INTRODUCTION
Constituée comme colonie française par un
décret du 17 Octobre 1899 mettant fin au Soudan français, la
Côte d'Ivoire fut réorganisée dans le cadre de l'Afrique de
l'Ouest par les décrets du 1er Octobre 1902 et du 18 Octobre
1904. Elle devint indépendante le 07 Août 1960.
La Côte d'Ivoire est limitée au Nord Est par le
Burkina, au Sud par le Libéria, à l'Est par le Ghana, au Nord
Ouest le Mali, à l'Ouest par la Guinée. Pays en pointe, la
Côte d'Ivoire occupe en Afrique une place privilégiée. Les
conditions naturelles ne constituent pas en Côte d'Ivoire une entrave au
développement économique.
Le pays, vaste, quadrilatère de 315 000 km2 est peu
accidenté. On n'y rencontre que quelques petits massifs dont la hauteur
n'excède général pas 600 m, sauf dans la région de
Man où quelques pitons rocheux émergent du massif du mont Nimba
et atteignent 1340 m d'altitude.
Comprise entre 4° 20' et 10 ° 50 ` de latitude Nord,
la Côte d'Ivoire fait la transition entre les climats équatoriaux
et les climats tropicaux. Mais du point de vue agricole, la Côte
d'Ivoire a des possibilités de cultures très diverses. Au Sud
dans la zone forestière aux essences très recherchées, le
climat et les sols sont favorables à la production du café, du
cacao et de la banane de chine. Le manioc, le maïs, la banane Plantin, le
riz fournissent la majeure partie de l'alimentation. Au Nord, la région
des savanes boisées convient surtout aux cultures vivrières et
à l'élevage. Dans ces conditions, les ressources agricoles sont
essentielles et la Côte d'Ivoire se manifeste à l'échelle
mondiale par ses exportations. La Côte d'Ivoire constitue la
première puissance de l'Afrique occidentale, francophone, et
deuxième en Afrique subsaharienne après le Nigeria.
Economiquement viable le café et le cacao dont elle est le premier
producteur mondial ont permis une accumulation de capitaux et un
développement économique sans précédent dans la
sous -région.
La Côte d'Ivoire détient 45 % de la masse
monétaire de l'UEMOA et de 40% du produit intérieur brut. La
croissance due au café et au cacao ont entraîné « le
miracle Ivoirien ». Cependant ce miracle va subir un coup du fait des
cours du café et du cacao au milieu des années 80.
Erigée en colonie de peuplement, la Côte d'Ivoire
est forte d'une population de 15 millions dont 40 % d'étrangers. On
retrouve au pays des lagunes ébriées en grande partie des
ressortissants Burkinabé, des Maliens, Sénégalais, Libano
- Syriens et autres européens. Sur le plan ethnico-religieux, la
Côte d'Ivoire présente une mosaïque où se côtoie
une soixantaine d'ethnies, parlant 60 dialectes différents,
répartie en quatre groupes : les Bétés à l'ouest
les Baoulés au centre-ouest, les dioulas et les Senoufs au Nord.
Cette diversité ethnique se double d'autogamismes
religieux entre 50 % de musulmans, 30 % de chrétiens et 20%
d'animistes.
Le phénomène de la composante nordiste peut
s'analyser à travers la volonté manifeste d'Houphouët Boigny
d'exporter la main d'oeuvre de l'ex-Haute Volta (actuel Burkina).
La Haute Volta à été pendant longtemps
une partie intégrale de la Côte d'Ivoire jusqu'à sa
dissolution en 1947 en trois parties : une partie a été
rattachée à la Côte d'Ivoire, une autre au Soudan
français, et enfin la dernière au Niger. Elle a été
reconstituée en 1947.
La côte d'Ivoire, éléphant d'Afrique,
depuis la mort d'Houphouët Boigny le 7 décembre 1993 n'a jamais
été en paix avec elle-même. Son héritage
n'était qu'une « bombe à retardement ». Dès sa
mort on assista à des problèmes de succession qui sont aussi
liés à la situation actuelle du pays. Ils étaient quatre
à se battre pour sa succession. Il s'agit respectivement du
Général Gueï, de Laurent Gbagbo, Alassane Ouattara et Henri
Konan Bédié.
Invoquant l'article 11 de la Constitution qui permet au
Président l'Assemblée nationale d'assurer la vacance,
Bédié devint président par intérim. De ce fait
quelques mois après la mort de Houphouët, effectivement en
septembre 1994, naîtra le Rassemblement des Républicains
d'Alassane Ouattara parti implanté dans le nord. Ce qui explique son
caractère identitaire et régional.
Henri Konan Bédié introduit le concept
d'ivoirité dans la Constitution. La polémique sur
l'Ivoirité qui impose de prouver ses origines pour participer à
la compétition électorale n'est qu'un des épisodes de la
domination d'élites issues du sud. Cette identification sectaire a
servi, depuis la mort d'Houphouët, les hommes qui se sont
succédés à la tête de l'Etat ivoirien.
C'est en décembre 1999 que la situation a totalement
basculé avec la mutinerie qui avait fini de se transformer en coup
d'Etat et porter le Général Gueï au pouvoir. Avec
l'insurrection du 19 septembre 2002, déclenchée par une partie de
l'armée en rupture de ban, la Côte d'Ivoire renoue avec la crise.
Par crise il faut entendre la période où les
difficultés économiques, politiques et idéologiques sont
ressenties comme paroxystiques.
