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Réflexions sur le concept d'états défaillants en droit international

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par Wenceslas MONZALA
Université de Strasbourg - Master II Droit International Public 2012
  

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Section 2 : L'évolution du concept d'Etats défaillants

Après les attentats du 11/9, le concept d'Etats défaillants va trouver un écho dans une sphère autre que celle de l'Agenda sécuritaire international. Le concept d'Etats défaillants va désormais occuper une place importante dans les politiques nationales de sécurité et de défense de certains Etats (Paragraphe 1). Ces derniers vont reconsidérer leurs relations avec ces Etats. Cela se traduit par l'élaboration de politiques spécifiques à l'endroit des Etats défaillants mais aussi parfois par la création d'organes administratifs chargés de s'occuper exclusivement de ces Etats défaillants et surtout de mesurer l'impact de ces derniers sur leur

sécurité nationale78. Cette évolution s'observe aussi dans le droit international du
développement notamment à travers l'émergence d'une notion qui se veut « neutre » pour rendre compte de la défaillance étatique. Il s'agit de la notion d' « Etats fragiles » qui matérialise l'approche développementaliste des Etats défaillants (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Le concept d'Etats défaillants dans l'élaboration de la politique
nationale de défense et de sécurité des Etats occidentaux

Dans ce paragraphe, nous nous bornerons à l'étude de deux acteurs importants de la scène internationale dont le narratif sécuritaire au cours de ces dernières années permet de mettre en lumière l'évolution du concept d'Etats défaillants. Aussi, conviendrait-il de préciser qu'il s'agit d'un choix entièrement arbitraire en raison du fait que la quasi-totalité des Etats influents dans l'élaboration de l'Agenda sécuritaire international, ont dû, au cours de ces dernières années, tenir compte de la problématique des Etats défaillants dans leur politique nationale de sécurité et de défense79. Ainsi, les développements qui vont suivre se limiteront, d'une part, à l'analyse de la politique nationale de sécurité et de défense des Etats Unis (A) et au discours de l'Union Européenne envers les Etats défaillants d'autre part (B).

78 A titre d'exemple, on peut citer l'U.S Commission on weak states and National Security.

79 A titre illustratif on peut citer la Position de la France sur les Etats fragiles et les situations de fragilité, stratégie validée par le Comité Interministériel de la Coopération Internationale et du Développement le 27 Septembre 2007, disponible sur http://www.diplomatie.gouv.fr/en/IMG/pdf/EtatsFragiles-2.pdf (Consulté le 8 juillet 2012) ; pour le compte de l'Australie, nous avons Our failing Neighbour : Australia and the future of Solomon Islands, document produit par l'Australian Strategic Policy Institute en 2003, document disponible sur http://www.aspi.org.au/htmlver/22484solomons/index.html ; enfin pour le Royaume Uni, nous pouvons citer The strategic Defense Review : A new chapter , 2002 disponible sur http://www.mod.uk/NR/rdonlyres/79542E9C-1104-4AFA-9A4D-8520F35C5C93/0/sdr a new chapter cm5566 vol1.pdf

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Réflexions sur le concept d'Etats défaillants en droit international

A. L'U.S. National Security Strategy et les Etats défaillants

«The events of September 11, 2001, taught us that weak states, like Afghanistan, can pose as great a danger to our national interests as strong states»80. Cette phrase par laquelle l'ancien président américain G.W. Bush introduit la stratégie de sécurité nationale de l'année 2002 (ci-après SSN) est assez évocatrice de la place que son gouvernement accordait aux Etats défaillants après les attentats du 11/9. Même si certains auteurs ont remarqué, à juste titre, que les Etats défaillants ont commencé à devenir la préoccupation des politiques nationales de sécurité des Etats Unis quelques années après la fin de la guerre froide81. C'est dans cette perspective, qu'entre 1995 et 2000, la CIA, sous la houlette du ministère de la défense des Etats Unis (Department of Defense), a été appelée à travailler avec la State failure task force. Il s'agissait d'un groupe spécial d'étude dont la mission était de mettre en avant les causes de la défaillance étatique et celles de l'incapacité de ces Etats à rester membres de la communauté internationale. Dans cette même période, la United States Agency for International Development (USAID), la principale agence d'aide américaine au développement s'intéressait déjà à la situation des pays déstabilisés par l'effondrement du mur de Berlin à travers des opérations ayant pour objectif d'assurer le retour à la paix et l'établissement de la démocratie dans ces pays.

Mais en réalité, l'intérêt que l'administration américaine porte aux Etats défaillants est apparu plus manifeste depuis les attentats du 11/9 dont la responsabilité est imputée en partie à l'Afghanistan, du fait de sa défaillance dans le contrôle d'une portion de son territoire qui a servi de base arrière au mouvement terroriste Al-Quaïda. Selon l'expression de l'ex-secrétaire d'État à la défense Condoleezza Rice, ces Etats défaillants posent aux Etats Unis un danger « unparalled »82 en raison de leur lien avec le développement de nouvelles menaces contre la paix et la sécurité internationale. Cette idée constitue le leitmotiv de toute la stratégie de sécurité nationale de 2002. Le document, dans différents chapitres, établit des liens entre les Etats défaillants et le développement du terrorisme international (Chapter III : Strengthen alliances to defeat global terrorism and work to prevent attacks against US and our friends), la propagation des armes de destruction massive (Chapter V : Prevent our enemies from threatening US, our allies, and our friends with weapons of mass destruction) et enfin les Etats défaillants sont perçus comme sources d'instabilité régionale (Chapter IV : Work with others to defense regional conflicts)83. Cependant, il faudrait signaler que, quand bien même la Stratégie de Sécurité Nationale de 2002 considère les Etats défaillants comme l'un des défis majeurs du XXIe siècle et comme l'un des dangers les plus importants à la sécurité des Etats-Unis, le raisonnement dans tout le reste du document, est construit autour de la vielle notion de rogue states : ces Etats qui maltraitent leur population et dilapident leurs ressources au

80 White House, National Security of the United States of America, 2002, p.1

81 Voir SACHS D. J., « The strategic signidicance of global inequity», The Whasington Quaterly, Vol. 24, n°3, Summer 2001, pp. 187 - 198 (Il s'agit en effet d'un article écris quelques années plus tôt mais dont la

publication n'a été effectuée qu'en 2001), disponible sur
http://www.earth.columbia.edu/sitefiles/file/about/director/pubs/ECSP_1003.pdf

82 RICE Condoleezza, « The promise of Democratic peace: why promoting freedom is the only Realistic path to security», Washington Post, Decembrer 11, 2005.

83 White House, U.S National Security Strategy, 2002.

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profit des dirigeants, rejettent les règles du droit international, soutiennent le terrorisme, ne respectent pas les Droits de l'Homme et par-dessus tout, haïssent les Etats Unis. C'est du moins ce qui ressort de la définition des rogue states donnée par l'US National Security Strategy de 200284. Du reste, la principale innovation dans le document consiste en la mise en place d'une stratégie d'action envers ces Etats. Cette stratégie repose sur trois axes à savoir la diplomatie, la défense et le développement. Ce dernier axe est sans doute l'innovation majeure de ce document. Le développement devient ainsi un enjeu majeur pour la sécurité intérieure des Etats-Unis. A titre d'exemple, le chapitre VII (Expand the circle dor development by opening societies and bulding the infrastructure of democracy) du document s'emploie à expliquer le rôle de l'aide au développement dans la protection de l'intérêt national étatsunien dans son combat face aux nouveaux défis du XXIe siècle. L'USAID rentrera très vite dans cette dynamique en adoptant le 7 janvier 2003 un rapport intitulé Foreign Aid in the National Interest85 dans lequel l'agence explique comment les actions d'aide publique au développement vont être coordonnées avec celles d'une politique nationale de sécurité. Il faudrait alors remarquer que, par le biais de ce positionnement, les Etats Unis utilisent l'aide publique au développement non pas pour aider les Etats défaillants mais au contraire pour se protéger de ces Etats. C'est en tout cas l'opinion de l'ex-secrétaire d'État à la défense Condoleezza Rice lorsqu'elle considère que l' « un de nos meilleurs outils pour aider les Etats à construire des institutions démocratiques et à renforcer la société civile est notre aide au développement, mais nous devons l'utiliser correctement. Une des grandes avancées des huit dernières années a été la création d'un consensus bipartisan pour une utilisation plus stratégique de l'aide étrangère. Nous avons commencé à transformer notre aide en incitants, afin de pousser les pays en développement à gouverner de manière juste, à avancer en matière de liberté économique et à investir dans leur population. [...] Nous alignons maintenant mieux notre aide au développement avec nos objectifs de politique étrangère »86.

Ainsi, d'une conception purement sécuritaire au départ, le concept d'Etats défaillants a pu s'imposer dans la politique intérieure et étrangère des Etats Unis et apparaît aujourd'hui comme un moyen d'action au service de la politique d'aide au développement à l'égard des Etats défaillants. C'est également cette approche qu'a adopté l'Union Européenne (ci-après l'UE) dans son positionnement face à la problématique des Etats défaillants.

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