WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Enjeux socio-économiques et conservation des ressources naturelles: dynamique des populations et perspectives de gestion durable de la forêt classée de Dida (Burkina-Faso)

( Télécharger le fichier original )
par Steve Dimitri PARE
Université de Kinshasa RDC - Diplôme d'études supérieures spécialisées (DESS) en aménagement et gestion intégrés des forêts et territoires tropicaux 2013
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

3.5.4. Perspectives de gestion durable

La problématique de la gestion durable de la FC Dida va au-delà de la simple question de son apurement. Elle se pose en terme de savoir quelle stratégie mettre en place pour permettre une gestion durable de ce potentiel? Même si l'ensemble des acteurs s'est prononcé en majorité pour une gestion visant une implication de tous, plusieurs goulots d'étranglements doivent être pris en compte au regard de la complexité de la question.

En effet, la situation de Dida se présente comme suit: une forêt aux limites imprécises concédée par des propriétaires terriens de la commune de Mangodora, qui relève

12 Ces densités ont été obtenues sur la base des données du RGPH 2006, en divisant la population totale sur la superficie de la commune

64

administrativement de la commune de Ouo, occupée par des populations majoritairement venant de la commune de Djigouè et contiguë au Parc National de la Comoé (PNC) en Côte d'Ivoire, lui aussi occupé par des populations. Cinq (05) paramètres dont il faut absolument tenir compte dans une perspective de gestion durable. C'est en cela qu'une approche systémique du problème est la seule option viable. De plus, les autorités ivoiriennes ont entrepris le déguerpissement mani militari des occupants (des burkinabè pour la plupart) du PNC, qui à la faveur du statu quo actuel dans la résolution de la question de Dida, pourraient trouver en cet espace un point de chute.

Quant à la gestion proprement dite, elle ne peut se faire que dans le respect des règles édictées par la loi forestière mais dans une perspective d'analyse des avantages comparatifs. Au Burkina-Faso, trois (03) formes de gestion existent aujourd'hui pour les aires classées : la gestion en régie par les services forestiers en concertation avec les populations, la mise en concession au profit d'opérateurs privés et la mise en concession au profit d'opérateurs communautaires (associations ou groupements) (MECV, 2004). Trois (03) scenarii peuvent donc être envisagés avec leurs avantages et leurs inconvénients.

Scenario 1 : gestion en régie par les services forestiers en concertation avec les populations.

Ce scenario part déjà avec le désavantage d'être le mode de gestion actuel de la FC de Dida tant décrié par l'ensemble des acteurs. Son avantage majeur serait d'assurer le droit régalien de l'Etat en matière de gestion des ressources forestières et d'engendrer des recettes pour le trésor public. Mais la possibilité pour l'Etat d'assurer cette gestion au regard de ses capacités est loin d'être une évidence. La surveillance et le contrôle des aires classées du pays requièrent des moyens humains et logistiques importants en raison de leur nombre relativement élevé. Le manque de moyens humains, financiers et matériels constitue un handicap sérieux. Pour preuves, le SDEDD pour la gestion n'a que six (06) agents, trois (03) motos et un véhicule hors d'usage, et seulement quatre (04) motos fonctionnels. Comme moyens financiers, il reçoit du trésor public par trimestre des bons de carburants d'une valeur de sept mille cinq cents (7500) francs CFA (pourtant le contrat d'objectif assigné à ce service est de dix (10) millions de francs CFA par an). En absence de tout financement, la surveillance, le contrôle de cette forêt sera difficile. Le SDEDD affirme être en phase d'élaboration d'un projet de près de deux cents (200) millions francs CFA à soumettre aux bailleurs de fonds. Il est peu probable que l'Etat puisse disposer de ressources pour financer

65

un tel projet. Le « Projet d'ouverture de la limite péricentrale de la Forêt Classée de Dida située dans la province de la Comoé » d'un montant de six millions deux cent six mille quatre cent cinquante (6 206 450) francs CFA de 2011, celui de l' « apurement de la FC de Dida » d'un montant de cinquante trois millions huit cent dix neuf mille six cent quatre vingt douze (53 819 692) francs CFA élaboré en 2013 n'ont encore pas reçu d'écho favorable. Le contexte international est aussi peu favorable aux financements accordés aux institutions étatiques. C'est dire qu'une gestion par les services forestiers, quelque soient les garantis d'implication des communautés locales manquera de capacités de mobilisation des ressources financières pour une gestion de la FC de Dida.

Scenario 2 : mise en concession au profit d'opérateurs privés.

Les concessions privées abondent au Burkina-Faso. Elles sont, au sens du Décret 97-054/PRES/PM/MEF, des périmètres sylvicoles aménagés faisant l'objet d'un titre de propriété ou de jouissance au nom d'une personne physique ou morale de droits privé (MEDD, 2011). Elles ont vu le jour à la faveur de la politique de concession d'un certain nombre d'aires protégées aux acteurs du secteur privé et des Organisations de la Société Civile (OSC) en 1997. En effet, l'article 33 du code forestier stipule que « les personnes physiques ou morales de droit privé sont propriétaires des forêts qu'elles ont légalement acquises ou qu'elles ont légalement plantées. Les personnes physiques ou morales de droit privé ne peuvent être propriétaires des forêts que moyennant la détention d'un titre régulier de jouissance sur le sol ». L'ensemble de ces concessions privées sont d'intérêt cynégétique. On peut citer entre autres les concessions de chasse de Pama (275 474 ha), de Pangou-Tandougou (35 000 ha), de Singou (177 394 ha), de Konkoumbouri (65 000 ha), de Kondio (51 000 ha), etc. (voire carte en annexe 3). Dans ces concessions, se pratiquent la chasse et le tourisme de vision. Les espèces fauniques présentes sont les éléphants (Loxodonta africana), les hippotragues (Hippotragus equinus), les bubales (Alcelaphus buselaphus major), les cobs rudunca, les cobs défassa (Kobus ellipsiprymnus defassa), les céphalophes (Cephalophus rufilatus), les ourébis (Ourebia ourebi), les phacochères (Phacochoerus africanus) et les singes (UICN-PAPACO, 2012). Par conséquent, pour qu'un privé puisse s'intéresser à la FC de Dida, il faudrait prouver sa rentabilité, notamment sa richesse faunique. Or, dans le cas présent, aucune véritable étude n'a été menée dans ce sens. De plus, à l'état actuel d'anthropisation de cette forêt, et au regard des entretiens réalisés sur le terrain, tous les grands mammifères susceptibles d'intéresser le secteur privé ont totalement disparu. La reconstitution de cette

66

biodiversité faunique nécessitera des années, avec un investissement colossal. La probabilité à l'heure actuelle que le secteur privé s'intéresse à la FC de Dida est très mince.

Scenario 3 : mise en concession au profit d'opérateurs communautaires

Le troisième scenario possible dans le cas de la FC de Dida est sa mise en concession au profit d'operateurs communautaires. C'est l'option souhaitée par la grande majorité des populations riveraines de la FC. Avec la loi n°055/2004/AN du 21 décembre 2004 portant Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT), le processus de décentralisation au Burkina-Faso est en marche. Cette option pourrait être envisageable dans le cas de la FC de Dida. En effet, pour le Secrétaire Exécutif de l'AGEREF/CL, « ce sont les communautés qui ont plus à gagner dans la conservation des ressources naturelles ». Par conséquent, plus elles seront intégrées dans la gestion des ressources, mieux elles pourront adhérer au processus. Aussi, cette option a l'avantage d'avoir l'onction d'éventuels bailleurs de fonds capable d'accompagner ces populations sur cette voie. La proximité d'expériences comme celles des Associations Inter villageoise de Gestion des Ressources Naturelles et de la faune de la Comoé Léraba (AGEREF/CL) et de Boulon/Koflandé (AGEREF/BK) peuvent être utiles.

En effet, la Forêt Classée et Réserve Partielle de Faune de la Comoé Léraba (FCRPF/CL), pour ne parler que de celle-là, d'une superficie de cent vingt cinq mille (125 000) hectares est, au Burkina-Faso, la première expérience de forêt concédée à une association inter villageoise par contrat de concession de gestion n°2001-01/737/MEE/SG/DGEF du 25 octobre 2001. Grâce à l'appui financier de partenaires nationaux et internationaux, l'AGEREF/CL reste de nos jours un modèle en matière de gestion communautaire des ressources naturelles. Cependant, ce modèle de gestion communautaire a pour faiblesse majeure la capacité technique des structures villageoises à assurer cette gestion. De plus, en tant qu'entités composites, il y'a bien à craindre que les acteurs en présence aient des intérêts divergents qui pourraient dangereusement compromettre ce mode de gestion.

Quelque soit le scenario adopté pour une gestion durable de la FC de Dida, il se doit de tenir compte de la situation frontalière de cette forêt. Des concertations doivent être entreprises avec la partie ivoirienne pour une synergie d'action. Mais de toute évidence, de tous les scenarii proposés, la gestion communautaire apparait comme la mieux adaptée aujourd'hui à la FC de Dida, à condition que le renforcement des capacités des acteurs locaux constitue un principe de base.

67

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein