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Le sort des contrats et des conflits de travail en cours dans les sociétés commerciales en voie de disparition.

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par Fabrice KABAMBA KADIMA
Université de Mbuji-Mayi - Droit 2016
  

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SECTION III LA PROCEDURE COLLECTIVE DE LIQUIDATION

DES BIENS

Nous recourons à l'étude de cette procédure pour quatre raisons principales :

- Premièrement, parce que la liquidation des biens d'une société ordonnée par le tribunal est une cause de disparition ou de dissolution commune à toutes les sociétés commerciales ;

- Deuxièmement, parce que cette cause de dissolution a une réglementation particulière et appropriée, à savoir l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif (AUPC) ;

- Troisièmement ; parce qu'il est nécessaire de démontrer à ce niveau particulier, tout comme aux autres phases déjà vues, le sort des contrats et des conflits de travail en cours ;

- Quatrièmement enfin, parce que la compréhension du déroulement de cette procédure, du rôle que peuvent jouer les travailleurs à cette étape ainsi que de leurs droits nous aidera à enrichir et à approfondir la présente étude.

D'une manière générale, la liquidation des biens fait partie des procédures collectives d'apurement du passif prévues par le droit OHADA. En effet, il s'agit des procédures judiciaires ouvertes lorsque le commerçant

193 OHADA, Droit des sociétés commerciales, op.cit, p. 62.

194 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 451.

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personne physique ou personne morale de droit privé est en état de cessation des paiements'95 ou connait des sérieuses difficultés financières, dans le but d'assurer le paiement des créanciers et, dans la mesure du possible, le sauvetage de l'entreprise, de son activité et des emplois.

Classiquement, ces procédures collectives poursuivent trois objectifs. D'abord, elles visent à protéger les créanciers impayés et à assurer leur désintéressement dans les meilleures conditions possibles, d'où le rôle relativement important des créanciers dans le dénouement de la procédure et la discipline collective qui s'applique à tous les créanciers. Ensuite, elles visent à punir et éliminer le commerçant qui n'honore pas ses engagements. Cet aspect n'est pas à négliger lorsque l'on considère le caractère dissuasif de la punition ainsi que sa contribution à la moralisation du milieu des affaires et au paiement des créanciers (cas de la faillite personnelle et de la banqueroute). Enfin, les procédures collectives doivent permettre la sauvegarde des entreprises redressables, même au prix d'une certaine entorse au droit des créanciers.'96

Quant aux caractéristiques de ces procédures collectives, il sied d'en retenir principalement trois :

- L'aspect collectif : les créanciers sont regroupés et soumis à un ensemble de règles destinés à les discipliner afin que leur paiement se fasse dans l'égalité et la justice.

- L'aspect conflictuel : un conflit d'intérêt existe, d'une part entre les créanciers et le débiteur ou la société, d'autre part, à l'intérieur du groupe des créanciers entre les créanciers chirographaires, les créanciers munis de sûretés et les créanciers pouvant se prévaloir de préférence, en l'occurrence le droit de propriété.

- L'intervention judiciaire : cette intervention est essentielle dans le domaine des procédures collectives. Elle est destinée à protéger les intérêts en présence et à assurer l'efficacité et la moralité des procédures.

L'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif (AUPC) prévoit trois procédures :

- Le règlement préventif avant la cessation des paiements qui constitue l'une des pièces maîtresses de la prévention destinée à éviter la cessation des paiements au moyen d'un concordat préventif'97 ;

- Le redressement judiciaire après la cessation des paiements, qui est destinée à la sauvegarde de la société en visant à la fois son sauvetage et l'apurement de son passif au moyen d'un concordat de redressement'98 ;

195 La cessation des paiements est la situation où le débiteur ne peut faire face à son passif exigible avec son actif disponible (Art. 25 AUPC)

196 SAWADOGO F.M, « Commentaires sur l'AUPC », in OHADA, Traité et actes uniformes commentés et annotés, Juriscope, 2012, pp. 1121-1302.

197 Art. 2- 1 AUPC.

198 Art. 2- 2 AUPC.

199 Art. 2- 3 AUPC.

200 Art. 3 AUPC.

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- La liquidation des biens, après la cessation des paiements, qui a pour objet la réalisation de l'actif et qui implique la liquidation de la société au profit des créanciers.199

C'est cette dernière procédure qui nous intéressera ici pour les besoins de la présente étude, étant donné que c'est elle seule qui implique la disparition de la société. C'est pourquoi, dans les lignes qui suivent, il sera question de déterminer les conditions d'ouverture de la liquidation des biens et d'établir les modalités de son exécution (§1), de saisir le rôle des travailleurs dans la mise en oeuvre de cette procédure (§2). En outre, la présence des travailleurs au sein de la société à cette phase délicate pousse à réfléchir sur la place de l'activité contractuelle dans cette procédure ainsi que sur les modalités prévues pour le traitement des créances de salaires (§ 3).

§1 CONDITIONS D'OUVERTURE ET MODALITES
D'EXECUTION

En vertu de l'article 33 AUPC, la liquidation des biens peut être ouverte soit immédiatement lorsque la société n'a pas d'espoir de se redresser, le débiteur n'ayant pas proposé un concordat sérieux ou qu'elle a cessé toute activité, soit à l'issue d'une période d'observation.

Nous verrons que dès le prononcé du jugement d'ouverture de la liquidation des biens, le tribunal nomme des organes de la procédure, qui sont des mandataires chargés de conduire et d'acheminer cette procédure.

A. Conditions d'ouverture

Il faut savoir avant tout qu'à côté des conditions de forme que nous allons évoquer ci-dessous pour l'ouverture de la liquidation des biens, il existe aussi des conditions de fonds, notamment la cessation des paiements et la juridiction compétente. En effet, les personnes physiques ou morales visées dans cette procédure ne peuvent être déclarées en liquidation des biens que si elles sont en état de cessation des paiements. Aussi, la juridiction compétente en cette matière n'est autre que celle compétente en matière commerciale, en l'occurrence le tribunal de commerce.200

Quant aux conditions de forme, il faut parler de la saisine du tribunal, de la décision même provenant de ce tribunal ainsi que des effets du jugement de liquidation des biens.

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1°) La saisine du tribunal

Elle peut se faire soit par le débiteur, soit par un créancier, ou même d'office par le juge.

a) Saisine par le débiteur

Le débiteur en état de cessation des paiements doit en faire la déclaration au tribunal dans les 30 jours de cette cessation, aux fins d'obtenir l'ouverture de la procédure de liquidation des biens, le cas échéant.201

En effet, l'article 25 AUPC donne une définition légale de la cessation des paiements et apporte des précisions relatives à la saisine de la juridiction compétente par le débiteur. La cessation des paiements découle de la comparaison entre l'actif disponible et le passif exigible. L'actif disponible est la trésorerie de la société. Il comprend les sommes dont la société peut disposer immédiatement soit parce qu'elles sont liquides, soit parce que leur conversion en liquide est possible à tout moment et sans délai. Le passif exigible est reflété par les éléments de la cessation des paiements ouverte (non paiement d'une dette certaine, liquide et exigible) ou de la cessation des paiements déguisée (maintien du service de caisse par des expédients).202

Aux termes de l'article 26 AUPC, la déclaration ci-haut mentionnée doit être accompagnée des pièces et documents exigés pour ce faire. Il s'agit entre autres des éléments suivants :

- Un extrait d'immatriculation au RCCM ;

- Les états financiers de synthèse comprenant notamment le bilan, le compte de résultat, un tableau financier des ressources et des emplois ; - Un état de la trésorerie ;

- L'état chiffré des créances et des dettes avec indication du nom et du domicile des créanciers et des débiteurs ;

- Le nombre des travailleurs et le montant des salaires et des charges salariales impayés ;

- Les noms et adresses des représentants du personnel ;

- La liste des membres solidairement responsables des dettes de la société avec indication de leurs noms et domiciles ainsi que les noms et adresses de ses dirigeants.

La pertinence de ces documents ne paraît pas discutable dans la perspective de l'apurement du passif de la société. Cependant, il semble difficile de les réunir toutes, et cela pourrait retarder la déclaration, ce qui serait dommageable. C'est pourquoi l'Acte uniforme a prévu au dernier alinéa de l'article 26 une hypothèse, conçue comme une exception et qui pourrait se révéler très fréquente. Cet alinéa prévoit en effet que, dans le cas où l'un des

201 Art. 25 AUPC.

202 SAWADOGO FM, op.cit, p. 1172.

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documents cités supra ne peut être fourni ou ne peut l'être qu'incomplètement, la déclaration reste possible mais doit indiquer les motifs de cet empêchement.

b) Saisine par un créancier

Tout créancier, quelle que soit la nature et l'importance de sa créance, peut demander l'ouverture d'une procédure collective contre son débiteur, pourvu que cette créance soit certaine, liquide et exigible. Pour ce faire, l'assignation du créancier doit préciser la nature et le montant de sa créance et viser le titre sur lequel elle se fonde.203

Les caractères certain, liquide et exigible de la créance signifient que l'ouverture d'une procédure collective ne peut être fondée sur des créances contestables et que les créances elles-mêmes doivent attestées par des pièces justificatives.

