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Les déterminants socio-politiques de la corruption dans l'administration publique burkinabè

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par SIDI BARRY
Ecole nationale d'administration et de magistrature (ENAM) - Conseiller en gestion des ressources humaines (GRH) 2010
  

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Paragraphe III : La politisation de l'administration

Le rapport sur le développement humain au Burkina Faso36(*), «constate de plus en plus une politisation de l'administration que l'on soit en présence d'un système de la Fonction Publique de carrière où d'un système de la Fonction Publique de l'emploi. Cette politisation est favorisée par le pouvoir discrétionnaire de l'administration que l'on retrouve dans les nominations où il faut tenir compte des compétences techniques en faisant prévaloir le critère du mérite sur celui de l'allégeance politique au régime».

Par ailleurs, dans un éditorial publié dans le journal `'Le pays'' du 29 novembre 2001, on pouvait lire ceci : «Beaucoup de voix s'élèvent et font le même constat. Notre administration est excessivement politisée (...). Dans ce bric-à-brac où le clientélisme est roi, en avant la politique du `'ôte-toi que je m'y mette''. On propulse à des postes de responsabilité des agents à la compétence parfois discutable et imperfectible».

Et selon le Commissaire au Gouvernement à la Cour des comptes, magistrat de formation : «Nous sommes un corps où nous ne sommes pas nombreux mais la justice est tellement politisée à telle enseigne que pratiquement tous les postes de décisions étaient confiés à des juges `'acquis''. Imaginez certains directeurs généraux qui ont fait quinze (15) ans à leur poste. Cela pose problème. Espérons que le Premier Ministre va appliquer la mesure consistant à faire un appel à candidature pour occuper ces postes de directeurs généraux avec des objectifs à atteindre».

Ainsi, cette politisation à outrance de l'administration publique est source de dysfonctionnements dans les services publics. Dans cette situation, les agents des services publics se trouvent automatiquement gratifiés d'un ascendant considérable sur leur entourage. Ils sont alors soumis à une forte pression de leur «bienfaiteur» les invitant à utiliser leur position pour piller les biens publics.

En effet, déjà en 1991, un texte paru dans Sidwaya du 28 août 1991, tirait la sonnette d'alarme sur l'ancrage de cette «politique du ventre» au Burkina Faso en ces termes : «Dans bon nombre de pays africains, la politique ressemble à un râtelier où une mangeoire publique où la chose publique est servie. Naturellement, toutes les mains qu'elles soient propres ou sales, immaculées où tachées, innocentes ou coupables, douteuses ou honnêtes... peuvent y plonger même sans s'y être conviées. L'accès à la table n'est pas subordonné par un laissez-passer. Ou, si! La seule condition sine qua non demeure le saupoudrage politique. Bien souvent, ces auto convives sont guidés dans leurs élans par la seule voracité. Qu'importe à leur auguste appétit que le couvert soit suffisamment étoffé, la table assez garnie pour les invités ; pourvu que leurs susceptibilités gastronomiques soient satisfaites!... »

Donc, pour certaines personnes, travailler dans l'administration et faire de la politique, «c'est se créer une place au soleil» et surtout se servir prioritairement en gérant de manière patrimoniale les biens de l'Etat. Cette collision entre le politique et l'administration a atteint un seuil inquiétant car ce sont les mêmes acteurs politiques qui gèrent les affaires de l'Etat. Et l'impunité dont jouissent les auteurs d'actes de corruption s'explique par le fait que ces derniers sont aux affaires et sont nommés à des postes de responsabilité par des amis politiques et bénéficient du soutien de ces derniers. Le Comité National d'Ethique37(*) confirme cette réalité et indique que « la quasi-totalité des secteurs de l'administration sont fortement politisés...Beaucoup de sociétés sont dirigées par des cadres désignés non en fonction de leurs compétences mais de leur appartenance politique ».

Par exemple, à propos du soutien dont bénéficient certaines personnes incriminées par les différents rapports de la Cour des comptes, un responsable du REN-LAC38(*) qui a du mal à cacher sa colère affirme que : «Les rapports de la Cour des comptes en disent long sur les dossiers brûlants des cas de détournements et de malversations dans les services publics. Mais l'affaire qui continue de faire des gorges chaudes est sans conteste l'affaire des malversations au niveau de la CNSS. Malgré la protestation des organisations syndicales, du REN-LAC et de la presse écrite, on s'est contenté de dire qu'il y a une enquête administrative qui va être commanditée. On a enlevé le DG de la CNSS sans nous dire qu'est-ce qu'il a fait. Et si on devait sanctionner, l'ancien Premier Ministre Ernest Paramanga YONLI allait prendre pour son compte».

Notons que dans certains pays comme la France par exemple, vous pouvez obtenir un poste de responsabilité au sein de l'administration grâce à votre appartenance politique mais n'empêche qu'en cas de malversation et de non respect de certaines procédures en matière de gestion des fonds publics, vous pouvez être poursuivi. L'actualité en France a souvent fait allusion à plusieurs responsables politiques qui sont sous poursuite judicaire pour corruption et fautes graves de gestion (l'ancien Président Jacques Chirac, Charles Pasquois ancien Ministre de l'intérieur, etc) quand ils étaient aux affaires. Or, au Burkina Faso, le plus souvent, les affinités politiques constituent un `'parapluie'' sous lequel se cachent les responsables et les agents de l'administration pour commettre des actes de corruption et jouir de l'impunité que leur confère leur appartenance politique.

Enfin, les tentatives de punition et de lutte contre la corruption sont brisées par les réseaux clientélistes et politiques tissés par les acteurs impliqués dans la corruption. Dans cette situation, l'institution ou celui qui veut sanctionner est l'objet de multiples interventions, voire de menaces voilées de ses pairs et de personnalités haut placés dans l'appareil d'Etat.

* 36 Corruption et développement humain. Rapport sur le développement humain - Burkina Faso-2003 PNUD, p.78.

* 37 Le Comité National d'Ethique : Rapport 2002

* 38 Entretien avec N. gestionnaire du REN-LAC

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