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Identité et appartenance: temps et comput anthropologique chez R. E. Mutuza Kabe

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par Jean Francis Photios KIPAMBALA MVUDI
Université de Kinshasa RDC - Doctorat en philosophie 2012
  

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§2. La place des faibles et l'idée de succession

« Le peuple vaincu, affirme TRAG de SNALE, tâche toujours d'imiter le vainqueur par la tenue, la manière de s'habiller, les opinions et les usages, rapporte Mutuza »(362(*))

Les membres les plus fragiles de notre société ont beaucoup de mal à y trouver leur place. L'image véhiculée de l'être humain idéal est celle d'une personne autonome, efficace et compétente ; elle exclut des personnes âgées(363(*)), malades ou démunies. La société ne devrait-elle pas se définir comme le lieu où l'on tient compte des besoins de tous les membres et où l'on reconnaît les dons de chacun ?

Selon une des thèses fondamentales de Nietzsche, les valeurs traditionnelles (représentées essentiellement par le christianisme) ont perdu leur emprise sur la vie des individus : « Dieu est mort », proclamait-il, résumant ainsi le « nihilisme passif » de la civilisation moderne. Les valeurs traditionnelles représentaient, à ses yeux, une « morale d'esclaves », une morale créée par des individus faibles et en proie au ressentiment, qui encourageaient la douceur et la gentillesse pour privilégier des comportements servant leurs propres intérêts. Nietzsche soutenait qu'il était possible de remplacer ces valeurs traditionnelles en créant des valeurs inédites, projet qui l'amena à élaborer la notion de surhomme (Übermensch).

Nietzsche opposait les masses, conformistes, qu'il qualifiait de « troupeau » ou de « populace », à un homme de type nouveau, assuré, indépendant et individualiste à l'extrême. Le surhomme qu'il appelait de ses voeux a des sentiments profonds mais contrôle rationnellement ses passions. Tourné vers le monde réel plutôt que vers les récompenses promises par la religion dans l'au-delà, le surhomme affirme la vie, y compris la souffrance et la peine qui sont le lot de l'existence humaine. Le surhomme est créateur de valeurs, créateur d'une « morale de maîtres », laquelle reflète la force et l'indépendance de celui qui se libère de toutes les valeurs, à l'exception de celles qu'il juge valables(364(*)).

Toute conduite humaine, selon Nietzsche, est motivée par la volonté de puissance. Dans son sens positif, la volonté de puissance n'est pas uniquement synonyme de pouvoir sur les autres, mais signifie aussi le pouvoir sur soi, indispensable à la créativité. Une telle puissance est manifeste dans l'indépendance, la créativité et l'originalité du surhomme. Affirmant clairement que l'idéal de surhomme ne s'était jamais réalisé, Nietzsche fit toutefois mention de plusieurs personnages susceptibles de servir de figure emblématique du surhomme, comme Socrate, Léonard de Vinci, Michel-Ange (+ 1564), Shakespeare (+ 1616), Goethe (+1832), Jules César (+ - 44) et Napoléon (+1821).

Dans l'histoire de la pensée zaïro-congolaise, l'oeuvre de Mutuza revêt une importance considérable dans la mesure où il est le premier homme d'Etat à tenter de concilier les exigences de la pratique politique et les résultats de la spéculation philosophique. Sans doute Gambembo et Nzege(365(*)), etc., ont beaucoup travaillé sous le régime du Marechal, mais ils n'ont pu continuer à travailler dans la même politique et encore moins résister aux vagues actuelles d'une politique des critiques acerbes de la part de ceux qui conçoivent la philosophie comme l'ancila politicae(366(*)).

Les grecs, dans la Haute Antiquité, et surtout Platon et Aristote, avaient-ils déjà fondé à proprement parler la philosophie politique pour la défense des faibles. Mais le premier le faisait en métaphysicien et en moraliste, sans véritable responsabilité d'homme d'Etat ; et le second, en savant, cherchant à cataloguer les diverses formes de Constitutions et à en faire l'histoire. Leur philosophie politique est semblable à un poème du pantocrator. C'est ainsi que l'étude d'une telle philosophie implique le savoir culturel dont le rapport des forces constitue l'aspect successoral ou dynastique.

Dans le cas sous examen, que raconte la poésie dynastique du Ruanda et les récits épiques des Lega du Zaïre racontent les merveilles royales pour la poésie dynastique du Ruanda, et les caractères successoraux des héros Lega. Si dans la poésie dynastique du Rwanda l'aspect successoral est très mécanique, au point de faire de la royauté un partage temporel chronologiquement équitable, on en vient à l'épopée Akritique, chez les Byzantins, dans son idée de succession qui oriente le roi vers une morale que lui offre le choeur des Akritiques ; ainsi, les récits épiques chez le Bantu stipulent que le mwami rappelle la succession qui n'obéit qu'à la loi naturelle de la mort. L'idée de la mort donne droit à la succession et l'héritier sait que ce qu'il a hérité n'est pas de celui dont il est le successeur, mais des ancêtres et aïeux.

Dans les différents récits des littératures ruandaise, byzantine et bantu (lega), nous allons les passer à pieds joints un grand nombre des problèmes ou, plus exactement, nous ferons nôtres les solutions d'un auteur excellent, Oppenheimer. Pour lui et beaucoup d'autres(367(*)), les hommes éminents dont il est question dans ces différentes littératures, sont des successeurs immédiats des héros, personnages à la taille élevée et non pas des disciples de ceux-ci, qui ne relèveraient que de la troisième génération après les héros.

Si cet ensemble des textes, qui seront compris, a été et demeure à ce point discuté entre les Occidentaux, les Chamites et les Bantu, c'est qu'il constitue, comme Mutuza l'exprime dans son titre, « la problématique du mythe Hima-Tutsi ». Mais quelle est au juste la portée d'un tel témoignage ?

Nous sommes ici en anthropologie et non en histoire. Nous regardons les textes de ces différentes communautés sociales. Ce qui signifie que nous portons des jugements sur les groupes auxquels Mutuza fait allusion pour son concept d'appartenance, dans leurs rapports dans le temps anthropologique. C'est parce que nous voulons nous placer en dehors du temps subjectif contemporain et nous situer dans l'objectivité que nous avons à nous permettre d'établir correctement l'apport de Mutuza dans la corrélation des concepts de mythe et d'appartenance dans l'espace et dans le temps.

La question de l'appartenance tourne autour du mot et de l'idée de succession (en grec äßáäï÷ç). Son utilisation est des plus naturelles. Non seulement ces mots « succession », « successeur », « succéder » reflètent exactement ce qui s'est passé entre les ascendants et les descendants. Mais au surplus leur usage courant dans l'africanitude et dans l'hellénitude ne crée aucun problème à N'sanda Wamenka, à Alexis Kagame et à Papadopoulos.

Au fond, ce que nous voulons éviter n'est pas tant d'éventuelles considérations terminologiques que l'obstacle sérieux qu'elles peuvent constituer si l'on en systématise la pratique, ainsi que l'usage dogmatique que l'on peut en faire, à savoir occulter les questions de fond. C'est bien pourquoi l'auteur de Le dialogue inter-congolais, prolégomènes à une culture démocratique pense les questions de mots en termes d'éclaircissement préalable ou de tâches préliminaires nécessaires. Son souci est d'empêcher, par exemple, que par une manoeuvre plus ou moins volontaire un problème soit transformé en une question des mots.

* 362 Ibidem, p. 26.

* 363 Dans la division du travail des Tutsi, les veilles personnes n'ont pas assez d'importance. Elles ne sont pas des bibliothèques comme chez les Hutu (Bantu) dont la pensée géométrique permet de considérer ceux qui la détiennent comme des bibliothèques vivantes et dont la mort causerait beaucoup de dommages à la communauté qui a encore besoin de maitriser les cartographies terriennes.

* 364 NIETZSCHE, F., Gai Savoir, 66. La libre maîtrise de soi doit aller de pair avec un certain laisser-aller : « Car il faut savoir se perdre de vue pour longtemps, si l'on veut apprendre quelque chose des réalités que nous ne sommes pas nous-mêmes ». Mais les « grands messages » demeurent « dans la douleur de l'humanité ».

* 365 Gambembo est professeur de Métaphysique à l'UNIKIN, il est un très éminent et fut un haut dignitaire à l'Institut Makandakabobi sous le Marechal Mobutu. Nzege est, lui aussi professeur de l'histoire de la philosophie moderne à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de L'université de Kinshasa, il est actuellement sénateur du groupe parlementaire de l'AMP.

* 366 Cfr. NGOMA-BINDA, Philosophie africaine contemporaine, pensée et pouvoir, Thèse de doctorat en philosophie, juillet 1985, p. 4, Inédit.

* 367 MUSEY nous le dit d'une manière inconsidérée. Il ne prend pas soin de décrire tous les éléments d'une succession et toutes les caractéristiques successorales. Mais OPPENHEIMER J. R. dans la Science et le Bon Sens, trad. par Albert Colnat, Paris, Gallimard, 1955, nous raconte « qu'à mesure que de nouveaux engins de destruction, de terreur collective, viennent accroître la férocité de la guerre totale, nous comprenons que l'un des buts et des problèmes spéciaux à notre temps est d'accorder l'éternelle préoccupation d'améliorer le sort de l'homme, de soulager la faim, la pauvreté et la misère à la nécessité impérieuse de limiter et d'éliminer le plus possible le recours à la violence organisée entre les nations. La destruction toujours plus experte de l'esprit humain par la puissance de la police, plus perverse, sinon plus affreuse que les ravages dus à la nature elle-même, est un autre de ces pouvoirs qu'il vaudrait mieux n'avoir jamais à utiliser ». Il met l'accent sur l'homme et lui seul.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard