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Le " retour forcé " des roumains en Roumanie, depuis 2007

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par Audrey Guitton
Université de Poitiers - Master migrations internationales 2011
  

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C) La précarité en question

La circulation migratoire des Roms roumains est mal comprise car la population migrante est peu connue. Au cours de cette étude, huit acteurs ont mentionné l'existence d'un lien entre la migration des Roms et la précarité dans laquelle ils vivent. J'ai eu l'occasion de constater que la question de la précarité est, également, source de confusion. En effet, la précarité peut être perçue comme la cause, ou la conséquence de cette migration.

1) La précarité : cause de la migration ?

Sept personnes interrogées dans le cadre de cette étude, ont mentionné la précarité en tant que cause de la migration. La précarité est, pour ces acteurs, le facteur répulsif qui pousserait les migrants hors de Roumanie. La comparaison entre le niveau de vie en Roumanie et le niveau de vie en France est souvent opérée. La différence de niveau de vie entre les deux pays est présentée par ces acteurs, comme l'un des principaux facteurs, de cette migration.

Mh. - « Au moment où ils passent une frontière étrangère, ils voient ce qu'ils

n'ont pas ici. Ils communiquent, les Roms de la communauté. S'ils entendent

que là-bas c'est bien, ils s'y rendront puisqu'ils ne pensent pas que ça puisse

être mieux ici. »138

En Roumanie, la vie est réputée plus difficile à l'étranger. Mh. exprime ici un sentiment répandu dans la société roumaine. De nombreux Roumains sont pessimistes quant à la capacité qu'ont les pouvoirs publics de mettre en place des actions efficaces, qui soient en mesure d'améliorer le quotidien des citoyens. Dès lors, je pense que le manque de confiance en un avenir meilleur, est un facteur répulsif à prendre en compte. Il est probable que ce facteur est plus décisif que la précarité en elle même. La référence à la communication entre les membres de la communauté est importante. Elle évoque la capacité d'adaptation du groupe et la mise en place de stratégies migratoires pour tenter d'échapper à la misère. C'est ainsi la volonté d'améliorer sa situation qui est présentée comme un élément décisif de ce phénomène migratoire.

D. - «If you don't have enough to live and you starve, what do you do ? And if you know that a friend of yours lives pretty well abroad, you'll go abroad. [...] I've seen families who are living in... I don't know how to call them... places to live in, because those are not houses. They make a hole in the ground and they put something like a cover and they live like that. I was in communities where the people don't have enough to eat. They live in a small

138Annexe 1 : extraits d'entretiens.

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village, where there is no big places or no big cities around where they can go beg to bring money to buy food. [...] Because first of all, most of them didn't go to school, don't have a job and a lot of them don't have papers, ID papers.»139

Ce que D. exprime dans cette citation est contradictoire. Une fois encore, la comparaison entre le niveau de vie en Roumanie et le niveau vie à l'étranger est présentée comme l'une des causes de la migration. D. compare une personne « mourant de faim » en Roumanie et une personne vivant aisément, à l'étranger. Toutefois, les personnes qui meurent de faim en Roumanie et qui ne possèdent pas de pièces d'identité, ne peuvent pas quitter le territoire roumain. Pour obtenir des papiers d'identité en Roumanie, il faut être en mesure d'attester d'un domicile fixe. De nombreuses familles n'ont pas de maison. Certaines familles ont une maison, construite de leurs mains et dont ils n'ont aucun acte de propriété. Selon D., environ 50 % des Roms roumains possèdent une pièce d'identité. Les plus pauvres n'ont donc, ni les moyens logistiques, ni les moyens financiers nécessaires à l'entreprise d'une migration. La comparaison entre le niveau de vie moyen en Roumanie et le niveau de vie moyen des pays de l'Europe occidentale atteste encore d'un écart significatif. L'écart entre la valeur du Leu et celle de l'Euro est, également, importante. De nombreux Roumains ne croient pas à l'amélioration de leur situation dans leur pays d'origine. Ces facteurs sont certainement des éléments majeurs de l'installation dans la mobilité de certains Roms roumains. En effet, tous ne peuvent pas faire ce choix. Ils n'en ont pas les moyens. Il serait vain de croire que Roms migrants en France sont les plus pauvres, fuyant la misère.

S.F. - « Il y a une famille qu'on a vu dans différents campements, au fil des expulsions. Ils ont eu envie de retourner en Roumanie, parce qu'ils ont une maison là-bas. Et, bon, bah ils sont revenus. On comprend pas toujours, bien, pourquoi ils reviennent. J'imagine que... En tout cas ce qu'ils disent c'est que c'est plus dur en Roumanie, qu'ici. »140

Cette citation de S.F. illustre parfaitement le paradoxe que je présentais au paragraphe précédent. Cette famille vient en France parce que la vie est plus dure en Roumanie. Pourtant, ils possèdent une maison dans leur pays d'origine et vivent dans un campement, lorsqu'ils séjournent en France. Par conséquent, la dureté de la vie ne semble pas une cause de la migration, mais une conséquence.

139Annexe 1 : extraits d'entretiens.. 140Ibid.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus