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Le statut des vérités analytiques dans l'épistémologie praxéologique de Ludwig Von Mises

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par Grégoire CANLORBE
Université Paris 1 - Master 1 LoPhiSC (Logique, Philosophie des sciences et de la connaissance) 2012
  

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B. Pourquoi introduire la notion d'analyticité ?

Von Mises décrit indifféremment la méthodologie aprioriste comme un raisonnement déductif aussi bien qu'analytique. Cette assertion ne va pas sans difficultés, que nous mettrons bientôt en lumière. Cependant, nous ne pouvons évaluer à sa juste mesure la conception misésienne de l'analyticité, i.e. des énoncés vrais en vertu de la signification des termes qui les composent, qu'en décrivant avec précision le sens de ce recours à la notion d'analyticité dans le contexte général de l'épistémologie de Von Mises.

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Divergence entre Kant et Von Mises sur la notion d'analyticité

Une fois de plus, Von Mises reprend une terminologie kantienne et se réapproprie l'idée qui y est associée. Une fois de plus également, il développe sa philosophie propre sur la base de cette référence à Kant, en sorte que l'influence du philosophe de Königsberg est en fin de comte très relative.

Von Mises conçoit avec Kant un énoncé analytique comme un énoncé qui est vrai en vertu de sa signification sous prétexte qu'il est tautologie, i.e. répétition, du sens d'un concept. Mais à la différence de Kant, il ne conçoit pas qu'un énoncé analytique doive nécessairement inclure au titre de sujet le concept qu'il décompose. Un énoncé analytique, dans l'épistémologie de Von Mises, développe le sens d'un concept qui lui préexiste mais n'inclut pas nécessairement ce concept.

La différence n'est pas bénigne. Prenons l'énoncé suivant: « L'imposition du revenu des producteurs accroît leur taux effectif de préférence temporelle, et conduit par conséquent à une moindre production. » Le concept d'action humaine n'est pas incorporé dans cet énoncé, mais cet énoncé explore néanmoins une partie du contenu du concept d'action humaine. Il est tautologie en ce sens.

Cette divergence entre Kant et Von Mises permet, au fond, à Von Mises d'ériger en vérité analytique, i.e. vérité due à la signification des termes, tout énoncé qui résulte à son sens d'une analyse du concept d'action humaine, qui est supposé contenir au préalable l'ensemble des catégories de l'agir humain.

Le raisonnement praxéologique, de forme déductive, est décrit indifféremment comme déductif et analytique

Von Mises, donc, décrit indifféremment le raisonnement praxéologique comme analytique aussi bien que déductif. En témoigne ce passage clef de l'Action humaine:

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« Le raisonnement aprioristique est purement conceptuel et déductif. Il ne peut rien produire d'autre que des tautologies et des jugements analytiques. Toutes ses implications sont logiquement dérivées des prémisses et y étaient déjà contenues. Donc, à en croire une objection populaire, il ne peut rien ajouter à notre savoir. »16 C'est nous qui soulignons.

On voit aisément que Von Mises met sur le même plan le raisonnement déductif et la décomposition conceptuelle. Il exprime les choses d'une façon qui porte à croire que le raisonnement déductif et la décomposition conceptuelle constituent une activité rigoureusement identique.

Comment se peut-il que le raisonnement analytique accroisse notre savoir? Cela est lié est à sa vertu de rendre explicite ce qui est implicitement inclus dans un concept. Il y a bien un accroissement de notre savoir ce faisant.

On ne saurait nier, pourtant, que la praxéologie, telle qu'elle est conçue, au fond, par Von Mises et surtout pratiquée par lui, constitue un raisonnement déductif et non pas analytique. Il est manifeste que la loi de la double inégalité des valeurs ou la loi de l'utilité marginale décroissante ne sont pas préalablement incluses dans le concept d'action humaine; et que c'est exclusivement une déduction sur la base de ce concept, et non pas une exploration de ce concept, qui nous permet de les établir.

Mais au fond, quel intérêt peut-il bien y avoir à défendre la thèse du caractère analytique du raisonnement praxéologique ?

L'analyticité permet de fonder la vérité a priori du raisonnement praxéologique, audelà de la foi psychologique en la vérité ce raisonnement

Le rôle joué dans l'épistémologie de Von Mises par le recours à la notion de l'analycité, i.e. la vérité d'un énoncé pour autant qu'elle

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découle de la signification des termes de cet énoncé, c'est de fonder la vérité a priori du raisonnement analytique. Celui-ci est vrai a priori parce que vrai analytiquement; et vrai analytiquement parce que simple tautologie.

Selon l'épistémologie de Von Mises, nous sommes conditionnés psychologiquement à tenir pour vrais ou appropriés les catégories de l'agir humain.

- Quoique nous fassions, nous devons estimer qu'il est approprié de participer à un échange seulement au cas où nous préférons ce que nous obtenons à ce que nous cédons en retour.

- Quoique nous fassions, nous devons tenir pour vrais qu'il y a des rapports de cause à effet dans l'univers (et que mon action notamment peut avoir des effets dans le monde).

Par conséquent, en raisonnant déductivement sur l'action humaine, i.e. en inférant des conclusions relatives à l'action humaine, sur la base de la prémisse que les hommes agissent, nous sommes psychologiquement conditionnés à tirer certaines conclusions et à tenir ces conclusions pour vraies. Mais au moins, notre raisonnement déductif est également décomposition du sens d'un concept préalablement à notre disposition: et en ce sens, qu'il est décomposition du contenu de ce concept, il est analytiquement vrai, et du coup vrai a priori.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard