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Le microcrédit au Maroc. Tensions entre performance commerciale et finalité sociale.

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par Brahim NAHI
Université Mohamed 5 _Faculté de droit Agdal Rabat  - Master spécialisé en Management de développement social  2012
  

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Conclusion de la section

« (...) Si nous découvrons que les personnes ayant obtenu des microcrédits s'en sortent mieux que les autres, cela signifie-t-il pour autant que les microcrédits en question sont la cause de l'amélioration ? (...)»145 En ce sens, différentes explications restent acceptables et peuvent être prises. Et, s'il est «constaté» que le MC ne concourt pas à sortir les gens de la pauvreté, ses autres avantages ne méritent-t-ils pas d'être cités ? Entendre que la preuve n'est pas faite de l'augmentation des revenus des pauvres par le MC, et que de nombreux clients l'utilisent juste pour un lissage de leur consommation sans pouvoir développer des activités productives ce qui ne signifie pas que le MC est un simple palliatif146 pour ceux qui l'apprécient, du moins pour son rôle dans la gestion de leur trésorerie familiale.

Or, tous les effets présumés positifs du MC supposent la réunion de conditions liées à la fois à la qualité de l'offre et aux conditions de l'environnement local. En leur absence, le microcrédit peut devenir source de danger en surchargeant l'endettement familial voire même conduisant au surendettement.

En outre, le MC ne peut prétendre bouleverser les rapports hommes/ femmes ni remettre en question les normes sociales ancrées dans l'imaginaire collectif. Par un meilleur accès aux ressources, le MC peut permettre aux femmes d'élargir leurs opportunités et au mieux protéger leurs intérêts sans pouvoir renverser règles et valeurs sociales.

La contribution du MC est indiscutable et représente un immense progrès vers une certaine viabilité dans la vie des pauvres. Dés lors que son aide apparente n'est totalement pas mise en doute dans la mesure où nombre de prestations complémentaires (formation, services divers d'appui) sont donc nécessaires pour qu'il y ait réellement création de richesse.

145 ROSENBERG, Richard. « Le microcrédit aide-t-il vraiment les pauvres ?», Focus note CGAP N° 59/2010.

146 Idem.

Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master Spécialisé Management du Développement Social 71

Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)

Conclusion du chapitre 2

Le microcrédit semble être une issue au problème de la pauvreté quoique dans certaines conjonctures devient inopérant et peut ne pas marcher d'autant plus lorsque le bénéficiaire est trop pauvre, les projets sont trop nombreux, généralement trop concurrentiels, parfois trop peu rentables ; alors les risques seront grands pour l'emprunteur particulièrement le risque de surendettement. S'ajoute à cela la difficulté de contrôler l'usage des prêts : le client pauvre peut privilégier d'utiliser (au moins partiellement) l'argent pour sa subsistance et celle de sa famille plutôt que de l'investir totalement dans une AGR dont la rentabilité n'est pas garantie. En effet, les plus pauvres sont chassés d'office du crédit qui s'adresse d'abord aux solvables capables de rembourser les intérêts. Pour les autres, l'échec de leur entreprise peut avoir des effets bouleversants. En fait les cibles potentielles de cet instrument sont les personnes « moyennement pauvres », et non les plus pauvres. Ces dernières n'en bénéficient pas réellement et bien peu d'entre elles peuvent prétendre être sorties définitivement de leur précarité.

En outre, Thomas Dichter147, est l'un des experts qui a le plus étudié le phénomène, conclue que les personnes les plus pauvres ne peuvent utiliser ce type de crédit « de manière productive » et confirme qu'il est exagéré d'affirmer que le microcrédit permet à ses bénéficiaires de transiter de l'état du pauvre au statut d'entrepreneur. Pour lui, le grand paradoxe du microcrédit lorsque "les plus pauvres ne peuvent pas faire grand chose de productif avec le crédit, et ceux qui peuvent en faire le meilleur usage sont ceux qui ont besoin non pas d'un microcrédit, mais d'un prêt plus important, assorti de conditions différentes". Dans cette perspective, le microcrédit reste un bon instrument pour une «stratégie» de survie sans qu'il constitue une clé au développement. Ces programmes ne sont que des filets de sécurité pour les démunis ; et JM Servet considère qu'il, « (...) paraît aussi irresponsable de prétendre que la pauvreté pourrait être vaincue mondialement par un développement généralisé et professionnel de la microfinance qui constituera aussi, dans l'avenir, un formidable marché pour les banques commerciales » 148. À court terme, une telle conscience peut permettre à certains opérateurs de MC et à leurs conseillers de « capter

147 Thomas Dichter a publié les études parmi les plus fouillées sur le microcrédit , Site web : www.microfinancegateway.org)

148 FOUILLET, Cyril et al. Le microcrédit au péril du néolibéralisme et de marchands d'illusions : Manifeste pour une inclusion financière socialement responsable. Op.cit.

Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master Spécialisé Management du Développement Social 72

Le Microcrédit au Maroc : Tensions entre Performance Commerciale et Finalité Sociale (Cas : Al Amana Microfinance)

des ressources, mais ni les investissements de responsabilité sociale, ni les placements financiers à but lucratif, ni les autorités publiques n'ont intérêt à long terme à ce qu'elle perdure » 149.

Malgré que son impact n'a jamais été une question consensuelle, il se trouve que la majorité des études sur le MC tirent un bilan relativement positif quoiqu'il est mitigé et hétérogène. Une minorité non négligeable de recherches conclue à un impact neutre voire parfois négatif (surendettement, revente d'actifs pour rembourser les prêts, conflits sociaux autour des remboursements au sein des groupes, etc.). Par contre ses admirateurs le conçoivent comme une forme nouvelle visant l'humanisation du capitalisme (capitalisme social) et un dispositif de promotion du développement et de lutter contre la pauvreté.

Aujourd'hui, le microcrédit est devenu une mode parmi nombre de ceux qui soutenaient la vision macro-économique d'ajustement structurel. Cet engouement pour le microcrédit a le mérite d'attirer l'attention des institutions financières sur le besoin de services financiers des populations les plus pauvres. Fort heureusement, la microfinance ne se limite plus au microcrédit ; une épargne en sécurité est souvent un service plus important que le crédit. Or le microcrédit est de plus en plus mobilisé, selon J.M. Servet, dans une logique néolibérale niant la nécessité des interventions publiques.

Que ce soit pour pauvres ou non pauvres, les besoins de base et fondamentaux relatifs à l'éducation, l'alphabétisation, soins de santé, prévention des risques, eau potable, réseaux d'épuration et de communication sont plus urgents à satisfaire que la diffusion à grande échelle de petits prêts. Le microcrédit ne peut à court terme assurer les besoins des démunis. Une politique volontariste de lutte contre la pauvreté et les inégalités ne peut s'appuyer exclusivement sur un outil comme celui-là. La vulgarisation de l'outil et sa médiatisation à grande échelle peut-être une occasion de retourner vers les concernés en leur donnant la parole, de prendre conscience que la priorité n'est peut-être pas de « placer du crédit » auprès des pauvres, mais qu'ils ont d'abord besoin de se nourrir, de se soigner et que, pour cela, il faut de l'emploi, des rémunérations et de la formation. Une véritable réflexion sur le MC ne peut se faire en fin qu'à partir d'une approche compréhensive tout en s'intéressant au sens que chaque acteur donne à sa propre conduite et non au sens que l'on aimerait bien lui attribuer.

149 ATTALI, Jacques. (2006). « Association d'économie financière ». Président de Planet Finance. (2006) p.115.

Etudiant Chercheur : Brahim NAIII PFE _Master Spécialisé Management du Développement Social 73

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