La crise qui secoue la Côte d'Ivoire se rapproche plus
à une lutte armée qui oppose au sein d'un même Etat
d'importantes fractions de la population. Pour sortir de la crise,
différentes médiations ont été entreprises. La
médiation se définit comme un mode de règlement
politique des conflits consistant dans l'interposition d'une tierce personne
qui ne se borne moins pas de persuader les parties mais leur proposer en plus
une solution.
Elles se sont opérées au plan individuel, sous
-régional, régional, et enfin l'échelle internationale.
Au plan individuel, nous pouvons retenir les médiations
du président Sénégalais Abdoulaye Wade et du
président malien Amadou Toumani Touré.
Le sommet du 29 septembre de la CEDEAO Accra s'est
concrétisé par la création du groupe de contact
dirigé par le président Togolais Gnassimbé
Eyadéma, avant de connaître un nouveau lifting avec le sommet
d'Accra du 6 mars 2003.
La France longtemps confinée dans une politique non
interventionniste depuis le fiasco politico-militaire rwandais de 1994 avec
l'opération turquoise, a envoyé un contingent militaire pour non
seulement sécuriser ses ressortissants mais aussi protéger ses
intérêts économiques. En effet, il y a 210 filiales
d'entreprises françaises sur le territoire Ivoirien, soit le quart de
filiales françaises implantées dans la zone franc.
Pour trouver une solution diplomatique à la situation,
un accord été signé à Marcoussis dans la banlieue
parisienne après 10 jours de conclave. Ont pris part à ce huis
clos, les différents protagonistes de la crise à savoir les trois
mouvements rebelles (le MPCI, MJP, MPIGO) et les différentes
entités politiques. Les accords de ce huis clos ont été
avalisés par le Sommet des Chefs d'Etat de Kléber le 25 et 26
Janvier 2003.
Dans le cadre de l'étude de ce sujet, un certain,
nombre de questions doivent être posées. Dans un Etat
multinational comme la Côte d'Ivoire, quel sont les critères de
détermination de la nationalité ?
A quelle ivoirité se réfère la Côte
d'Ivoire ?
Pourquoi les rebelles contestent-ils le pouvoir ?
Etaient-ils en droit de contester un pouvoir
démocratiquement élu ?
En Afrique, un coup d'Etat, une rébellion ne sont-ils
pas en train d'être érigés en mode d'accession au
pouvoir?
Le processus de l'intervention française, n'est-il pas
signe d'un grand retour du néocolonialisme? L'Etude du sujet
à travers de multiples données nous permet de déceler un
intérêt au triple plan : géo-économique, politique
et actuel.
Sur le plan géopolitique, la Côte d'Ivoire est en
proie à des conflits ouverts ou mal éteints avec le
Libéria et la Sierra-Léone. Situé au Sud-Ouest le
Libéria est aujourd'hui le principal pourvoyeur de milices tant du
côté gouvernemental que celui des mouvements rebelles. Au nord
Est, Blaise Compaoré, Président du Burkina Faso est accusé
par Abidjan de déstabiliser la Côte d'Ivoire par son aide
supposée aux rebelles. Sur la moitié Nord Ouest, la Côte
d'Ivoire partage une frontière avec le Mali fermée sans attendre
le début de la présente crise. La Guinée ayant
également fermé sa frontière à l'Ouest semble se
murer dans une certaine neutralité. Cependant, le Ghana, à l'Est
ne souffre d'aucune friction sérieuse de l'ivoirité. De
surcroît, la Côte d'Ivoire offre un marché juteux aux
trafiquants d'armes.
Sur le plan économique, la crise a eu d'importantes
répercussions sur la bonne marche de l'Union Economique et
Monétaire Ouest Africaine (UEMOA). En effet, la Côte d'Ivoire
contribue à 40 % du PIB. De surcroît, le port d'Abidjan constitue
une des principales portes d'ouverture pour les pays enclavés tels le
Mali, le Niger et le Burkina.
Avec la suspension du trafic, ces derniers réorganisent
les circuits d'approvisionnement vers d'autres ports notamment à
Lomé, à Cotonou, à Dakar et même à
Téma au Ghana.
Au plan politique, la crise en Côte d'ivoire s'explique
par une dynamique de pouvoir. Les différents protagonistes luttent pour
la conquête ou le maintien du pouvoir. En effet, d'abord corporatistes,
les revendications des mutins deviennent par la suite politiques en demandant
le départ du Président Laurent Gbagbo et l'organisation
d'élections où prendraient part toutes les sensibilités
politiques. Il est surtout actuel.
La Côte d'Ivoire réputée stable, renoue
avec la spirale de la violence susceptible d'embraser toute la
sous-région.
L'objet de notre réflexion sera basé sur une
approche synthétique mettant en exergue d'une part les divers
éléments qui sont inter-relation entre eux et d'autre part, les
facteurs historiques, socio-politique et économiques. C'est pourquoi,
l'étude de ce sujet appelle différentes questions :
Quels sont les différents déterminants sous
-jacents la société ivoirienne ? et qui sont les protagonistes de
la crise ?
Quelles sont les solutions qui ont été
préconisées pour sortir de la situation de crise ?
Les questionnements nous conduisent à exposer dans un
premier mouvement les facteurs et les acteurs de la crise et de montrer dans un
deuxième mouvement les tentatives de sortie de crise.
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