3.5. Perspectives de gestion durable de la Forêt
Classée de Dida
Aucune perspective viable de gestion de la FC de Dida
n'est possible si elle n'intègre pas un certain nombre de
considérations liées essentiellement à la
perception des ressources de la
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forêt de la part des acteurs en présence, de
leurs rôles et aussi du mode de gestion souhaité par la
majorité des parties prenantes.
3.5.1. Perceptions liées aux ressources de la
forêt
Pour la SDEDD, la FC de Dida est un écosystème
en danger, menacé de disparition par des occupants illégaux qui y
mènent des activités proscrites dans une forêt
classée. Le titre de l'article paru dans le Journal le Pays N°5333
du lundi 08 Janvier 2012 illustre bien cette vision: « SOS pour la
forêt classée de Dida ». Pour les autorités
communales et régionales, Dida est une « forêt à
problèmes » et surtout une question sensible tant sur le plan
politique que social. Pour les héritiers des responsables coutumiers
d'alors ayant signés l'acte de classement de la forêt, Dida reste
la terre de leurs ancêtres sur laquelle ils ont perdu aujourd'hui tout
contrôle. A l'image du chef du village de Mado, la FC de Dida
représente pour les autochtones la terre qui les a vus naitre et sur
laquelle ils souhaitent vivre et mourir. Quant aux allochtones, Dida est leur
terre d'accueil, à laquelle ils doivent tout. Ces perceptions
diffèrent aussi avec l'activité. Pour les agriculteurs, la FC de
Dida est une terre exploitable et riche où la production est optimale.
C'est pour les éleveurs un espace de pâturage idéal pour le
bétail. Au delà de ces représentations par rapport
à eux-mêmes, les acteurs ont des représentations
différentes dès qu'il s'agit faire cette représentation
par rapport à un autre acteur. Pour les occupants de la forêt,
Dida est une manne financière pour les services forestiers. Ils
n'hésitent pas à parler de « Banque Mondiale »
pour les agents des eaux et forêts eût égard aux
nombreuses verbalisations dont ils sont tout le temps victimes.
En effet, 78 % des enquêtés ont
déjà eu affaire au moins une fois aux services des eaux et
forêts (voire annexe 2) et ont été verbalisés.
Même si selon les Plans Communaux de Développement (PCD) de Ouo et
de Mangodara la FC de Dida relève de Ouo, ce sont les agents de
Mangodara qui interviennent le plus dans la forêt. Cependant, une mise en
relation de l'activité menée et le fait d'avoir été
verbalisé nous donne les résultats suivants consignés dans
le tableau 7 :
Tableau 7 : Situation de verbalisation des ménages en
fonction de l'activité menée
Déjà été verbalisé
?
|
ActivitéAgriculteurs
|
Elevage
|
Total général
|
Non
|
13
|
-
|
13
|
Oui
|
35
|
10
|
45
|
Total général
|
48
|
10
|
58
|
56
On constate que tous les éleveurs (100 %)
enquêtés ont été au moins une fois verbalisés
par les services forestiers contre 72,9 % des agriculteurs. Cette
catégorie d'acteurs affirme avoir eu le plus de
démêlés avec les services de l'environnement. Les amendes
payées ont varié entre cinquante mille (50 000) francs CFA et
cinq cent mille (500 000) francs CFA. Le reproche qui leur est fait est le
pâturage sans autorisation en forêt classée ou la coupe de
certaines espèces végétales (Khaya senegalensis,
Pterocarpus erinaceus, Afzelia africana) pour l'alimentation du
bétail. La variation même du montant des infractions est
jugée subjective par les populations. Pour le chef de poste du SDEDD,
les amendes ont pourtant toujours été fixées en
références au code forestier. En son article 259, ce code
stipule: « sont punis d'une amende de cinquante mille francs à
cinq cent mille francs (50.000F à 500.000F), et d'un emprisonnement de
trois mois à deux ans ou de l'une de ces deux peines seulement, ceux qui
procèdent à des défrichements non autorisés dans
les forêts classées; ceux qui procèdent à la
destruction d'essences forestières protégées ».
L'article 260 du même code prévoit une amende de vingt mille
francs à deux cent mille francs (20.000 F à 200.000 F) et d'un
emprisonnement d'un mois à un an ou de l'une de ces deux peines
seulement ceux qui laissent divaguer les animaux dans les forêts non
ouvertes à leur pâturage. En ce qui concerne le pâturage, le
SDEDD de Mangodara souligne qu'il est permis aux éleveurs sur une
distance de 150 m à la périphérie des forêts
classées sur autorisation.
Une corrélation semble établie entre le fait
d'être autochtone ou allochtone et celui de se faire verbaliser par les
forestiers, comme le montre le tableau 8 ci dessous.
Tableau 8 : Situation de verbalisation en fonction du statut de
résidence
Déjà été verbalisé?
Statut de résidence
|
Non
|
Oui
|
Total général
|
Allochtones
|
7
|
36
|
43
|
Autochtones
|
6
|
9
|
15
|
Total général
|
13
|
45
|
58
|
Il ressort du tableau 8 que 83,7 % (36 personnes sur 43) des
allochtones ont déjà été verbalisé par les
services forestiers contre 60 % des autochtones (9 personnes sur 13). En dehors
du fait que les allochtones soient les plus nombreux dans la FC de Dida, il ya
que ce sont eux qui disposent des grandes superficies exploitées.
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