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Les compétences statutaires des sociétés de classification

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par Pierre CHEVALIER
Université de Bretagne occidentale - Droit des espaces et des activités maritimes 2009
  

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Section 2. La certification de la conformité aux Conventions Internationales sur la

pollution en mer : la Convention MARPOL

La volonté de protéger le milieu marin de la pollution résultant du transport maritime est récente. En 1954 est adoptée la première convention internationale relative à la pollution en mer. Il

58 P . BOISSON, La sûreté des navires et la prévention des actes de terrorisme dans le domaine maritime, D.M.F., 2003, p. 732.

59 P. POLERE, Sûreté maritime : Bilan et perspectives du Code ISPS, D.M.F., 2006, p. 282.

60 Arrêté du 25 juin 2004 relatif à la reconnaissance des organismes de sûreté maritime et portant création d'une commission consultative de reconnaissance, JO n° 179 du 4 août 2004.

61 Idem.

62 Ibid.

63 S. ROBERT, L'Erika : responsabilités pour un désastre écologique, PEDONE, 2003, p. 166.

s'agit de la Convention pour la prévention de la pollution des eaux de la mer par les hydrocarbures (dite OIL POL). Puis, les grandes catastrophes écologiques résultant du naufrage de nombreux navires ont conduit, dans un souci de protection de la mer, à des engagements nationaux et internationaux dans les années 1970 sous forme de déclarations et conventions. Ainsi, la protection de l'environnement marin est devenue une des « valeurs fondamentales »64 du droit maritime. Sous l'égide de l'O.M.I. est adoptée en 1973 la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires65. Cette convention a été modifiée par un Protocole de 1978, d'où son appellation courante de MARPOL (Maritime Pollution) 73/78. Il s'agit à l'heure actuelle d'un des régimes les plus « complets et précis »66 avec actuellement 6 annexes, toutes en vigueur, qui concernent :

- la pollution par les hydrocarbures (Annexe I)

- la pollution par les substances liquides nocives (Annexe II)

- la pollution par les substances nuisibles transportées en colis (Annexe III)

- la pollution par les eaux usées des navires (Annexe IV)

- la pollution par les ordures des navires (Annexe V)

- la pollution de l'atmosphère par les navires (Annexe VI)

§ 1. Les diverses visites prévues par la convention

L'alinéa 3c de la règle 4 du chapitre 5 indique que tout Etat du pavillon désignant des inspecteurs ou des organismes reconnus pour effectuer des visites et des inspections, doit les habiliter à pouvoir exiger qu'un navire subisse des réparations et à effectuer des visites et des inspections si les autorités de l' Etat du port le lui demandent.

La Convention MARPOL prévoit différentes visites préalables à la délivrance du certificat. Une visite initiale qui comprend une visite de la structure, des équipements et des installations, aménagements et matériaux. Une visite de renouvellement avec des vérifications semblables à celles qui sont prévues pour la visite initiale. Cette visite a lieu à des intervalles fixés par l'administration de l'Etat du pavillon et ne doit pas dépasser 5 ans. Une visite supplémentaire, générale ou partielle doit être effectuée, à la suite d'une réparation ayant fait suite à une directive d'une société de classification, ou à chaque fois que le navire subit des réparations ou rénovations

64 M. RIMABOSCHI, op. cit., p. 228.

65 La Convention MARPOL a été ratifiée par la France le 25 septembre 1981, J. O., 2 octobre 1981.

66 P. FATTAL, Pollutions des côtes par les hydrocarbures, PUR, 2008, p. 52.

importantes. Enfin une visite annuelle est effectuée 3 mois avant ou après chaque date d'anniversaire du certificat. Toutes ces visites sont très semblables à celles prévues par la Convention SOLAS.

Il existe également des visites renforcées pour certains navires. Ces visites à bord des vraquiers et des pétroliers sont plus complètes. Un programme de visite est élaboré sur la base de renseignements concernant le navire. Les inspecteurs de l'Etat du pavillon ou d'une société de classification travaillent avec des données relatives aux caractéristiques du navire, les plans généraux de sa structure et de ses citernes ainsi que leur utilisation, la nature du revêtement de protection de ces citernes67. Pour chaque visite statutaire, un nombre d'éléments supplémentaires à contrôler est ainsi ajouté.

§ 2. La délivrance des certificats de conformité

Comme pour les Conventions S.O.L.A.S. et I.C.L.L., la Convention MARPOL prévoit dans son annexe I, chapitre 5 à la règle 10 que le certificat est délivré , soit par l' Etat du pavillon, soit par un organisme dûment autorisé par elle.

Les règles de délivrance, de conditions de validité et de prorogation des certificats MARPOL sont similaires à celles prévues par la Convention S.O.L.A.S.. Il s'agit ici d'un certificat international de prévention de la pollution par les hydrocarbures délivré après une visite initiale ou une visite de renouvellement. La durée de validité de ce certificat est fixée par l'Etat du pavillon mais ne peut excéder cinq ans. Mais, si à la fin de la durée de validité du certificat, le navire ne se trouve pas dans un port de l'Etat du pavillon, le certificat peut être prorogé pour permettre au navire d'achever son voyage. Mais il faut que cette mesure apparaisse opportune et raisonnable (règle 8) et la prorogation ne peut pas excéder cinq mois. Une fois arrivé dans un port de l' Etat du pavillon, le navire ne peut pas quitter le port sans avoir obtenu un nouveau certificat.

La délivrance de ces certificats est assurée par les mêmes personnes qui effectuent les visites, soit un agent de l'administration de l'Etat du pavillon, soit un expert auprès d'une société de classification agrée.

67 M. FERRER, op. cit. p. 322.

Les sociétés de classification procèdent donc aux visites prévues par les différentes conventions et délivrent les certificats de conformité. Ce travail statutaire leur est confié car ces organismes disposent d'une reconnaissance historique, d'une compétence technique unanimement admise68 mais également d'un réseau de centres et d'experts situés dans tous les grands ports du monde.

Bien qu'associées au sein de l'I.A.C. S., les sociétés de classification n'en sont pas moins concurrentes et les certificats de conformité délivrés par le Bureau Veritas n'étaient pas reconnus par les autres sociétés et vice-versa. Un navire était donc visité par une seule société de classification et les certificats émanaient également d'une seule société. Les membres de l'I.A.C.S. estimaient que cela permettait une sorte d'unité du contentieux. En effet, en cas de contestation faisant suite à un naufrage par exemple, une seule société de classification avait certifié le navire et endossait donc seule la responsabilité en cas de condamnation.

Mais cette situation a changé avec l'adoption, le mardi 10 mars 2009, du paquet Erika 369. Les sociétés de classification devront désormais adopter le principe de reconnaissance mutuelle des certificats du navire.

Les sociétés de classification ont donc désormais l'obligation d'accepter et de couvrir par leur propre certificat des équipements certifiés par d'autres organismes sur lesquels elles n'ont aucune possibilité d'intervention ni aucun moyen de contrôle. L' Institut Français de la Mer70 (I.F.M.) considère71 que cette obligation « porte gravement atteinte à la cohérence du dispositif en place qui a fait ses preuves, même s'il est perfectible ». Cette disposition du Paquet Erika 3 aurait été introduite « à la hâte, sans concertation et sans étude d'impact » et elle constituerait une « menace sérieuse » pour la sécurité maritime. Cette obligation de reconnaissance mutuelle des certificats va entraîner une « dilution des responsabilités ». En effet, la société de classification n'aura plus une connaissance complète du navire et de ses équipements. L'I.F.M. considère que les sociétés de classification devront désormais travailler « en aveugle » et se contenter d'accepter des certificats émis par d'autres. Cette obligation de reconnaissance est « d'autant plus incompréhensible

68 LE MARIN, adaptation des sociétés de classification aux évolutions des navires, vendredi 17 octobre. 2008., p. 4.

69 LE MARIN, Le paquet Erika 3 enfin adopté, vendredi 13 mars 2009, p. 4.

70 L'Institut Français de la Mer (IFM) est une association de Loi 1901 qui a pour objectif de sensibiliser les Français au rôle fondamental de la mer dans tous les domaines et d'oeuvrer par tous moyens au développement des activités maritimes de la France.

71 V. Institut français de la mer, Communiqué de presse du 11 décembre 2007, La reconnaissance mutuelle des certificats de classification des équipements, une menace pour la sécurité maritime.

qu'elle est contraire à l'exigence constante et justifiée de la Commission Européenne que les sociétés de classification aient recours exclusivement à leur propre personnel pour effectuer toutes les inspections et vérifications entrant dans leur champ de responsabilité ».

Le Secrétaire Général de l'Organisation maritime internationale le reconnaît lui-même, toutes les réglementations du monde ne vont pas empêcher les accidents de se produire. Le système juridique a une grande part à jouer mais, dans une grande majorité des cas, c'est l'élément humain qui est la source de l'accident72. Mais les sociétés de classification ne sont pas qualifiées pour assumer un contrôle opérationnel. Ainsi, aucune société n'examine si les membres de l'équipage du navire ont une langue commune de communication ou s'ils sont capables de travailler en équipe. Or, comme nous l'indiquions précédemment, les statistiques montrent que l'erreur humaine est à l'origine d'environ 80% des sinistres enregistrés. Comme le remarque Monsieur Athanassiou, « les problèmes commencent là où cessent les compétences classiques des sociétés de classification, lesquelles s'avèrent, même contre leur gré, impuissantes à pourvoir l'aspect public de la sécurité maritime »73.

72 W. O'NEIL, Raising the world maritime standars, MARITIME POLICY ANS MANAGEMENT, 2004, n°1, p. 86.

73 G. ATHANASSIOU, Aspects juridiques de la concurrence maritime, PEDONE, 1996, p. 434.

31 Chapitre 2. La particularité du régime juridique de la délégation aux sociétés de classification

Cet exercice de l'obligation de contrôle des navires arborant le pavillon de l'Etat, basé sur la coopération étroite avec le secteur privé, permet ainsi aux autorités nationales de remplir leurs obligations internationales en suivant la meilleure pratique professionnelle et ce « sans bourse délier »74.

Pour éviter que cette action des sociétés de classification en faveur de la sécurité maritime ne soit une démarche simplement cosmétique, il a fallu de plus en plus s'assurer de la rigueur des contrôles qu'elles exercent.

Les techniques juridiques utilisées pour les premières délégations étaient assez rudimentaires : il s'agissait le plus souvent d'un simple acte administratif autorisant l'organisme habilité à effectuer les visites prévues par une convention et à délivrer les certificats de conformité correspondants. Puis dans le sillage du Liberia75, de nombreux Etats mirent en place des accords d'agrément pour régir les rapports juridiques avec les sociétés de classification délégataire, organiser un système de coopération et permettre l'échange des informations en matière de contrôle de la sécurité des navires76.

Un contrôle extérieur à l'Etat délégataire est peu à peu apparu. L'aptitude à exercer ces fonctions statutaires est régie par une procédure d'agrément qui reconnaît la capacité à agir au nom et pour le compte de l'Etat du pavillon. L'O.M.I. et l'Union Européenne ont fixé des directives encadrant cette délégation. Cette position des instances internationales n'est pas surprenante car les acteurs majeurs du transport maritime admettent que les sociétés de classification doivent être majoritairement reconnues. Cette exigence est d'autant plus nécessaire que plus de 50 sociétés de classification sont actuellement dénombrées dans le monde77. Pour pouvoir recevoir une délégation d'un Etat membre de l'Union européenne, une société de classification doit préalablement satisfaire aux exigences posées par le droit international et par le droit communautaire (section 1). L'Etat du pavillon ne pourra déléguer ses compétences qu'aux sociétés qui satisferont aux critères posés par le

74 G. ATHANASSIOU, op. cit., p. 432.

75 L'administration maritime du Liberia fut la première en 1978 à développer des accords d'agrément avec les grandes sociétés de classification.

76 P. BOISSON, Etats du pavillon / sociétés de classification, op. cit., p. 43.

77 A. BELLAYER-ROILLE, Le transport maritime et les politiques de sécurité de l'Union européenne, op. cit., p. 104.

droit international ou le cas échéant, par le droit communautaire. Cette nécessaire reconnaissance préalable est la première singularité du régime juridique de la délégation de compétence aux sociétés de classification.

Le régime juridique de cette délégation à des sociétés de classification « reconnues » est spécifique à chaque Etat délégant. Au regard du droit français, cette délégation est originale car les activités de contrôle de l'Etat sont rarement déléguées. Sont reconnus par la France le Bureau Veritas, le Det Norsk Veritas, le Germanischer Lloyd, le Lloyd Register, et l'American Bureau of Shipping. C'est l'armateur du navire sous pavillon français qui choisit parmi ces sociétés reconnues celle qui inspectera son navire. Cette procédure complexe renforce la singularité de la délégation de compétence aux sociétés de classification en droit français.(section 2)

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus