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Réflexions sur le concept d'états défaillants en droit international

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par Wenceslas MONZALA
Université de Strasbourg - Master II Droit International Public 2012
  

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B. La décommunisation

La décommunisation renvoie traditionnellement à l'effondrement des régimes communistes d'Europe de l'Est à la fin du XXe siècle. Dans la suite de l'étude du principe d'autodétermination des peuples, la décommunisation s'apparente à une application « interne » de ce droit et se traduit par une dissolution d'Etats déjà constitués. La dissolution d'Etats consiste en l'éclatement d'un État préexistant en deux ou plusieurs Etats nouveaux, dont aucun ne peut prétendre être le continuateur de celui dont ils sont issus, sinon par accord entre les Etats successeurs, comme cela s'est produit pour l'U.R.S.S. (les Etats de la Communauté des Etats Indépendants, à travers l'accord d'Alma - Ata du 21 décembre 1991, ont reconnu à la Russie le droit de succéder à l'U.R.S.S. comme membre des Nations Unies avec les prérogatives qui en découlent telles que le siège permanent au conseil de sécurité, le droit de veto, etc.)56. Dans l'étude de la décommunisation, il est souvent fait référence à trois démembrements d'Etats : le cas de la Russie, de la Yougoslavie et de la Tchécoslovaquie et à une incorporation dans le cas de l'Allemagne. Les développements qui vont suivre se limiteront aux exemples de la dislocation de la Fédération Yougoslave et de l'Union soviétique qui vont véritablement donner lieu à l'apparition de nouveaux Etats. A ce sujet, il faudrait observer d'entrée de jeu que le droit international n'encourage pas ce mode de création d'Etats qui s'oppose au principe du respect de l'intégrité territoriale. Mais devant la dislocation de la fédération yougoslave et l'union soviétique, la communauté internationale a dû entériner ce fait.

54 ADHEMAR ESMEIN, Éléments de droit constitutionnel français et comparé, Paris, Sirey, 1927, Tome 1, pp. 1- 2.

55 CONSEIL CONST., déc., n°91 - 290 DC du 9 mai 1991, Statut de la Corse.

56 SATCHIVI A., Le déclin de l'État en droit international public, Paris, L'Harmattan, 2001, p. 113.

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En ce qui concerne l'URSS, sa dislocation a débuté avec les difficultés économiques rencontrées par la fédération au début des années 1990 ; difficultés qui vont ensuite affermir la volonté des entités fédérées à accéder à la souveraineté. Pour mémoire, l'URSS a été créée en 1922 par une décision du premier congrès des soviets de l'URSS composé de quatre républiques soviétiques : la république socialiste fédérative soviétique de Russie (RSFSR), la RSS d'Ukraine, la RSS de Biélorussie et la République socialiste fédérative soviétique du Caucase (formée en mars 1922 par l'union des trois républiques soviétiques du Caucase : la Géorgie, l'Arménie et l'Azerbaïdjan). L'Union était fondée sur deux documents importants issus de ce premier congrès des Soviets de l'URSS, à savoir la Déclaration sur la formation de l'Union des Républiques socialistes et le traité sur la formation de l'Union des Républiques socialistes soviétiques qui fixait les compétences attribuées à l'Union et en définissait les structures. L'union s'est ensuite dotée d'une constitution, celle du 31 Janvier 192457, qui va fixer la répartition des compétences entre l'Union et les Républiques fédérées. Celles-ci sont passées de quatre en 1922 à quinze en 1957. La disparition de la RSFSR a entraîné l'intégration du Kazakhstan, de l'Ouzbékistan, du Turkménistan, du Tadjikistan et de la Kirghizie à l'Union avec le statut de république fédérée. Ensuite, la Lettonie, la Lituanie, l'Estonie et la Moldavie sont devenues républiques soviétiques en 1940 à la suite des accords entre Staline et Hitler.

Au début des années 1990, le fédéralisme soviétique entre dans sa phase d'effondrement progressif. L'indépendance des pays baltes, proclamée en 1990 pour la Lettonie et l'Estonie et en 1991 pour la Lituanie, va sonner le glas de la dissolution de l'Union à la suite de l'échec des tentatives de M. Gorbatchev pour renouveler le fédéralisme soviétique. Suivant l'exemple des Etats baltes, les républiques fédérées vont, les unes après les autres, proclamer d'abord leur souveraineté puis leur indépendance. La signature le 8 décembre 1991 par la Russie, l'Ukraine et la Biélorussie des accords de Minsk consacrent la naissance, entérinée plus tard par les accords d'Ata-Aka du 21 décembre 1991, de la communauté des Etats Indépendants et la fin de l'Union soviétique.

La destruction du système communiste soviétique entraîne en 1990 celle de l'ex-Yougoslavie. La république fédérative de Yougoslavie réunissait six entités hétérogènes, à savoir la Serbie, la Slovénie, la Croatie, la Bosnie, la Macédoine et le Monténégro. L'éclatement de la fédération yougoslave commence, après la mort du Maréchal Tito en 1980, avec les résurgences nationalistes et l'aspiration de plus en plus forte des différentes entités fédérées à une totale autonomie. Le nationalisme serbe atteint son paroxysme avec l'arrivée au pouvoir en 1986 du communiste Slobodan Milosevic. L'année 1990 va marquer un tournant décisif dans la dislocation de la fédération yougoslave avec l'organisation des référendums sur l'indépendance, d'abord en Slovénie (1990) puis en Croatie (mars 1991). Ce mouvement d'indépendance satisfaisait les peuples non serbes au grand dam des serbes pour lesquels le seul avantage de l'État yougoslave consistait à pouvoir réunir tous les serbes dans un seul État. Les institutions fédératives vont se bloquer à un point tel qu'il n'était plus possible de trouver un arrangement entre peuples minoritaires et peuples majoritaires dans les

57 La Constitution de l'URSS du 31 Janvier 1924, disponible à l'adresse : http://mjp.univ-perp.fr/constit/su1924.htm (Consulté le 05 Juillet 2012).

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différents Etats. Seule l'armée restait fédérale mais elle était dominée par les officiers serbes. Elle cherchera en vain à lutter contre la proclamation d'indépendance de la Slovénie, puis de la Croatie en mai 1991. A son tour, la Macédoine proclame son indépendance à la suite du référendum de septembre 1991. Interviendra en mars 1992, la proclamation de la république de Bosnie suivie de la sécession des serbes et de la guerre entre Serbes et Bosniaques.

Ce qu'il faudrait retenir de ce bref rappel historique est la cause, du moins les principes juridiques qui ont été avancés pour justifier le droit à l'autodétermination de ces peuples. Grosso modo, on aura appris, sans doute de manière inattendue à cette époque, que les peuples appartenant à des Etats déjà constitués pouvaient bénéficier d'un droit à l'autodétermination. La communauté internationale se trouvait, dans le cadre de la décommunisation, devant un fait accompli et elle se devait de trouver une solution à l'épineuse équation de la conciliation entre « [...] deux principes qui s'opposent en apparence, à savoir le respect de l'intégrité des Etats et le droit à l'autodétermination des peuples »58. On peut donc s'apercevoir, à travers la décommunisation, qu'il a été reconnu aux peuples appartenant à des Etats déjà constitués un droit à l'autodétermination, droit qui s'appuie sur une sorte de « principe de légitimité ethnique »59. La création de nouveaux Etats, dans le contexte de la décommunisation, répondait, dans la majorité des cas, à une référence à des arguments identitaires mélangeant des aspects culturels et historiques.

En fin de compte, la mise en avant de l'identité ethnico-nationale dans l'application du principe d'autodétermination des peuples n'a abouti qu'à créer des conflits qui ont fini par créer des Etats à l'infini défaillants. L'appréciation de la défaillance de ces Etats ne s'opère pas exclusivement sur la base de critères économiques car, dans ce domaine, certains Etats issus de la décommunisation ont, en intégrant certaines communautés économiques régionales, comblé leur retard et jouissent d'une relative stabilité. En revanche, l'évaluation de leur défaillance sur la base de critères tels que l'effectivité de l'État de droit ou encore le respect des Droits de l'Homme, confirme aisément ces propos. Ainsi, au moins onze (11) Etats issus de la décommunisation figurent dans la catégorie « warning », « very higt warning », « hight warning » et « alert » du Failed States Index 2012 produit par le Fund of Peace60.

C'est d'ailleurs sur la base des critères de l'effectivité de l'État de droit, du respect des Droits de l'Homme que s'appréciera la défaillance étatique au lendemain des attentats du 11 septembre, période qui a également vu émerger un consensus international autour du concept d'Etats défaillants.

58 Point de presse du ministre français des affaires étrangères, R. BADATINR du 8 Juillet 1991 à la Haye, cf. AFDI 1991, p. 986

59 Voir GOSSIAUX J. - F., Pouvoirs ethniques dans les Balkans, Paris, PUF, 217 p.

60 The Fund of Peace, Failed States Index 2012, p. 4 - 5; document disponible à l'adresse : http://reliefweb.int/sites/reliefweb.int/files/resources/cfsir1210-failedstatesindex2012-06p.pdf (Consulté le 05 Juillet 2012)

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand