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Identité et appartenance: temps et comput anthropologique chez R. E. Mutuza Kabe

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par Jean Francis Photios KIPAMBALA MVUDI
Université de Kinshasa RDC - Doctorat en philosophie 2012
  

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v Préjugé de la dépendance des Hutu aux Tutsis

Les traces de métallurgie du fer mises au jour dans la région permettent d'établir que les premiers agriculteurs bantous, en provenance du bassin du Congo, étaient installés dans la région, dont l'environnement était propice à l'établissement humain, au IIIe siècle de notre ère. Lorsque les Tutsi s'établirent à leur tour dans les collines de l'Est du Rwanda, entre le Xe et le XVe siècle, les Hutu avaient déjà formé de petits royaumes qui, avec l'arrivée des Tutsi se réunifièrent en un seul et unique Ruanda.

L'image -- déformée -- habituellement donnée de la société qui s'élabora alors montre les Hutu placés dans une situation de dépendance et de soumission totale à l'égard de Tutsi, seuls détenteurs du pouvoir et de la richesse. Le système politico-religieux extrêmement hiérarchisé qui fondait le royaume Tutsi au Rwanda était en fait moins rigide : parmi les chefs qui, sous l'autorité suprême du mwami (roi) Tutsi, géraient les affaires, les chefs de sol étaient le plus souvent choisis parmi les Hutu de même que les chefs d'armée pouvaient également être Hutu. Et les mariages mixtes étaient relativement fréquents. Au Burundi, dans le royaume Baganda, la souplesse du système était plus grande encore. Si l'on considère la masse de la population, Tutsi et Hutu partageaient le même sort, vivant les uns et les autres de l'agriculture comme de l'élevage. Ils parlaient la même langue qu'on nomme le kinyarwanda ou le kirundi, et avaient la même religion héritée des aïeux Bahutu, le roi étant devenu, par la suite, l'image d'Imama, le dieu suprême.

La politique menée par les colonisateurs européens, allemands d'abord, puis belges après la Première Guerre mondiale, allait dresser la majorité hutu (85 % environ dans chacun des deux pays) contre la minorité tutsi. L'administration coloniale, en effet, s'appuya, pour assurer son pouvoir, sur l'aristocratie Tutsi et figea les rôles de chacun au nom d'analyses ethnologiques rapides. En 1926, les fonctions de chef devinrent ainsi héréditaires. Le Bwame n'était originellement pas héréditaire, son image originelle est celle que l'on rencontre chez les Balega, les Banande, etc. (en RDC). En 1934 et 1935, l'administration coloniale procéda à un recensement de la population du Rwanda-Urundi et délivra des livrets d'identité sur lesquels devait figurer obligatoirement l'appartenance « ethnique ».

Les clivages ainsi institutionnalisés se renforcèrent encore au Rwanda dans les années 1950. Après la mort mystérieuse, en 1959, du mwami Mutara, qui s'était fait le porte-parole des aspirations indépendantistes de son peuple, éclata le premier conflit meurtrier entre Hutu et Tutsi. L'Église catholique, puissance incontournable au « pays des mille collines », prit alors fait et cause astucieusement pour la majorité hutoue. L'administration coloniale favorisa désormais les Hutu. En février 1961, la monarchie était abolie par un référendum, la république proclamée. Le régime serait désormais dominé par les Hutu jusqu'à la guerre civile de 1994-1995. La fin de la monarchie au Rwanda eut d'importantes répercussions au Burundi, où affluèrent les Tutsi rwandais. Spoliés de leurs terres, exclus du pouvoir, ils contribuèrent au raidissement du pouvoir Tutsi burundais. L'Union pour le progrès national (Uprona), parti unique, rassemblait pourtant à l'origine Tutsi et Hutu.

En 1966, fut institué un régime militaire républicain qui maintint la domination Tutsi sur les Hutu jusqu'en 1992, date à laquelle le pouvoir fut partagé entre l'Uprona et le Frodébu (Front pour la démocratie au Burundi), à dominance des Bahutu. Mais les affrontements intercommunautaires continuent depuis lors à déchirer le Burundi. En 1994, le massacre est déclenché au Ruanda. Poussés à l'exode puis à l'exil au Zaïre par la victoire des Tutsi du Front populaire rwandais (FPR), nombre d'entre les Hutu furent à leur tour massacrés en 1996-1997, dans l'Est du Zaïre, par les forces tutsies alliés à L.D. Kabila, soutenus par l'armée rwandaise et par son encadrement tutsi.

Les Tutsi, eux, sont une population habitant la région inter-lacustre d'Afrique centrale, principalement le Rwanda et le Burundi ainsi qu'une petite partie de la Tanzanie limitrophe.

Les Tutsi, présentés le plus souvent comme un peuple hamitique, sont probablement originaires de la vallée du Nil. Ils s'établirent progressivement entre le Xe et le XVe siècle dans la région des grands lacs africains où vivaient les Twas, peuple de pygmées connus déjà par les Grecs depuis l'Antiquité (ð?ãìç = coudée(391(*)) = environ 46 cm) et les Hutu, agriculteurs d'origine bantoue. Ces pasteurs constituaient une minorité numérique au sein des royaumes qui existaient alors. Vers le XVIIe siècle, un royaume gouverné par les Tutsi s'était développé sur la plus grande partie du territoire de l'actuel Rwanda (à l'exception du Sud-ouest).

Le système politico-religieux était extrêmement hiérarchisé : le roi ou mwami, image du dieu suprême Imama, était entouré d'une aristocratie tutsie qui fondait son pouvoir sur la possession du bétail. La gestion directe des ressources du royaume appartenait aux chefs de pâturage -- pour l'essentiel des Tutsi --, aux chefs de sol -- le plus souvent des Hutu -- et la défense du royaume relevait des chefs d'armée, recrutés parmi les Tutsi et les Hutu. La masse des sujets du roi, Tutsi comme Hutu, partageait le même sort. Les mariages mixtes étaient fréquents. Une langue commune s'était élaborée, le kinyarwanda ou le kirundi, appartenant au groupe des langues bantoues.

Le régime colonial, allemand puis belge après la Première Guerre mondiale, institutionnalisa le clivage entre les communautés. Le système d'administration indirecte qui fut appliqué au Rwanda-Burundi, sous mandat de la Société des Nations (SDN), favorisa la domination de l'aristocratie tutsie. À partir de 1934-1935, Tutsi et Hutu furent officiellement séparés en deux «ethnies», l'appartenance à l'un ou à l'autre groupe devant être obligatoirement mentionnée sur le livret d'identité.

Au Burundi, la domination politique et économique de la minorité tutsi -- 12 à 14 % de la population -- se maintint jusqu'en 1992, date à laquelle fut instauré un partage du pouvoir. Au Rwanda, la majorité hutu, soutenue par l'Église catholique et, à partir de 1959, par l'administration coloniale, prit le pouvoir en 1961. Trois ans auparavant, les Tutsi avaient été victimes de massacres perpétrés par les Hutu en révolte. L'histoire du pays, comme celle de son voisin burundais, devait être marquée par des massacres intercommunautaires périodiques. Les derniers, qui, après l'assassinat, en avril 1994, des deux présidents, hutu, du Burundi et du Rwanda, furent commis par les Hutu au pouvoir et visèrent les Tutsi, ont été qualifiés de génocide par l'ONU. Un tribunal pénal international a été institué pour juger les responsables des massacres qui ont touché également les Hutu politiquement modérés, faisant entre 500 000 et 1 million de victimes.

À l'issue de la guerre civile, le Front populaire rwandais (FPR), tutsi, prit le pouvoir au Rwanda. Une telle évolution de pensée provoque souvent une certaine angoisse car elle nous oblige à marcher à tâtons dans l'inconnu et à repenser les formules anciennes, pour les restituer dans un langage accessible et vivant. Cela invite à revitaliser les principes à partir de notre expérience et de notre vie, par ces principes. Il faut non pas regretter le passé, mais vivre le présent et avancer vers l'avenir, afin de comprendre ceux qui nous entourent.

Avec ce problème, nous arrivons sur le point le plus épineux de la pensée de Mutuza. L'étude comparative des civilisations, qu'elle relève de l'Ethnographie, de la linguistique ou de la littérature comparée, n'a pu aborder avec succès le problème des correspondances culturelles des divers monuments de la civilisation protohistorique ou historique, dit Papadopoulos392(*). Par correspondance culturelle nous entendons l'établissement de la corrélation d'une manifestation de la civilisation matérielle, esthétique ou sociale, avec l'état d'évolution ethno-historique du peuple qui en est responsable. Par corrélation culturelles nous voulons signifier l'établissement de l'état comparatif et des connexions organiques qui relient deux manifestations culturelles relevant de civilisations différentes. Il ne s'agit pas, bien entendu, comme le note encore Papadopoulos393(*), de l'établissement d'une corrélation externe, savoir d'une comparaison des données de la civilisation dans le temps chronologique, mais bien de la détermination d'une part des liens internes d'une manifestation culturelle avec le système ethno-historique dont elle dérive, d'autre part des rapports essentiels qui subsistent entre deux systèmes de civilisation séparés dans l'espace et dans le temps pour un pouvoir à sauver.

* 391 Ancienne mesure de longueur d'à peu près 50 centimètres, dont la base était la distance comprise entre la pointe du coude et celle du majeur (vieilli)

* 392 Poésie dynastique du Ruanda et l'Epopée Akritique, p. 5.

* 393 Idem.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand