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Le développement de l'industrie musicale en Grande-Bretagne de l'entre-deux-guerres aux années Beatles : une trajectoire d'innovation globale?

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par Matthieu MARCHAND
Université Michel de Montaigne - Bordeaux III - Master Histoire 2012
  

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B/ Un exemple d'ascension « en escalier »274 : les Beatles

L'ascension de la musique « pop » des Beatles est à juste titre la plus intéressante si on souhaite étudier la contribution essentielle des groupes médiatiques auprès des industries du disque dans le phénomène de construction des stars. Alors que la BBC-Radio s'est ouvert timidement au rock and roll et par là même à la programmation de disques, à travers une émission de deux heures, le Saturday Club de Brian Mathew (1958), diluée dans le très familial Light Programme, en plus de la station privée Radio Luxembourg, elle accueille pourtant favorablement les Beatles, à défaut de l'existence de chaîne destinée aux jeunes. Les Beatles enregistrent leur première émission de radio à Londres, The Talent Spot, au mois de décembre 1962, puis participent dès février 1963 à une émission en direct, Parade of the Pops, enregistrée pour le Light Programme, avant d'assister à toutes les émissions touchant plus ou moins les jeunes sur la BBC, dont les plus populaires sont Easy Beat et le Saturday Club. Le groupe aura même droit en juin 1963 à son propre programme, Pop Go the Beatles, montrant à quel point la BBC-Radio fut généreuse envers le groupe, à tel point que les ingénieurs de la BBC la surnommait ironiquement la Beatles Broadcasting Corporation275.

Fait qui remonte jusqu'à sa fondation en 1922, la BBC, mais surtout le service anglophone de Luxembourg, dépendaient largement des grosses compagnies du disque, qui financent certaines émissions et présentent le plus officiellement du monde leur production pop. Pour l'industrie musicale, un passage à la radio est l'assurance d'une vente confortable, sous la condition de souscrire à la réglementation précise déjà évoquée, ce à quoi s'attela le producteur George Martin au moment de la sortie du « Love Me Do » des Beatles (4 octobre

273 On prend dès lors parti avec des sociologues britanniques comme Simon Frith ou encore Roy Shuker, pour qui la pop se définit comme une musique produite commercialement, avec une intention de profit et selon une logique non pas artistique mais d'entreprenariat. Cf. FRITH, Simon, et al., The Cambridge companion to pop and rock (2001).

274 L'expression est tirée de : GUIBERT, Gérôme, « Industrie musicale et musiques amplifiées », Chimères, 2000, n° 40, p. 5.

275 LEMONNIER, Bertrand, L'Angleterre des Beatles : une histoire culturelle des années soixante, Paris, Éditions Kimé, 1995, p. 119.

1962), dont le 45-tours qui en est issu n'atteint que la dix-septième place du classement des ventes établi par le Record Mirror. La sortie rapprochée d'autres 45-tours276 et mieux encore d'un 33-tours, permet qui plus est de profiter d'un effet de répétition et de multiplier les chances de séduire les médias de manière durable : c'est le phénomène bien connu du follow up277 (plusieurs titres consécutifs aux sommets du hit-parade), très recherché par les maisons de disques. Ainsi, dans la foulée « Please Please Me » atteint au mois de mars la deuxième place du Top Twenty, succès réitéré en avril avec « From Me to You » qui s'installe à la tête des classements de vente. Par conséquent, l'alliance entre une production millimétrée de titres à la chaîne et un objectif clairement commercial permet généralement d'obtenir la clé des ventes et des profits qui y sont liés. C'est du moins un argument qui fonctionne dans le cas des Beatles et de la majorité des groupes qui ont suivi.

Rapidement, les Beatles deviennent les coqueluches des journaux du disque business comme New Record, puis des magasines musicaux établis et respectés (v. annexe 9) qui rapidement, et ce dès le début des années cinquante, se sont dotés des premiers classements de singles. Le premier du genre est publié le 14 novembre 1952 dans le New Musical Express, plus connu sous l'acronyme NME, journal lancé au mois de mars précédent. Le classement, au départ un Top 12, fut créé par le chef de la publicité du journal, Percy Dickins, qui compila les ventes de disques en téléphonant aux vingt magasins de disques les plus importants. Rapidement devenu l'une des rubriques les populaires du journal, il commence à être relayé dans les notes des maisons de disques et les communiqués de presse. En octobre 1954, il s'est élargi au Top 20 et en avril 1956 au Top 30. Principal rival du NME, le Melody Maker, dévoile sa première version des charts le 7 avril 1956. Le précurseur d'un classement officiel plus proche du modèle actuel apparaît néanmoins pour la première fois dans le Record Retailer en mars 1960 sous la forme d'un Top 50. Cependant, il ne fut pas immédiatement reconnu comme le classement officiel du pays car, à la différence du NME, magazine plus reconnu et surtout ayant l'avantage de disposer d'une meilleure exposition médiatique grâce à

276 Les singles ont toujours comporté d'autres morceaux, faces B et autres versions, etc. Mais ce qui comptait, c'était la chanson principale, le titre figurant dans les charts. La seule exception a été les doubles faces A occasionnelles, dont l'exemple le plus célèbre est sûrement le double single des Beatles en 1967 : « Penny Lane » / « Strawberry Fields Forever ».

277 Idem, p. 114.

sa diffusion sur Radio Luxembourg 278 , le Record Retailer est plutôt réservé aux professionnels en raison de chiffres se référant plus à de la comptabilité (nouvelles signatures, montants de contrats, changement de personnels au sein des maisons de disques, etc.). Le NME, le Melody Maker mais aussi Disc and Music Echo (publié entre 1958 et 1975), Sounds ou encore le Record Mirror, disponibles en kiosque, se destinaient plus quant à eux à un public non spécialisé. Tout au long des années soixante, les divers classements se sont développé, le listing pur et simple étant agrémenté de certains titres distinctifs qui permettaient de repérer immédiatement les titres en montée (avec, entre parenthèses, son classement enregistré la semaine précédente), les plus fortes progressions de la semaine, et les disques ayant déjà obtenu une distinction (disque d'Or et d'Argent). Ainsi, à la fin de l'année 1963, le Melody Maker (07-12-1963) ne recense pas moins de onze entrées dont trois 45-tours, trois Super 45-tours, deux 33-tours et trois chansons enregistrées par d'autres artistes (dont « I Wanna Be Your Man » des Rolling Stones). Les chiffres de vente pulvérisent tous les records : 1 300 000 exemplaires vendus du 45-tours « She Loves You »279 , mais ils sont surtout révélateurs de l'audacieuse décision de George Martin qui, en avril 1963, enregistre un 33-tours contenant quatorze titres des Beatles enregistrés dans la précipitation et avec une grande économie de moyens.

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