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Sculpture et vidéo, modes de fabrication et présentation : le processus d'une coalescence des formes.

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par Kevin Fouasson
Université Rennes 2 - Master 2 Arts Plastiques 2012
  

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La vidéo: recouvrement et altération.

Comme pour les sculptures, la réalisation de la vidéo a nécessité plusieurs phases. Et c'est par des procédés assez proches de ceux employés pour le travail sculptural, que j'ai obtenu le rendu final de la vidéo.

Dès le tournage, les notions de recouvrement et d'altération de la figure filmée furent mises en pratique. Le modèle féminin, vêtu de sous vêtements blancs, était allongé au sol, sur le dos, et enveloppé dans une bâche translucide de manière à recouvrir entièrement son corps. La pièce était plongée dans le noir, seule une lampe, située derrière la tête du modèle, éclairait la scène d'une manière très contrastée qui, tout en accentuant les drapés de la bâche, avait pour effet d'aplatir les reliefs de la figure.

La caméra, sur pied et surélevée de manière à filmer en plongée, se trouvait au niveau des pieds du modèle. La capture vidéo fut par ailleurs réalisée en un seul plan séquence de sept minutes, pendant lequel la caméra fixe filmait le modèle immobile. Et c'est durant les deux dernières minutes de capture que, répondant à mes instructions, le modèle se mit en mouvement. Je n'intervins directement sur la capture vidéo qu'une seule fois, en soufflant sur l'objectif de la caméra pour le recouvrir de buée. Ainsi, durant cette première mise en scène, tout est mis en oeuvre pour que l'image filmée, dès sa capture originelle, soit perçue comme de mauvaise qualité (flous, forts contrastes, pixellisation). Mais c'est véritablement lors du traitement de l'image obtenue après la capture, c'est à dire lors du montage, que le processus d'altération de l'image a été mis en oeuvre.

Le montage consista tout d'abord en une première transformation de la matière brute qu'est l'image filmée, me permettant ainsi d'établir l'organisation générale de la vidéo. De la séquence montrant le modèle immobile, j'ai tiré une minute que j'ai ralentie au tiers de la vitesse réelle. J'ai ainsi obtenu les trois minutes de la première partie de la vidéo. J'ai fait de même avec une autre minute tirée de cette même séquence initiale pour obtenir la troisième partie de la vidéo. Quant à la séquence de deux minutes montrant le modèle en mouvement, j'en ai sélectionné les plans les plus percutants, et j'ai accéléré certains passages ou j'ai inversé la vitesse d'autres. Par exemple, le plan montrant la buée recouvrant le champ de l'image vidéo, a subi un inversement et une accélération de sa durée. Ainsi, la

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buée présente sur l'objectif et qui s'évapore change de nature et devient un voile lumineux et transparent qui, par le procédé d'inversement, vient recouvrir le champ de l'image, du haut vers le bas. Il apparaît alors comme un filtre entre l'objet filmé et l'objectif, tout en affirmant ce que le fond noir ne révélait pas jusqu'à présent, c'est à dire l'orientation et la provenance de la lumière dans la scène.

Les passages entre les plans ont été pensés comme des glissements d'une image dans une autre. J'ai donc usé de fondus entre les plans pour que leur succession se fasse avec fluidité. Ce procédé permet également, durant quelques secondes, d'avoir des images superposées, l'une cédant sa place à la suivante au grès d'une transparence progressive.

J'ai également réduit la saturation des couleurs jusqu'à ne plus obtenir que des gris, et j'ai augmenté les contrastes tout en diminuant l'exposition lumineuse de l'image. Ainsi, les ombres de la scène filmée sont devenues des zones d'un noir profond, apparaissant comme de véritables espaces de vide dans l'image. Vides noirs d'où surgissent les formes blanchâtres du modèle enveloppé, véritables vestiges, morceaux de corps en survivance qui résistent là où le reste de l'image se perd. Mais, à ce stade, le travail a essentiellement porté sur la séquence centrale de la vidéo, la période d'agitation, où, comme dans mon travail sculptural, j'ai entamé un processus de recouvrements et de superpositions. Ainsi, des images qui se trouvaient les unes à la suite des autres dans le premier montage se sont retrouvées superposées entre elles. Elles perdaient alors leurs qualités respectives et individuelles pour entrer dans une logique de transparence et d'altération réciproque. Cette superposition des images vidéos donne donc naissance à une nouvelle image où le mouvement confus mais démultiplié se perçoit par un jeu de transparences entre les différents niveaux des images superposées. Ces dernières sont alors comparables à de fines peaux translucides, collée les unes sur les autres, toutes différentes et pourtant presque semblables, au travers desquelles se trouve perceptible la légère palpitation d'un corps. Une fois ces opérations réalisées, j'obtenais un second montage présentant une image vidéo de plus en plus éloignée de l'image originelle.

L'étape finale du montage consista donc à accentuer l'altération de l'image vidéo, déjà entamée par les précédents procédés. Et cette fois, plutôt que de passer par un logiciel de montage pour obtenir les effets désirés, je me suis servi des médiums propres à la vidéo, et de leurs défauts, c'est à dire du caméscope, et de l'écran d'ordinateur. J'ai donc filmé à l'aide de mon caméscope la vidéo obtenue après la seconde phase de montage, sur mon écran d'ordinateur. Je n'ai eu qu'à regarder le tout, et ma seule intervention fût d'éteindre le caméscope à la fin de la vidéo. De ce re-filmage, j'obtins une image vidéo légèrement plus floue que l'originale, mais surtout, le jeu des pixels de l'écran se trouvait visible grâce à l'enregistrement du caméscope. Alors que l'écran montre une image lisse et nuancée de gris, fidèle aux traitements qui lui ont été prodigués, l'image vidéo obtenue après capture révèle la trame de l'écran - il s'agit de légères stries rapprochées barrant l'image verticalement - ainsi qu'une légère teinte bleutée produite par l'écran. On observe également sur cette image nouvelle quelques flous correspondant aux efforts de mise au point du caméscope, des nuances de couleurs très faibles (violet, vert et bleu) dues à la réinterprétation du caméscope des pixels blancs de l'écran.

L'image vidéo finale se trouve donc être le résultat d'une succession d'interventions : qu'elles résident dans la mise en scène particulière lors de la capture vidéo ; qu'elles s'articulent à travers l'usage d'un

1 Françoise Parfait, Vidéo : un art contemporain, Paris, Editions Du Regard, 2001, p.125.

2 Ibid, p.97.

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logiciel de montage informatique et de ses outils de modification, soit de l'image elle même, soit de sa durée; ou encore qu'elles découlent directement de l'utilisation du médium vidéo et des défauts qui lui sont inhérents. Et c'est bien cette accumulation d'effets qui, finalement, à travers son rendu plastique, témoigne d'elle-même de son propre processus de réalisation.

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