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Les déterminants socio-politiques de la corruption dans l'administration publique burkinabè

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par SIDI BARRY
Ecole nationale d'administration et de magistrature (ENAM) - Conseiller en gestion des ressources humaines (GRH) 2010
  

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CHAPITRE II : LES FACTEURS SOCIO-POLITIQUES QUI FAVORISENT L'EMERGENCE DE LA CORRUPTION DANS L'ADMINISTRATION PUBLIQUE BURKINABE

Section I : Les déterminants sociaux de la corruption dans l'administration

Plusieurs facteurs sociaux contribuent à l'ancrage des pratiques corruptrices dans l'administration publique au Burkina. Ces principaux facteurs sociaux sont : Le délitement des valeurs morales, les faibles revenus des agents publics et l'enchâssement des logiques socio-culturelles dans le fonctionnement de l'administration.

Paragraphe I : Le délitement des valeurs morales

«Aucune nation ne se construit dans l'incivisme, la corruption et l'abus de biens publics. Etre Burkinabè, c'est être intègre». Ce slogan qui passe régulièrement à la télévision nationale avant le journal télévisé et qui suscite des interrogations, en dit long sur la perte de nos valeurs morales.

Autrefois considéré comme un homme honnête, intègre et travailleur, le burkinabè adopte de nos jours des comportements jugés déviants et pernicieux. A ce propos, le Comité National d'Ethique (CNE) dans son rapport 2002 révèle que «Toutes les couches sociales semblent être frappées par le dérèglement moral».

La montée en puissance des valeurs individuelles (individualisme, la cupidité, la mégalomanie, la recherche du gain facile) et l'effritement des valeurs de références collectives (civisme, patriotisme, valeurs morales et religieuses) constituent un socle favorable à l'enracinement de la corruption dans l'administration publique Burkinabé.

En effet, plusieurs voix s'élèvent régulièrement dans les media pour tirer la sonnette d'alarme sur l'agonie de la morale dans notre pays qui se traduit par le manque de formation à l'instruction civique, les dérives en matière d'éducation, la perte de nos valeurs culturelles et traditionnelles. Notons que ces dérives sont plus perceptibles dans les centres urbains où les relations sociales sont de plus en plus monétarisées.

Ainsi, la morale et l'éthique qui gouvernent l'administration ont cédé la place à la «politique du ventre» qui rime avec le slogan «gouverner c'est manger».

Selon un responsable du REN-LAC14(*), «La perte des valeurs morales est un facteur déterminant dans le développement de la corruption dans l'administration. Prenons un exemple simple, lorsque nous étions élèves. C'est vrai qu'il n'est pas dit l'élève ne triche pas mais à notre époque, les quelques élèves qui trichaient se cachaient pour le faire non seulement par peur du maitre d'école mais aussi des autres élèves. Ces tricheurs avaient peur car si on les prenait, ils auraient honte. Cela veut dire qu'avant, il y avait des valeurs morales auxquelles la majorité adhérait et même ceux qui voulaient violer ces règles morales ne le faisaient pas publiquement. Mais aujourd'hui, c'est presqu'une fierté que de montrer qu'on a réussi par la tricherie. Vous avez à l'université ce que les étudiants appellent `'défense en ligne''. Cela veut dire que tout le monde est d'accord sur le fait qu'on peut tricher».

Il est indéniable que l'absence de modèle de référence est source de corruption dans l'administration publique. Et cette déstructuration de l'ordre moral au niveau national a des effets dévastateurs dans l'ensemble des secteurs de l'administration publique où les valeurs d'éthique devraient être la règle d'or. La perte des valeurs a atteint un niveau tel que l'ostentation, la cupidité, l'incivisme, le gain facile, la folie des grandeurs, le paraître, le prestige et la recherche des honneurs sont devenus des critères importants de réussite sociale.

L'étude sur les pratiques de corruption dans l'administration publique du Burkina15(*) indique que «constituent les causes d'ordre moral, l'appât du gain facile, la perte des valeurs morales et les raisons culturelles. Parmi ces trois causes, les raisons culturelles sont les moins importantes. L'appât du gain facile avancé par 92% des enquêtés occupe la quatrième (4è) place parmi les onze causes retenues. Il est suivi par la perte des valeurs morales de l'avis de 79,5% des personnes».

Selon le rapport 2005 du REN-LAC16(*), «Cette culture le l'argent-roi qui décide de tout est un facteur propice à l'émergence d'une société où les valeurs morales, l'éthique et le respect du bien public sont foulés du pied».

Notre administration qui est à l'image de la société est traversée par les mêmes contradictions et remous sociopolitiques. Ainsi, de nombreux agents publics et usagers constatent au quotidien des signes évidents de l'absence des valeurs de référence collective à travers le mauvais exemple des responsables et le manque de transparence dans la gestion des affaires publiques.

Dans cette situation, un agent public où un usager peut céder à la tentation et s'adonner à la corruption parce qu'il est déchiré entre la montée en puissance des valeurs individuelles et le déclin des valeurs collectives qui assurent sa socialisation.

A ce sujet, un agent17(*) au Ministère de la Fonction Publique dira en substance : «Aujourd'hui, il vaut mieux paraitre que être. L'avoir a pris le pas sur l'être. La perte des valeurs morales est la principale cause de la corruption dans les services publics aujourd'hui. Dans notre société actuelle, les gens sont appréciés en fonction de ce qu'ils ont et non en fonction de ce qu'ils sont. C'est ce que tu as qui compte et non ce que tu fais. Même au sein de la famille, on voit que quand le petit frère a plus de moyens que le grand frère, au niveau du conseil de famille, c'est sa voix qui compte. Donc, cela fait que les jeunes travailleurs, c'est-à-dire les jeunes fonctionnaires sont tentés de réussir rapidement ».

* 14 Entretien avec N.A Gestionnaire du REN-LAC

* 15 Etude sur les pratiques de corruption dans l'administration publique du Burkina Faso : Programme d'appui à la bonne Gouvernance, mars 2008, p.42

* 16 Etat de la corruption au Burkina Faso : Rapport 2005, Ouagadougou, REN-LAC, p.60

* 17 Entretien avec K.S.E agent à la DPESSA au Ministère de la Fonction Publique

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo