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Lee Konitz, l'art de l'improvisation

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par Yvonnick PRENE
Université Paris IV Sorbonne - Master 2 Musique et Musicologie  2011
  

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1.3.5.3 Les connotations négatives attachées au Cool

Les critiques dénotaient la musique de Tristano et de ses suiveurs avec des épithètes péjoratifs pour un jazzman tels que «froid» et «cérébral». Le sextette avait été surnommé « les six souris aveugles »117 se souvient Konitz. À l'époque, ces connotations dépréciatives avaient plusieurs origines. Sociale tout d'abord, on pourrait attribuer ces critiques au fait qu'à cette époque peu de musiciens blancs et encore moins de be-bop s'exprimaient avec un feeling

114 MURPHY, Molly, Interview pour les NEA (National Endowment for the Arts Jazz Masters), 2009

« Someone asked me once a long time ago on a television thing about the meaning of cool jazz. And I mentioned that Louis Armstrong when he's playing great is cool, man. Charlie Parker when he's playing great is cool. The hot is just the show business part.

116«consulté en mai 2010» http://www2.pcom.net/sminer/x4_28_77.htm, 13 aout 2000. «They called him cold and unemotional. How can someone who devotes their life to the purity of their art, who never sells out, be cold and unemotional? It's people playing rehashed licks and styles, and cold technique who are cold and unemotional. Lennie's incredible technique came from his stretching out from his feeling, not vice versa as most people try to do.»

117 SHIM, Eunmi, Lennie Tristano His Life in Music,University of Chicago, 2007 « The Six Blind Mice »

authentique de jazz. Certains étaient accusés de copier la musique des Noirs. Le be-bop né à Harlem, était le fruit de revendications politiques et représentait un moyen d'émancipation destiné à mettre en valeur une communauté stigmatisée. Ce jazz moderne formait une contre- culture, un cercle fermé qui exigeait un investissement profond de la part du musicien venant de l'extérieur pour interpréter le be-bop correctement et mériter sa place dans la communauté. Mis à part Bix Beiderbecke, Stan Levey, Al Haig. Red Rodney, Phil Woods et quelques autres, les jazzmen blancs étaient souvent décrits par les critiques comme des musiciens classiques : intellectuels, virtuoses mais dénués de swing et de passion. Pour Bill Kirchner, Konitz était l'épitome d'un jazz flegmatique. « Aucun artiste n'a poussé plus loin la distance émotionnelle du jazz cool d'un aussi grand extrême que Lee Konitz, un autre ancien élève du nonette de Miles Davis, exception faite peut être de ses collègues réguliers, son pianiste et mentor le pianiste

Lennie Tristano et Warne Marsh au saxophone ténor. »118

Les attaques émanaient également des musiciens contemporains tels que Dizzy Gillespie et touchait a l'aspect rythmique de la musique. « Il n'y avait pas de tripes dans cette musique, ni de rythme119 non plus. Ils ne transpiraient jamais sur scène, Lee Konitz, Lennie Tristano, et ces types. »120 Dizzy, chef de file des boppers, mettait ainsi en cause leur manque d'engagement. Il est vrai que Tristano avait une conception spécifique du rôle de la batterie. Elle a toujours occupé dans les formations de Tristano un rôle moindre que dans les ensembles be-bop. Elle devait

maintenir un flot rythmique régulier et une dynamique moyenne afin ne pas recouvrir les solistes et les perturber dans leurs improvisations. Gerry Mulligan en fin observateur remarqua cette différence entre Tristano et les boppers : « c'est difficile de dire sans émotion, parce que ce

n'était pas exactement ça, mais il y avait une tranquillité dans toute son approche du niveau

118 KIRCHNER, Bill, The Oxford Companion to Jazz, Oxford Companion, 1988, page 334 «No artist pushed the emotional distance of cool jazz to a farther extreme than Lee Konitz, another alumnus of the Birth of Cool band- except perhaps his frequent colleagues, pianist and mentor LT and tenor saxophone WM.»

119 Il faudrait remplacer ici le terme «rythme'' par swing.

120 GILLESPIE Dizzy, To Be or Not to Be «There was no guts in that music, not much rhythm either. They never sweated on the stands, LeeKonitz, Lennie Tristano , and those guys»

dynamique sonore. »121 À l'écoute, cette section rythmique peut sembler ennuyeuse à cause de l'interaction limitée des musiciens avec la batterie. Par conséquent, la section rythmique n'était pas aussi intense que celle des boppers. Cependant, les critiques qui qualifièrent la musique de Konitz de cérébrale, suggérant une absence de feeling et une improvisation préparée, semblaient avoir manqué l'essence de son jeu. Konitz se souvient d'avoir partagé des moments forts avec le clan Tristano : « avec Billy (Bauer) et Warne Marsh, parfois nous créâmes des moments extraordinaires. Malheureusement ils ne furent pas tellement enregistrés. » 122 Selon Peter Watrous du New York Times, « la musique faite par le pianiste Lennie Tristano et ses élèves ne parvient pas à émouvoir l'auditeur. Vous devez la suivre dans des coins obscurs où elle est partie se cacher; la musique est timide et semble anti-dramatique. »123 La dynamique sonore paraissait sans doute moindre comparée à la section rythmique de Charlie Parker ou d'Art Blakey. L'objectif de Tristano était de produire une musique aux lignes équilibrées et naturelles, de construire une architecture sonore sensée et sans excès qui pouvait sembler parfois inexpressive et ennuyeuse. Konitz n'était pas favorable de prime abord au sensationnalisme du

be-bop mais a reconnu sa nécessité pratique. « C'était définitivement une question de show business, en terme de communication avec un public qui pouvait ne pas connaitre la musique. Quelle que soit l'audience que le be-bop ait eue, qui était certainement un public petit, limité, elle était due en partie, selon moi, à cette sorte d'expression dynamique. »124 Au cours des années 1960 et 1970, Konitz ne fut pas un soliste aussi populaire que Phil Woods, Art Pepper ou

Jackie McLean. « Il y eut une période où le saxophoniste alto Lee Konitz n'était pas une

121 MACMILLAN, Jazz Masters of the Forties, New York, 1966 « It's hard to say unemotional , because it's not exactly that , but there was a coolness about his whole approach in terms of the dynamic level »

122 HAMILTON Andy, Conversations on the Improviser's Art, The University of Michigan, 2003 page 65

« With Billy and Warne Marsh, sometimes we hit some extraordinary moments. Not too much of that was recorded, unfortunately. »

123 WATROUS Peter, A Kind of Shy Counterpoint That's Rarely Heard Today, New York Times, 17 avril

1999» The music made by the pianist Lennie Tristano and his students doesn't come out and shake a listener. You have to follow it into the dark corners where it's gone to hide; the music is shy and seemingly anti-dramatic.»

124 HAMILTON, Andy, Conversations on the Improviser's Art, the University of Michigan, 2003 page 23 «this was definitely a showbiz consideration, in terms of communicating to an audience who might not know about music. Whatever audience bebop got, which was certainly a small, limited audience, had to do in part, I think, with that kind of dynamic expression. »

attraction régulière dans le circuit des clubs de New York. En fait cela n'a jamais été le cas pendant le plus gros de sa carrière : Mr Konitz n'a jamais été le plus chaleureux ou le plus facile d'accès des légendes du jazz et, a longtemps souffert d'une relation erratique avec les projecteurs. »125 Ainsi, même après sa collaboration avec Tristano, Konitz est resté en quelque sorte une figure du cool, en dehors du courant et des modes principales du jazz.

1.3.5.4 L'intuition avant tout

Konitz choisit de se consacrer à un art dénué de sensationnalisme, à une discipline exigeante: la recherche de nouvelles mélodies à travers l'improvisation. L'approche intuitive de Tristano semblait être la cause d'une musique qui bien que puisant sa source dans le be-bop apparaissait plus introspective. Moins accessible que celles de Bud Powell ou Charlie Parker, la musique de Tristano demandait de la part du public un effort d'écoute pour appréhender sa complexité rythmique et mélodique. En effet, une éducation musicale et une connaissance de l'histoire du jazz était préférable. Ce processus d'improvisation demandait d'éviter les chemins déjà traversés et, note après note, de créer de nouvelles mélodies.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery