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La bonne foi dans le rapport de travail

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par oumar ben Camara
Université Lumiére Lyon2 - Master 2 2007
  

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SECTION II : La bonne foi, une limite générale au pouvoir de l'employeur

Il y a un lien indéfectible entre le pouvoir que le droit reconnaît à l'employeur et le lien juridique de subordination. Nul ne conteste que la subordination, permet à l'employeur de diriger le salarié, de faire évoluer sa tâche et qu'il conserve ainsi une certaine marge de manoeuvre129. Toutefois, il faut aussi reconnaître que le salarié ne s'engage pas à proprement parler à se subordonner. Certes, il consent par le contrat qu'il conclut à se soumettre à l'employeur dans l'exécution du travail, mais retrouve en dehors de sa tâche sous réserve du devoir général de loyauté qui pèse sur lui sa « liberté ». D'ailleurs, le salarié n'est il pas que le simple exécutant d'une obligation contractuelle ?

En s'engageant dans cette relation qui opère à la manière d'un acte condition130, en acceptant donc la subordination inhérente au contrat de travail, le salarié met son corps et son esprit au service de l'employeur pendant le temps de l'exécution de son travail. Le contrat de travail n'étant pas un contrat intuitus rei, il nécessite l'engagement de la personne du salarié pour l'exécution de la prestation.

Dès lors, comment assurer tant soit peu une intégrité morale à ce dernier dans ce rapport par essence inégalitaire ? Si c'est tout le rapport de travail tant dans sa dimension institutionnelle que sa dimension contractuelle qui est saisie par le pouvoir de l'employeur. Ce dernier doit aussi exécuter loyalement ces obligations contractuelles. La cour de cassation, à travers le standard de la bonne foi, tente d'imposer à l'employeur le respect de la personne du salarié (paragraphe 1).

127 Soc. 25 juin 2002 Bull. civ. V, n°21 1

128 Soc. 31 mai 1990, Bull. civ. V, n° 260

129 E. Dockès « La détermination de l'objet des obligations nées du contrat de travail », Dr. Soc. 1997, p.141

130 A. Jeammaud préc.

Par ailleurs, étant titulaire d'un pouvoir qui lui permet de sanctionner les manquements du salarié dans le cadre des exigences posées par le législateur et le juge, ces sanctions au-delà du fait qu'elles doivent être justifiées, doivent répondre à une « certaine éthique » (paragraphe 2).

§I : Le devoir de respecter la personne du salarié

Le contrat de travail n'est plus conçu comme un simple contrat de louage de services. Conclu en considération de la personne, l'existence de particularités propres à chacun des contractants, même si elles ne trouvent pas à s'exprimer dans le cadre de l'exécution du contrat, prennent pleinement leur place en dehors des horaires et du lieu de travail. Dans le rapport d'emploi, c'est l'exécution correcte du travail convenu qui importe et le regard porté par l'employeur sur la façon dont le salarié effectue la tâche qui lui est confiée. De fait, la première obligation tant logiquement que chronologiquement de l'employeur est de fournir du travail au salarié. Tout manquement à cette obligation engage en principe sa responsabilité contractuelle.131En outre, il doit mettre le salarié dans des conditions telles, qu'il puisse exécuter normalement la prestation convenue. Il s'agit là du respect de l'exigence de bonne foi qui pèse sur le contrat de travail. Ainsi l'employeur doit se garder de toute décision, mettant le salarié dans l'impossibilité de faire son travail. De la sorte la chambre sociale de la cour de cassation a considéré que l'employeur en « cessant de faire bénéficier à une salarié d'un avantage lié à sa fonction, l'avait mise dans l'impossibilité de travailler, ce qui caractérisait un manquement à l'exécution de bonne foi du contrat de travail132 »De même il ne peut refuser une demande de mutation fondée sur des raisons familiales, sans justifier les raisons objectives qui justifient ce refus133.En l'espèce la cour de cassation précise que le refus injustifié « portait atteinte de façon disproportionnée à la liberté de choix du domicile de la salarié et était exclusive de la bonne foi contractuelle ». S'il reste acquis, en principe que les contraintes familiales du salarié ne créent aucun devoir à l'employeur, ce dernier, d'après l'arrêt a « un devoir de réponse circonstanciée » face à une demande touchant à sa vie privée. . Il semble que la reconnaissance effective d'une vie privée attribuée au salarié construit l'opposition entre sa vie personnelle et sa vie professionnelle. Alors que la vie professionnelle concerne le domaine strict de l'exécution du contrat et les obligations qui s'y rattachent, la vie personnelle quant à elle, est plus difficile à cerner.

131 G. Couturier, préc. n°195

132 Soc. 10 mai 2006, n° 05-42.2 10

133 Soc. 24 janvier 2007, n° 05-40.639

Plus extensive que la notion de vie privée, englobant également la vie publique du salarié, le concept de vie personnelle à la différence de celle de vie privée peut trouver sa place dans l'entreprise134 et dès lors être pris en compte par l'employeur. Nul ne conteste aujourd'hui que le rapport de travail soit fortement marqué par le respect des libertés individuelles. Que l'on se situe en amont ou en aval de la vie du contrat de travail, le législateur, le juge et la doctrine s'accordent sur le fait qu'une conciliation entre le pouvoir patronal et les libertés du salarié est nécessaire pour un certain équilibre contractuel dans le rapport de travail 135.S'il existe des dispositions opératoires pour cette conciliation, l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail, présente un caractère continu.

Au demeurant, la frontière entre la vie personnelle et la vie professionnelle étant difficile à tracer, c'est au regard des exigences de la bonne foi que le juge tente de concilier l'intérêt de l'entreprise et la protection du salarié. L'ingérence de l'employeur dans la vie personnelle du salarié doit pouvoir trouver une justification inhérente à l'entreprise et aux nécessités de celle-ci. Et la distinction entre vie professionnelle et vie extraprofessionnelle est alors délimitée par ce que l'employeur et le salarié sont en droit d'exiger du contrat. « Il faut donc admettre qu'il existe dans la vie professionnelle elle-même un aspect privé qui participe de la protection de la vie privée : la subordination juridique subie dans la relation de travail ne sèvre pas le salarié de vie privée dans l'entreprise.136 ».Ainsi, on comprend qu'à travers le standard de la bonne foi contractuelle que le juge tente d'imposer à l'employeur un comportement respectueux da la personne du salarié. De la sorte « si l'employeur a le droit de contrôler et surveiller l'activité des salariés pendant le temps de travail, tout enregistrement quels qu'en soient les motifs, d'images ou de paroles à leur insu, constitue un mode de preuve illicite 137». Il en résulte qu'admettre l'existence de ce contrôle patronal ne permet pas de justifier une entrave à la vie personnelle du salarié. « La loyauté ne valide pas la dissimulation qui a pour but de trahir le salarié ou de permettre la révélation d'éléments qu'il taisait volontairement ou involontairement138 ». Dans le même sens, la chambre sociale de la cour de cassation a précisé que « la loyauté qui doit présider aux relations de travail interdit le recours à l'employeur à des artifices et stratagèmes pour placer le salarié dans une situation qui puisse ultérieurement lui être imputée à faute139 ». Quand bien même les faits se sont déroulés dans l'entreprise, il semble qu'un degré d'intimité soit accordé au salarié. La vie

134 Ph. Waquet, « Vie personnelle et vie professionnelle du salarié », CSPB, 1994, n°64

135 J. Pelissier, A. Supiot, A. Jeammaud, préc. n°877

136 N. Pourias-Rexand préc. p286

137 Soc. 20 novembre 1991, Bull. civ. V, n° 519

138 N. Pourias-Rexand préc. p.304

139 Soc. 16 janvier 1991 Bull. civ. V, n° 15

privée du salarié semble bénéficier d'une protection particulière accrue. La chambre sociale de la cour de cassation dans l'arrêt Nikon140, alors même que des données relatives à la vie privée du salarié n'étaient pas en cause, affirme clairement que le principe du respect de celleci puisse justifier, à travers le secret de correspondances, l'interdiction faite à l'employeur de prendre connaissance de messages personnels émis par le salarié ou reçus par lui par courrier électronique. Il s'agit de garantir tant soit peu l'autonomie du salarié dans son rapport de subordination avec l'employeur et donc de donner une certaine immunité au contenu des correspondances. Au final, il semble qu'avec l'arrêt du 18 mai 2007, la cour régulatrice soit revenue à une conception plus rigoureuse de la vie privée car elle ne permet pas à l'employeur, de quelque manière de tirer une conséquence d'un fait relevant de la vie privée du salarié peu importe ses éventuelles répercussions dans l'entreprise. La chambre mixte précise que « l'employeur ne pouvait pas, sans méconnaître le respect dû à la vie privée du salarié, se fonder sur le contenu d'une correspondance privée pour sanctionner son destinataire141 ». Il en résulte qu'un trouble objectif dans le fonctionnement de l'entreprise ne doit plus permettre en lui-même, d'après cet arrêt de prononcer une sanction disciplinaire à l'encontre de celui par lequel il est survenu. En conséquence, le trouble peut certes toujours justifier la rupture du contrat mais en dehors du terrain disciplinaire.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon