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Le droit de l'OMC dans le sillage du commerce des aéronefs civils

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par Simon TURMEL
Université Montesquieu Bordeaux IV - Master 2 Droit international 2006
  

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2.2 Un résultat et des conséquences incertains

Les Communautés européennes ont présenté une demande d'ouverture de consultations avec les États-Unis le 6 octobre 2004263(*). Les États-Unis ont fait de même avec les CE, également le 6 octobre 2004264(*). Les consultations, de part et d'autre, n'ont pas permis de solutionner le différend. Le 31 mai 2005, les CE ont demandé l'établissement d'un groupe spécial. L'ORD a toutefois reporté cet établissement et des consultations supplémentaires ont été tenues le 27 juin 2005. Un groupe spécial a été établi lors de la réunion de l'ORD du 20 juillet 2005 et sa composition a été arrêtée le 17 octobre 2005265(*). Les États-Unis ont procédé, pour leur part, à la demande d'établissement d'un groupe spécial le 31 mai 2005266(*). Le 17 octobre 2005, la composition du groupe spécial a été arrêtée267(*).

Les deux parties ont procédé à des demandes de consultations supplémentaires à la suite de la composition des deux groupes spéciaux268(*). À la suite de ces nouvelles consultations, tant les CE que les États-Unis ont demandé à nouveau, sur la base des nouveaux renseignements collectés lors des consultations additionnelles qui ont été tenues, l'établissement de groupes spéciaux. À peu de détails près, les allégations dans ces nouvelles demandes d'établissement de groupes spéciaux sont les mêmes, simplement parfois avec un peu plus de détails. Il semble que jusqu'à présent, l'ORD ne se soit pas prononcé à savoir si les groupes spéciaux initiaux entendront les nouvelles demandes, ce qui serait logique, ou si de nouveaux groupes spéciaux seront mis sur pied, ce qui impliquerait une duplication des litiges.

En date du 1er juillet 2007, les deux groupes spéciaux initiaux n'ont toujours par rendu leur rapport à l'ORD, malgré l'expiration du délai de 6 mois prévu au Mémorandum d'accord. En fait, ils ont averti l'ORD, conformément à l'article 12 :9 du Mémorandum d'accord, que compte tenu de la complexité du dossier, ils seraient dans l'incapacité de se conformer à ce délai de six mois269(*). Selon certaines informations disponibles, le rapport du groupe spécial dans le cas de la plainte déposée par les États-Unis devrait normalement être distribué au mois de septembre 2007270(*) alors que celui du groupe spécial examinant la plainte déposée par les CE serait déposé en juillet 2008271(*). Il pourrait donc y avoir un décalage de près d'un an entre la distribution des deux rapports272(*).

Dans un premier temps, nous proposons d'examiner, à partir notamment des prétentions des parties contenues dans les divers documents communiqués à l'ORD, les questions en litige devant l'ORD (2.1). Dans un second temps, nous examinerons différentes problématiques et difficultés que ce dossier met en relief ainsi que des pistes de réflexion (2.2).

Il est toutefois important de souligner que les chiffres avancés sont ceux disponibles, notamment dans la littérature ou encore dans la presse. Ils sont donc à prendre avec une certaine précaution puisqu'ils seront eux-mêmes au coeur du débat devant l'ORD. Un vice-président d'Airbus n'a d'ailleurs pas hésité à suggérer que les chiffres avancés par les américains ont probablement été élaborés devant une machine à sous à Las Vegas273(*)!

2.2.1 Les litiges actuels

C'est sur la base des faits disponibles, et compte tenu de l'état du droit de l'OMC au mois de juin 2007, qu'il est possible de dresser un certain portrait du litige en examinant quelles seront les questions débattues, mais surtout les conséquences potentielles de ce dossier, considéré comme « the toughest case » sur le système de l'OMC.

Nous examinerons dans un premier temps les principales prétentions des CE relativement aux programmes américains et dans un second temps celles des États-Unis relativement aux programmes européens.

2.2.1.1 L'affaire États-Unis - aéronefs civils gros porteurs

Bien que les Communautés européennes identifient six programmes émanant tant du gouvernement fédéral américain que de certains gouvernements fédérés ou municipalités qui seraient contraires aux règles de l'OMC, il est possible de les classer en deux catégories principales: les programmes qui constitueraient des subventions directes et ceux qui constitueraient plutôt des subventions indirectes à la branche de production américaine des aéronefs civils de grande capacité. Par la suite, nous tenterons de voir quelle démarche juridique devrait normalement emprunter le groupe spécial pour régler ce dossier.

Les mesures soulevées visent principalement des mesures qui auraient profité à Boeing. Toutefois, certaines des allégations visent également des mesures qui auraient profité à McDonnell-Douglas. Rappelons que McDonnell-Douglas a été intégré à Boeing en 1998.

2.2.1.1.1 Les subventions directes

Les CE soutiennent que différents états américains ainsi que certaines municipalités auraient transféré de diverses manières des ressources économiques à la branche de production des aéronefs civils de grande capacité. Certains incitatifs fiscaux, cette fois du gouvernement fédéral sont également montrés du doigt. Les allégations visent principalement, bien que pas exclusivement, des contributions qui auraient été accordées dans le cadre du développement du Boeing 787 Dreamliner274(*) dont la mise en service est prévue pour l'année 2008. Le lancement de ce programme a officiellement eu lieu en 2004. Puisque c'est le programme aéronautique le plus documenté, nous examinerons de façon plus spécifique les allégations de subventions directes relatives à celui-ci.

L'état de Washington a signé un Mémorandum d'accord avec Boeing visant la construction d'une usine d'assemblage pour la construction du Boeing 787275(*). La loi 2294 adoptée par l'Assemblée législative de l'état de Washington contient huit mesures fiscales ayant essentiellement pour effet de réduire la taxe d'affaire et d'occupation de l'état de Washington276(*).

L'état du Kansas a approuvé pour sa part l'émission d'obligations par le Kansas Development Finance Authority à Boeing pour un montant de 500 millions $US afin de financer les installations qui seront en charge du fuselage avant du Boeing 787 (nez et cockpit). Le nombre d'emplois créés directement à cette usine serait d'environ 900. Le capital doit être remboursé par Boeing, mais le remboursement des intérêts se fera à même les impôts payés par les employés affectés à ce projet dans les installations sises au Kansas. Il s'agit donc, en réalité, d'un prêt sans intérêt accordé à Boeing277(*). Basé sur un taux d'intérêt annuel de 5%, la subvention ainsi consentie à Boeing par le Kansas pour le fuselage avant du 787 serait d'environ 200 millions $US278(*).

Quant à l'état de l'Illinois et à la ville de Chicago, il leur est reproché inter alia diverses incitations fiscales, une aide à la relocalisation du siège de Boeing, des dons pour le développement ainsi que la mise à la disposition d'un siège pour Boeing sans payer de loyer279(*).

Outre ces aides ci-avant décrites, Boeing aurait également demandé aux différents états impliqués dans le développement du 787 de fournir des fonds pour l'achat de trois Boeing 747-400 et la conversion de ceux-ci en un appareil de transport, un peu sur le modèle du Beluga de Airbus, qui serait en mesure de transporter les différents pièces du 787 fabriquées au Japon et en Italie jusqu'à l'usine d'Everett située dans l'état de Washington280(*). D'ailleurs, toujours selon ce même observateur, près de 50% des aides publiques accordées au projet Dreamliner seraient soit interdites ou contestables selon l'article 5 de l'Accord SMC281(*).

* 263 Demande de consultations présentée par les CE, «États-Unis -aéronefs civils gros porteurs», WT/DS317/1, 12 octobre 2004.

* 264 Demande de consultations présentée par les États-Unis, «CE et certains états membres - aéronefs civils gros porteurs», WT/DS316/1, 12 octobre 2004.

* 265 La présidente est Mme Marta LUCIA RAMIREZ de RINCÒN et les membres sont Mme Gloria Peña et M. David UNTERHALTER.

* 266 Demande d'établissement d'un groupe spécial présentée par les États-Unis, «CE et certains États membres - Aéronefs civils gros porteurs», WT/DS316/2, 3 juin 2005.

* 267 Le président du groupe spécial est M. Carlo Pérez Del CASTILLO et les membres M. John ADANK et M. Thinus JACOBSZ.

* 268 Les États-Unis ont procédé à une demande de consultations supplémentaires le 7 février 2006 et les CE ont fait de même en date du 1er juillet 2005.

* 269 Communication du président du groupe spécial, «États-Unis -Aéronefs civils gros porteurs», WT/DS317/6, 18 avril 2006 ; Communication du président du groupe spécial, « CE et certains États membres - Aéronefs civils gros porteurs», WT/DS317/7, 13 avril 2006.

* 270 Dépêche AFP, «Airbus et Boeing se déchirent à l'OMC», 21 mars 2007, [en ligne : http://www.ledevoir.com:80/2007/03/21/135916.html page visitée le 1er mai 2007].

* 271 Un document daté du 18 mai 2007 indique que le rapport, qui devait initialement être déposé en février 2008, sera, considérant «the substantive and procedural complexities» du dossier, déposé en juillet 2008, [en ligne : http://www.ictsd.org/weekly/07-05-23/wtoinbrief.htm page visitée le 27 mai 2007].

* 272 Il est permis de s'interroger sur les raisons de ce décalage annoncé dans la remise des rapports des deux groupes spéciaux d'autant plus que jusqu'à maintenant, la procédure (demande de consultations, demande d'établissement des groupes spéciaux) s'est déroulée simultanément. Dans le litige entre le Canada et le Brésil, les rapports avaient pourtant été distribués à la même date. Il nous semble également permis de nous interroger sur les potentielles conséquences d'un tel décalage.

* 273 Christian LOSSON, «Duel de calculette sur les subventions à Boeing et Airbus», Libération no 8049, samedi 24 mars 2007, p. 22.

* 274 Le Boeing 787, un long-courrier de moyenne capacité, remplacera les Boeing 767 et 757 dans le catalogue de Boeing. Au 1er avril 2007, Boeing enregistrait déjà plus de 514 commandes fermes pour cet avion ce qui en fait un succès commercial avant même son premier vol. La réponse de Airbus au Boeing 787 Dreamliner est le Airbus A350 XWB. Toutefois, sa mise en service n'est prévue que pour l'année 2013.

* 275 Lors de l'annonce par Boeing du lancement du 787, encore connu à l'époque sous la désignation 7E7, 19 états américains étaient en lice pour accueillir l'usine d'assemblage. C'est toutefois l'état de Washington qui a emporté la mise avec ses incitatifs fiscaux offerts. Certaines estimations sont à l'effet que la présence de cette usine d'assemblage générerait plus de 18 000 emplois dans l'état de Washington ainsi que des revenus fiscaux annuels pour l'état évalués à environ 18 millions $US. Sur la base d'une aide de la part de cet état qui pourrait atteindre jusqu'à 3,2 milliards de $ US, il est toutefois loin d'être certain que l'état fasse ses frais. Alexander R. COLLINS, «Is the Regulation of State-Aid a Necessary Component of an Effective Competition Law Framework», [2005] EBLR, 379, 391.

* 276 State of Washington's Business and Occupancy tax rate.

* 277 David PRITCHARD et Alan MACPHERSON (2004), Op. Cit., p. 63.

* 278 Ibid., p. 65.

* 279 Demande de consultations présentée par les Communautés européennes, «États-Unis - aéronefs civils gros porteurs», WT/DS317/1, 12 octobre 2004.

* 280 David PRITCHARD et Alan MACPHERSON (2004), Op. Cit., p.70. Boeing aura donc fait transformer trois 747-400 en 747-LCF, également connu comme le Dreamlifter. La renommée de cet appareil est également le fait de son allure plutôt disgracieuse.

* 281 Ce chiffre comprend les subventions accordées par les gouvernements japonais et italiens; voir Supra, section 2.2.2.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo