WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Lee Konitz, l'art de l'improvisation

( Télécharger le fichier original )
par Yvonnick PRENE
Université Paris IV Sorbonne - Master 2 Musique et Musicologie  2011
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

1.3.5 Une musique cool ?

1.3.5.1 Origine du Cool

Durant les années 1950, le terme «cool» était utilisé pour décrire une branche particulière du jazz issue du be-bop. Caractérisé par une conception laid-back 108 du temps, c'était une musique plus calme et introspective. Le cool était représenté largement par les jazzmen blancs109 de la Californie. Leur style collectif fut appelé West Coast Jazz et incluait des musiciens de premiers ordre tels que Art Pepper (1925-1982), Bud Shank (1926-2009), Shorty Rogers (1924-

1994), Marty Paich, (1925-1995) de la côte Ouest des États-Unis.

1.3.5.2 Distinction entre Hot et Cool

Curieusement le cool a longtemps été définit comme l'antithèse de «hard» et non de «hot». Le hard bop est apparu à New York, Detroit et Philadelphie vers la fin des années 1950. Reflétant la vie intense des métropoles de la côte Est des États-Unis. Il est une extension du be- bop dont le style agressif, la référence prépondérante au blues et, une urgence émotionnelle étaient originairement perçus comme une réaction à la tendance cérébrale du cool. Le hard bop était identifié comme une musique noire. En conséquence, les musiciens blancs étaient souvent jugés à tort par les critiques de l'époque comme introspectifs et intellectuels alors que les jazzmen noirs étaient perçus comme plus instinctifs, émotionnels et incarnaient la tradition du blues. Le groupe porte-drapeau de ce style était l'orchestre des Jazz Messengers d'Art Blakey (1919-1990).

Le terme hot en revanche soulignait une conception strictement émotionnelle de la musique. Selon Tristano, le feeling que les joueurs hot exprimaient était gorgé d'agressivité et révélait plus l'ego du musicien que quelqu'un qui était au service de la musique. On pouvait les reconnaître à travers leur timbre sale et leur vibrato empathique. Les pionniers du style cool comme Bix Beiderbecke, Franck Trumbauer, Lester Young peignaient un feeling qui n'évoquait pas un sentiment précis. Leur musique était interprétée avec un vibrato mesuré, un timbre

108 `'Laid-back'' est une expression employée par les musiciens de jazz qui renvoie à une conception en arrière du tempo, légèrement en retard et relâché.

109 On note bien sur des exeptions comme le Modern Jazz Quartet et Miles Davis.

restreint, une dynamique sonore stable, un phrasé clair et détaché, des harmonies diatoniques et parfois sophistiquées et un recours modéré à l'idiome du blues. Il convient de ne pas prendre les remarques de Tristano au pied de la lettre et de relativiser ses propos amers. Il a pu dire de musiciens tels que John Coltrane, Miles Davis, Sonny Rollins et Ornette Coleman: « que de l'émotion, aucun feeling. »110 Pendant le règne du be-bop, Charlie Parker jouait de façon cool sur ses compositions telles que « Yardbird Suite » et « Cool Blues ». En le voyant sur scène, Konitz était fasciné par l'immobilité de Parker et sa profonde concentration. « Charlie Parker ne

bougeait pas d'un muscle pendant qu'il jouait [...] il n'y avait pas de mouvements gaspillés. C'est la posture la plus désirable à mon sens. »111 Malgré un tempérament différent de Parker, Konitz s'inspira de sa maitrise émotionnelle et de son austérité. Doté d'un penchant pour des mélodies simples et le dépouillement plus que pour la virtuosité et se satisfaisant d'une exécution musicale pure sans mise en scène ni sensationnalisme, le style de Konitz était classé dans la catégorie des joueurs cool par les critiques. « Quand je joue, je pense uniquement à interpréter

une succession de notes mélodiques, avec un sens du rythme aussi précis que possible. Je ne suis pas spécialement d'humeur poétique [...] J'essaie juste de jouer la musique à la fois de manière claire, chaleureuse et positive - c'est vraiment ma motivation. »112 Il déplorait la confusion que provoquait cette appellation. « C'est pourquoi j'ai été estampillé avec le son «cool». Les gens

me disent, «quand vas-tu commencer à swinguer ?». Ce n'est pas une compétition pour moi. »113

110 BILLARD François. Lennie Tristano, Editions du Limon, 1988.

111 Hamilton Andy, Conversations on the Improviser's Art, The University of Michigan, 2003, p 31 «Charlie Parker didn't moved a muscle when he was playing; [...]There was no wasted motion, That's the most desirable way to me''

112 Hamilton Andy, Conversations on the Improviser's Art, The University of Michigan, 2003, p31«When I play, I'm just thinking playing a melodic succession of notes, with as accurate a time-feeling as possible. I don't feel very poetic. [...] I am just playing the music clear, warm, and positive- that's really my motivation `'

113 «consulté en mai 2010» http://www.npr.org/templates/story/story.php?storyId=128953406« This is what I got coined with -- the "cool" sound. Some people say, 'When are you gonna swing?' It's not a competition to me«

Les musiciens qui représentaient l'esthétique cool étaient pour Konitz, Louis Armstrong, Lester Young, Charlie Parker. Selon lui, la distinction entre hot et cool ne procédait pas d'une question raciale, sociale ou stylistique mais uniquement musicale. « Quelqu'un me demanda une fois il y a longtemps à la télévision le sens du jazz cool. J'ai indiqué que lorsque Louis Armstrong joue de manière excellente, il est cool. Quand Charlie Parker joue superbement, il est cool. Le hot est

seulement la part de show business. »114 À travers les multiples connotations, le plus souvent

négatives, qu'englobe le terme cool, Konitz redéfinit complètement sa signification. « Nous avions toujours pensé cela en termes positifs. J'avais un album avec des glaçons sur la couverture. Maintenant c'est une insulte pour un improvisateur qui est supposé jouer une sorte de musique passionnée. »115 Il regrettait également les accusations contre Lennie Tristano. « Ils le traitaient de froid et incapable d'émotion. Comment quelqu'un qui dévoua sa vie à la pureté de son art, qui ne se vendit jamais, pouvait-il être froid et sans émotion? Ce sont les musiciens

qui remanient leurs ''licks'' et les styles, et les techniciens froids qui sont froids et sans émotions. La technique incroyable de Lennie est l'extension directe de son feeling, non le contraire comme la plupart des personnes essaient de faire. »116

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon