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Le droit de l'OMC dans le sillage du commerce des aéronefs civils

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par Simon TURMEL
Université Montesquieu Bordeaux IV - Master 2 Droit international 2006
  

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1.1.2 L'affaire Brésil-aéronefs

Le Canada a été le premier à tirer la salve dans le conflit l'opposant au Brésil. C'est le 18 juin 1996 que le Canada a demandé l'ouverture de consultations conformément a l'article 4 de l'Accord SMC avec le Brésil à propos de certaines subventions à l'exportation accordées par l'entremise du programme PROEX aux acheteurs étrangers d'aéronefs civils fabriqués par la compagnie Embraer. Des consultations se sont tenues à Genève les 22 et 25 juillet 1996, mais sans succès96(*). Les parties n'ont en effet pas été en mesure d'en arriver à une solution satisfaisante. En date du 16 septembre 1996, le Canada a donc demandé l'établissement d'un groupe spécial afin de trancher le différend, et ce conformément aux articles 4 et 30 de l'Accord SMC ainsi qu'aux articles 4 et 6 du Mémorandum d'accord. Cette demande d'établissement d'un groupe spécial est réitérée le 3 octobre 1996. Elle a toutefois été retirée par la suite afin de laisser une nouvelle chance aux négociations97(*).

Ces négociations n'ayant pu permettre aux parties d'en arriver à une entente, le Canada réitère sa demande d'établissement d'un groupe spécial près de deux ans plus tard, soit le 10 juillet 1998 afin d'examiner la conformité du programme PROEX avec le droit de l'OMC98(*). L'ORD a décidé d'établir un groupe spécial le 23 juillet 1998 afin d'examiner cette affaire et la composition du groupe spécial est annoncée le 16 octobre 199899(*). Les États-Unis et les CE sont intervenus comme tierces parties. Le 12 mars 1999 le groupe spécial dépose son rapport provisoire et le 14 avril 1999, le rapport final100(*). Le 3 mai 1999, le Canada a interjeté appel de la décision rendue par le groupe spécial. L'organe d'appel a rendu son rapport le 2 août 1999101(*). L'ORD a adopté le rapport de l'organe d'appel et du groupe spécial le 20 août 1999.

1.1.2.1 Le PROEX

Alors que le Brésil conteste plusieurs programmes ou mesures du gouvernement canadien, le Canada concentre ses énergies sur un seul programme brésilien, le PROEX. Il s'agit d'un programme mis sur pied par le gouvernement brésilien en 1991 et dont l'objectif est d'accroître le niveau des exportations brésiliennes102(*). Pour atteindre cet objectif, le PROEX fournit des crédits à l'exportation aux exportateurs brésiliens soit par un financement direct ou par des versements de péréquation des taux d'intérêt103(*).

Le financement direct implique que le Brésil prête une partie des fonds nécessaires pour la transaction. Le financement par versement de péréquation des taux d'intérêts implique, quant à lui, « que le Trésor public accorde à la partie finançant l'opération un versement couvrant, au plus, la différence entre les intérêts fixés par contrat avec l'acheteur et ce qu'il en coûterait à la partie finançant l'opération pour se procurer le financement requis. »104(*) Les versements de péréquation vont de 2,0 à 3,8 points de pourcentage par an et cette marge de financement dépend de la durée de financement. La durée de financement des aéronefs régionaux est toutefois fixée par décret à 15 ans ce qui implique que les versements de péréquation sont de l'ordre de 3,8 points de pourcentage. Concrètement, le Trésor brésilien devra verser à l'institution finançant l'achat 3,8 points de pourcentage du taux d'intérêt pour la transaction et l'acheteur sera tenu de verser la différence105(*).

Le PROEX entrera en jeu lorsque le constructeur, donc Embraer, demande au Comité du crédit à l'exportation, un organisme sous la supervision du Ministère des finances, une lettre d'agrément avant la conclusion en bonne et due forme de l'accord avec l'acheteur d'aéronef. En cas d'approbation, le Comité délivre au constructeur une lettre d'engagement garantissant un financement au titre du PROEX. Les versements débutent après l'exportation de l'aéronef et du paiement de celui-ci par l'acheteur. Les versements au titre du PROEX sont versés à l'organisme prêteur sous la forme de bons du trésor libellés en reais brésiliens106(*).

De plus, pour bénéficier du programme, les biens brésiliens destinés à l'exportation devaient contenir au moins 60% de contenu brésilien107(*). En 1998, Embraer absorbait ainsi de 39 à 45% du total des ressources allouées au programme PROEX108(*). Selon les estimations de la firme Ernst & Young, la valeur des versements représentait près de 2,5 millions $US par appareil109(*).

Les griefs du Canada concernant le programme PROEX sont essentiellement de deux ordres. Tout d'abord, le Canada demande au groupe spécial de constater que la partie du programme PROEX consistant au versement de péréquation des intérêts constitue en soi une subvention à l'exportation au sens de l'article 3 de l'Accord SMC. Dans un second temps, le Canada demande au groupe spécial de constater que les versements de péréquation des intérêts effectués dans le cadre de certaines transactions spécifiques et identifiées sont des subventions à l'exportation au sens de l'article 3 de l'Accord SMC. Le Canada demande également au groupe spécial de constater que le Brésil ne satisfait pas aux conditions de l'article 27.4 de l'Accord SMC et que de ce fait, il ne bénéficie pas du délai de grâce de 8 ans accordé aux PVD. Finalement, le Canada demande à l'ORD de constater que le premier paragraphe du point K) de l'Annexe 1 de l'Accord SMC ne prévoit pas d'exception à l'article 3 de l'Accord110(*).

Le Brésil, pour sa part, prie l'ORD de constater que le PROEX n'est pas incompatible avec les obligations lui incombant en vertu de l'article 3 de l'Accord SMC111(*).

* 96 Rapport du Groupe spécial, «Brésil - aéronefs», WT/DS46/R, 14 avril 1999, par. 1.2.

* 97 Marc TESSIER, Op. Cit., p. 7.

* 98 C'est-à-dire le même jour où le Brésil a demandé l'établissement d'un groupe spécial pour étudier les différends programmes canadiens, voir infra.

* 99 Les parties n'ayant pu s'entendre, c'est le directeur général de l'ORD qui a nommé les membres du groupe spécial. Le président du groupe spécial était M. Dariusz ROSATI et les deux autres membres M. Akio SHIMIZU et M. Kajit SUKHUM.

* 100 Rapport du Groupe spécial, «Brésil - aéronefs», WT/DS46/R, 14 avril 1999.

* 101 Rapport de l'Organe d'Appel, «Brésil-aéronefs», WT/DS46/AB/R, 2 août 1999.

* 102 Ce programme a été mis sur pied à une époque où le Brésil venait de tenir sa première élection démocratique depuis la chute de la dictature militaire (l'élection s'est tenue au mois de mars 1990). Parmi les ambitions du président Fernando COLLAR, une dénationalisation importante des entreprises ainsi que la transformation de l'économie brésilienne en économie de marché. C'est d'ailleurs dans le cadre de ces ambitions qu'a été signé, le 26 mars 1991, le Traité d'Asunciòn entre le Brésil, l'Argentine, le Paraguay et l'Uruguay menant à la création du MERCOSUR.

* 103 Joseph D'CRUZ et Charles M. GASTLE, «Canada-Brazil Trade Relations : an expedited arbitral mechanism may be required to resolve the WTO Aircraft From Brazil/Canada Dispute» Estey Center for Law and Economics in International Trade, février 2002, p. 20.

* 104 Rapport du Groupe spécial, «Brésil - aéronefs», WT/DS46/R, 14 avril 1999, par. 2.2.

* 105 Marc TESSIER, Op. Cit., p. 10.

* 106 Rapport du Groupe spécial, «Brésil - aéronefs», WT/DS46/R, 14 avril 1999, par. 2.1 à 2.6.

* 107 Ibid., par. 151.

* 108 Joseph D'CRUZ et Charles M. GASTLE, Op. Cit., p. 21.

* 109 Rapport du Groupe spécial, « Brésil - aéronefs - Recours du Canada à l'article 21 :5 du Mémorandum d'accord sur le règlement des différends», WT/DS46/RW, 9 mai 2000, note de bas de page 85.

* 110 Rapport du Groupe spécial, «Brésil - aéronefs», WT/DS46/R, 14 avril 1999, par. 3.2.

* 111 Ibid., par. 3.4.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo