WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le principe de la responsabilité de protéger : une issue pour la protection des populations civiles. Cas de la république démocratique du Congo

( Télécharger le fichier original )
par Patience KATUNDA AGANDGI
Université de Kinshasa RDC - Licence en droit international 2010
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

C. Le droit d'ingérence humanitaire

Porter secours, assister, aider et protéger les populations en péril. C'est au nom de ces principes que des organisations non gouvernementales, comme Médecins sans frontières (MSF) fondé par Bernard Kouchner, ou Médecins du monde (MDM) ont commencé à revendiquer durant les années soixante-dix le droit de franchir clandestinement des frontières pour rejoindre au Bangladesh, en Erythrée, en Afghanistan et ailleurs, des peuples que la guerre isolait du monde. Alors que les « french doctor » ont multiplié leurs interventions dans les pays en guerre, certains ont tenté, avec la fin de la guerre froide, d'organiser cette ingérence humanitaire sous la forme d'un droit international qui jetterait les bases d'un nouveau mode de relation entre les Etats. Voilà comment est né le droit d'ingérence humanitaire43(*).

Après plusieurs années de controverses et d'hésitation, la France va initier l'adoption de deux résolutions importantes au niveau de l'assemblée générale de l'ONU, à savoir la résolution 43/131 du 8 décembre 1988 et la résolution 45/100 du 14 décembre 1990, résolutions portant sur « l'assistance humanitaire aux victimes des catastrophes naturelles et autres situations de même ordre ». Ces deux textes vont poser les jalons d'un droit d'ingérence humanitaire.

En effet, ces deux résolutions vont poser les principes de l'accès aux victimes des catastrophes naturelles, de l'urgence44(*), de la rapidité et de l'efficacité, ainsi que du concours et de l'aide d'organisations locales et d'O.N.G agissant dans un but strictement humanitaire45(*). Pour faciliter l'accès aux victimes, la résolution 45/100 a proposé l'établissement concerté de « couloirs d'urgence », afin de surmonter les difficultés pratiques qui entravent l'accès aux victimes.

Notons que la résolution 43/131 a été appliquée le lendemain même de son adoption, lorsque l'Union soviétique annonçait que, pour la première fois dans son histoire, elle ouvrait ses frontières sans obligation de visa aux sauveteurs occidentaux voulant se rendre en Arménie, pour secourir les victimes d'un tremblement de terre46(*). Mais ces deux textes ne suffisent pas à elles seules, pour légitimer une intervention armée dans le cadre du droit d'ingérence humanitaire. Ainsi l'intervention humanitaire dans son aspect militaire n'avait toujours pas de socle pour s'édifier.

Au niveau du Conseil de sécurité, c'est à l'occasion de l'intervention militaire de plusieurs Etats occidentaux au Kurdistan iraquien, en avril 1991, que l'on a, pour la première fois, évoqué l'émergence d'un véritable « droit d'ingérence ». Le conseil de sécurité par sa résolution 688, du 5 avril 1991, autorise les forces armées occidentales d'intervenir militairement de façon unilatérale pour assurer le respect des droits de la personne47(*).

L'action a été présentée comme destinée à protéger les Kurdes alors sévèrement réprimés par les autorités Iraquiennes. Le respect des droits de la personne devait dorénavant être assuré par des actions menées par la communauté internationale, par l'intermédiaire des institutions européennes ou de certains Etats prêts à défendre leurs valeurs essentielles. Le conseil de sécurité de l'ONU, cette fois comme dans tous les cas suivants, invoquait une menace contre la paix et la sécurité pour fonder cette action, malheureusement il n'y avait pas d'avancée significative parce que ce ne sont pas les violations des droits de l'homme qui constituaient la menace contre la paix et la sécurité, mais l'exode massif de refugiés vers des frontières internationales et à travers celles-ci des violations de frontière48(*).

Le Conseil de sécurité a ensuite pris d'autres résolutions qui ont conforté la pratique de l'ingérence humanitaire. Nous avons la résolution 770 du 13 août 1992 sur la situation en ex-Yougoslavie, la résolution 794 du 04 décembre 1992 à propos de la situation en Somalie, et la résolution 929 du 22 juin 1994 sur la situation au Rwanda.

Les deux premières résolutions sont importantes en ce qu'elles impliquent une autorisation de recourir à la force dans la mesure où cela s'avère nécessaire à l'acheminement d'une aide humanitaire à des populations en détresse. Jamais le Conseil de sécurité n'avait pris de mesures impliquant un éventuel usage de la force sans évoquer une réaction à une attaque militaire perpétré par un Etat contre un autre. Le Conseil de sécurité dans ces deux résolutions a agi dans le cadre des principes existants dans la charte des Nations Unies. A cet effet, le Conseil de sécurité a précisé expressément dans ces résolutions qu'il agissait en vertu du chapitre VII, et qualifié ces deux situations de menace contre la paix et la sécurité internationales, avant de prendre toute mesure coercitive dans ces situations.

Certains auteurs ont estimé qu'en suivant cette démarche le Conseil n'a pas consacré un quelconque droit d'ingérence humanitaire puisqu'il s'est inscrit dans le strict respect de la charte, et a justifié son action en qualifiant le qualifiant explicitement ces situations de menace contre la paix et la sécurité internationales, et non en invoquant le seul caractère tragique des évènements au plan humanitaire49(*).

Au demeurant, la majorité de la doctrine est unanime sur le lien établi dans ces résolutions entre l'humanitaire et le maintien de la paix, et par ricochet le lien dynamique entre rétablissement de la paix et assistance humanitaire50(*). Ce faisant, le Conseil pouvait baser sa qualification essentiellement sur des violations des droits de la personne, internes à un Etat membre, sans avoir constaté des conséquences transfrontières comme ce fut le cas au Kurdistan iraquien.

De tout ce qui précède on peut affirmer avec CORTEN et KLEIN, que la règle de non-intervention ne peut faire obstacle à une action coercitive décidée par le Conseil de sécurité pour mettre fin à des violations massives des droits de la personne observées à l'intérieur d'un Etat, et si ces violations constituent de l'avis de cet organe, une menace pour la paix51(*).

Les évènements du Kosovo au cours de l'année 1999 ont donné une nouvelle dimension à la problématique de l'ingérence humanitaire. Entre le 24 mars et le 10 juin 1999, l'OTAN a mené une campagne de bombardements aériens contre la République fédérale de la Yougoslavie, Etat indépendant et membre de l'ONU, au nom de la défense des valeurs universelles de la communauté internationale, en l'espèce la défense des populations kosovars d'origine albanaise.

Il s'agit de l'opération Force Alliée qui visait selon la déclaration du secrétaire général de l'OTAN « à faire cesser la violence et mettre fin à la catastrophe humanitaire qui frappaient le Kosovo52(*) ».

L'intervention au Kosovo a mis en exergue deux questions fondamentales à savoir celle de l'emploi de la force dans les relations internationales par une organisation (régionale), qui n'a pas reçu l'autorisation préalable du conseil de sécurité, dans un Etat souverain ; et celle de la réponse à donner à des violations graves et à une large échelle des droits de la personne.

Si la deuxième question a déjà trouvé une réponse adéquate, c'est la première qui pose le plus problème. En s'engageant dans une opération sans l'autorisation préalable du Conseil de sécurité, l'OTAN a violé le droit international en vigueur, et l'intervention de l'OTAN est regardée, quant au jus ad bellum comme un véritable florilège de violations de la Charte de l'ONU53(*). Ce faisant cette opération ne peut être retenue comme confortant le droit d'ingérence humanitaire, mais plutôt comme une simple ingérence à la souveraineté d'un Etat, en pulvérisant sa population par une pluie de bombes, sans recours à quelconque texte international. En sus l'aggravation de la situation humanitaire des habitants et la méconnaissance crue et accrue des normes du droit international humanitaire, ont entrainé l'indignation de plus d'une personne, et ont amené la majorité de la doctrine à n'établir aucun rapport entre cette opération unanimement désapprouvée et quelconque droit d'ingérence54(*).

C'est dans ce contexte qu'on a vu émerger un droit d'ingérence humanitaire dont les tenants fondent la légitimité sur l'article 2 § 4 de la charte des nations unies. En effet, pour les auteurs favorables, les interventions armées aux fins humanitaires ne sont menées ni contre l'intégrité territoriale, ni l'indépendance politique d'un Etat, et ne sont pas contraires aux buts et principes de l'ONU.

Toutefois, une majorité d'auteurs s'accorde à considérer que le droit d'intervention (armée) humanitaire n'a pas été consacré par la charte de l'ONU. Ils relèvent que l'ensemble du texte de la charte et les documents préparatoires montrent que l'intention des Etats, en indiquant à l'article 2 § 4 qu'était prohibé le recours à la force contre l'intégrité territoriale et l'indépendance des Etats ou de toute autre manière incompatible avec les buts des nations unies, était de renforcer l'interdiction et non de la restreindre55(*). Dans cette mesure, ils concluent que toute action armée transfrontière serait visée par l'interdiction de l'article 2 § 4, quels qu'en soient les mobiles.

Pour répondre à cette à cette position, M. Boutros-Ghali, ancien Secrétaire Général des Nations Unies disait :

« Il n'y a pas lieu de s'enferrer dans le dilemme respect de la souveraineté-protection des droits de l'homme. L'ONU n'a nul besoin d'une nouvelle controverse idéologique. Ce qui est en jeu, ce n'est pas le droit d'intervention, mais bien l'obligation « collective qu'ont les Etats de porter secours et réparation dans les situations d'urgence où les droits de l'homme sont en péril56(*) ».

S'il est vrai que l'assistance humanitaire est devenue l'objet principal d'une intervention collective, dans le cadre notamment du chapitre VII de la Charte des Nations Unies, dans un certain nombre de situations ces dernières années, il est cependant difficile de concevoir que la notion d'ingérence humanitaire ait reçu consécration juridique en dehors d'une autorisation donnée par le Conseil de sécurité ; l'ambiguïté des objectifs, la diversité des modalités d'action et l'hésitation de nombreux Etats n'en font pas un véritable droit57(*).

Néanmoins, si la doctrine n'est pas toujours unanime sur le fondement d'un droit d'ingérence humanitaire, tout le monde reconnaît au moins que la souveraineté avec ses corollaires de non ingérence et de non intervention dans les affaires intérieures ne saurait justifier des violations massives des droits de l'homme et du droit international humanitaire. Même si la pratique de cette « ingérence humanitaire » doit être encadrée pour éviter des dérapages et des abus de puissance58(*).

Notons de façon particulière qu'à ce jour, le seul traité international qui codifie le droit d'ingérence humanitaire est l'Acte constitutif de l'Union africaine qui à son article 4, énonce le droit de l'Union d'intervenir dans un Etat membre sur décision de la Conférence, dans certaines circonstances graves, à savoir : les crimes de guerre, le génocide et les crimes contre l'humanité59(*). Cet article constituera le prédécesseur conventionnel de la responsabilité de protéger.

* 43 « Droit d'ingérence humanitaire », Microsoft® Études 2008 [DVD]. Microsoft Corporation, 2007.

* 44 Par. 10 du préambule de la résolution 43/131.

* 45 Par. 13 du préambule de la résolution 43/131.

* 46 TSAGARIS Konstantinos, Le droit d'ingérence humanitaire, Mémoire de DEA, Université de Lille II - Faculté de Sciences Juridiques, Politiques, et Sociales, année universitaire 2000-2001, p. 65

* 47 TSAGARIS Konstantinos, op. cit., p. 70.

* 48 Idem, p. 74

* 49 CORTEN O. et KLEIN P., « L'autorisation de recourir à la force à des fins humanitaires »,in 4 EJIL, 1993, pp. 506-533

* 50 Idem

* 51 Ibidem, p. 514

* 52 Communiqué de presse du 23 mars 1999 (040), in http://www.nato.int/docu/pr/1999/p99-040.htm

* 53 BOUSTANY K. et DORMOY D., « L'intervention de l'OTAN au Kosovo : l'humanitaire aux confins du politique, de la force armée et du droit », in Perspectives humanitaires entre conflits, droit(s) et action, Collection de Droit International, Bruxelles, Editions Bruylant, Editions de l'Université de Bruxelles, 2002, p. 18

* 54 TSHILUMBAYI MUSAWU I. J-C., De l'obligation de non-ingérence au droit d'ingérence. Dilemme ou paradoxe ? , Mémoire de DEA en Relations Internationales, UNIKIN, 2007-2008, pp. 332-334 ; CORTEN O. & DELCOURT B., Droit, légitimation et politique extérieure : l'Europe et la guerre du Kosovo, Collection de droit international, Bruxelles, Bruylant, éditions de l'Université de Bruxelles, 2000, pp. 135-138

* 55 CORTEN O. & KLEIN P., Droit de l'ingérence ou obligation de réaction ?, Collection de droit international, Bruxelles, Bruylant, 2ième édition, 1996, p. 162-170.

* 56 Boutros-Ghali cité par Nguyen Quoc Dinh, Alain Pellet et Patrick Daillier, Droit International Public, 7ème édition, Paris, L.G.D.J, 2002, p. 449

* 57 SALMON J. (Dir.), Dictionnaire de Droit International, Bruxelles, Bruylant, 2001, p. 580

* 58 MAMPUYA KANUNK'a TSHIABO A., « Le système onusien de protection des droits de l'homme : Introduction générale », in Droits de l'homme et droit international humanitaire, séminaire de formation cinquantenaire de la DUDH, Kinshasa, PUK, 1999, p. 37

* 59 Article 4 point h) de l'Acte constitutif de l'Union africaine.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Tu supportes des injustices; Consoles-toi, le vrai malheur est d'en faire"   Démocrite