1.2.3DIMENSIONS DU CONFLIT
De tout temps, les conflits sontapparus comme une
donnée inévitable et inéluctable des relations humaines
pouvant revêtir des formes différentes et jouant un rôle
dans la dynamique et l'évolution des individus et des
collectivités
Universalité du conflit, Au VIème siècle
avant Jésus-Christ, le philosophe grec Héraclite voyait
déjà dans la guerre une loi universelle des rapports humains. De
fait, l'histoire et l'anthropologie ont montré qu'à toutes les
époques et dans toutes les sociétés, les désaccords
et la vie collective et l'un des fondements des interactions sociales. Auduc
(2007)
L'existence des autres est en elle-même une lutte
à l'influence, au pouvoir et à l'espace de chacun. Alors, on se
bat pour agrandir son territoire. Pour Hobbes (1651, p.26),Léviathan
c'est l'égalité même des hommes qui nourrit le
conflit : ayant les mêmes ambitions, ils sont amenés à
se détruire pour jouir seuls de ce qu'ils désirent pour d'autres,
au contraire, c'est l'inégalité des hommes qui fonde les
combats : c'est le cas, par exemple du concept marxiste de lutte des
classes.
Quand deux individus, deux groupes ou deux civilisations se
rencontrent, ils se présentent l'un à l'autre dans une
« étrangeté », qui peut devenir assez vite
une menace pour l'intégrité de chacun d'eux. Constater que
d'autres vivent selon des valeurs différentes(connaissances, croyances,
morale, mode de vie...) peut conduire à remettre les siennes en
cause ; d'où le désir de se battre pour les imposer :
croisades, génocides, guerre froide entre l'est et l'ouest, combat
contre l'axe du mal..., les exemples abondent. C'est ce qui a fait dire
à Hegel en 1807, la phénomelogie de l'esprit, que le conflit et
la lutte pour la reconnaissance constituent une sorte de loi universelle :
« l'homme qui désire humainement une chose agit non pas
simplement pour s'emparer de la chose, mais pour faire reconnaitre par un autre
son droit sur cette chose, comme un droit de propriété, bref pour
faire reconnaître par l'autre sa supérioté sur
l'autre ».
Au niveau de l'individu, on retrouve une perspective
similaire. En effet, la psychanalyse fait du conflit psychique
l'élément constitutif de l'être humain à travers
diverses perspectives : conflits entre le désir et la
défense, entre les instances, entre les pulsions, voire même entre
des désirs contraires et entre ces désirs et les interdits (comme
dans le conflit oedipien) notent Fisher,Gi telson(1983, P.103)
On voit donc que les individus, comme les groupes humains,
sont mus par des forces contraires qui se combattent. Les autres s'accordent
donc pour dire que le conflit est universel. Mais à quoi
mène-t-il ?
Fonction du conflit, le conflit est-il destructeur ou
utile ? Cette question a fait débat, notamment en sociologie comme
soulignent Ford et Walker. Certains comme Augusteconte et Emile Durkheim, l'ont
considéré comme un élément perturbant du
système social et un obstacle à la nécessaire harmonie des
rapports humains. D'autres, au contraire, le voient comme un
élément moteur et dynamisant du lien social, seul voie possible
vers le changement : d'abord parce qu'entre en conflit avec un
autre(personne, groupe, nation,...), c'est reconnaître son existence et
intégrer la réalité d'un système de vie et de
pensée diffèrent du sien ; ensuite parce que la sortie du
conflit suppose des actes de négociation qui permettent aux structures,
aux normes et aux relations d'évoluer. C'est
Ce courant de pensée dans lequel on trouve notamment
(Karl Marx, Georg Simmel ou serge Moscovici) qui nourrissent la
réflexion actuelle sur ce sujet en sciences humaines.
Au niveau interne, il apparait également que le conflit
joue un rôle fondamental dans le processus de maturation. La psychanalyse
fait ainsi du conflit qui se noue autour du complexe d'oedipe
l'élément central dans la construction de la personnalité
comme le font Foucher et Bouchard.
De même, la psychologie cognitive a montré
à partir de dispositifs expérimentaux que les situations de
conflits (internes et interindividuels) ont un effet favorable dans la
constitution et la structuration de nouvelles connaissances.
Cependant, si le conflit peut être facteur de
changement, il peut aussi provoquer la rupture du lien et engendrede la
souffrance. Il revêt donc une signification ambivalente : il est
à la fois impossible de le fuir et dangereux de s'y ancre. Cela se
remarque à tous les niveaux : en Palestine ou dans les Balkans, les
luttes armées qui s'éternisent entraînent des populations
entiers dans la misère et la destruction mutuelle ; les familles
qui se déchirent pendant des années ou des
générations à travers des procès interminables en
ressortent rarement indemnes ; trop de conflits intrapsychiques submergent
le moi et suscitent d'intenses souffrances et une désorganisation
durable de la personnalité, etc.
Le rapport au conflit soulève donc une
problématique existentielle : fuir le conflit revient à
éviter tout un pan de la réalité ; s'y complaire
amène à vivre dans la tension, l'agressivité et
l'autodestruction. On peut considérer qu'un conflit est normal quand il
reste circonscrit aux enjeux qui l'ont déclenché (défendre
ou conquérirun bien, promouvoir ou combattre un projet, confronter des
points de vue différents...). Mais lorsqu'il déborde sur le reste
de la vie, devient une obsession de tous les instants et contamine d'autres
activités, on peut alors le qualifier de pathologique.
Les formes du conflit disputent d'une heure ou acharnement
d'une vie, insultes ou coups, harcèlement, guerre,... les formes que
peut revêtir un conflit sont infinies. On peut néanmoins les
ordonner en quelques catégories.
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