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Quel est l'impact de la précarité sur la famille et sur l'enfant?

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par Romain CORDIER
Haute Ecole en Hainaut de Tournai - Educateur Spécialisé 2015
  

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III. SANTE/HYGIENE :

1. SUR LE PLAN PSYCHOLOGIQUE :

Je souhaite introduire ici les constats issus des services agréés de l'aide à la jeunesse, qui ont été présenté dans le Diagnostique Social 2014 du CAAJ de Tournai. Au sein de l'arrondissement, s'est créée il y a quelques années, une plateforme de l'aide à la jeunesse. Chaque service agréé de l'aide à la jeunesse est invité à y envoyer un représentant. Elle se réunit au moins quatre fois par an et poursuit sa réflexion sur des thèmes d'actualité et sur des pratiques du secteur. Un questionnaire a été envoyé à chaque service de la plateforme. Une séance a été consacrée à cette partie du diagnostic social du CAAJ et à la mise en commun des réponses. En voici les principaux thèmes :

· Famille et Santé Mentale :

- problèmes individuels d'ordre psychiatrique chez certains parents,

- troubles du comportement des jeunes,

- troubles de l'attachement, relations sociales et affectives perturbées avec compensations affective débridées,

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- violences intrafamiliales et institutionnelles familles recomposées : problème de la place du jeune.

? Précarité :

- privation par rapport aux besoins élémentaires,

- manque de structuration des enfants, - problèmes identitaires des familles, - sentiments de honte.

· Isolement social (désaffiliation) :

- stigmatisation des familles,

- exclusion sociale, stigmatisation des jeunes et décrochage scolaire, redoublement

- inadéquation de l'offre scolaire

- manque de souplesse par rapport à l'obligation scolaire

- politiques d'exclusion des jeunes au niveau scolaire mais aussi au niveau

communautaire.

Après la lecture de ces constats, il est aisé de se rendre compte que les difficultés rencontrées par les enfants ne sont pas seulement économiques ou matérielles. Comme je l'ai expliqué plus haut, elles sont aussi, et même de manière très prégnante, d'ordre familial. Pour bon nombre, le couple parental est séparé, le père est absent, et le ou les enfants, vivent seuls avec la mère (56,25% des enfants interrogés vivent seuls avec leur mère, contre 25% avec les deux parents présents). Pour les aînés, la charge peut s'avérer très lourde puisqu'ils sont souvent investis d'une fonction familiale qui n'est pas la leur : 18,75% des enfants admettent que le plus souvent, ce sont eux qui s'occupent de leurs frères et soeurs. On peut donc facilement imaginer que cette situation les pousses à vive allure dans ce que j'appellerai une « maturité précoce ». Comment un enfant de 10 ans peut-il s'épanouir dans son enfance si le parent seul (père ou mère), lui délègue le rôle du parent absent ? A long terme, n'y a-t-il pas un risque de trouble du comportement provoqué par le surinvestissement de ce « mauvais » rôle ? Puisque s'il est investi de la sorte, c'est que le parent seul ne s'en sort plus, et/ou que

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l'enfant ressent une angoisse qui le pousse à penser que c'est à lui de prendre les rênes. Mais dans ces deux cas, ce n'est jamais une question de choix.

J'ai en mémoire ce jeune garçon de 11 ans qui se montrait très violent, mais aussi très protecteur avec sa petite soeur de 6 ans. J'avais rencontré le père lors du questionnaire : un homme sans emploi et fortement alcoolique, en rupture totale avec son ex-femme depuis plusieurs années. Il avait l'air littéralement perdu, ayant pour seule arme éducative un chantage favorisant pour le jeune garçon. Lorsque le père venait les chercher à la Maison de Jeunes, on voyait très clairement le manque d'autorité qu'il avait sur lui, et par le corollaire, l'impressionnante domination que l'enfant avait sur le père. Ce même enfant était sans cesse en défiance de l'autorité, et tenait des propos qui témoignaient d'une certaine expérience de vie d'adulte, surtout dans sa façon de s'adresser à sa soeur. Et on pouvait deviner que derrière cette « maturité précoce », se cachait une incroyable incompréhension.

Comme pour l'adulte, toutes ces difficultés sont plus des problèmes de construction identitaires que de véritables pathologies psychologiques. Mais il est évident, en tout point, que ces freins psychologiques entravent grandement le développement psychique idéal de l'enfant. Et je ne parle pas du sentiment de stress que j'ai évoqué dans l'impact global de la précarité sur l'adulte, car il est absolument certain que ce stress pèse aussi sur les épaules des enfants.

Mais s'il existe un trouble assez fréquent chez ces enfants de pauvres, c'est la carence affective. En effet, bon nombre des enfants que j'ai pu rencontrer me semblaient être souvent mis de côté par leurs parents, comme s'ils passaient au second plan dans les préoccupations familiales. Ce n'est pas un blâme, et je comprends à quel point cela peut être complexe de jongler entre démonstration affective et problèmes du quotidien liés à la précarité. Ainsi, j'ai pu observer certaines des caractéristiques que Michel LEMAY a relevé chez l'enfant carencé, telles que :

- des troubles de la relation, avec l'adulte comme avec les pairs,

- une fuite du regard, particulièrement significative du manque de confiance en soi,

- des troubles alimentaires, un surpoids et des repas pris de façon sporadique,

- des difficultés scolaires, problèmes de concentration, invention de subterfuges pour

sécher les cours (professeurs absents, maladie, erreur d'emploi du temps, etc),

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- de l'agressivité verbale, et parfois physique, avec une agitation excessive (passent

par des phases de grand calme à des phases d'excitation sans état intermédiaire), - un sentiment d'insécurité, dû à un climat instable dans le foyer familial, 25% des

enfants interrogé avouent ne pas se sentir en sécurité chez eux,22

- ainsi que certaines difficultés liées au retard dans l'acquisition cognitive.

S'ajoute à toutes ces caractéristiques, des facteurs aggravant tels que le logement insalubre ou trop petit pour accueillir la fratrie entière. 56,25% des enfants interrogés ont plus de trois frères et/ou soeurs, et 43,75% d'entre eux doivent partager leur chambre avec un autre. Et on sait combien il est important pour le développement intellectuel de l'enfant de pouvoir aussi se retrouver seul avec lui-même, pour se concentrer, et pour se recentrer.

Deux autres chiffres qui témoignent de l'importance du milieu de vie dans la construction identitaire de l'enfant m'ont particulièrement marqué : 4 enfants sur 16, soit 25% des enfants interrogés, avouent ne pas se sentir en sécurité chez eux, et 18,75% d'entre eux n'ont pas suffisamment chaud l'hiver dans la maison.

De l'anxiété, un sentiment d'insécurité et parfois une honte de soi, tel est le lourd tribut payé par les enfants de la pauvreté et de la précarité. Car au-delà d'un certain dénuement matériel, le renfermement sur soi est souvent du a une carence affective :

« L'allongement du temps de travail, le manque d'aide à la maison et l'abandon d'activités récréatives peuvent affaiblir les liens familiaux, ce qui perturbe les enfants à des étapes clés de leur développement intellectuel et affectif. »23

Mais puisque certaines maladies mentales prennent racine dès l'enfance, les adultes en devenir qu'ils sont, sont ainsi plus exposés aux risques de développer par la suite une souffrance psychique, des troubles du comportement, des états dépressifs et autres problèmes de santé mentale, ce qui ressort d'ailleurs constamment des travaux sur la santé des plus démunis.

22 Cf : Annexe Tableau des résultats des réponses aux phrases enfant

23 Bilan Innocenti 12, Centre de recherche Innocenti de l'Unicef, octobre 2014.

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2. SUR LE PLAN PHYSIQUE :

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Si très peu d'études se sont penchées sur les véritables conséquences de la précarité sur l'état de santé physique des enfants qui en souffrent, j'ai cependant relevé quelques pathologies qui me semblent relativement importantes, car il est évident que ce sont des indices que je ne pouvais pas relever sur le terrain. L'impact général de la précarité sur l'enfant du point de vue physique est quasi-identique à l'impact sur l'adulte puisque c'est par le ou les facteurs de risques des parents qu'arrivent les pathologies, ce sont les conséquences de la transmission intergénérationnelle. Les inégalités sur le plan de la santé touchent les enfants avant la naissance et continuent de se manifester durant l'ensemble de leur développement.

Premièrement, le taux de prématurité est fortement corrélé avec des facteurs sociaux. En classant les communes en 5 catégories sur base d'indicateurs de pauvreté (niveau de chômage, d'instruction et revenu), une étude menée en 2008 par le SPF Economie et le SPF Affaires Sociales, a observé une croissance du taux de prématurité avec le taux de pauvreté de la commune : 7,35 % pour les communes les plus riches contre 8,75 % pour les communes les plus pauvres.

Le mode de vie des parents a une influence considérable sur l'état de santé du foetus in utero. Ainsi, si la mère fume et/ou consomme régulièrement de l'alcool, ou qu'elle évolue dans un milieu empreint de ces addictions, le bébé en paiera nettement les conséquences. En effet, les spécialistes ont relevés une série d'incidences liée à la consommation d'alcool durant la grossesse, telles que :

· retard de croissance du foetus,

· risque de fausse couche,

· accouchement prématuré,

· malformations de la boîte crânienne,

· troubles psychiques ou du comportement de l'enfant,

· troubles d'apprentissage,

· troubles de la mémorisation,

· troubles de l'attention, etc.

Deuxièmement, si les enquêtes font état d'une stabilisation globale de l'augmentation de l'obésité chez les enfants, elles montrent un creusement des inégalités sociales sur cette question. La surcharge pondérale apparaît comme le miroir des inégalités sociales aussi bien chez les adolescents que chez les jeunes à l'entrée de l'âge adulte.

En France par exemple, 26% des enfants scolarisés en Zone d'Education Prioritaire sont en surcharge pondérale contre 19 % en dehors de ces zones.24 Cela s'explique notamment par les mauvaises habitudes alimentaires des parents, et la faible mobilité des enfants, qui sont très peu à pratiquer une activité sportive : 56,25% des enfants interrogés ne pratiquent aucune activité sportive ou extra-scolaire.

24 VERSINI Dominique, Conséquence sur le développement affectif de l'enfant des situations de précarité familiale, avril 2011.

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Troisièmement, au

niveau de la santé bucco-dentaire, les enfants issus de milieu pauvre ont plus de carries que les enfants issus de milieu aisé. Il est simple de relier ce constat aux problèmes de malnutritions. Ainsi, 11% des enfants les plus pauvres souffrent de caries contre 6 % du reste de la population.

Quatrièmement, les enfants de pauvres vont moins souvent chez le médecin, et surtout chez les spécialistes. Ils sont également moins bien couverts : 22 % d'entre eux n'ont pas de complémentaire santé contre 7 % du reste de la population25.

Enfin, pour illustrer de façon concrète la prévalence des risques pathologiques chez l'enfant en situation de précarité, voici un tableau de la part des enfants souffrant des pathologies les plus fréquentes réalisé par l'INSEE :

25 DE SAINT PAUL Thibault, La santé des plus pauvres, INSEE Première, n°1161, octobre 2007.

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Ainsi, je peux dire qu'il n'y a pas réellement de maladies des enfants pauvres, mais il est certain que le risque d'en contracter, et bien plus important en milieu précaire qu'en milieu stable. Et une chose est sure : la pauvreté rend malade, et la maladie rend pauvre.

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3. DES DIFFICULTES DANS LE PARCOURS SCOLAIRE :

Comment ne pas évoquer l'impact de la précarité des familles sur l'enfant sans parler des difficultés que celle-ci engendre dans le parcours scolaire de ce dernier ? L'école qui doit être le deuxième lieu de socialisation de l'enfant, après la famille, se doit d'être porteuse de valeurs d'égalités et de respect, en veillant au bien être de l'enfant au sein de l'institution éducative qu'elle représente.

Mais comme le dit Julie CHUPIN26 : « Ce qui est promesse de plaisir pour la plupart devient source d'angoisse pour d'autres dès lors que les difficultés s'accumulent ». Le redoublement en est le premier signe : 37,5% des enfants interrogés ont ainsi déjà redoublé au moins une fois. Le stress vécu dans la famille, et les prédispositions de celle-ci vis-à-vis de la transmission des savoirs, sont autant de facteurs qui mettent un frein à l'envie d'apprendre.

Si la famille ne porte pas les valeurs et les bienfaits de l'école, si un parent est fortement malade, ou si les espoirs envers l'enfant sont trop grands, alors comment l'enfant peut-il être suffisamment en confiance au point d'accepter qu'on lui transmette quelque chose sans qu'il ne soit préoccupé par d'autres sujets ? Car pour qu'un enfant puisse apprendre, il faut des conditions qui ne soient pas exclusivement scolaires.

Dans l'idéal, l'école devrait être un lieu d'ancrage essentiel pour les enfants issus des familles précaires. Puisqu'à la maison, rien ne va vraiment, l'école devrait représenter un temps où les enfants se retrouvent et peuvent évacuer le stress familial qu'ils subissent. Mais bien souvent, l'influence des facteurs liés à la précarité, tels que le manque de sommeil, l'impossibilité de faire ses devoirs à la maison, le surpeuplement du foyer familial, ou encore le désintérêt des parents face à la sphère scolaire, est synonyme d'inégalités en matière de réussite. Ainsi, 25% des enfants interrogés déclarent ne pas pouvoir faire leurs devoirs dans le calme, 50% avouent que leurs parents ne les aident pas à faire leurs devoirs lorsque l'Ecole Des Devoirs est fermée, et 4 enfants sur 16 admettent que leurs parents ne s'intéressent pas à ce qu'ils font à l'école.

26 CHUPIN Julie, Echec scolaire, la grande peur, éditions Autrement, Paris, 2013.

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Voici comment l'école, vecteur de socialisation est d'intégration, devient peu à peu une problématique supplémentaire dans le parcours et le développement psychosocial et psycho-affectif de l'enfant, renforçant de façon continue, les sentiments d'angoisse et de honte qu'il pouvait alors déjà ressentir.

Dans ces trois dernières partie, je me suis donné comme objectif de mettre en lumière les processus de précarisation et de pauvreté, et notamment leurs impacts sur le corps familial et sur l'enfant. J'ai ainsi pu démontrer que notre société, aussi développée soit-elle, laisse la part belle à l'émergence de nouvelles situations d'exclusions sociales, où la précarité et la pauvreté affectent tous les domaines de la vie de l'enfant, et portent atteintes à ses droits les plus fondamentaux.

Il est certain qu'il existe une spirale « infernale » et négative dans laquelle sont entraînés les enfants et les familles défavorisées. Notre société riche, se voulant égalitaire et fraternelle, laisse de côté un grand nombre de ces citoyens. Je dis qu'elle laisse de côté parce que c'est vraiment le sentiment que j'ai eu en écoutant les parents et les familles, mais aussi en rédigeant ce travail. Comme si une certaine fatalité s'acharnait sur les épaules de certains enfants à travers leur situation familiale, et que celle-ci les forçait à s'asseoir à une place où leur intelligence, leur créativité, leurs capacités, leur désir d'apprendre, de s'intégrer, de s'inventer une vie à la hauteur de leurs espoirs et de leurs ambitions, finalement, ne compteraient pas.

Je ne veux pas tomber ici dans le misérabilisme, et c'est d'ailleurs pourquoi ma dernière partie se veut être une « réponse », ou tout du moins, des hypothèses de réflexions, à ces problématiques sociales que l'éducateur spécialisé est à même de rencontrer dans sa carrière professionnelle. Dans un souci d'objectivité et de cohérence, je me concentrerai uniquement sur l'action que peut mener un éducateur au sein d'une Maison de Jeunes puisqu'il m'est impossible, avec le peu d'expérience que j'ai dans ce domaine, de dresser une série d'actions dites « efficaces et indiscutables » qui permettraient aux enfants et aux familles de sortir de cette spirale.

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E. LES OUTILS DE L'EDUCATEUR OU L'EDUCATEUR-OUTIL EN MAISON DE JEUNES :

La Maison de Jeunes est un lieu où les enfants et les adolescents doivent se respecter entre eux. La mise en place d'un règlement fortement inspiré de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme et du Citoyen, les inscrit d'emblée dans un contexte de liberté où chacun à des droits et des devoirs. Si le fonctionnement de la MJ est basé sur l'autonomie et la participation active des jeunes, les éducateurs qui y travaillent sont d'abord des référents adultes, des piliers stables et droits dans leur démarche éducative, assurant le rôle de point de repère pour ces jeunes en difficultés.

Il est évident que le rôle premier d'une Maison de Jeunes n'est pas de régler les problèmes de précarité et de pauvreté des familles et de ceux qui la fréquente. Mais dans un sens, elle ne peut pas non plus fermer les yeux sur la déshérence de ces personnes, tout en prétendant que son action est dirigée vers une prise de conscience citoyenne. Son rôle est justement de prendre en compte les difficultés sociales de chacun, et de tenter de les contourner, de les supprimer, ou au moins, de donner une chance aux enfants, de prétendre à une vie faite de partage et de dignité.

I. SUR LE PLAN FAMILIAL :

1. ETRE A L'ECOUTE DES SITUATIONS FAMILIALES :

Comme son nom l'indique, une Maison de Jeunes est faite pour les jeunes, et non pour les parents. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles certains d'entre eux s'y rendent :

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pour échapper aux contraintes familiales, ou au stress qui en découle. C'est pourquoi, bien souvent, certains d'entre eux évoquent facilement leurs relations avec leurs parents, et il est inutile de préciser à quel point elles sont compliquées. Ils recherchent, auprès des éducateurs, un climat de confiance qui puisse leur donner le sentiment d'être entendu et compris.

Pour ma part, je pense qu'il serait vraiment intéressant de renforcer le lien entre les familles de ces jeunes, et les membres de l'association, sans prétendre à une quelconque aide à la parentalité. Mais seulement pouvoir les recevoir de temps en temps, pour faire le point sur leur situation, savoir ce qu'il en est avec leurs enfants, les diriger vers des services d'aides spécialisés si besoin, et même, pourquoi ne pas créer des ateliers où parents et enfants participent ensemble ? Utopique peut-être. Mais nécessaire à mon sens, car ce sont bien les familles qui ont un impact direct sur l'enfant, et si l'on veut changer, ou du moins influencer, les habitudes négatives de ce dernier, il faut alors absolument prendre en compte la fonction parentale dans son ensemble.

Cela me parait essentiel d'introduire une sorte de continuité dans la relation parents/éducateurs, en leur montrant qu'on les respecte, qu'on ne les convoque pas mais que nous sommes des alliés dans leur situation, qu'on leur permette de parler, qu'on les écoute et que leur parole ne soit pas disqualifiée. Car la plupart des enfants qui fréquentent la Maison de Jeunes, arrivent dès qu'ils sont en âge de la fréquenter, c'est-à-dire 4 ans, et la quittent lorsqu'ils n'y sont plus acceptés, c'est-à-dire à 21 ans. S'il n'y a pas de déménagement ou de conflits trop importants, pour ceux qui s'inscrivent dès qu'ils le peuvent, il se passe donc en moyenne plus de 16 années avant qu'il n'y ait une réelle rupture avec eux.

En ce sens, je ne peux pas concevoir que l'importance de la prise en considération des parents ne soit pas faite, et c'est une des raisons qui justifie la mise en place de mon questionnaire : apprendre à les connaître, c'est aussi mieux connaître leurs enfants, et donc améliorer et mieux cibler les actions éducatives et culturelles.

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2. FIXER DES OBJECTIFS A COURT ET A LONG TERME :

Un autre point qui me semble important d'évoquer, est la mise en place d'objectifs à court et à long terme dans la démarche de mise en relation avec la famille. En effet, puisque le lien entre parents et éducateurs est quasi-inexistant, pourquoi ne pas proposer, comme je l'ai dit plus haut, des activités où parents et enfants s'attèlent à une tâche commune, et ce dès le plus jeune âge de l'enfant, et où l'éducateurs servirait d'accompagnateur dans cette démarche ? Il est vrai que la Maison de Jeunes propose des soirées thématiques où les enfants préparent le repas pour les adultes. Mais les inscrits sont, le plus souvent les partenaires sociaux et le voisinage, que les parents eux-mêmes. Des sorties culturelles sont aussi organisées pour les jeunes, alors pourquoi ne pas inviter, de temps en temps, les parents à se joindre à eux ? Cela ne renforcerait-il pas le lien affectif parents/enfants, et le lien parents/éducateurs ?

Et comme objectif à long terme, il pourrait être intéressant de créer des groupes de paroles, ou même des groupes d'entre-aide entre parents. Je pense à cette mère illettrée et au chômage, élevant seule son enfant, qui chaque jour venait une heure avant la fermeture de la MJ pour discuter, et essayer de rattraper un niveau correct en mathématiques et en français. Elle avait le souci de vouloir passer son diplôme du secondaire, et elle me disait le faire pour son fils, pour lui montrer que sa mère ne baisse pas les bras. La tâche est lourde, et s'étend sur la durée. Et si des parents dans la même situation se joignaient à elle ? Et s'ils se rendaient compte qu'ils ne sont pas les seuls ? Alors ne s'entre-aideraient-ils pas ?

Peut-être utopique encore une fois, mais l'espoir ne vaux-t-il pas la peine d'essayer, au moins pour un temps ?

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984