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Le politique et l'écriture a travers La vie et demie de Sony Labou Tansi sous la supervision de prof. Josias Semujanga

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par Emmanuel NDUNGUTSE
Université Nationale du Rwanda - Licence en Langue et Litterature francaise 2001
  

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III.1.2 Le style sonien dans La vie et demie

III.1.2.1 La parodie

Le dictionnaire Nouveau Larousse définit la parodie comme étant : « une imitation burlesque d'une oeuvre littéraire ou artistique »72(*). Hutcheon ajoute qu'elle est considérée comme : « une forme d'imitation, mais une imitation caractérisée par l'inversion ironique »73(*). Pour Josias SEMUIJANGA : « parce qu'elle résulte d'une transtextualité généralisée, la parodie passe par l'évocation, la révocation et la réécriture du matériau discursif antérieur »74(*).

On voit donc que la parodie se définit comme un procédé littéraire ou romanesque qui consisterait à recourir, à imiter d'autres textes ou à d'autres discours déjà existants en littérature. Mais l'introduction de ces textes ou discours pourrait occasionner un changement de sens de ces derniers.

Ainsi, dans La vie et demie, ce procédé littéraire est très remarquable pour un lecteur attentif et mérite d'être relevé dans cette étude. Signalons dès l'abord que beaucoup d'éléments touchent à la bible. Les exemples sont nombreux, mais retenons ceux qui sont beaucoup plus frappants. L'expression « ecce homo » que nous trouvons à la page 41 et « voici l'homme » à la page 58 et 71 renvoient directement à « ecce homo » de la Bible prononcée par Pirate au moment de livrer Jésus Christ. L'expression « Sainte vierge douleur » à la page 79 est la parodie de celle de la Bible : « la Sainte Vierge Marie » ; même chose pour « la Sainte Vierge noire » (V.D. : 65) qui parodie toujours « la Sainte Vierge Marie ». La phrase « On donna à Martial ce qui était à Martial et au guide providentiel ce qui était au guide providentiel » (V.D. : 86) est la parodie de celle de la Bible : « Rendez à César ce qui appartient à César et à Dieu ce qui appartient à Dieu ». « Chers frères, chères soeurs, je meurs pour vous sauver de moi » (V.D. : 142) est la parodie de « Je meurs pour vous sauver du péché ». La phrase comme « Gardez mon nom comme un trésor » (V.D. : 142) est la parodie de la phrase biblique « Faites ceci en la mémoire de moi ». Aussi faut-il encore ajouter que la phrase « la raison du guide était toujours la meilleure » est la parodie de « la raison du plus fort est toujours la meilleure ». La devise de Jean Coriace : « Une tête saine sur un ventre sain » (V.D. : 161), est la parodie de « Un corps sain dans un esprit sain ».

A côté de cette parodie jouant sur des mots et leur agencement dans la phrase, nous trouvons dans La vie et demie, une autre sorte de parodie, se rapportant aux discours politiques et sociaux voire même sur les institutions mises en place. Alors que nous connaissons, dans des discours sociaux et politiques, que les militaires, c'est-à-dire les maréchaux, les colonels et les autres sont des hommes respectueux, honnêtes, gardiens de la paix, le narrateur de La vie et demie nous apprend que :

« Les colonels, les généraux et les maréchaux n'étaient que des soldats en titre qui s'engraissaient, se battaient autour des jeunes filles et des vins mousseux [...] et quand la puissance étrangère qui fournissait les guides en avait décidé, ils prenaient le pouvoir et choisissaient un nom de règne ; alors ils ouvraient des comptes écoeurants dans les banques de la puissance étrangère qui fournissait les guides. De temps en temps, ils « pérrochutaient » des versets établis par leurs ancêtres en discours inaugural de ceci ou de cela » (V.D. : 175).

Toujours par cette parodie portant sur les discours officiels, le narrateur entre en contradiction avec les conventions reconnues par l'ordre établie. Celui-ci tend à les valoriser au point que les principaux personnages sont ridicules comme « le Guide providentiel [qui] dansa avec la mariée toute la nuit si bien que les mauvaises langues parlèrent de nationalisation » (V.D. : 51). En parlant de cette nationalisation pour acquisition de la femme d'autrui, Josias SEMUJANGA nous apprend que ce mot, une sorte d'ironie « s'adresse au discours de la nationalisation des entreprises et de ses abus comme si les choses et les êtres appartenaient au Guide Providentiel dont l'absolutisme lui octroie même les vieux droits de cuissage longtemps pratiqué dans les sociétés médiévales »75(*).

Par ailleurs, alors que le discours social officiel donne du Révérend Père Wang une image de sage incarnant la pondération et la moralité publique, le narrateur lui donne une autre image. Non seulement cet homme de Dieu est un débauché qui « à trois heures quitta son lit au nom du père et du fils [...] pour aller rejoindre sa maîtresse » (V.D. : 110) mais aussi c'est un être brutal qui perd patience avec ses chrétiens. En effet, il frappe souvent sur la table pour se faire respecter « En demandant au seigneur de faire quelque chose pour changer le coeur des pygmées » (V.D. : 109).

Notons, en guise de conclusion à ce point, que ce procédé de déplacement de sens qu'est la parodie dans La vie et demie est épaulée par l'ironie qui à son tour, n'est pas à négliger dans cette analyse.

* 72 Larousse, Op. cit., p. 730.

* 73 HUTCHEON, cité par SEMUJANGA, J., Op. cit., p. 140.

* 74 SEMUJANGA, J., Op. cit., p. 140.

* 75 Idem, p. 144.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry