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Le " retour forcé " des roumains en Roumanie, depuis 2007

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par Audrey Guitton
Université de Poitiers - Master migrations internationales 2011
  

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b) La stigmatisation de cette population

D'après Vincent Geisser131, les Roms et les gens du voyage sont victimes d'une discrimination qui « vient d'en haut ». Les Roms sont marginalisés et discriminés, dans toute l'Europe et dans toutes les couches de la société. Néanmoins, cette marginalisation est beaucoup plus marquée en Roumanie, qu'en France. Par conséquent, il est probable que si la situation ne s'améliore pas en Roumanie, les Roms reviendront en France.

Samuel Delépine explique que « la population tsigane migrante, à l'image des tsiganes en général, subit une stigmatisation constante qui les associe à une population inassimilable, en marge et mettant en danger l'équilibre d'un modèle de société qui a fait ses preuves. »132 Ils sont exclus parce que leur mode de vie n'est pas réductible à celui d'un État, bien que leur présence sur ces territoires, date parfois, de plusieurs siècles. Un parallèle peut être ici effectué avec ceux que Hannah Arendt à nommé les Sans-État, ou Stateless. Elle définit ces personnes comme étant en

129 Fleck G., Florea I., Kiss D., Rughinis C., Come closer. Inclusion and exclusion of Roma in present day Romanian Society, op. cit., p. 8.

130Le dernier recensement roumain date de 2002, il faisait état de 21 680 974 habitants.

131Geisser V., « Un anti-tsiganisme venu d'en haut : le rôle central des élites politiques dans la fabrication du préjugé », Migrations société, volume 19 n°109, 2007.

132Delépine S., « Les Roms migrants en France, ou comment faire d'une population en danger, une population dangereuse ». Colloque international, La fabrique de populations problématiques par les politiques publiques, Nantes, juin 2007.

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rupture avec leur société d'origine et tout à la fois exclues de la vie politique et sociale du pays dans lequel elles résident, à la marge du système. Marie-Claire Caloz-Tschopp écrit à ce sujet : « En étant colonisé par le système d'États-Nations mondialisé et dominant, l'espace est en quelque sorte saturé. Si quelqu'un est exclu d'un endroit, il est exclu de partout ; il n'a plus de place puisque tout le monde à les mêmes références, les mêmes règles. »133 Ainsi, si les Roms sont exclus d'un pays de l'Europe, c'est d'Europe qu'ils sont exclus. De cette affirmation, on peut déduire que c'est au niveau européen, que des solutions doivent être pensées, pour permettre à cette communauté de trouver sa place.

Au cours des entretiens réalisés pour ce travail, les acteurs ont parfois « infantilisé » la population rom. Elle est définie comme une population qu'il faut encadrer et qui ne peut être laissée à elle-même.

J.P. - « On en parlait encore hier entre nous : il y a deux solutions. Ils s'installent ici et on les laisse vivre comme ils sont là-bas. Sauf que ça on ne peut pas le faire. On s'est retrouvé à Massy avec un campement ingérable. 300 personnes, c'est pas possible. Ça va tant qu'ils sont en petits groupes. »134

Tout comme des enfants, ils sont décrits comme « ingérables » si trop nombreux. Dans plusieurs entretiens, la perspective selon laquelle il faut contrôler cette population, a émergé. Selon cette perspective, il faut imposer des limitations au grossissement d'un camp. En effet, plus un groupe est important, plus il est difficile de le contrôler.

S.F. - « Par exemple, sur les campements, notre gros problème, c'est que dès qu'il y a quelqu'un qui s'installe, il y d'autres familles qui s'installent. Les camps grossissent énormément et après on ne peut plus rien faire.[...] Ils s'organisent très mal entre eux...[...]On a l'impression qu'ils fonctionnent par grandes familles, familles élargies. [...] Des fois on a l'impression qu'il y en a un qui ressemble à un chef. [...] »135

Cet extrait met, également, en exergue, la méconnaissance du milieu associatif et de la société civile, à l'encontre du schéma familial rom. L'expression utilisée par S.F., « avoir l'impression », révèle le fait que l'association n'a pas échangé avec la communauté à ce sujet. En Roumanie, comme en France, le terme « famille proche » désigne les parents et les frères et soeurs.

133Caloz-Tschopp M-C., Les Sans-État dans la philosophie d'Hannah Arendt, 2000, Payot, Lausanne. p. 419. 134Annexe 1 : extraits d'entretiens, p.

135Ibid, p.

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Lorsque nous nous référons à une « famille élargie », il s'agit des oncles, des tantes et des cousins. Les Roms ont une conception différente de ce que représente ces termes. Leurs familles proches sont nos familles élargies. Leurs familles élargies sont des communautés. Le cas des villages d'insertion est intéressant dans ce contexte. Le fait que les membres de la famille élargie (dans l'acceptation de ce terme, partagée par la majorité de la société française) ne soient pas autorisés à rendre visite à leurs proches, nous montre que les pouvoirs publics ne reconnaissent pas, non plus, ce schéma familial. Or, cette reconnaissance est nécessaire pour que ce type d'action fonctionne.

Cette citation de S.F. est également intéressante par rapport à l'organisation hiérarchique des communautés roms. S.F. nous dit que « parfois, il y en un qui ressemble à un chef ». Ainsi, l'existence d'un chef au sein du groupe est devinée, mais elle n'est pas reconnue. Il est envisageable d'utiliser la position de leader d'un des membres du groupe pour rentrer en contact avec la communauté. Les auteurs de l'étude Come Closer nous en font part. « One significant issue confronting Roma communities is the confusion between formal and informal leadership. In many communities formal, elected leaders - such as local authorities - rely on informal leaders to communicate with the Roma citizens and to help implement policies. [...]Localities with Roma experts employed in the local administration have a greater probability of having best practice programs involving Roma. »136 Il est donc envisageable d'utiliser la position de leader d'un des membres de la communauté. Cela s'avère également judicieux.

En France, il serait d'autant plus judicieux de reconnaître un leader, ou un porte parole, mais peu de personnes parlent le roumain. En effet, il est plus facile de communiquer avec une personne qui parle peu notre langue, qu'avec un groupe.

J.P. - « Sinon, nous notre problème c'est pour communiquer. Il y a une fille

d'un autre association qui parle bien le Roumain mais bon... »137

La stigmatisation que subissent les Roms est, en partie, due au manque de connaissances qu'ont les pouvoirs publics et les acteurs associatifs de cette communauté, de son mode de vie et de son organisation sociale. Une meilleure communication entre les différentes parties est nécessaire pour lutter contre cette méconnaissance. Sans une meilleure connaissance, et une meilleure reconnaissance des spécificités de cette communauté, la mise en place de programmes appropriés à leurs cultures est fortement compromise.

136Fleck G., Florea I., Kiss D., Rughinis C., Come closer. Inclusion and exclusion of Roma in present day Romanian Society, op. cit., p. 199-212.

137Annexe 1 : extraits d'entretiens.

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