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Etude d'impact environnemental en droit français et camerounais

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par Faustine Villannaeau FOTSO CHEBOU KAMDEM
Université de Limoges - Master II en Droit International Comparé de l'Environnement (DICE) 2009
  

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CHAPITRE I. LES INSUFFISANCES DES ETUDES D'IMPACT DANS LES DEUX SYSTEMES JURIDIQUES.

« L'expertise scientifique est indispensable, mais pas toujours suffisante pour conduire à la décision »161(*). L'étude d'impact relevant de l'expertise scientifique pré-décisionnelle, elle regorge également des insuffisances intrinsèques. Réglementée, l'évaluation de l'étude d'impact suppose répondre à la question fondamentale de l'atteinte des objectifs qui lui sont assignés. De manière générale, il faudrait s'interroger pour savoir si le dispositif réglementaire mis en place par les différents systèmes juridiques permet de voir l'étude d'impact comme un instrument efficace d'évaluation des incidences des projets sur l'environnement. Or, comme il a été indiqué plus haut, pour atteindre cet objectif général, il faudrait que le public participe de manière efficiente dans le processus décisionnel. Il faudrait également que l'administration puisse être suffisamment éclairée sur les effets du projet au moment de l'autorisation. Ainsi, si l'analyse du dispositif réglementaire amène à conclure que les objectifs assignés à l'étude d'impact sont peu ou prou atteints, cela signifie qu'il y'a des insuffisances liées à la réglementation. A côté des insuffisances ou limites relevées tout au long de notre exposé, il sera développé dans ce chapitre d'autres insuffisances que nous avons arbitrairement considérées comme singulières dans la réglementation de l'étude d'impact. En outre, on note également des obstacles externes qui limitent la portée de la procédure d'étude d'impact.

Notre analyse comparative nous conduit à rechercher quelles sont les insuffisances qui édulcorent la réglementation de l'étude d'impact dans nos deux pays. Puis, il sera exposé les insuffisances respectives dans les deux systèmes juridiques.

Section I. Les insuffisances rencontrées dans les deux systèmes juridiques.

Il sera évoqué ici les insuffisances liées à la réglementation de l'étude d'impact et celles extérieurs à la réglementation.

ParagrapheI. Les insuffisances liées à la réglementation de l'étude d'impact

L'une des insuffisances les plus notoires de la procédure d'étude d'impact procède même de la nature de cet outil. Il s'agit d'un outil scientifique réalisé par les experts en la matière. La décision de l'administration et même le juge saisi ultérieurement dans le cadre du contrôle dépendront donc des experts qui vont élaborer l'étude d'impact. Par ailleurs, l'exigence de l'étude d'impact reste et demeure pour le promoteur comme une obligation de moyen. L'aspect économique s'avère également comme une insuffisance de la réglementation.

Dès lors, il convient de développer la dépendance de la procédure décisionnelle à l'expertise scientifique, l'obligation de moyen à la charge du promoteur et les coûts économiques de la procédure.

A. La dépendance ou les dangers de l'expertise scientifique dans la procédure décisionnelle de l'étude d'impact.

Plusieurs domaines du droit sont aujourd'hui sous l'emprise de l'expertise scientifique162(*). Que ce soit en amont de la décision administrative ou d'une décision judiciaire163(*), le recours à l'expertise scientifique est et sera de plus en plus sollicité. L'expertise scientifique ne serait elle pas alors ce serpent de mer qui de partout surgit, plus insaisissable que jamais, mais donc l'omniprésence est remarquée par tous et imposée à tous. Il est alors à craindre que l'expertise prenne la décision en otage. L'autorité qui devra se prononcer sur la base d'un document dressé par le promoteur ou un expert, à défaut de compétence technique, se limitera simplement à contrôler si les parties obligatoires de l'étude d'impact ont été exposées. La tentation de facilité pourrait conduire cette autorité à se fier aux conclusions de l'expert sans effectuer elle-même une descente sur le terrain. Le recours à l'étude d'impact ainsi réglementée présente davantage des dangers au regard du processus de désignation de l'expert. En effet, le promoteur lui-même peut, s'il en a des compétences, élaborer l'étude d'impact. Il va alors obligatoirement se poser la question du sérieux et de la fiabilité du document établi. L'étude d'impact étant une évaluation du projet, le pétitionnaire réussira-t-il à évaluer lui-même son projet compte tenu des enjeux financiers en cause. Rien n'est moins sûr. Par contre, si le pétitionnaire fait recours à un bureau d'étude ou à une université, le problème de la fiabilité demeure. Car, le lien de droit qui unit l'expert au maître d'ouvrage sera empreint d'impartialité et de dépendance. Le bureau d'étude est choisi et rémunéré par le pétitionnaire. Si ce dernier n'est pas satisfait par la rigueur d'un bureau d'étude, il pourra toujours solliciter les services d'un autre expert qui est plus malléable et flexible.La question de la compétence de l'expert constitue également l'un des dangers du recours à l'expertise. Il a été constaté une mauvaise prise en compte des impacts indirects et secondaires (différés dans l'espace et dans le temps). Ainsi par exemple, l'expérience a montré en France que la création d'autoroutes engendrait des impacts environnementaux très importants via les remembrements qu'ils entraînaient, autant sinon plus qu'à cause des retombées de pollution et de l'effet de fragmentation écologique de l'autoroute elle-même (idem pour les canaux, TGV et autres contournements..)164(*). En outre, il est reconnu qu'il manque très souvent de compétence technique pour les inventaires faune-flore et écologiques, en particulier en zone tropicale forestière, aquatique ou marine où de nombreuses espèces sont inconnues ou connues que de quelques spécialistes, où les espèces sont parfois difficilement accessibles (sur la canopé, sous le sol) et les impacts peu prévisibles (par exemple sur les récifs coralliens pour les aménagements portuaires et littoraux).

En tout état de cause, l'exigence d'une étude d'impact est une obligation de moyen.

B. L'étude d'impact, une simple obligation de moyen.

Analysant les limites de l'étude d'impact, Eric Naim-Gesbert165(*)part du constat selon lequel si l'étude d'impact permet d'évaluer les incidences des activités humaines sur l'environnement, elle connaît juridiquement des limites liées à un mécanisme déterminé par une obligation de moyen. Pour lui, il s'agit simplement de produire le document administratif peu important que celui-ci s'inscrive dans le processus décisionnel de façon formelle, sanctionnée par le juge en cas de réalisation insuffisante parce qu'il ne remplit pas sa fonction d'aide à la décision. Concluant sur cette analyse critique, cet auteur avance que l'étude d'impact est un mécanisme juridique nécessaire, mais relatif qui procède à une appréhension du réel dans sa totalité en une approche globale et dynamique dans son contenu finalisé à une casuistique du réel. Continuant dans cette conclusion, il précise que l'étude d'impact établit les informations à caractères scientifique sur toutes les conséquences probables du projet sur l'environnement. A ce titre, elle ne peut exprimer qu'une vérité relative en science, ce que le droit ne peut traduire qu'en obligation de moyen.

Les incidences économiques apportées dans la réglementation de l'étude d'impact constituent aussi des limites.

C. Les coûts financiers de l'étude d'impact.

La procédure d'étude d'impact est très couteuse dans les deux pays. Au Cameroun, les différents frais de procédure à exposer sont explicitement prévus par les textes à l'exception de la rémunération du bureau d'étude. En effet, il ressort des textes que chaque promoteur doit, lors du dépôt de son dossier, s'acquitter auprès du Fonds National de l'Environnement et du Développement Durable, ou de la structure en tenant lieu, contre reçu, des frais d'examen de dossier qui s'élèvent à sept millions (7.000.000) FCFA en ce qui concerne l'étude d'impact détaillée et à quatre millions (4.000.000) FCFA pour l'étude d'impact sommaire166(*). Il n'a pas été comptabilisé bien entendu la rémunération de l'expertise scientifique et les frais de reproduction du rapport de l'expertise. Même s'il n'apparaît pas dans les textes français, les frais exposés pour l'étude d'impact, il est évident que cette procédure est administrativement coûteuse. Les frais de descente sur le terrain, des analyses etc...sont à la charge du pétitionnaire.

Il se pose également a posteriori le problème des mesures conservatoires et compensatoires prévues pour réduire ou supprimer les effets négatifs du projet sur l'environnement

D. Le problème des mesures compensatoires.

Les mesures compensatoires (replantation d'arbres, par exemple) peuvent pendre des dizaines d'années avant d'avoir un effet significatif, alors que l'impact négatif était majeur et immédiat. Les textes imposent parfois des mesures contre-productives, avec par exemple la remise en état des carrières, justifiant en général qu'elles soient rebouchées par des déchets, alors qu'un aménagement plus propice à la biodiversité et à la conservation des ressources en eau pourrait être proposé, permettant la survie des espèces protégées qui s'y étaient généralement installées. Quelques fois, lorsque le projet est déjà exécuté, les mesures compensatoires prévues et proposées par le pétitionnaire ne sont tout simplement pas mises en oeuvre, faute de suivi de l'administration ou par pure mauvaise foi. Dès lors, il apparaît que les mesures prises pour réduire ou supprimer les effets du projet sur l'environnement deviennent un trompe l'oeil uniquement pour permettre de valider le projet.

Nous voici maintenant rendus à l'exposition des insuffisances externes à la réglementation.

ParagrapheI. Les insuffisances externes à la réglementation.

Il sera développé dans ce cadre l'influence du politico-économique et la mauvaise foi des pétitionnaires

A. La mauvaise foi du pétitionnaire

Il a été constaté que certains grands projets soumis à l'étude d'impact sont souvent saucissonnés, c'est-à-dire mis en oeuvre par tranches successives dans le temps, par leurs promoteurs, ce qui leur permet d'échapper à la réglementation des études d'impact. Très souvent les promoteurs sont en relation de partenariat avec des organismes qui imposent le respect des délais pour la finalisation des projets. Pour rattraper donc les délais, il peut arriver que le maître d'ouvrage bâcle son étude d'impact. Au surplus, compte tenu du système de liste mis en place, les promoteurs essayeront de trouver un montage savamment orchestré pour faire échapper leur projet aux étude d'impact ou trouver des parades en jouant sur les critères de déclenchement des études d'impact pour bénéficier d'une dispense ou faire intégrer leur projet dans la catégorie des études d'impact allégées.

B. L'intervention politico-économique et militaire

La préservation de l'environnement est souvent considérée comme un enjeu mineur face aux intérêts économique, politique et militaire. A cet effet, la procédure d'étude d'impact peut être sapée pour des raisons industrielles ou de brevet. En clair, la publicité de certaines informations dans le cadre de l'enquête publique ou de la publicité peut nuire aux promoteurs du projet qui rendront donc difficile l'accès aux informations par le public167(*). En France, par exemple, il a été observé qu'aucune législation environnementale n'a été mise en place dans le but de faciliter l'exploitation, par l'Etat français et certaines entreprises, du Nikel en Nouvelle Calédonie168(*). Ainsi, certains grands projets sidérurgiques ont été autorisés par l'exécutif sur la base d'une étude d'impact « indigeste », ce malgré l'avis défavorable des services administratifs provinciaux, des ONG et du commissaire enquêteur169(*). Il existe plusieurs autres exemples de l'influence de l'exécutif dans la procédure d'étude d'impact. Cela peut être aggravé lorsque c'est d'ailleurs une personne publique qui doit réaliser un important projet d'intérêt général. Pire, les projets réalisés dans le domaine militaire ne sont pas soumis à l'étude d'impact alors qu'il est indéniable que de nombreux sites pollués ont une origine militaire.

Chaque système juridique porte des insuffisances qui jugulent la portée réelle de l'étude d'impact dans son contexte.

* 161 M.M Jean Yves Le Déaut et Claude Saunier, L'expertise scientifique, audience publique du 06 décembre 2005, office parlementaire des choix scientifiques et technologiques, synthèse in http:// www.senat.fr/opecot/resume/4 pages_scientifique.pdf

* 162 C'est ainsi qu'à propos de la filiation, il a été jugé que « L'expertise biologique est de droit en matière de filiation, sauf s'il existe un motif légitime de ne pas l'ordonner »

* 163 MM. Jean Yves Le Déaut et Claude Saunier, op.cit

* 164 Lire à propos http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89tude_d'impact

* 165 Op.cit

* 166 Article 9 du décret du 23 février 2005

* 167 Wiképedia op.cit

* 168 Bruno Van Pethegem, acte de corailvivant, colloque GECOREV 26, 27 et 28 juin 2006 in http ://www.corailvivant.org/présentation.php

* 169 idem

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand