CONCLUSION GENERALE
Ce travail intitulé,
« Exploitation artisanale de l'or et développement
en territoires de Mambasa et de Wamba (Province Orientale, RD
Congo) », est parti de cette question de départ
« Quel est l'impact de l'exploitation artisanale de l'or sur le
développement en territoires de Mambasa et de Wamba ? »
et s'est assigné comme objectif de montrer comment l'exploitation
artisanale de l'or en territoires de Mambasa et de Wamba a une incidence sur le
développement. Il fallait ainsi déterminer l'incidence de
l'exploitation artisanale de l'or sur les initiatives locales de
développement et sur la cohésion sociale, identifier les raisons
de l'orientation de la population vers l'orpaillage artisanal, et montrer
les risques environnementaux et sanitaires occasionnés par
l'orpaillage artisanal.
Pour atteindre l'objectif qu'on s'est
fixé au départ, nous avons adopté une démarche
méthodologique appropriée. A partir de l'exploration au tour de
la question du départ, nous avons circonscrit notre
problématique. Cela nous a permis, dans le premier chapitre, à
construire notre analyse sur le modèle de la théorie des
externalités (James MEADE), selon laquelle l'activité d'un agent
économique (l'exploitation artisanale de l'or, pour ce qui nous
concerne) peut avoir des effets externes, positifs ou négatifs, sur les
activités des autres agents (les initiatives locales de
développement à vocation agro-pastorale, par exemple) et sur le
modèle de la théorie des besoins fondamentaux (PNUD) qui met
l'accent sur la satisfaction des besoins fondamentaux des populations.
Pour l'analyse des informations de terrain
obtenues par l'utilisation de plusieurs techniques telles que la technique
d'enquête, le questionnaire, l'observation participante, les entretiens,
et la technique documentaire (exploitation des rapports, des documents
personnels, ...), nous avons recouru à la méthode fonctionnelle
(méthode qualitative) et à l'induction statistique
(méthode quantitative). Cette dernière nous a poussé
à constituer, par la technique de boule de neige, un échantillon
de 148 individus, dont 40 femmes et 108 hommes. Cette analyse nous a permis
d'aboutir à trois résultats qui constituent d'ailleurs les
apports de ce travail contenus dans le deuxième et le troisième
chapitre.
Primo. L'exploitation artisanale de l'or
vide les villages de leurs populations actives. En effet, il s'est
révélé que l'âge des exploitants artisanaux se
trouve dans l'intervalle de 33 et 38 ans pour les hommes et dans l'intervalle
de 22 et 27 ans pour les femmes. Cet exode des villages vers les
carrières a eu des conséquences néfastes sur le dynamisme
et la cohésion sociale de plusieurs villages : la diminution de la
production agricole, l'absence de petites initiatives de développement,
des époux abandonnent leurs épouses pendant des longues
années aboutissant souvent aux divorces, les enfants sont
détournés du contrôle parental et donc de
l'éducation formelle, etc. Cette situation a donc confirmé notre
première hypothèse selon laquelle «L'exploitation artisanale
de l'or viderait les villages de leurs populations actives, ce qui induirait
par voie de conséquence, à l'absence des petites initiatives de
développement (à vocation agro-pastorale par exemple) et à
la fragilisation de la cohésion sociale par des conflits
d'autorité».
Secundo. Parmi les multiples raisons de
l'attrait de la population pour l'activité aurifère, l'obtention
d'un revenu rapide et élevé reste la raison principale (28,70%).
Pour le lavage à la batée et le lavage simple, les types
d'exploitation les plus pratiquées, la production est vendue sur place
au soir même de l'exploitation alors qu'il faut attendre 6 mois ou plus
pour avoir la production agricole (riz, bananes). De plus, le revenu mensuel
d'un orpailleur varie entre 210 et 280 dollars américains. Il est
élevé par rapport à celui d'un fonctionnaire (enseignant)
qui n'atteint pas 100 dollars américains même en respectant le
SMIG (Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti). Mais, nous avons
constaté que la propension marginale à consommer est très
élevée (0,87), elle approche l'unité. Cette consommation
consiste plus à la satisfaction des besoins alimentaires et
vestimentaires. D'autres besoins fondamentaux comme les soins de santé,
l'éducation, le transport, l'eau, l'énergie, ... restent non
satisfaits. La deuxième hypothèse selon laquelle « Il
semble que l'exploitation artisanale de l'or procure un revenu rapide et
élevé permettant de satisfaire les besoins fondamentaux des
exploitants artisanaux» doit être nuancée.
Tertio. L'orpaillage a cependant des
conséquences néfastes sur l'environnement et sur la santé.
Abordant la problématique des conséquences négatives, nous
avons relevé sur le plan environnemental la pollution des eaux (32,41%)
et sur le plan sanitaire les risques sanitaires proprement dits (48,15%). La
troisième hypothèse selon laquelle « L'orpaillage
aurait des conséquences néfastes sur l'environnement et sur la
santé des hommes» a donc été confirmée.
Somme toute, pour que le
développement en territoires de Mambasa et de Wamba émerge
à partir de l'orpaillage artisanal, nous pensons qu'il faut, d'une part,
bien gérer les externalités négatives et, d'autre part,
encadrer les acteurs intervenant dans ce secteur. Cet encadrement pourra se
faire et par le pouvoir public (par le biais du SAESSCAM) et par les autres
partenaires non étatiques de ce secteur. Tout cela ne peut être
possible que s'il existe un cadre juridique favorable au développement
et un plan stratégique national de l'exploitation artisanale de l'or. A
la fin de ce travail, nous avons proposé quelques éléments
d'un plan stratégique national de l'orpaillage, un des aspects que
d'autres recherches ultérieures peuvent approfondir.
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