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Le développement de l'industrie musicale en Grande-Bretagne de l'entre-deux-guerres aux années Beatles : une trajectoire d'innovation globale?

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par Matthieu MARCHAND
Université Michel de Montaigne - Bordeaux III - Master Histoire 2012
  

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A/ L'arrivée du rock américain et ses conséquences

Les majors ont longtemps hésité avant de se lancer sur le terrain hasardeux de la musique rock. La première à entrer sur le marché fut Decca-US qui, à la différence de sa grande soeur britannique, était plus spécialisée sur la musique populaire. Malgré tout, une certaine prudence la gardait de multiplier les contrats avec les rockers américains ; sans pour autant renier un succès potentiel (elle signa Bill Haley, considéré comme l'un des premiers rockers avec Elvis Presley), sa stratégie fut de laisser ses propres sous-labels s'en occuper, minimisant ainsi les pertes financières en cas d'échec. En l'occurrence, Brunswick (entre temps séparée progressivement de sa maison-mère depuis l'arrivée du manager Nat Tarnopol) et Coral (créée en 1949 et qui connut le succès grâce aux McGuire Sisters et Teresa Brewer) signèrent des contrats avec des musiciens célèbre comme Buddy Holly ou encore Rocky Nelson339. Assurément, Decca-US était devenu un puissant label mais sa gestion était fortement handicapée par la non prévoyance de ses responsables ; ainsi, à la fin des années cinquante où le rock and roll commence à décliner, rien ne peut empêcher une imminente prise de contrôle, pas même la création de London Records en 1947 qui permettaient de distribuer sur le territoire étatsunien les artistes britanniques de Decca-UK340, ni l'acquisition en 1952 du studio de cinéma Universal Pictures, et encore moins l'intérêt pour la musique country qui pousse Decca Nashville (fondée en 1945 par Paul Cohen à New York) et l'implication de son nouveau directeur, Owen Bradley, à venir s'implanter au coeur même de la capitale de la

339 TSCHMUCK, Peter, Creativity and innovation in the music industry, Dordrecht, Springer, 2006, p. 95.

340 Le répertoire musical y est alors assez maigre en talents nationaux à la différence d'EMI qui récupéra les Beatles que Decca-UK eut le malheur de refuser. Il faut attendre la signature de Tommy Steele et surtout des Rolling Stones et des Who pour que la firme anglaise puisse se construire une liste d'artistes anglais digne de ce nom.

country341. Par conséquent, en 1962, la MCA (Music Corporation of America) rachète Decca-US. À l'origine créée à Chicago par Jules Stein en 1924 et établie comme agence de management, elle devint rapidement une major incontournable sur la scène américaine, en raison d'une stricte réorganisation de l'entreprise qui commença à la fin des années soixante : contrôle des centres de distribution désormais réduits au nombre de sept, fusion des usines de production de disques et rassemblement des anciens bureaux à New York. La consolidation s'achève en 1973 et prend le nom de MCA Records, célèbre pour avoir lancé les premiers disques d'Elton John, alors inconnu.

De toutes les majors qui contrôlaient le marché américain avant l'arrivée du rock and roll, seules CBS et RCA ont survécu : « In the early 1970s, CBS was so omnipresent that it was nearly impossible to spend a dollar without increasing CBS's profits. »342 La confiance qu'elles ont eu à considérer le rock comme un phénomène culturel et commercial sans précédent y est pour beaucoup (elle leur a permis notamment d'éviter le piège dans lequel est tombé Decca-US), alors que quelques années avant, ne l'oublions pas, ce sont précisément les indépendants qui ont compromis leur réputation en signant les premières rocks stars. Si on en tire des conséquences, il est donc parfaitement normal que l'émergence de la musique psychédélique qui succède, dans l'étude des courants musicaux, au rockabilly des pionniers, est ainsi allée main dans la main avec les maisons de disques : CBS et la Warner ont su anticiper et s'ouvrir à la nouvelle génération de groupes, avec des labels de taille plus modeste comme Elektra ou Atlantic. Bien entendu, les majors les plus anciennes comme CBS et RCA ont l'avantage d'être reliées à des réseaux radiophoniques installés à l'échelle nationale, ce qui ont garanti leur survie. Quant à la Warner Music Group (anciennement WEA Records), créée plus tardivement en 1958 comme filiale de la Warner Bros Pictures et qui surpasse RCA en termes de ventes pour se placer juste derrière CBS, son succès résulte de sa capacité à jongler sur le succès de styles musicaux diversifiés : elle rachète en 1970 Elektra (fondée en 1950 par Jac Holzman, répertoire rock essentiellement) et Atlantic Record (fondée en 1947 par Ahmet Ertegün, répertoire jazz, blues et soul au départ, puis rock). Ce phénomène poussé de concentration atteint son apogée justement à un moment où les lois anti monopole américaines s'assouplissent quelque peu puisque le groupe Warner Communications Inc. regroupe les trois compagnies de disques sous le nom de WEA (Warner - Elektra - Atlantic) en octobre 1972.

341 http://en.wikipedia.org/wiki/MCA_Nashville_Records#MCA_Nashville

342 TSCHMUCK, Peter, op. cit., p. 122.

Centralisation, concentration et distribution sont donc les maîtres mots des maisons de disques aux États-Unis, mais qu'en est-il du réseau en Grande-Bretagne ?

Depuis que Decca perd sa petite soeur absorbée par MCA, elle tire heureusement pleinement profit du succès colossal des Rolling Stones jusqu'en 1970. Quant à EMI, beaucoup moins faible sur le marché international que sa rivale, elle profite avec Capitol du juteux marché engrangé grâce aux Beatles. Comme aux États-Unis, mais en apparence seulement, les indépendants ont laissé les majors s'emparer du rock anglais. En réalité, la situation est plus complexe, nous le verrons par la suite. L'important à noter se trouve dans l'étude des trajectoires prises par les firmes discographiques qui, comme aux États-Unis (mais avec quelques années de décalage), sont caractérisées depuis le début des années soixante jusqu'en 1966 par une croissance du marché et, simultanément, une concentration. L'étude de Chapple et Garofalo343 montre très justement les différents types de fusions que l'on a pu jusqu'ici observer, qu'il s'agisse de la « fusion horizontale » où les firmes fusionnent pour augmenter leur part de marché comme ce fut le cas entre EMI et Capitol (même si la firme anglaise reste la force majoritaire dans l'opération), ou encore de la « fusion verticale » que

l'on observe toujours chez EMI avec le contrôle du « noeud de la distribution » (accès aux lieux de

vente), grâce aux magasins HMV. En 1965 EMI

créa un « club de disques », censé distribuer les disques directement, sans passer par des relais

inutiles ; malgré l'échec de ces clubs qui peu de temps après furent revendus344, ils sont néanmoins révélateur de l'importance de cet espace de contrôle concernant les ventes de disques (eux-mêmes protégés grâce au copyright), et que les directeurs des grandes maisons de disque ont toujours voulu s'approprier.

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