WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Les enjeux du télétravail international


par Méric SANCHEZ
IETL LYON 2 - M2 Mobilité internationale du travailleur  2020
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Chapitre II : Le télétravail international et la protection sociale

du salarié

L'autre grand volet du droit social est la protection sociale, qui est également l'un des enjeux majeurs de la mobilité internationale et donc de la pratique du télétravail international.

En effet, lorsqu'un salarié est envoyé dans un pays étranger, si un incident de santé devait survenir, lié ou non à son travail, la question de sa prise en charge se posera nécessairement.

Si la France et son système de sécurité sociale sont très protecteurs pour le salarié, ce n'est pas nécessairement le cas de la plupart des autres pays, dans lesquels se soigner peut coûter cher. La protection sociale du salarié est donc l'un des principaux éléments d'un « package » classique d'expatriation, qui la plupart du temps propose au salarié une adhésion à la CFE et à diverses mutuelles internationales ainsi qu'à une assurance rapatriement, afin d'assurer un niveau de protection et de prise en charge au moins équivalent au système français, pour le salarié et sa famille, faute de quoi il ne partirait probablement pas.

Dans le cas d'une mobilité « classique », le volet santé est ainsi la plupart du temps prévu dans le « package » d'expatriation. En cas de soucis de santé pour le salarié et sa famille, la question de sa prise en charge ne pose donc pas problème.

En revanche, dans le cas du télétravail international, qui résulte souvent d'une situation de fait, dans laquelle le salarié s'est simplement installé dans un pays étranger, en prétendant que cela était « transparent » pour son employeur, qui n'a donc pas forcément prévu de protection spécifique pour le salarié, des difficultés peuvent émerger.

La question de la protection sociale se pose également, dans le cadre de la COVID-19, pour les travailleurs frontaliers, qui sont bloqués par les mesures de confinement et ne peuvent plus traverser la frontière pour travailler, et sont donc contraints au télétravail.

Dans ce chapitre, nous allons donc aborder l'enjeu de la protection sociale pour le télétravailleur international, qu'il s'agisse d'un salarié « ordinaire » qui télétravaille depuis l'étranger ou d'un salarié contraint au télétravail dans un pays qui n'est pas le pays de son lieu habituel de travail.

23

Section I : La protection sociale du télétravailleur international, un enjeu essentiel de mobilité internationale

Dans cette section, nous nous intéresserons tout d'abord aux conséquences du télétravail international sur l'affiliation du salarié à un système de sécurité sociale, avant de nous pencher plus précisément sur le cas de l'accident du travail.

I) Le principe de la protection sociale du télétravailleur international

A) Le cas du télétravailleur international « ordinaire »

a) Le principe : le rattachement au système de sécurité sociale du pays d'accueil

En droit, et plus particulièrement en matière de protection sociale, le principe applicable est celui de la territorialité : l'assujettissement au régime de sécurité sociale du lieu d'exercice de l'activité professionnelle.

Le salarié est donc automatiquement rattaché au système de santé du pays d'accueil dès lors qu'il y travaille, même si certains pays prévoient une contribution différente et souvent moindre pour les expatriés (le Koweït par exemple prévoit une contribution minime pour les expatriés).

Le pays d'accueil peut ainsi demander le rattachement du salarié qui télétravaille depuis son pays et demander le paiement de cotisations à ce titre, sauf certains pays qui ont des conditions de durée de séjour avant rattachement.

Un salarié qui s'installe à l'étranger afin d'y télétravailler doit donc en principe être rattaché au système de sécurité sociale de ce pays, car il y exerce son activité professionnelle. Par voie de conséquence, il ne sera donc plus rattaché au système français de sécurité sociale.

b) L'exception au principe : le détachement

Comme tout principe juridique, il existe une exception à ce principe de territorialité en matière de sécurité sociale.

24

Il s'agit des éventuels règlements européens, conventions bilatérales et décrets de coordination qui permettent à l'employeur de détacher son salarié dans le pays d'accueil plutôt que de l'expatrier. La principale différence est que le salarié restera affilié au système de sécurité sociale de son pays d'origine, et ne sera donc pas tenu d'être rattaché au système du pays d'accueil.

En cas de télétravail international européen, si le séjour dans le pays d'accueil dure moins de 3 mois, une simple déclaration à la CPAM suffit, mais au-delà il faudra faire demande de détachement avec le certificat A1.

Toutefois, ce certificat A1 pourrait potentiellement être refusé car bien souvent, dans le cadre du télétravail international, c'est d'avantage le salarié qui demande à être affecté dans un pays que l'employeur qui décide de l'affecter là-bas.

Le détachement est régi par la Directive (UE) 2018/957 du Parlement européen et du Conseil du 28 juin 2018 modifiant la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services. Le salarié détaché se définit comme celui que l'employeur met à disposition d'une autre entreprise, sous l'autorité de laquelle il exécutera des travaux, et sans que son contrat de travail avec son entreprise d'origine soit rompu. Il y a donc dans la définition du détachement l'idée d'une « mise à disposition » ou d'un « envoi » du salarié, de la part de l'employeur. Si c'est le salarié qui est à l'origine de la demande, il conviendra donc d'attendre la réponse de la CPAM quant à la demande de certificat A1.

Le salarié pourrait décider d'effectuer des allers/retours entre la France et le pays d'accueil depuis lequel il télétravaille, afin de ne pas dépasser ce seuil des 3 mois.

Cependant, il existe un risque de la reconnaissance d'une pluriactivité entre deux états membres de l'UE : il faudra alors cotiser dans l'état où est passé plus de 25% du temps, ce qui est souvent le pays d'accueil où le salarié exerce son activité24. Cela comporte donc un risque pour le salarié, qui serait affilié au régime de sécurité sociale du pays dans lequel il exerce son activité de télétravail. Il est donc plus prudent de passer par le détachement et le certificat A1.

24 Règlement Européen n°883/2004 ; article 14§5 du Règlement d'application n°987/2005

25

Si le pays depuis lequel le salarié souhaite télétravailler n'est pas un pays membre de l'UE, il faudra qu'une convention de sécurité sociale entre la France et ce pays prévoit la possibilité du détachement. S'il n'existe pas de conventions bilatérales de sécurité sociale, l'employeur pourra avoir recours au mécanisme de détachement de droit interne prévu par le code du travail pour maintenir volontairement le salarié au système de sécurité sociale français, mais cela reviendra cher pour l'employeur.

Sinon, l'employeur aura la possibilité d'expatrier son salarié. Comme nous l'avons vu, le principe de territorialité prévoit que ce salarié sera rattaché au système de sécurité sociale du pays d'accueil. L'employeur aura donc la possibilité de faire adhérer son salarié à la Caisse des Français de l'Étranger (CFE), afin qu'il bénéficie d'une couverture sécurité sociale équivalente à la couverture française. Certaines conventions collectives prévoient d'ailleurs le maintien du niveau de couverture sociale français pour un salarié en mobilité internationale.

Dans tous les cas, que le salarié soit détaché ou expatrié, il faudra, en plus de la sécurité sociale, prévoir la partie mutuelle internationale, prévoyance, ATMP, COVID...

En effet, que ce soit dans le cadre d'un détachement ou d'une expatriation avec une adhésion à la CFE, le salarié ne sera pris en charge que sur la base du barème français de sécurité sociale. Or, si en France, une consultation chez le médecin coûte tout au plus une trentaine d'euro, dans certains pays cela peut coûter bien d'avantage, pour un remboursement qui restera le même que celui dont le salarié aurait bénéficié en France. Une mutuelle internationale est donc quasiment obligatoire afin que le salarié soit pris en charge totalement.

Ainsi, qu'il soit détaché ou expatrié, le télétravailleur international, ainsi que son employeur, devront être vigilants quant à son affiliation à la sécurité sociale, ainsi qu'à diverses mutuelles et assurance privées, afin d'assurer au salarié une couverture équivalente à celle dont il aurait bénéficié en France.

De ce fait, si le salarié est en situation de télétravail « sauvage », il risque de ne pas être pris en charge. En effet, la sécurité sociale française, qui apprendra que le salarié

26

n'exerce plus son activité en France, pourrait refuser la prise en charge, en estimant que le salarié devrait être affilié dans le pays dans lequel il exerce son activité.

En ce qui concerne le système de sécurité sociale du pays dans lequel le salarié exerce son activité, ils ignorent tout simplement que le salarié exerce son activité depuis leur pays, et il ne paye de plus pas de cotisations. Le salarié, qui n'aurait de surcroît pas adhéré à une mutuelle internationale ou à la CFE, risquerait donc ne pas être pris en charge et devoir supporter des charges importantes.

B) Le cas du télétravailleur frontalier

D'un point de vue fiscal, la notion de travailleur frontalier est subordonnée à une activité exercée dans une zone frontalière (la Belgique par exemple : dans la convention fiscale liant la France et la Belgique, est stipulée une zone frontalière de 20km entre nos deux pays ; un salarié qui n'habiterait pas dans cette zone ne pourrait pas bénéficier du régime fiscal du travailleur frontalier, sur lequel nous reviendrons plus tard).

En revanche, ce n'est pas le cas d'un point de vue de la sécurité sociale. En effet, seul un passage fréquent et régulier de frontière du, et vers, le lieu de résidence est nécessaire. Par exemple, un salarié qui habite en France, donc résident français, traverse quotidiennement la frontière Suisse pour travailler au sein d'une entreprise Suisse, et retraverse la frontière le soir vers son pays de résidence, la France.

En principe, le travailleur frontalier est affilié à la Sécurité sociale du pays dans lequel il exerce son activité professionnelle.

Ainsi, si un salarié réside par exemple en Lorraine mais qu'il traverse régulièrement la frontière pour travailler au Luxembourg, il dépendra de la Caisse Nationale de Santé (CNS), qui est l'équivalent de la CPAM au Luxembourg.

Cependant, en tant que travailleur frontalier, ce salarié a la possibilité d'obtenir le remboursement de soins de santé effectués dans le pays d'emploi ou en France. Pour pouvoir s'affilier à la Sécurité sociale française, il est nécessaire de demander un formulaire S1 à l'organisme d'assurance maladie du pays dans lequel il exerce son activité professionnelle. Les remboursements s'effectueront alors sur la base des tarifs en vigueur dans le pays dans lequel les soins ont été dispensés.

27

Cependant, en raison de la crise de la COVID-19, de nombreux travailleurs frontaliers ne sont plus en mesure de traverser la frontière pour exercer leur activité professionnelle.

Ainsi, ils télétravaillent depuis leur pays de résidence pour le compte de leur employeur situé de l'autre côté de la frontière.

Si cette situation n'est pas de nature à faire perdre au salarié son statut de travailleur frontalier, au moins sur le plan de la sécurité sociale (nous reviendrons sur le plan fiscal plus tard, problématique à cet égard), une problématique émerge néanmoins : en principe, le salarié est affilé auprès de la sécurité sociale du pays dans lequel il exerce son activité professionnelle. Pour notre salarié qui traverse la frontière quotidiennement pour travailler au Luxembourg, ce dernier est donc affilié à la sécurité sociale Luxembourgeoise car il y exerce son activité professionnelle. Or, pendant le confinement, il ne traverse plus la frontière et effectue son activité professionnelle en France (télétravail). Il devrait donc être affilié à la sécurité sociale française, car il y exerce son activité.

Face à ce risque, le 13 aout 2020, la Direction de la Sécurité Sociale, en concertation avec les autorités nationales des États membres frontaliers, a adopté une mesure en vertu de laquelle le salarié restera affilié au régime de sécurité sociale du pays où il exerce habituellement son activité professionnelle.

Ainsi, notre salarié restera affilié à la sécurité sociale Luxembourgeoise, même s'il télétravaille depuis la France. Cette mesure a vocation à s'appliquer jusqu'à la date du 31 décembre 2020. Aucun formalisme particulier n'est exigé pour régulariser la situation.

Cette mesure s'applique aussi bien au salarié frontalier qu'au salarié détaché dans un pays État de l'UE/EEE/Suisse. Concernant ces salariés détachés, rappelons qu'en application du dispositif de détachement en droit de l'Union Européenne, ces derniers restent affiliés à la sécurité sociale française, bien qu'ils soient détachés dans un pays étranger pour y exercer leur activité professionnelle. En vertu de cette mesure, ces travailleurs détachés demeureront affiliés à la sécurité sociale française.

Notons qu'hors de l'UE, d'autres pays ont adopté des mesures analogues pour les frontaliers. Ainsi, la Sécurité sociale suédoise a accepté avec son homologue Danois une mesure de neutralité en matière de couverture sociale : si un salarié vit en Suède et travaille habituellement au Danemark, sa situation de sécurité sociale ne sera pas affectée s'il doit rester en Suède pour télétravailler et réciproquement.

28

C) Le cas des expatriés français de retour en France pour motif impérieux

En raison de la crise sanitaire, des français résidents à l'étranger (expatriés français) sont de retour en France temporairement pour motif impérieux (COVID-19). De retour en France, ceux-ci continuent de travailler pour leurs employeurs non-résidents en télétravail.

Se pose la question de la protection sociale du salarié non-résident de retour en France temporairement.

En effet, l'expatrié est en principe affilié au système de sécurité sociale de son pays de résidence habituelle dans lequel il travaille. De retour en France, il exerce son activité professionnelle via du télétravail. Or, nous savons qu'en vertu du principe de territorialité, une personne est affiliée au système de sécurité sociale du pays dans lequel est exercé son activité professionnelle (hors cas de détachement).

Quel sera l'impact sur l'affiliation du salarié ?

Le CLEISS s'est fendu d'une notice sur son site internet afin de clarifier cette situation. D'après cet organisme, le français non-résident de retour en France reste rattaché au système de sécurité sociale du pays de résidence habituel.

En ce qui concerne la prise en charge de ses prestations sociales, si le salarié est amené à recevoir des soins en France, le salarié sera couvert soit par sa caisse d'assurance maladie étrangère (si un accord de sécurité sociale entre la France et son État de résidence le permet), soit par la Caisse des Français de l'Étranger (CFE - s'il y contribue), soit par son assurance maladie privée ou encore, s'il est retraité du système français, par le CNAREFE (Centre National des Retraités de France à l'Étranger) ou la CPAM de Tours.

Ainsi, nous l'avons vu, la question de l'affiliation à la sécurité sociale du télétravailleur international est un enjeu majeur à prendre en compte pour l'employeur. En effet, cette affiliation (ou non affiliation dans le cas du télétravail sauvage) peut avoir de graves conséquences pour le salarié.

A l'occasion de l'exécution de son contrat de travail, le salarié en situation de télétravail international, comme tout salarié, est sujet à un accident du travail. Cependant, en raison de sa situation, la question de sa prise en charge au titre de l'accident du travail se pose.

29

II) Télétravail international et Accident du travail : un risque de non prise en

charge pour le salarié ?

En droit, en cas d'accident du travail, le principe est posé par l'article L.411-1 du code de la sécurité sociale, qui dispose qu'« est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise. »

Pour bénéficier de cette présomption et donc d'une prise en charge, le salarié, ou ses ayants droit en cas d'accident mortel, devront démontrer que l'accident a eu lieu sur le temps et au lieu du travail. Même si le salarié se trouvait chez lui lors de l'accident, il peut tout de même rapporter cette preuve s'il démontre qu'il était alors encore soumis à un lien de subordination vis-à-vis de son employeur.

Comme en matière de temps de travail, la jurisprudence a une conception extensive de la notion de lieu de travail. Par lieu de travail, il ne faut donc pas entendre exclusivement le poste de travail occupé par le salarié. Il s'agit de l'ensemble de l'entreprise et de ses dépendances et, plus généralement, tous les lieux où l'employeur exerce son contrôle et sa surveillance.

En réalité, la principale question est celle de savoir si, dans le lieu où l'accident est réalisé, le salarié était toujours sous l'autorité et le contrôle de l'employeur. Dans l'affirmative, l'accident sera un accident du travail : pour que le caractère professionnel soit écarté, il faut donc que soient établies les conditions qui font que le salarié a échappé à cette autorité25.

Ainsi, deux situations sont à distinguer.

Si le salarié télétravaille depuis l'étranger, et que le contrat de travail du salarié ne le précise pas expressément et indique toujours comme lieu de travail le siège de l'entreprise (télétravail sauvage), tout accident survenant à son domicile dans le pays d'accueil ne sera

25 Cass. soc., 20 févr. 1980, no 79-10.593

30

donc pas considéré comme ayant eu lieu sur son lieu de travail tel qu'il est prévu par son contrat de travail.

Cependant, le salarié pourra démontrer qu'il était sous l'autorité et le contrôle de son employeur à ce moment-là car il télétravaillait. Il faudra par exemple rapporter l'existence de directives pendant qu'il télétravaille chez lui, et prouver qu'il est sous le contrôle de son employeur (mail, messages, visio-conférence...). Si le salarié ne rapporte pas cette preuve, il s'expose à ne pas être pris en charge au titre d'un accident du travail.

Si à l'inverse le télétravail international est prévu dans le contrat de travail, il faut se référer à l'article L. 1222-9 du Code du travail qui confirme que l'accident « survenu sur le lieu où est exercé le télétravail » est présumé être un accident du travail, sauf si l'employeur démontre l'absence de lien entre l'accident et le travail (par exemple un salarié se brûle pendant le télétravail alors qu'il est censé travailler sur ordinateur).

Ainsi, le salarié en situation de télétravail international ne sera pas forcément couvert en cas d'accident du travail s'il s'agit d'un télétravail « sauvage », sans modification du contrat du travail du salarié par un avenant qui préciserait ses nouvelles conditions de travail, et notamment le fait qu'il télétravaille depuis le pays d'accueil.

Bien souvent, le salarié n'est pas conscient des conséquences du télétravail sauvage, notamment en ce qui concerne l'étendu de sa couverture santé. Pourtant, nous allons le voir, l'employeur a une obligation d'information à cet égard, et s'expose à des sanctions en cas de manquement.

Section II : L'obligation d'information de l'employeur sur l'étendue de la couverture santé du salarié en situation de télétravail international

En droit, les articles 2 et 4 de la directive 91/533/CEE du conseil de l'Europe du 14 octobre 1991 qui traitent de l'obligation de tout employeur d'informer les travailleurs sur les conditions applicables au contrat ou à la relation de travail, énoncent les informations devant être données aux travailleurs en général (article 2) et les informations supplémentaires devant être données aux expatriés avant leur départ en expatriation (article 4). Ce deuxième article a été repris tel quel dans le code du travail à l'article R1221-10.

31

Au vu de ces textes, et du principe d'exécution de bonne foi du contrat de travail, la jurisprudence a mis à la charge des entreprises une obligation d'information spécifique sur les employeurs vis-à-vis des salariés travaillant à l'étranger quant à leur régime de protection sociale et à leur régime de retraite26.

Elle a ainsi sanctionné un employeur pour ne pas avoir informé un expatrié avant son départ des conditions dans lesquelles il cotiserait pour son compte aux divers organismes sociales au titre des garanties retraite et chômage.

La Cour a précisé que l'employeur est tenu de délivrer une information claire et exhaustive permettant à l'expatrié d'apprécier l'étendu de la couverture sociale dont il bénéficie. En outre, il doit informer le salarié sur la nécessité, le cas échéant, de recourir volontairement, et à ses frais, à des garanties non couvertes pendant son expatriation (par exemple en adhérant à la CFE ou à une mutuelle internationale).

Certaines conventions collectives viennent renforcer cette obligation d'information, par exemple la convention collective nationale des cadres des travaux publics du 20 novembre 2015 à l'article 6.2.4. Cet article dispose que pour toute expatriation excédant 3 mois, un avenant au contrat de travail doit être conclu, qui précise notamment la couverture retraite (sécurité sociale ou régime équivalent et régimes complémentaires) et la couverture prévoyance (invalidité, décès, accidents du travail, maladie et accidents, perte d'emploi).

Ainsi, l'employeur qui ne satisfait pas à cette obligation d'information s'expose à une sanction. Imaginons par exemple que l'employeur accepte qu'un salarié télétravaille de manière sauvage depuis l'Espagne, sans l'informer qu'il ne sera plus couvert par la sécurité sociale française, et que ses frais de santé en Espagne ne seraient donc pas couverts, à moins d'adhérer à la CFE et éventuellement à une mutuelle internationale. Cet employeur s'exposera donc à des sanctions.

La Cour de cassation juge de manière constante que le manquement à l'obligation d'information de l'employeur à son salarié au regard de sa protection sociale pendant son expatriation cause un préjudice au salarié consistant en une perte de chance de s'assurer volontairement contre le risque27.

26 Cass soc. 19 juin 2013, 12-17.980

27 cass. Soc. 25 janvier 2012, n°11-11.374

32

En l'espèce, le salarié reprochait à son employeur de ne pas l'avoir informé que son activité ne donnait pas lieu au versement de cotisations au régime général de retraite et de ne pas l'avoir averti qu'il pouvait y adhérer volontairement ; la Cour d'appel a alloué au salarié une somme de 100 000 euros de dommages et intérêts au seul titre de la perte de chance de cotiser lui-même à une assurance volontaire. Le pourvoi de l'employeur a été rejeté.

L'absence de cotisations au régime général de retraite, et l'absence d'assurance volontaire comme la CFE par le salarié, est un contentieux classique en matière de mobilité internationale. Le salarié de retour en France, au moment de son départ à la retraite, se rend compte qu'il n'a pas cotisé au régime général (et éventuellement de retraite complémentaire et supplémentaire) de retraite pendant toute la durée de son expatriation, ce que l'employeur ne lui avais pas indiqué, et il n'avait par conséquent adhérer à aucune assurance volontaire comme la CFE, qui lui aurait permis de cotiser au régime général de retraite, sans compter les assurances pour une éventuelle cotisation à un régime de retraite complémentaire ou supplémentaire.

Si l'expatriation a durée plusieurs années, le manque à gagner pour le salarié peut être conséquent, et par conséquent l'employeur s'expose à devoir payer une somme importante de dommages et intérêts au salarié au titre d'une perte de chance.

Ainsi, si l'employeur permet au salarié de télétravailler depuis un pays étranger sans l'informer de l'étendu de sa couverture sociale dans le pays d'accueil il peut être lourdement sanctionné.

Nous l'avons vu, le télétravail international, comme toute mobilité internationale, est d'ores et déjà loin d'une pratique caractérisée par une absence de formalités, notamment en droit social. Comme un départ d'un salarié en expatriation ou en détachement, le télétravail international doit être préparé en amont, par l'employeur comme le salarié.

Toutefois, le droit social n'est qu'une partie des enjeux de mobilité internationale applicables au télétravail international. Les enjeux migratoires et surtout fiscaux sont de taille, à plus forte raison en raison de la crise sanitaire actuelle, qui a fait émerger de nombreuses problématiques.

: LE TELETRAVAIL

INTERNATIONAL ET LES AUTRES ENJEUX DE MOBILITE INTERNATIONALE

DEUXIEME PARTIE

Dans cette seconde partie, nous allons aborder les enjeux fiscaux et migratoires du télétravail international, qui sont, au même titre que le droit social, des enjeux majeurs de mobilité international et donc du télétravail international. Enfin, nous verrons le mécanisme du portage salarial international, qui semble être une solution aux risques et enjeux du télétravail international.

Chapitre premier : Les enjeux fiscaux du télétravail
international

Comme nous l'avons vu, le télétravail international est une pratique de plus en plus développée du fait d'une demande croissante de la part des salariés, qui souhaitent choisir leur lieu de travail, souvent à l'étranger.

La pandémie mondiale de la COVID-19 a fait apparaître de nombreuses interrogations sur les questions de résidence fiscale des salariés qui sont actuellement bloqués à l'étranger et qui télétravaillent pour leur employeur, ce qui constitue une situation de télétravail international contrainte.

Ainsi, que le télétravail international soit le résultat d'une volonté du salarié ou imposé par les mesures de confinement, il convient d'étudier les incidences fiscales du télétravail international. En effet, cette modification du lieu de travail a, comme nous allons le voir, des incidences fiscales, que soit sur le plan de la fiscalité personnelle ou des entreprises. Pour cela, nous verrons dans un premier temps les incidences sur le plan de la fiscalité personnelle du salarié, puis dans un second temps sur le plan de la fiscalité des entreprises.

33

Section I : La fiscalité personnelle du télétravailleur international

34

Dans une première section, intéressons-nous à l'enjeu de la fiscalité personnelle du télétravailleur international, et notamment sur la détermination de la résidence fiscale et donc du paiement de l'impôt sur le revenu du télétravailleur.

I) L'impact du télétravail international sur la résidence fiscale des salariés

A) Le risque de conflit de résidence

En principe, pour déterminer la résidence fiscale d'un individu, il faut se référer aux critères de droit interne du pays dans lequel il réside ou exerce son activité professionnelle.

Pour un salarié qui réside ou travaille en France, il faut donc se référer aux dispositions fiscales françaises et au CGI, ce qui ne pose pas problème.

Imaginons maintenant que notre salarié français, célibataire et sans enfants, en cours d'année, décide de s'installer en Espagne afin d'y télétravailler pour son employeur français.

La question de sa résidence fiscale pose question, car étant donné qu'il travaille en Espagne, il faut se référer aux règles espagnoles de détermination de résidence fiscale. Or, ces dernières peuvent considérer que notre salarié est également résident fiscal espagnol.

Nous faisons donc face à un conflit de résidence, car les droits internes des deux pays considèrent le salarié comme résident fiscal, et donc redevable de l'impôt. Il conviendra donc, afin d'éviter une double imposition pour le salarié, de se référer à la convention fiscale conclue entre l'Espagne et la France.

Cette convention fiscale déterminera la résidence fiscale du contribuable selon des critères communs. Pour faire application d'une convention fiscale signée par la France, il est donc généralement nécessaire, comme nous l'avons vu, que la personne concernée réponde aux critères français de domiciliation fiscale (en effet, pour qu'il y ait un conflit de résidence il faut que le salarié réponde aux critères français de domiciliation fiscale qui font de lui un résident fiscal français, en plus d'être résident fiscal du pays d'accueil). Ce n'est qu'à partir de cet état de fait qu'un conflit de résidence peut intervenir entre la France et l'autre État28.

Cette convention ne permettra pas nécessairement de trancher la résidence fiscale du salarié, mais elle permettra au moins de déterminer le droit d'imposer de chaque État afin

28 CE 17 mars 1993, n° 85894

35

d'éviter que le salarié soit face à une situation de double imposition (imposé par les deux pays, ce qui évidemment représenterait une charge importante pour le salarié) ou au contraire une absence d'imposition (imposé par aucun des deux pays).

Afin d'illustrer nos propos, étudions le cas de la convention fiscale qui lie la France à l'Espagne. Reprenons notre exemple, un salarié français, célibataire et sans enfants, qui décide de s'installer en Espagne afin d'y télétravailler, en septembre 2019. Quelle sera sa résidence fiscale au titre de l'année 2019 ?

Pour répondre à cette question, comme nous l'avons vu, il faut tout d'abord étudier les critères de résidence de droit interne, pour caractériser un éventuel conflit de résidence fiscale.

En droit fiscal espagnol29, est considérée comme résidente fiscale au titre de l'année en cours :

- Toute personne qui y séjourne pendant une période supérieure à 183 jours au cours de l'année civile ;

- Toute personne qui y a établi le centre principal ou la base de ses activités ou intérêts économiques (directement ou indirectement).

En l'espèce, notre salarié qui s'installe en Espagne y établit la base de ses intérêts économiques, car c'est depuis l'Espagne qu'il va exercer son activité professionnelle.

Il peut donc être considéré comme résident fiscal Espagnol au titre de l'année 2019.

En droit français30 , est considérée comme ayant son domicile fiscal en France toute personne remplissant l'une conditions suivantes :

- Avoir en France son foyer ou son lieu de son séjour principal. Le lieu de séjour principal ne peut être retenu que dans l'hypothèse où le contribuable ne dispose pas d'un foyer ;

- Exercer en France à titre principal une activité professionnelle, salariée ou non, sauf si cette activité n'y est exercée qu'à titre accessoire ;

- Avoir en France le centre de ses intérêts économiques

29 Article 9.1 de la loi relative à l'impôt sur le revenu des personnes physiques - IRPF

30 CGI art.4 B, 1; BOFIP-IR-CHAMP-10-28/07/2016

36

Notre salarié étant parti en Espagne septembre 2019, il a passé la plus grande partie de cette année-là en France, il y a donc son lieu de séjour principal.

Ainsi, pour la période de septembre à décembre 2019, notre salarié est à la fois considéré résident fiscal espagnol et français eu égard aux droits internes des deux pays. Il s'agit donc d'un conflit de résidence, le salarié fait face à un risque de double imposition : en application des droits internes français et espagnols, le salarié étant considéré résident fiscal des deux pays, il doit en principe payer l'impôt sur le revenu sur ses revenus de 2019 dans les deux pays.

Il faut donc se référer à la convention fiscale liant la France à l'Espagne31 pour déterminer l'état compétent en matière de résidence fiscale.

La convention liste les critères de résidence en droit interne de deux pays, et précise qu'il s'agit de critères alternatifs : si le critère est rempli dans les deux états, il convient de passer au critère suivant, et ainsi de suite, afin de trancher sur la résidence, jusqu'à arriver à un critère qui n'est rempli que par l'un des deux pays signataire à la convention, qui sera alors l'état compétent pour imposer le salarié. Les critères de la convention sont les suivants :

« - une personne est considérée comme un résident de l'État où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent ; si elle dispose d'un foyer d'habitation permanent dans les deux États, elle est considérée comme un résident de l'État avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits (centre des intérêts vitaux) ;

- si l'État où cette personne a le centre de ses intérêts vitaux ne peut pas être déterminé, ou si elle ne dispose d'un foyer d'habitation permanent dans aucun des États, elle est considérée comme résidente de l'État où elle séjourne de façon habituelle ;

- si cette personne séjourne de façon habituelle dans les deux États ou si elle ne séjourne de façon habituelle dans aucun d'eux, elle est considérée comme un résident seulement de l'État dont elle possède la nationalité ;

31 La France et l'Espagne ont signé le 10 octobre 1995 une convention afin d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune. Cette convention est entrée en vigueur le 11 juillet 1997.

37

- si cette personne possède la nationalité des deux États ou si elle ne possède la nationalitéì d'aucun d'eux, les autorités compétentes des États contractants tranchent la question d'un commun accord. »

Au regard de ces critères, le salarié, célibataire et sans enfants, qui travaille en Espagne et y a donc désormais le centre de ses intérêts vitaux, doit être considéré comme résident fiscal espagnol. En effet, le premier critère de la convention n'est pas applicable : le salarié ne dispose pas d'un foyer d'habitation permanent en France ou en Espagne car il est célibataire et sans enfants. Le second critère précise que quand le salarié ne dispose pas de foyer d'habitation permanent, il est considéré comme résident fiscal de l'état où il séjourne de façon habituelle. Le Conseil d'Etat a récemment précisé32 que cette notion s'apprécie « au regard de la fréquence, de la durée et de la régularité des séjours qui font partie du rythme de vie normal d'une personne et qui ont donc un caractère plus que transitoire, sans qu'il y ait lieu de rechercher si la durée totale des séjours qu'elle y a effectués excède la moitié de l'année ». Ainsi, le salarié, qui habite désormais en Espagne, et y exerce son activité professionnelle, peut être considéré comme ayant son lieu de séjour habituel en Espagne, quand bien même il n'y a pas passé plus de la moitié de l'année.

L'Espagne sera donc l'état compétent pour imposer le salarié, qui est considéré comme résident fiscal espagnol, et non pas français.

Ainsi, dans tous les cas, il conviendra d'analyser la résidence fiscale des salariés en situation de télétravail international, afin d'éviter les situations de double imposition ou à l'inverse une absence d'imposition.

Si une double imposition entraine un coût important pour le salarié qui télétravaillerait depuis l'étranger, cela entraînerait également un coût pour une petite entreprise avec le paiement d'une assistance fiscale qui représenterait une charge importante.

Si l'entreprise refuse de fournir une telle assistance dans le pays d'accueil, le salarié risque d'être induit en erreur quant à sa résidence fiscale, et dès lors pourrait ne plus être en règle dans son pays d'accueil au niveau fiscal.

32 Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 16/07/2020, 436570

38

En effet, si au regard du droit interne de ce pays le salarié doit être considéré comme résident fiscal de ce pays, le salarié qui ne ferait alors pas de formalités déclaratives de ses revenus pourrait être soumis à une procédure de l'administration fiscale du pays dont il est résident fiscal.

De surcroit, le salarié en situation de télétravail sauvage, sera considéré comme résident fiscal français car au regard de l'administration fiscale le salarié exerce toujours son activité professionnelle en France et est donc résident fiscal français.

Le salarié serait donc redevable de l'impôt français et de celui du pays d'accueil, dont l'administration fiscale pourrait en plus le poursuivre en cas de non-respect de la législation fiscale locale.

Nous l'avons vu, pour déterminer la résidence fiscale d'un salarié, certains états conditionnent à cela un nombre de jours minimum (6 mois par exemple) passé dans ce pays. En raison de la crise de la COVID-19, de nombreux salariés sont contraints de télétravailler à partir d'un pays qui n'est pas celui dans lequel il travaille habituellement. Cela est-il de nature à impacter leur résidence fiscale habituelle, avec les conséquences que l'on sait ?

B) Les effets du télétravail sur la résidence fiscale du salarié

En droit interne, et pour la détermination de la domiciliation fiscale d'un individu, de nombreux pays ont pour condition un temps minimum passé sur leur sol, au-delà duquel l'individu est considéré comme étant résident fiscal de ce pays. Nous l'avons vu, l'Espagne prévoit par exemple cette condition dans son droit interne.

A cet égard, la crise de la COVID-19 peut faire émerger des risques. En effet, imaginons qu'un salarié étranger, résident fiscal de ce pays, soit bloqué en France en raison du confinement et qu'il y télétravaille. Les jours qu'il passe sur le territoire français doivent-il être décomptés dans la détermination de sa résidence fiscale ? Le salarié ferait potentiellement face à une situation de double imposition si ce décompte est effectif et qu'il devient résident fiscal français.

Face à ces risques, l'administration fiscale française a pour sa part précisé qu'un séjour temporaire en France en raison du confinement en France, ou de restrictions de

39

circulation ne devait pas avoir d'impact sur l'appréciation des critères de résidence fiscale en France.

En effet, au regard des conventions internationales, la circonstance, pour une personne, d'être retenue provisoirement en France en raison d'un cas de force majeure n'est pas de nature à la considérer, pour ce seul motif, comme y ayant établi son foyer permanent ou y ayant le centre de ses intérêts vitaux.33

De même, en plus de la France, d'autres administrations fiscales ont adopté le même type de mesure de neutralité, afin d'éviter le risque de double imposition. Par exemple, l'administration fiscale Suédoise a confirmé que si un particulier est resté plus de 6 mois en Suède de manière «involontaire» (en raison de la COVID-19), il ne deviendra pas résident fiscal suédois comme il serait devenu en temps normal, à condition que son revenu professionnel soit taxé à l'étranger (la mesure, si elle doit éviter une double imposition des revenus professionnels du salarié, ne doit pas avoir pour effet une absence d'imposition du salarié).

Par ailleurs, des mesures ont été prises pour le cas particulier des travailleurs frontaliers et transfrontaliers afin de « neutraliser » ces jours passés d'un côté ou de l'autre de la frontière jusqu'au 31 décembre 2020, comme nous le verrons par la suite.

Afin d'illustrer ces difficultés, prenons un exemple concret.

Imaginons qu'un salarié employé par une société espagnole, travaillant et vivant à Madrid, est rentré en France pendant la période du confinement afin de le passer en famille, et a donc effectué du télétravail international depuis la France pour son employeur espagnol entre le 12 mars et le 31 août 2020. Pendant cette période, la société espagnole a continué de lui verser un salaire, qui a été soumis au prélèvement à la source espagnole, du fait de son statut de résident fiscal espagnol.

La problématique qui se pose est de déterminer s'il sera toujours considéré comme résident fiscal espagnol en 2020, du fait du nombre de jours importants passés en France à télétravailler ? La réponse est oui, car comme nous l'avons vu, les jours passés en France au

33 ( www.impots.gouv.fr > je viens ou reviens en France > résidence fiscale et confinement crise covid).

40

titre du confinement n'ont pas vocation à avoir d'impact sur l'appréciation des critères de résidence fiscale. Il ne deviendra donc pas résident fiscal français et restera donc résident fiscal espagnol.

Cependant, tous les pays n'ont pas adopté de telles mesures de « neutralisation » des jours passés en leur sein en raison de la COVID-19, il conviendra donc d'étudier précisément la situation selon le pays à partir duquel télétravaille le salarié. En effet, si le pays décompte ces jours, le salarié fera alors face à un potentiel conflit de résidence, auquel cas il faudra appliquer ce qui a été vu précédemment.

De même, ces mesures ne sont que temporaires et visent expressément le confinement dû à la crise sanitaire. Si le salarié décide de télétravailler dans un pays pour sa convenance personnelle sans y être contraint par la crise, ou reste travailler en France après la crise sanitaire, les jours de présences seront évidemment décomptés, avec le même risque de conflit de résidence et de double imposition.

A présent, intéressons-nous à l'impact du télétravail international sur l'imposition des rémunérations.

II) Quel impact du télétravail international sur l'imposition des rémunérations

du salarié ?

A) Le principe : l'imposition dans l'État d'exercice de l'activité de télétravail

En droit, en ce qui concerne l'imposition des revenus provenant d'activités salariées, l'article 15 du modèle de convention fiscale OCDE pose la règle générale selon laquelle ces revenus sont imposables dans l'État où l'emploi est effectivement exercé, en d'autres termes à l'endroit où le salarié est physiquement présent lorsqu'il exerce l'activité pour laquelle il est rémunéré.

Intéressons-nous au cas où l'activité professionnelle est exercée sous forme de télétravail international : le salarié télétravaille à partir d'un pays étranger, pour le compte

d'une entreprise française, ou inversement un salarié télétravaille depuis la France pour son employeur étranger.

Dans tous les cas, la rémunération que le salarié recevra en contrepartie du télétravail international sera considérée comme ayant pour source l'État où l'activité professionnelle est physiquement exercée (y compris sous forme de télétravail).

Les revenus du télétravailleur international seront donc imposés dans le pays à partir duquel il exerce son activité de télétravail, et non pas le pays dans lequel se trouve son employeur pour le compte duquel il exerce son activité de télétravail.

Cependant, en raison du confinement, de nombreux salariés en mission à l'étranger ont été rapatriés dans leur État d'origine, dans lequel ils ont continué d'exercer leur activité professionnelle pour leur employeur en télétravail.

En vertu du principe ci-dessus, leurs revenus devraient donc être imposés dans le pays dans lequel ils ont été rapatriés car ils télétravaillent depuis cet endroit. Cette situation est génératrice d'insécurité juridique car le salarié avait ses revenus habituellement imposés dans l'état dans lequel il travaillait habituellement.

Pourtant, à ce jour, hormis le mécanisme de neutralisation des jours passés en France pendant le confinement sur la résidence fiscale que nous avons vu, aucune communication n'a été publiée par l'administration fiscale française s'agissant de l'imposition des rémunérations des salariés qui télétravaillent dans un autre État pendant la crise. Il faudra donc être vigilant sur ce point. Il convient donc de se référer à d'autre dispositions pour l'imposition de ces revenus.

B) L'exception des missions de courte durée pour le télétravail temporaire

Par exception à la règle que nous avons vu ci-avant, la rémunération reste exclusivement imposable dans l'État de résidence habituelle (dans notre cas l'état dans lequel se trouve l'employeur pour lequel le salarié télétravaille actuellement depuis la France) si les 3 conditions cumulatives suivantes sont réunies34 :

41

34 Modèle de convention OCDE, art. 15, al. 2

42

- le bénéficiaire séjourne dans l'État d'affectation pendant une période ou des périodes n'excédant pas au total 183 jours durant toute période de douze mois commençants ou se terminant durant l'année fiscale considérée ;

- les rémunérations sont payées par un employeur, ou pour le compte d'un employeur, qui n'est pas un résident de l'État d'affectation ;

- la charge des rémunérations n'est pas supportée par un établissement stable que l'employeur a dans l'État d'affectation.

Étudions l'exemple suivant afin d'illustrer ce recours aux missions de courte durée pour le télétravail temporaire.

Imaginons qu'un salarié français est détaché de septembre 2019 à décembre 2020 à Bruxelles pour travailler dans la filiale belge d'une société française. Ce dernier est célibataire sans enfant à charge, résident fiscal en Belgique et est rémunéré par cette filiale belge (il ne bénéficie pas d'un régime d'imposition des travailleurs frontaliers). Il choisit de rentrer en France le 30 octobre 2020 afin de passer le confinement en famille. Cependant, en raison du confinement et des mesures de restrictions, il se retrouve bloqué en France et dans l'obligation de télétravailler jusqu'au 1er décembre 2020 depuis la France pour le compte de la filiale belge. La question est donc de déterminer où sont imposables les rémunérations perçues par ce salarié par la société belge pendant la période du second confinement ?

Tout d'abord, il convient de rappeler, comme nous l'avons vu précédemment, qu'eu égard à la décision de l'administration fiscale française, ses jours de présence en France au titre du confinement n'ont pas vocation à modifier sa domiciliation fiscale et donc sa résidence fiscale, qui restera la Belgique.

Notons cependant que ces mesures prises par l'administration fiscales françaises n'engagent que la France, il conviendra d'étudier au cas par cas.

Toutefois, en l'absence d'autres mesures spécifiques, il conviendra de se référer à l'article des missions temporaires de la convention fiscale franco-belge pour définir le lieu d'imposition des rémunérations. Sur la base de ces critères conventionnels tirés de la convention fiscale bilatérale liant la France et la Belgique35, l'imposition des rémunérations

35 Convention fiscale franco/belge du 10 mars 1964 ; article 11

43

perçues pendant le confinement resterait attribuée à la Belgique si les conditions suivantes sont réunies :

- « 1° le bénéficiaire séjourne temporairement dans l'autre État contractant (la France) pendant une ou plusieurs périodes n'excédant pas 183 jours au cours de l'année civile ;

- 2° sa rémunération pour l'activité exercée pendant ce séjour est supportée par un employeur établi dans le premier État (Belgique) ;

- 3° il n'exerce pas son activité à la charge d'un établissement stable ou d'une installation fixe de l'employeur, situé dans l'autre État (la France) »

Les deux dernières conditions ne poseront pas problèmes dans notre cas, car le salarié restera rémunéré par son employeur belge, qui supportera ainsi la charge de ses rémunérations.

Toutefois, dans l'hypothèse où le salarié viendrait à séjourner en France plus de 183 jours sur la période concernée, le salarié ne remplirait la première des conditions qui sont cumulatives et pourrait ainsi voir ses rémunérations imposées en France.

Il faudrait des mesures d'assouplissement de l'administration fiscale française pour éviter une imposition en France qui nécessiterait par la suite une régularisation a posteriori, à plus forte raison en raison du second confinement actuel, qui pourrait faire passer ce seuil de présence de 183 jours à des nombreux salariés si ces derniers ne sont pas retournés dans le pays d'exercice habituel d'emploi à l'issu premier confinement.

Il conviendra donc d'étudier au cas par cas, pays par pays, la situation fiscale du salarié en situation de télétravail international, notamment eu égard aux mesures de tolérance adoptées par certains états, qui ne lient cependant que ces derniers et qui sont circonscrites à la situation sanitaire actuelle. Il est probable que ces mesures ne soient plus applicables à la suite cette dernière.

À ce titre, comme nous allons le voir, l'OCDE a rappelé que les situations exceptionnelles nécessitent une coordination exceptionnelle entre les États dans le but d'atténuer l'impact pour les employeurs et leurs salariés dans le cas de modifications temporaires du lieu d'exercice de l'activité, notamment dans des situations contraintes

44

consécutives à des évènements de « force majeure » qui n'était pas prévisible et qui échappent donc au pouvoir de décision des employeurs et de leurs salariés.

A présent, intéressons-nous au cas des travailleurs frontaliers. En effet, les personnes bénéficiant de ce régime fiscal particulier sont particulièrement impactées par les mesures sanitaires de confinement qui restreignent la liberté de mouvement et qui interdisent à ces derniers de traverser la frontière pour travailler. Nous allons voir que les administrations fiscales de certains pays ont adoptés des mesures afin de clarifier leur situation.

III) Télétravail international et travailleurs frontaliers à l'heure de la COVID-

19

A) Le principe d'imposition du travailleur frontalier

Les travailleurs frontaliers, de par leur spécificité, bénéficient d'un régime dérogatoire en matière d'imposition de leurs revenus et également en matière d'affiliation aux régimes de sécurité sociale, comme nous l'avons vu.

En droit, le travailleur frontalier est défini comme toute personne résidente d'un État qui exerce une activité salariée dans un autre État pour le compte d'un employeur établi dans cet autre État et qui retourne chaque jour dans son État de résidence.

Lorsqu'un travailleur se déplace dans un autre pays pour y travailler, les deux États, celui de sa résidence et celui dans lequel il exerce son activité professionnelle, peuvent prétendre au droit d'imposer le revenu perçu, conformément à leur droit fiscal interne.

Il existe donc un risque de double imposition. Il faut donc se référer à la convention fiscale liant les deux pays, et notamment au régime prévu pour les frontaliers.

En application de ce régime des travailleurs frontaliers, les salariés qui peuvent justifier de leur qualité de travailleur frontalier sont imposés sur leurs revenus provenant de leur activité professionnelle dans leur État de résidence, et non pas dans celui où ils exercent physiquement leur activité professionnelle.

45

Par exemple, un salarié de nationalité française, habitant à Annemasse, traverse la frontière Suisse tous les jours et effectue des allers-retours afin de travailler dans une entreprise située en Suisse. Le salarié a sa résidence en France, car il y habite, et exerce son activité professionnelle en Suisse.

Au regard des droits interne en termes de domiciliation fiscale, les deux pays peuvent considérer le salarié comme résident fiscal. En effet, la France peut le considérer comme résident fiscal car il y a son lieu de séjour principal. De même, la Suisse peut le considérer comme résident fiscal suisse car il y exerce son activité professionnelle.

Cependant en vertu du régime fiscal des frontaliers prévu par la convention fiscale conclue entre les deux pays, le salarié sera considéré comme un résident fiscal français exclusivement, et sera donc imposable au titre de l'impôt français sur ses revenus tirés de son activité professionnelle exercée en Suisse.

La France prévoit ce régime dérogatoire pour les travailleurs frontaliers avec la plupart de nos voisins : la Suisse, l'Allemagne la Belgique, l'Espagne et l'Italie. En revanche, il convient de noter qu'il n'en existe pas avec le Luxembourg, Monaco, Andorre, et le Royaume-Uni.

Toutefois, en raison de la crise sanitaire, des problématiques émergent quant à ce régime, puisque les salariés ne peuvent plus pour certains traverser la frontière, et sont contraints de télétravailler dans leur pays de résidence au profit de leur employeur situé de l'autre côté de la frontière, le bénéfice du régime spécifique des frontaliers peut ainsi être remis en question.

B) Les mesures des administrations fiscales face à la crise sanitaire

a) Pour les travailleurs bénéficiant du régime spécifique des travailleurs frontaliers

Dès mars 2020 et le début du premier confinement, des accords amiables ont été conclus avec l'Allemagne, la Belgique et la suisse.

Ces accords prévoyaient que les personnes bénéficiant des régimes spécifiques d'imposition, prévus pour les travailleurs frontaliers, puissent continuer à en bénéficier

46

même si elles sont contraintes de demeurer et télétravailler chez elles pendant la crise sanitaire.36 Ces accords continueront de s'appliquer jusqu'au 31 décembre 2020.37

Le principal risque est que le salarié, qui désormais travaille et réside en France, ne réponde plus aux conditions du régime spécifique des travailleurs frontaliers, qui le plus souvent précise un nombre de jours maximum travaillés dans le pays de résidence au-delà duquel le salarié ne pourra plus bénéficier du régime.

En d'autres termes, la convention peut prévoir que si le salarié, qui en temps normal traverse la frontière et travaille dans tel pays, travaille plus de X jours par an en France, il ne sera plus considéré comme un travailleur frontalier au sens du régime spécifique prévu par la convention.

Rappelons-le, ce régime prévoit que le salarié est exclusivement imposable dans son pays de résidence, c'est-à-dire la France.

Ainsi, le risque est que les revenus du salarié, tirés de son activité initialement en présentiel dans le pays frontalier, puisse être imposés dans ce pays, puisque le régime spécifique des frontaliers ne s'applique plus.

En effet, le salarié, depuis le 1er janvier 2020, traversait la frontière et travaillait dans ce pays frontalier, et bénéficiait du régime fiscal des travailleurs frontaliers.

Cependant, dès mars, contraint au télétravail en France, il ne répondait plus aux critères de ce régime. A la fin de l'année fiscale, se posera donc la question de l'imposition de ses revenus tirés de son activité dans ce pays frontalier, puisqu'il il ne bénéficiait pas du régime spécifique des travailleurs frontaliers en raison du confinement. Il y a donc un risque de double imposition.

Le pays frontalier pourrait en effet considérer que les périodes pendant lesquelles le salarié a exercé son activité sur son territoire doivent être imposés au regard de son droit fiscal interne (le pays considérerait le salarié comme résident fiscal car exerçant son activité sur son territoire) car le salarié ne bénéficie plus du régime spécifique des frontaliers, ayant dépassé par exemple le nombre de jours maximums d'exercice d'une activité hors de son territoire.

36 Communiqué de presse du 19 mars 2020, n° 2081 / 993).

37 Communiqué de presse du 31 août 2020 ; rép. Masson n° 16036, JO 24 septembre 2020, Sén. quest. p. 4351).

47

La France quant à elle, pays de résidence du salarié, le considère comme résident fiscal car il y a son lieu de séjour principal et y exerce désormais son activité professionnelle et pourrait donc l'imposer elle aussi.

En vertu de ces accords, le salarié restera donc imposé exclusivement dans son pays de résidence, la France.

Étudions l'exemple suivant :

Un salarié est résident fiscal français et exerce son activité professionnelle en Belgique dans la zone frontalière. Toutefois, en raison des mesures sanitaires, il a été contraint de télétravailler depuis son domicile en France pendant toute la durée du confinement. La question qui se pose est donc de déterminer si ce salarié est toujours éligible au régime spécifique d'imposition des travailleurs frontaliers pour l'année 2020 ?

Tout d'abord, il convient d'apporter quelques précisions sur la convention fiscale liant la France et la Belgique. En effet, l'avenant à la convention fiscale entre la France et la Belgique, signé à Bruxelles le 12 décembre 2008, modifie le régime d'imposition des traitements et salaires des travailleurs frontaliers. En effet, depuis le 1er janvier 2012, les nouveaux travailleurs frontaliers ne bénéficient plus du statut fiscal de frontalier et paient leurs impôts en Belgique. Ainsi, Seules les personnes bénéficiant du statut avant le 1er janvier 2012 peuvent conserver ce statut et continuer à payer leurs impôts en France jusqu'en 2033, à condition :

- de maintenir, de manière ininterrompue jusqu'en 2033, leur foyer d'habitation permanent dans la zone frontalière française ;

- d'exercer leur activité dans la zone frontalière belge ;

- et de ne pas sortir plus de 30 jours par année civile de la zone frontalière belge pour l'exercice de leur activité.

Les « zone frontalière » dont il est question correspondent à toutes les communes situées dans la zone délimitée par la frontière commune à la Belgique et à la France et à une ligne tracée à une distance de 20 kilomètres de cette frontière.

Supposons que notre salarié, avant la crise sanitaire, répondait à ces critères. Il est aujourd'hui contraint de télétravailler à partir de sa résidence française. Or, la troisième

48

condition précise que le salarié ne peut pas travailler plus de 30 jours hors de la zone frontalière belge. Ainsi, notre salarié, s'il a passé tout son confinement en France et y a exercé son activité via du télétravail, excède ces 30 jours. Il ne pourrait donc plus bénéficier du régime des travailleurs frontaliers.

Toutefois, comme nous l'avons vu, des accords ont été conclus entre la France et la Belgique dans le cadre de la crise sanitaire. Ces accords prévoient que les jours travaillés depuis le domicile du salarié en France pendant la période du confinement jusqu'au 31 décembre 2020 n'ont pas vocation à remettre en cause son régime d'imposition spécifique existant. Ainsi, le salarié sera exclusivement imposable en France même si le nombre de jours travaillés autorisés en dehors de la zone frontalière en Belgique n'est pas respecté.

b) Les mesures pour les travailleurs ne bénéficiant pas du régime spécifique des travailleurs frontaliers

A côté des travailleurs bénéficiant de ce régime particulier, il a fallu clarifier la situation des travailleurs frontaliers qui n'en bénéficiaient pas.

Leur situation est la même : notre salarié de nationalité française et habitant près de la frontière Luxembourgeoise fait des allers-retours quotidiens au Luxembourg afin d'y travailler. Notre salarié réside en France, et exerce son activité professionnelle au Luxembourg.

Au regard des droits internes des deux pays, il peut être considéré comme résident fiscal des deux pays. Nous sommes donc face à un conflit de résidence.

Or, nous l'avons vu, il n'existe pas, dans la convention fiscale liant la France au Luxembourg du 20 mars 2018, de régime spécifique de travailleur frontalier.

Cette convention fiscale liant ces deux pays, prévoit, pour un travailleur résident en France qui travaille au Luxembourg (allers-retours quotidien), l'imposition au Luxembourg pour le revenu tiré d'une activité effectuée dans ce pays.

Du fait de la crise sanitaire, le salarié est bloqué en France et doit télétravailler pour le compte de son employeur Luxembourgeois.

La convention fiscale prévoit une période maximale de 29 jours pendant laquelle le salarié peut travailler en France sans remettre en cause sa résidence fiscale Luxembourgeoise. Au-delà, le salarié redeviendrait résident fiscal français, car il serait alors

49

résident et exercerait son activité professionnelle en France, il n'y aurait donc plus de conflit de résidence, il serait résident fiscal français exclusivement.

Ainsi, des accords ont été passés entre ces pays.

En substance, ces derniers prévoient que les jours (télé)travaillés à domicile dans le pays de résidence en raison des mesures de confinement, pourront, sur option, être considères comme des jours travaillés dans l'État où les personnes concernées exercent habituellement leur activité et donc y demeurer imposables.

Concernant le Luxembourg, pour reprendre notre exemple, un accord a été conclu le 16 juillet 2020 entre les deux pays afin que la période comprise entre le 14 mars 2020 et le 31 août 2020 inclus, pendant laquelle le salarié télétravaille depuis la France, ne soit pas considérée comme des jours travaillés en France pour le décompte des 29 jours pendant lesquels le salarié peut travailler en France sans remettre en cause sa résidence fiscale Luxembourgeoise. L'accord est prolongé le 27 août 2020, étendant cette période de neutralisation jusqu'au 31 décembre 2020 inclus. Le salarié demeure ainsi résident fiscal français.

Ainsi, en conclusion de cette section, nous avons vu que la pandémie de la COVID-19 a contraint de nombreux gouvernements à adopter des mesures strictes de confinement, restreignant ainsi la liberté d'aller et venir de ses ressortissants.

Ce type de mesure a donc impacté de nombreux salariés, parmi lesquels se trouvaient des salariés en situation de télétravail international ou contraint de le devenir.

En effet, les travailleurs frontaliers par exemple, qui traversaient la frontière pour aller travailler, se retrouvent dans l'incapacité physique d'exercer leurs fonctions dans le pays d'emploi, et sont donc contraint de télétravailler à partir du pays dans lequel ils sont confinés, au profit d'une société étrangère. Ils sont donc en situation de télétravail international.

De même, certains salariés qui travaillaient habituellement dans un pays étranger au profit d'une société étrangère se retrouvent bloqués dans un pays qui n'est pas leur pays de résidence, contraint de télétravailler pour leur société d'emploi.

Ces éléments de dimension internationale soulèvent de nombreuses problématiques fiscales, auxquelles les États concernés ont répondu, pour le moment, en adoptant des

50

mesures temporaires visant à neutraliser les effets de la pandémie sur la résidence fiscale et l'imposition des salariés en situation de télétravail international du fait de la pandémie.

Toutefois, les salariés ne sont pas les seuls concernés par cet enjeu fiscal. En effet, nous allons le voir, les entreprises font également face à des risques en la matière, du fait du télétravail international, choisi ou contraint, de certains de leurs salariés.

Le secrétariat de l'OCDE, dont les modèles sont adoptés dans la plupart des conventions fiscales internationales, est donc intervenue38 pour formuler des instructions sur cette problématique fiscale, afin que la situation exceptionnelle n'entraine pas de conséquences fiscales néfastes pour les employeurs.

Ces instructions visent donc la question du lieu de résidence fiscale des entreprises dont la gestion est assurée dans un autre pays en raison des restrictions de déplacement et des mesures de confinement et qui pourrait donc constituer un établissement stable, ce qui emporte des conséquences fiscales.

Section II : Les enjeux fiscaux pour l'entreprise ayant un salarié en
télétravail international

Les entreprises craignent que le fait que certains de leurs employés soient, en raison des mesures sanitaires, confinés et bloqués dans un autre pays que celui dans lequel ils travaillent régulièrement et télétravaillent actuellement dans cet autre pays, n'ait pour conséquence la création d'un établissement stable dans ce pays, ce qui imposerait à l'entreprise des obligations déclaratives et fiscales dans ce pays, notamment en termes d'impôt sur les sociétés.

En droit, la notion d'« établissement stable » désigne généralement soit une installation d'affaires présentant un caractère fixe et ayant une activité propre en France, soit un agent indépendant en France qui accomplit des actes au nom pour le compte de la société, l'engageant par la même.

38 « Conventions fiscales et impact de la crise du COVID-19 : Analyse du secrétariat de l'OCDE », version du 3 avril 2020

51

En droit interne français, c'est le critère « d'entreprise exploitée en France » qui est retenu en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés, et qui reprend les critères de l'établissement stable.

Ainsi, l'exercice habituel d'une activité est ainsi caractérisé par trois critères, qui ne sont pas cumulatifs :

- L'exploitation d'un établissement en France ;

- La réalisation en France d'opérations par l'intermédiaire d'un représentant dépendant ;

- La réalisation d'opérations formant un cycle commercial complet.39

Ainsi, l'établissement stable est une notion développée en premier lieu par chaque État souverain puis, dans le cadre des conventions internationales pour déterminer le lieu d'imposition d'une activité opérationnelle exercée par une entreprise dans un État autre que celui du lieu de son siège.

Par exemple, lorsqu'une entreprise établie en France, exerce une activité en Italie par l'intermédiaire d'un établissement stable, qui sera caractérisé par les critères que nous allons détailler (un agent indépendant par exemple), l'Italie sera en droit d'imposer les bénéfices réalisés par cet établissement stable.

Selon le modèle OCDE pour les conventions fiscales, qui est repris par une grande majorité de conventions fiscales, la définition de l'établissement stable est établie sur deux critères : l'installation fixe d'affaires et l'agent dépendant.

La notion d'agent dépendant est définie comme suit : «en l'absence d'une installation fixe d'affaires, un établissement stable peut être caractérisé par la présence d'un agent représentant l'entreprise dans un autre État. Cet agent, personne physique ou morale, traite les contrats au nom de l'entreprise et exerce son activité dans les domaines caractéristiques de l'existence d'un établissement stable »40

39 BOFIP, IS - Champ d'application et territorialité - Détermination du lieu d'imposition des entreprises dont le siège est situé hors de France

40 BOFIP, NT - Dispositions communes - Droit conventionnel - Modalités d'imposition au regard du droit conventionnel - Bénéfices des entreprises

52

Étudions donc les différentes situations qui pourraient potentiellement conduire à la reconnaissance d'un établissement stable, et aux solutions qui ont été retenues par l'OCDE afin de limiter au maximum cette reconnaissance, due à une situation de force majeur caractérisée par la crise sanitaire, qui peut avoir des conséquences importantes pour les entreprises sur le plan fiscal.

I) Le risque de la reconnaissance d'un établissement stable

A) Le salarié en situation de télétravail international : un bureau situé au

domicile ?

Tout d'abord, imaginons un cas classique causé par la crise sanitaire : un salarié français expatrié aux États-Unis, a décidé ou a été contraint de rentrer en France en raison des mesures sanitaires. Il décide donc de travailler en télétravail depuis son domicile français. Le fait que le salarié exerce, en raison de la crise sanitaire, son activité professionnelle à domicile, dans un pays qui n'est pas celui de son lieu d'activité professionnelle habituelle, peut-il conduire à la reconnaissance d'un bureau situé à ce domicile, et donc à la reconnaissance d'un établissement stable pour son employeur ?

En droit, un établissement stable doit présenter un certain degré de permanence et être à la disposition d'une entreprise pour être considéré comme une installation fixe d'affaires par l'intermédiaire de laquelle une entreprise exerce tout ou partie de son activité.

Le paragraphe 18 des Commentaires sur l'article 5 (qui aborde la notion d'établissement stable) du Modèle de Convention fiscale de l'OCDE précise que, « même si l'activité d'une entreprise peut être exercée pour partie dans des locaux tels qu'un bureau situé au domicile d'une personne, ceci ne devrait pas conduire à la conclusion que ces locaux sont mis à la disposition de l'entreprise simplement parce qu'ils sont utilisés par une personne (notamment un salarié) qui travaille pour cette entreprise. »

L'exercice discontinu d'une activité au domicile d'un employé ne fait pas de ce domicile un endroit mis à la disposition de l'entreprise.

De plus, pour qu'un bureau situé au domicile soit considéré comme un établissement stable mis à la disposition d'une entreprise, il doit être utilisé de manière continue pour

l'exercice d'une activité d'entreprise et l'entreprise doit obliger la personne à utiliser les locaux concernés pour l'exercice d'une activité de l'entreprise.

Ainsi, pour reprendre notre cas d'espèce, pendant la crise de la COVID-19, notre salarié qui reste à son domicile pour travailler à distance le fait pour se conformer à des directives gouvernementales ; il s'agit donc d'un cas de force majeure, et non d'une obligation imposée par l'entreprise ou l'employeur.

C'est pourquoi, eu égard au caractère exceptionnel de la crise du COVID-19, et sous réserve que le télétravail ne devienne pas la norme dans la durée pour notre salarié, l'OCDE estime que le télétravail depuis son domicile français (autrement dit le bureau situé au domicile) « ne constitue pas un établissement pour l'entreprise/l'employeur, parce que cette activité ne présente pas un degré suffisant de permanence ou de continuité. »

Ainsi, le télétravail de ce salarié à son domicile ne saurait constituer un bureau situé à son domicile susceptible d'entrainer la reconnaissance d'un établissement stable pour l'entreprise.

Cependant, cette recommandation de l'OCDE, comme toutes celles qui suivront, sont la conséquence du premier confinement.

Or, nous vivons actuellement un second confinement. Le salarié qui, entre ces deux confinements, aurait décidé de continuer à télétravailler, et serait désormais bloqué dans ce domicile, pourrait potentiellement présenter un certain degré de permanence.

Il en irait de même si l'employeur, du fait de la situation incertaine, avait décidé de demander au salarié de demeurer à son domicile afin d'y télétravailler, en attendant que la situation devienne plus lisible.

Le télétravail serait alors la conséquence d'une directive de l'employeur. Ces éléments seraient de nature à reconnaître un bureau situé au domicile du salarié.

Il conviendra donc d'étudier la situation au cas par cas.

53

B) Le salarié en télétravail international : un agent indépendant ?

Penchons-nous à présent sur la problématique d'une personne travaillant temporairement à domicile pour un employeur non-résident : pourrait-elle être qualifiée d'agent indépendant dont les activités donneraient lieu à la création d'un établissement stable ?

En droit, l'article 5(5) du Modèle de Convention fiscale de l'OCDE dispose que « les activités d'un agent dépendant tel qu'un employé conduisent, pour une entreprise, à la création d'un établissement stable si l'employé conclut habituellement des contrats pour le compte de l'entreprise ». Ainsi, pour appliquer l'article 5(5), il conviendra d'évaluer si l'employé exerce ces activités de manière « habituelle ».

Dans le cadre de la crise de la COVID-19, d'après l'OCDE, il semble « peu probable qu'une activité exercée par un employé ou un agent dans un État soit considérée comme exercée de manière habituelle si la personne concernée ne travaille à domicile dans cet État que pendant une courte période dans un cas de force majeure et/ou à cause de directives gouvernementales ayant des répercussions exceptionnelles sur le cours normal de ses activités. »

De même, le paragraphe 33.1 des Commentaires sur l'article 5 de la version de 2014 du Modèle de Convention fiscale de l'OCDE prévoit que le critère selon lequel l'agent doit « habituellement » exercer des pouvoirs lui permettant de conclure des contrats signifie que la présence d'une entreprise dans un État contractant ne doit pas être simplement transitoire pour que l'on puisse considérer que l'entreprise possède dans cet État un établissement stable, et qu'elle y soit donc redevable de l'impôt.

Ainsi, dans le cadre de la crise de la COVID-19, l'OCDE estime que les personnes travaillant temporairement à domicile pour un employeur non-résident ne devraient pas être qualifiées d'agents indépendants dont les activités donneraient lieu à la création d'un établissement stable, du fait du caractère temporaire de leur activités.

Cette recommandation présente les mêmes limites que la précédente. En raison du second confinement, il conviendra d'étudier la situation au cas par cas et pour chaque salarié.

54

C) Les chantiers de constructions retardés : des établissements stables ?

55

Du fait de la crise de la COVID-19, un grand nombre d'activités exercées sur des chantiers de construction sont temporairement interrompue. En effet, le premier confinement avait mis un coup d'arrêt à l'ensemble des chantiers BTP en France.

En droit, un chantier de construction constitue un établissement stable si sa durée dépasse douze mois conformément au Modèle de Convention fiscale de l'OCDE, ou six mois conformément au Modèle de convention fiscale des Nations Unies.

Le risque est donc que ces chantiers, interrompus du fait de la crise de la COVID-19, ne dépasse ces durées et caractérisent des établissements stables, avec les conséquences fiscales que l'on sait.

D'après l'OCDE, la durée de cette interruption ne devrait toutefois « pas entrer dans le calcul de la durée d'existence d'un chantier et ne devrait donc pas entrer en ligne de compte pour déterminer si un chantier de construction constitue un établissement stable ».

Cependant, il ne s'agit là encore que d'un avis non contraignant de l'OCDE. En effet, Il est précisé au paragraphe 55 des Commentaires sur l'article 5(3) du Modèle de Convention fiscale de l'OCDE « qu'un chantier ne doit pas être considéré comme ayant cessé d'exister si les travaux ont été momentanément interrompus (les interruptions temporaires devant entrer dans le calcul de la durée d'existence d'un chantier) ».

A titre d'exemple d'interruptions, les commentaires évoquent notamment un manque de matériaux ou des difficultés de main-d'oeuvre.

Évidemment, l'OCDE ne s'est jamais penchée sur le cas de la COVID-19 comme motif d'interruption, puisque ces commentaires sont antérieurs à la crise sanitaire. Il conviendra donc de déterminer si les interruptions temporaires de chantier due à la COVID seront prises en compte dans la durée d'existence du chantier, et donc pour caractériser un établissement stable si la durée dépasse celle prévue par les textes.

Si l'avis de l'OCDE n'est pas contraignant, il convient cependant de rappeler que la plupart des conventions fiscales utilisent le modèle OCDE, qui a donc un avis légitime et qui devrait être suivi.

56

Toutefois, si la crise venait à perdurer, ce qui semble être le cas, il faudra être vigilant sur le comportement des États quant à ces préconisations, qui sont temporaires par essence et conjecturelles.

Contrairement aux deux premiers risques que nous avons-vu, ce dernier ne devrait pas être impacté par le second confinement. En effet, à l'occasion du second confinement, les chantiers BTP ont été autorisés à poursuivre leurs activités, rendant improbable un arrêt des chantiers et un dépassement important de sa durée prévue.

Jusqu'à présent, nous nous sommes essentiellement intéressés à des salariés « lambdas », contraints au télétravail dans un pays autre que celui de leur employeur. Cependant, les mesures sanitaires ont également touché de nombreux directeurs généraux et autres dirigeants d'entreprise. Du fait de leur grande mobilité, et en raison de leur emploi, il est même possible que cette catégorie ait été particulièrement impactée par la crise sanitaire et ses mesures restrictives en termes de mobilité.

II) L'impact du télétravail international sur la résidence fiscale de l'entreprise

La crise de la COVID-19 suscite des inquiétudes concernant la possibilité que le « siège de direction effective » d'une entreprise soit modifié.

En effet, certains dirigeants ont pu être dans l'incapacité de quitter un pays qui n'est pas le pays de résidence de l'entreprise. Ils continueraient cependant de télétravailler pour le compte et au nom de l'entreprise. Plus précisément, l'inquiétude porte sur le fait qu'un tel changement puisse avoir pour conséquence un changement de résidence de l'entreprise en application de la législation nationale applicable.

D'après l'OCDE, il semble peu probable que la situation créée par la pandémie de la COVID-19 entraîne un changement de résidence d'une entité en vertu d'une convention fiscale.

En effet, un changement temporaire de localisation des directeurs et dirigeants, lié à une situation exceptionnelle et temporaire provoquée par la COVID-19 « ne doit pas avoir pour effet d'entraîner de changement de résidence pour l'entité. »

57

A titre d'illustration, l'administration fiscale irlandaise a publié des instructions invitant à ne pas tenir compte de la présence d'une personne physique en Irlande - et, le cas échéant, dans une autre juridiction - dans le cas d'une entreprise par laquelle cette personne est employée en tant que directeur, dès lors qu'il est démontré que cette présence résulte de l'application des restrictions aux déplacements liées à la COVID-19.

Le principal risque est un problème de double résidence. En effet, le changement de localisation de certains dirigeants pourrait conduire les deux pays à considérer l'entité comme résidente fiscale en application de leur droit interne respectifs.

Par exemple, un dirigeant d'une entreprise américaine, bloqué en France en raison des mesures sanitaires, et qui exerce ses fonctions de dirigeant depuis la France, au nom et pour le compte de l'entreprise située aux États-Unis. L'entreprise pourrait être la fois considérée comme résidente fiscale française et américaine.

Toutefois, comme le précise les Commentaires sur les articles du Modèle de Convention fiscale de l'OCDE, les situations de double résidence sont relativement rares.

En effet, même dans les situations de double résidence d'une entité, comme pour les cas de conflit de résidence au niveau personnel, les conventions fiscales prévoient des règles de départage destinées à déterminer la résidence de l'entreprise, afin d'éviter les cas de double résidence.

Si la convention contient une disposition similaire à la règle de départage du Modèle de Convention fiscale de l'OCDE de 2017, les autorités compétentes résolvent le problème de double résidence au cas par cas d'un commun accord.

En particulier, le paragraphe 24.1 des Commentaires sur l'article 4 décrit les divers facteurs que les autorités compétentes sont censées prendre en considération pour déterminer la résidence, « tels que le lieu où les réunions du conseil d'administration ou de tout autre organe équivalent se tiennent généralement, le lieu où le directeur général et les autres dirigeants exercent généralement leur activité, le lieu où s'exerce la gestion supérieure des affaires courantes de la personne, le lieu où se situe le siège de la personne morale, etc ».

Ainsi, il semble peu probable que la résidence des entreprises soit modifiée en raison de leur dirigeants ou directeurs qui seraient contraints au télétravail dans un autre pays. Il est

58

donc conseillé que ces derniers conservent les pièces qui pourront attester que leur présence en dehors de l'état de résidence de l'entreprise est liée à la COVID-19.

III) La procédure de rescrit, une solution à l'incertitude ?

Face à cette incertitude, l'article L. 80B 6° du LPF permet à tout contribuable de bonne foi de demander à l'administration fiscale, à partir d'une présentation écrite, précise, complète et sincère de la situation de fait, afin que celle-ci apporte l'assurance qu'il ne dispose pas en France d'un établissement stable ou d'une base fixe au sens de la convention fiscale liant la France à l'État dans lequel ce contribuable est résident.

L'administration doit répondre dans un délai de 3 mois à la demande faite de bonne foi à l'appui d'un dossier très précis.

Cette possibilité est réservée au contribuable résident d'un état lié à la France par une convention fiscale internationale.

Ainsi, dans cette période d'incertitude juridique quant à l'établissement stable du fait de la COVID-19, cette procédure de rescrit apparaît comme une solution permettant d'avoir une réponse claire sur leur situation.

Nous l'avons vu, la crise la covid-19 a fait émerger de nombreuses problématiques quant au télétravail international imposé en raison des mesures sanitaires. Ces problématiques fiscales étaient aussi bien « personnelles », c'est-à-dire relative à la résidence fiscale du salarié, qu'au niveau de la résidence fiscale de l'entreprise.

Le principal risque est évidemment une procédure de redressement fiscal, de la part de l'état duquel le salarié ou l'entreprise serait devenu résident fiscal en raison de la crise, sans toujours en avoir conscience.

En France, la procédure de rescrit semble être un moyen sur pour une entreprise de s'assurer qu'elle ne possède pas d'établissement stable en France, avec les conséquences que cela emporte en termes d'obligations déclaratives et fiscales.

La fiscalité est donc l'un des enjeux majeurs du télétravail international, et plus largement de la mobilité internationale, dont elle constitue l'un des piliers.

Toutefois, il demeure un dernier enjeu : l'enjeu migratoire. En effet, avant même de se poser la question de la fiscalité applicable au salarié en situation de télétravail international,

ou de sa protection sociale, il convient de se demander si le salarié pourra « migrer » vers le pays désiré, y demeurer, et y travailler. En effet, nous allons le voir, tous les pays ne le permettent pas, et un salarié qui ne serait pas en règle serait susceptible d'être reconduit à la frontière.

Chapitre II : Les enjeux migratoires du télétravail international et la tentation du portage salarial international

Dans ce chapitre, nous allons aborder les enjeux migratoires de cette pratique qu'est le télétravail international. En effet, les grands enjeux de la mobilité internationale, à savoir la protection sociale et la fiscalité du salarié peuvent faire oublier cet enjeu migratoire, pourtant essentiel.

Plusieurs questions se posent en effet : faut-il un visa pour s'installer dans le pays souhaité, à partir duquel le salarié souhaite télétravailler ? faut-il un permis de travail pour exercer son activité de télétravail ?

Dans un second temps, nous nous intéresserons au mécanisme du portage salarial international, qui semble être une solution aux enjeux soulevés par le télétravail international.

précédent sommaire suivant










Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy



"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard