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Le politique et l'écriture a travers La vie et demie de Sony Labou Tansi sous la supervision de prof. Josias Semujanga

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par Emmanuel NDUNGUTSE
Université Nationale du Rwanda - Licence en Langue et Litterature francaise 2001
  

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II.1.2 Les personnages et leur caractérisation dans La Vie et demie

Le Dictionnaire Larousse définit un personnage comme étant « une personne mise en action dans une oeuvre littéraire »34(*). Jean Superville dit qu'un personnage est « un être imaginaire qui semble vivre et palpiter dans les pages d'un roman »35(*). De là, il convient de prendre conscience qu'un personnage n'est pas une personne, même si la conception du personnage pourrait renvoyer à la conception historique de la personne. Un personnage est un signe littéraire composé à l'aide de procédés plus ou moins conventionnels qui se traduisent dans les indices textuels ou dans le roman pour le cas qui nous concerne.

Signalons alors, dès le début, que le choix du personnage dépend d'un romancier à l'autre, d'un courant à l'autre, pour ne citer que ceux-là. Ainsi, le roman negro-africain de la deuxième génération inaugure un traitement particulier des personnages qu'il met en scène. Sony Labou Tansi met en « oeuvre toutes les possibilités techniques pour dissoudre le personnage. Un même personnage peut apparaître sous plusieurs noms dans un même récit »36(*). A titre d'exemple, le nom de Chaïdana est porté par deux personnages différents. Ceux-ci se distinguent, comme nous le verrons, par leur beauté et leur détermination de réussir par le sexe.

Dans La Vie et demie, lorsqu'un personnage meurt, il est directement remplacé par un autre ayant les mêmes aptitudes que le disparu. Si son remplaçant ne peut pas être trouvé, le défunt continue d'agir comme il le faisait de son vivant, mais il acquiert une force supérieure à celle des humains. Il réapparaît et agit en silence en semant la terreur. Le personnage disparaît quand il le veut après avoir harcelé son ennemi. Martial le père de Chaïdana, meurt mais il n'est pas remplacé. C'est pourquoi il continue à apparaître. Son rôle revêt une grande importance. Personne ne peut prendre sa place. Martial joue son rôle comme s'il était vivant. Les guides le redoutent, en particulier Obramassando Mbi, son ancien protagoniste. Chaïdana meurt au moment où ses deux enfants ont dix ans. Sa fille Chaïdana aux-gros-cheveux la remplace après son séjour dans la forêt des pygmées. Chaïdana change d'identité deux cents-quarante fois pour échapper à la cruauté des guides et pour pouvoir se faufiler dans la haute société afin de venger son père. Obramassando Mbi lui-même change d'identité deux fois. La première fois, il le fait pour éviter les poursuites judiciaires, la deuxième fois pour pouvoir épouser Chaïdana.

Dans La Vie et demie, Sony Labou Tansi nous met devant un roman qui compte plusieurs personnages. Il y a même ceux qui n'ont pas un rôle défini dans le récit, qui peuvent revêtir le rôle de personnages secondaires ou de simples figurants. Beaucoup d'autres figures participent activement à l'évolution de l'action. C'est pour cette raison qu'au cours de notre analyse, nous n'allons pas étudier tous les personnages. Nous allons seulement considérer ceux qui reviennent dans le récit, dans l'action et leur contribution dans l'évolution de l'intrigue politique que nous trouvons dans La Vie et demie.

II.1.2.1 Le Guide Providentiel : Obramoussando Mbi

Dans La Vie et demie, le Guide Providentiel : Obramoussando Mbi est le premier des grands personnages du récit. Ses actions sont beaucoup plus récurrentes dans le roman. Son vrai nom est Cypriano Ramoussa. Il est ancien voleur de bétail qui, pour échapper aux poursuites judiciaires, change son identité et porte le nom d'Obramoussando Mbi. Après cette manoeuvre bien menée, il quitte sa région natale et intègre les forces armées de la démocratie nationale et grâce à ses dix-huit qualités d'ancien voleur de bétail, il se fait un chemin louable dans la vie (V.D. : 26). Il réussit à occuper une place importante dans la société Katalamanasienne en devenant le chef de l'Etat du nouveau pays indépendant.

La formation du Guide Providentiel est nulle. Il n'est pas à la hauteur de la lourde tâche d'un président ; c'est pourquoi il recourt à la dictature, à la violence qui sont pour lui une arme sûre pour s'imposer. Il ne tolère aucune opposition dans son pays. Pour s'en débarrasser, il n'hésite pas à égorger Martial, à révolvériser et sabrer Martial, le chef charismatique et oblige la famille de celui-ci à manger ses restes. C'est d'ailleurs sur cette scène que s'ouvre le roman comme Marie-Noëlle VIBERT, elle aussi, l'a remarqué :

« La Vie et demie s'ouvre sur le massacre de Martial par le guide providentiel, qui oblige ensuite la famille de celui-ci à manger le reste du corps. "vous allez me bouffer ça [...] Il ordonna qu'on vînt prendre la termitière et qu'on en fit moitié pâté et moitié daube bien cuisinée pour le repas du lendemain" »37(*).

Ce repas anthropophagique imposé par le guide providentiel aux différents membres de sa famille vise bien sûr à les humilier en niant leur dignité, mais aussi à les obliger à participer à l'élimination totale de leur parent, lequel, comme nous venons de le mentionner, réduit au sens propre en chair pâté et en daube, doit être mangé par les siens.

Au cours de son règne, Cypriano Ramoussa est beaucoup troublé par Martial qui ne cesse plus de revenir. A cause de la peur provoquée par ce dernier, le Guide Providentiel demande qu'on lui donne les quarante soldats plus courageux de l'armée afin de le protéger :

« C'était pour la plupart des hommes grands comme deux, forts comme quatre et velus comme deux ours. Le guide dormait entre quatre d'eux, collés à sa peau, tandis que le reste du contingent s'ajoutait à une cinquantaine de soldats ordinaires qui remplissaient les veillées de son excellence du bruit ferré de leurs sinistres souliers »(V.D. : 20).

Dans La Vie et demie, le Guide providentiel croit, pour conjurer les fort désagréables apparitions de Martial, qu'il doit partager sa couche avec Chaïdana, la fille de Martial, tout en la respectant. Mais au contraire, quand il fit des rapports sexuels avec Chaïdana, c'est là où Martial lui apparaît vite. De ce fait, c'est en se gardant alors de faire avec Chaïdana « ce qu'on fait avec les filles » (V.D. : 21) que le guide peut espérer tenir à distance le fantôme sanglant de Martial.

« Mais son excellence doit absolument éviter de faire la chose-là avec la fille de Martial. Pendant trois ans le guide providentiel partagea ses nuits avec la famille de Martial sans faire la chose avec elle, ni avec aucune autre femme. C'était l'époque où il parlait à tout le monde de ses trois ans d'eau dans la vessie » (V.D. : 21).

Par après, le Guide providentiel continuera à être hanté par Martial jusqu'à ce qu'il exprime son amertume et son désespoir en ces termes : « Enfin, Martial ! sois raisonnable. Tu m'as assez torturé comme ça. Tu deviens plus infernal que moi [...] Cesse d'être tropical, Martial. J'ai gagné ma guerre, reconnais-moi ce droit-là » (V.D., 58).

Le règne de Obramoussando Mbi dure 25 ans et est toujours parsemé de plusieurs abus.

* 34 LAROUSSE, P., Nouveau Petit Larousse, Paris, Larousse, 1977, p. 765.

* 35 SUPERVILLE, J., Théories de l'Art et des Genres littéraires, Paris, édition de l'école, 1951, p. 438.

* 36 NKIZAMACUMU, D., cité par BIZIMUNGU, C., Op. cit., p. 69.

* 37 VIBERT, M.N., Op. cit., p. 108.

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