En l'espèce, sur appel interjeté contre un jugement du tribunal régional de Dakar du 14 février 2007 ayant refusé d'ouvrir une procédure collective de liquidation des biens contre la société A4 CENTER, sur assignation d'un de ses créanciers pour non paiement de sa créance, la Cour d'appel de Dakar confirme le jugement entrepris pour les motifs selon lesquels « l'appelant n'a pas produit de titres exécutoires, les créances alléguées résultent de documents unilatéraux ne comportant pas la signature du débiteur et non certifiés par une autorité légalement habile ; et il s'y ajoute que les chèques ne sont également pas émis par la société A4 CENTER ; elles ne sont donc pas certaines. »204

L'une des causes de demande par le créancier de la procédure collective de liquidation des biens contre son débiteur est le fait que toutes les poursuites en paiement du créancier sont demeurées vaines. En l'espèce, le jugement du TPI de Libreville du 12 mars 2001 a ouvert une procédure de liquidation des biens contre la société OGAR à la demande d'un des ses créanciers du fait que la société a cessé toute activité depuis plus d'un an et ses dirigeants ont quitté le Gabon ; ce qui a fait que toutes les poursuites en paiement soit demeurées vaines.205

Il faut noter en outre que l'alinéa 3 de l'article 28 AUPC laisse au débiteur assigné la possibilité de faire la déclaration et la proposition de concordat dans le délai d'un mois de l'assignation.

c) Saisine d'office

Aux termes de l'article 29 AUPC, la juridiction compétente peut se saisir d'office, notamment sur base des informations fournies par le

203 Art. 28 AUPC.

204 Cour d'appel de Dakar, Chambre civile et commerciale, Arrêt n° 192 du 18 février 2010, Mr X c/ Société A4 CENTER, OHADA, Actes uniformes commentés et annotés, Juriscope, p. 1177.

205 TPI de Libreville, Jugement n° 11/2000-2001 du 12 mars 2001, Mr X c/ Société OGAR ; OHADA, Traité et actes uniformes commentés et annotés, p. 1176.

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représentant du Ministère public, les commissaires aux comptes, les associés ou les institutions représentatives du personnel qui lui indiquent les faits de nature à motiver cette saisine.

Le président du tribunal fait convoquer le débiteur, par les soins du greffier, par acte extrajudiciaire, à comparaître devant la juridiction compétente siégeant en audience non publique.

Si le débiteur comparaît, le président l'informe des faits de nature à motiver la saisine d'office et reçoit ses observations. Si le débiteur reconnaît être en cessation des paiements ou en difficulté ou si le président acquiert l'intime conviction qu'il est dans une telle situation, ce dernier lui accorde un délai de 30 jours pour faire la déclaration et la proposition de concordat. Passé ce délai, le tribunal statue en audience publique.

Si le débiteur ne comparaît pas, il en est pris acte et la juridiction compétente statue à la première audience publique utile.

De ce qui précède, l'on note que les cas de saisine d'office sont en pratique très rares. Les enquêtes pouvant être faites par des organes ou des individus chargés d'informer le tribunal paraissent inadéquates. Il serait mieux pour les tribunaux de commerce de la RDC d'organiser, à l'instar des tribunaux de commerce belges, un service d'enquêtes commerciales dont l'utilité est évidente pour la saisine d'office.206

B. Modalités d'exécution 1°) La décision du tribunal

Il ressort de la lecture de l'article 32 AUPC qu'avant de prononcer l'ouverture d'une liquidation des biens, le tribunal peut désigner un juge du siège ou toute personne qu'il estime qualifiée pour recueillir tous renseignements sur la situation du débiteur, ses agissements et ses propositions concordataires et en faire rapport.

A cet égard, on remarque que quel que soit le mode de saisine, le tribunal ne peut rendre de décision avant 30 jours à compter de sa saisine. Si le tribunal constate la cessation des paiements dans le chef du débiteur, il doit prononcer la liquidation des biens après avoir constaté que le débiteur ne peut pas ou ne peut plus proposer un concordat sérieux de redressement judiciaire.207Il peut aussi prononcer cette liquidation à tout moment au cours de la procédure de redressement judiciaire si le débiteur ne respecte pas ses propositions contenues dans le concordat.

206 DUPLAT J.L, « Les services des enquêtes commerciales des tribunaux de commerce » ; in L'entreprise en difficulté, Editions Jeune Barreau, 1981, pp. 45-76.

207 Art. 33 AUPC.

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Le concordat sérieux, à en croire le professeur Filiga Michel SAWADOGO, est celui qui, tout en préservant et en favorisant l'assainissement de l'entreprise, assure le paiement des créanciers dans des conditions acceptables. Il doit donc comporter d'une part des mesures de redressement de la société et un plan de paiement des créanciers théoriquement satisfaisants, et d'autre part des garanties d'exécution des engagements que contient la proposition de concordat.208

Le tribunal, dans la décision d'ouverture de la liquidation des biens, nomme certaines personnes devant agir comme organes de la liquidation, à savoir le juge commissaire, un à trois syndics, et le cas échéant, des contrôleurs.

a) Le juge commissaire

Il est nommé parmi les juges de la juridiction, à l'exclusion de son président sauf en cas de juge unique. Il veille au déroulement rapide de la procédure et aux intérêts en présence. C'est lui qui nomme les contrôleurs, lesquels sont choisis parmi les créanciers, sans que leur nombre puisse excéder trois.209Ces derniers assistent le juge-commissaire dans sa mission de surveillance du déroulement de la procédure.

b) Le syndic

Il paraît comme l'acteur central dans la procédure de liquidation des biens. C'est lui seul qui exécute les opérations de liquidation pendant que les autres sont là pour assurer le contrôle. Il est généralement choisi sur une liste des spécialistes arrêtée par la Cour d'appel.210

Sa mission est essentielle quant au déroulement diligent et au bon aboutissement de la procédure collective. Il a l'obligation de rendre compte de sa mission au juge-commissaire selon une périodicité définie par ce dernier.211 Le syndic peut représenter la masse des créanciers, le tribunal en tant que mandataire de justice et, le cas échéant, le débiteur. L'on remarque que dans ces conditions, un conflit de fonctions peut se produire.

En effet, les alinéas 2 et 3 de l'article 53 AUPC énoncent que le jugement qui prononce la liquidation des biens entraine corrélativement le dessaisissement des pouvoirs du débiteur au profit du syndic qui sera chargé de représenter les droits et actions concernant le patrimoine du débiteur dessaisi pendant toute la durée de la procédure collective. Lorsque le débiteur est une personne physique, l'application ne pose pas de difficulté dans la mesure où le débiteur est simplement remplacé par le syndic.

208 SAWADOGO FM, op.cit, p. 1183.

209 Art. 48 AUPC.

210 SAWADOGO F.M, op.cit, p. 1193.

211 Art. 43 al. 4 AUPC.

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En revanche, le débiteur conserve ses droits propres, tels que les droits de recours contre les décisions, qu'il pourra exercer lui-même. Mais lorsque le débiteur est une personne morale, le problème est tout autre. La société débitrice dissoute est donc dessaisie et à travers elle, les dirigeants sociaux et le conseil d'administration.

Cependant, en vertu du principe posé selon lequel la personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation, la société dispose encore des droits encore des droits propres, notamment le droit de faire appel du jugement ouvrant ou prononçant la liquidation des biens, ou faire appel des décisions du juge commissaire.

Toute la problématique est alors celle de savoir qui est habilité à représenter la société dans ses diverses actions. En d'autres termes, comment pallier ce vide législatif occasionné par la cessation des pouvoirs des dirigeants sociaux dès le prononcé du jugement de liquidation des biens contre la société P

Maître Bérenger Yves MEUKE, un auteur, a tenté d'apporter une solution à ce problème (laquelle solution nous paraît logique), en soutenant qu' « il est indispensable de remplacer les organes sociaux dessaisis et de nommer aux côtés du syndic un représentant de la société qui sera chargé de représenter les intérêts propres de la société débitrice (un liquidateur sociétaire), car, d'une part le syndic est incompétent pour exercer les droits propres de la débitrice et par conséquent il ne doit pas représenter celle-ci dans les actions en justice à engager dans cette procédure.

Etant chargé de représenter les créanciers, on pourrait se retrouver face à un conflit d'intérêts entre les droits des créanciers et ceux propres à la débitrice. D'autre part, les organes sociaux sont eux aussi incompétents pour représenter la débitrice puisqu'ils ont perdu tous pouvoirs dès le prononcé du jugement confirmant la liquidation des biens ».212

Il est à noter en outre qu'un jugement prononçant la liquidation des biens est toujours susceptible d'appel.213Ce jugement doit être mentionné au RCCM et publié dans un journal d'annonces légales.214Ceci traduit la nécessité pour le jugement d'ouverture de faire l'objet d'une publicité afin d'informer les créanciers et les personnes qui ont traité ou qui voudraient traiter avec le débiteur. La publicité est habituelle et est considérée comme justifiée dès lors que la société est en état de cessation des paiements.

212 MEUKE B.Y., « Qui représente la société en liquidation des biens dans l'espace OHADA ? », Ohada.com/ Ohadata D-08-16, pp. 1-6.

213 Art. 33 al. 5 AUPC.

214 Art. 36 AUPC.

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2°) Effets du jugement de liquidation des biens

a) A l' égard du débiteur

· Dessaisissement : Désormais, le débiteur est dessaisi de la gestion, de l'administration et de la disposition de son patrimoine. L'accomplissement de ces actes est confié au syndic. La liquidation des biens d'une société d'une société entraine de plein droit sa dissolution.

b) A l'égard des créanciers

· Regroupement en une masse : Ne peuvent participer à la procédure collective que les créanciers réunis en une masse représentée par le syndic qui est seul à pouvoir agir en son nom et l'engager.215Ne font partie de la masse que les créanciers dont la créance est née antérieurement à la date du jugement d'ouverture de la procédure.

En plus du regroupement en une masse, le jugement de liquidation des biens produit les effets suivants, communs à tous les créanciers :

- Il arrête le cours des inscriptions de toutes les sûretés216;

- Il emporte, au profit de la masse, une hypothèque forcée217;

- Il suspend ou interdit toutes les poursuites individuelles218, sauf les actions en nullité en et en résolution, ou encore les actions tendant uniquement à la reconnaissance d'un droit de créance ou de propriété si ce droit leur est contesté par le syndic après production ;

- Il rend exigibles les dettes à termes à l'égard du débiteur219 ;

- Il arrête, à l'égard de la masse, le cours des intérêts des dettes à termes220. Le fondement psychologique de cette règle de l'arrêt du cours des intérêts est qu'il n'est pas raisonnable de réclamer les intérêts là où le recouvrement du capital est compromis. Au plan technique, cette règle permet de fixer définitivement le montant de passif.221

- Il oblige tous les créanciers de produire, sous peine de forclusion, leurs titres de créance auprès du syndic et se soumettre à la procédure de vérification222. Cette procédure de vérification aboutit à l'établissement d'un état qui est déposé au greffe, notifié à chaque créancier et publié dans un journal d'annonces légales. La décision du syndic est soit l'acceptation (partielle ou totale) de la créance, soit le rejet de celle-ci. Cette décision peut être soit confirmée ou infirmée par le juge-commissaire, soit contestée par le créancier devant le tribunal.

215 Art. 72 AUPC.

216 Art. 73 AUPC.

217 Art. 74 AUPC.

218 Art. 75 AUPC. 219Art. 76 AUPC.

220 Art. 77 AUPC.

221 SAWADOGO F.M, op.cit, p. 1220.

222 Art. 78 à 90 AUPC

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Au bout du compte, il faut noter que tant que la procédure de liquidation des biens n'est pas close, l'activité de la société peut continuer. Cette poursuite d'activité peut présenter quelques avantages : elle procure des revenus et conserve la valeur du fonds. Mais elle présente le danger, si elle est déficitaire, d'aggraver le passif au détriment des créanciers. Le législateur la soumet donc à un régime particulier.

En effet, la continuation de l'exploitation doit être autorisée par le tribunal, pour les seuls besoins de la liquidation, pour une durée de 3 mois, si l'intérêt public ou celui des créanciers n'est pas mis en péril. Au bout de 3 mois, l'exploitation cesse ; elle peut être reconduite une ou plusieurs fois sans pouvoir dépasser un an sauf décision spécialement motivée du tribunal pour des motifs exceptionnels ; et de ce fait, le syndic doit, tous les trois mois, communiquer le résultat de l'exploitation.223

3°) Solution de la liquidation des biens

Dès que la liquidation des biens est prononcée, les créanciers sont en état d'union.224L'union est l'état des créanciers groupés pour faire valoir leurs droits. Le syndic, après avoir accompli les mesures de la période préparatoire (vérification du passif, inventaire de l'actif, etc.), remet le rapport au juge-commissaire qui l'autorise à procéder à la réalisation de l'actif et à l'apurement du passif.

a) La réalisation de l'actif225

La réalisation de l'actif constitue la question la plus importante que pose la liquidation des biens.

? Biens meubles : Le syndic poursuit seul la vente des biens meubles de la société, le recouvrement des créances et le règlement des dettes. Les créances à long terme peuvent faire l'objet de cessions afin de ne pas retarder les opérations de liquidation dans les conditions prévues pour les compromis et les transactions. Les deniers provenant de ces opérations sont versés sur un compte spécial sur lequel aucune opposition n'est recevable.

? Biens immeubles : En principe, les ventes d'immeubles ont lieu suivant les formes prescrites en matière de saisie immobilière. C'est le juge-commissaire qui détermine les conditions essentielles et les modalités de la vente (vente sur saisie immobilière, vente par adjudication amiable ou vente de gré à gré). Si, dans le délai de trois mois suivant le jugement de liquidation des biens, le syndic n'a entrepris aucune procédure de

223 Art. 112 à 117 AUPC.

224 Art. 146 AUPC.

225 Art. 147 à 163 AUPC.

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réalisation d'immeuble, les créanciers hypothécaires et les créanciers munis d'un privilège général peuvent exercer ou reprendre leur droit de poursuite individuelle à charge d'en rendre compte au syndic.

b) L'apurement du passif226

Il s'agit du paiement des créanciers. Pour ce faire, le juge-commissaire ordonne la répartition des deniers entre les créanciers et le syndic adresse à chaque créancier un chèque correspondant à son dividende, lequel chèque est tiré sur le compte ouvert spécialement à cet effet dans un établissement bancaire ou postal ou au Trésor public.

Le montant de l'actif est repartie entre tous les créanciers dont la créance est vérifiée et admise, déduction faite des frais et dépens de la procédure et des éventuels secours accordés au débiteur et à sa famille.

Les deniers provenant de la réalisation des immeubles et des meubles sont repartis entre les créanciers sur base d'un classement établi par la loi (Articles 166 et 167 AUPC). C'est ce même classement qui est prévu par les articles 225 et 226 de l'Acte uniforme sur les sûretés (AUS). Concernant l'application de ces dispositions, il faut savoir que les créanciers d'un rang supérieur doivent être intégralement payés avant les créanciers du rang suivant et ainsi de suite.

c) La clôture de la liquidation des biens

Lorsque les opérations de liquidation des biens sont terminées, le syndic en rend compte au juge-commissaire, qui dresse un procès-verbal (PV) constatant la fin des opérations.227Le PV est ensuite communiqué au Tribunal qui prononce la clôture de la liquidation des biens et tranche, par la même occasion, les contestations éventuelles.

L'union est donc dissoute de plein droit et les créanciers recouvrent l'exercice individuel de leurs actions. La décision de clôture est publiée au Journal officiel ainsi qu'au RCCM, par les soins du greffier, après en avoir adressé un extrait au représentant du Ministère public.228

Si les fonds manquent pour entreprendre ou terminer les opérations de la liquidation des biens, le tribunal peut, sur le rapport du juge-commissaire, à quelque époque que ce soit, prononcer, à la demande de tout intéressé ou même d'office, la clôture des opérations pour insuffisance d'actif.229

La clôture des opérations pour insuffisance d'actif est, à en croire le professeur SAWADOGO, le mode de clôture le plus fréquent, statistiquement

226 Art. 164 à 169 AUPC.

227 Art. 170 AUPC.

228 Art. 172 AUPC.

229 Art. 173 AUPC.

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parlant.230Il y a insuffisance d'actif lorsqu'il n'y a pas d'actif du tout231 ou lorsque les frais de réalisation de l'actif excèdent les recettes attendues. Un tel mode de clôture s'explique aisément : la procédure tend à un paiement, ne serait-ce que partiel. S'il n'y a aucune perspective, il est logique l'on y mette fin, d'autant plus que la poursuite de la procédure dans ce cas ne peut que gonfler inutilement le passif. De ce point de vue, la clôture pour insuffisance d'actif apparaît comme un raccourci ou un diminutif de l'union.

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein