quelques réflexions sur le nouveau Constitutionalisme africain », Symposium international de Bamako, Cotonou, 29-31 mars 2000, pp. 26-32, p. 27.

Disponible sur internet http://democratie.francophonie.org/IMG/pdf/bamako.297.pdf

* 110 BIAYA affirme que « Les élites, en s'emparant des armes du colonisateur, avaient ainsi hérité ou reproduit le modèle constitutionnel de la Métropole coloniale mais privé de son esprit et de son contexte. Cette appropriation malhabile a favorisé l'entrée de l'Afrique dans la période de l'autoritarisme sous ses différentes formes : monopartisme, coup d'État militaire, le patrimonialisme, la présidence à vie, le populisme militariste, etc », BIAYA (T.K) « Quelle Démocratie pour l'Afrique? Réflexions sur ses Possibilités et ses Caractéristiques », Dakar,

1998, pp. 14, p. 3. Article disponible sur internet http://unpan1.un.org/intradoc/groups/public/documents/cafrad/unpan008698.pdf

 ; Dans ce sens l'ex Président du Zaïre Mobutu affirmait au sommet de la Francophone à Dakar en mai 1989 : « le Chef africain ne partage pas son pouvoir », de YOUSSEF (N), « La transition démocratique et la garantie des droits fondamentaux », note de bas de page 1116, p.390.

* 111 Article 3 de la Charte de l'Organisation de l'Unité Africaine adoptée le 25 mai 1963.

* 112 AYOUN N'DAH (P) « Vers la bonne gouvernance et la démocratie », Débats. Courrier d'Afrique de l'Ouest, n° 26-27, juillet-août 2005, p. 49-54, p.49.

Article disponible sur internet : http://africanalyses.cerapinades.org/africanalyses/images/stories/DOSSIERS/DEBATS/Vers_la_bonne_gouvernance_et_la_dmocratie.pdf

* 113 GENNE (M), « La démocratie en Afrique : De la thèse de René Dumont à celle de la Commissionéconomique pour l'Afrique », Études internationales, vol. 22, n° 2, 1991, p. 413-423. Disponible sur internet : http://www.erudit.org/revue/ei/1991/v22/n2/702848ar.pdf

* 114Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples, adoptée le 27 juin1981 à Nairobi,lors dela 18e Conférence de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA). Entrée en vigueur le 21 octobre 1986

* 115 L'article 13 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples : « 1. Tous les citoyens ont le droit de participer librement à la direction des affaires publiques de leur pays, soit directement, soit part l'intermédiaire de représentants librement choisis, ce, conformément aux règles édictées par la loi.?

2. Tous les citoyens ont également le droit d'accéder aux fonctions publiques de leurs pays.

3. Toute personne a le droit d'user des biens et services publics dans la stricte égalité de tous devant la loi.»

* 116YOUSSEF (N), « La transition démocratique et la garantie des droits fondamentaux », Éditions Publibook, Paris, 2011, p. 391-394.

* 117 L'Acte constitutif de l'Union Africaine adoptée à Lomé le 11 juillet 2000, sa création officielle a eu lieu le 9 juillet 2002 à Durban.

* 118 Protocole au traité instituant la Communauté économique Africaine relatif au parlement européen, adopté par la 5ème session extraordinaire de la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement, Syrte, Libye, 2 mars 2001.

* 119 ROSTAND (B), « La suspension de la Guinée Bissau par l'Union Africaine », SFDI, la page hebdomadaire d'information, bulletin n°301, 22 avril 2012. Page internet : http://sentinelle-droit-international.fr/bulletins/a2012/20120422_bull_301/bulletin_sentinelle_301.php

* 120 AYOUN N'DAH (P), op cit., p.51

* 121 Le Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, portant création de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples signé à Ouagadougou, le 9 juin 1998,

* 122 NTWARI (G-F), « Note sur le premier arrêt de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples », African Journal of International and Comparative Law. Volume 18, Page 233-237, 2010. Article disponible sur internet: http://cdi.lyon3.free.fr/cdi.lyon3/petits_cahiers_files/Arret%20YOGOGOMBAYE.pdf

* 123 Lors de L'interview juridique de l'Université Jean moulin Lyon 3, avril 2011, http://www.youtube.com/watch?v=emrqPLJ_rcg

* 124 La Charte Africaine de la Démocratie, des Elections et de la Gouvernance, adoptée par la huitième session ordinaire de la Conférence tenue le 30 janvier 2007, Addis-Abeba Ethiopie.

* 125 NGARHODJIM (N.F), « Charte Africaine de la Démocratie, des Elections et de la Gouvernance : une analyse critique », Open Society Institute, Africa Gouvernance Monitoring and Advocacy Project, mai 2007, pp.7, p. 1. Article disponible sur internet :http://www.aidh.org/Biblio/Txt_Afr/Images/A_propos_Charte.pdf

* 126 AYOUN N'DAH (P), op cit., p. 50.

* 127 Données de la Banque mondiale http://donnees.banquemondiale.org/theme/pauvrete

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo